Jénine - 5 juillet 2004

Deux points de vue sur l’assassinat de Jénine

Par Catherine & Filip

Au bout d’une demi-heure, la voiture du combattant tué a explosé et les ambulances ont pu approcher la maison et l’emmener. Les rues se sont soudain remplies des lamentations de la famille et des voisins venus soutenir la famille choquée du combattant.
En plus du membre de la résistance tué, deux personnes ont été blessées et trois autres ont été arrêtées. L’écho des tirs a continué de se faire entendre dans la ville tard dans la nuit.

Reportage de Catherine

Aujourd’hui vers le milieu de l’après-midi, des chars israéliens, des jeeps, des hélicoptères Apache, des véhicules Hummer et les forces spéciales ont envahi la vielle cité de Jénine pour assassiner un membre local des Brigades des Martyrs Al Aqsa. On ignore quelle était la logique de cet assassinat car le groupe al-Aqsa de Jénine n’effectue aucune opération hors de Cisjordanie .

Le combattant a été tué vers une heure, mais les chars israéliens et les jeeps ont continué d’encercler les rues de la vieille ville pendant des heures, lançant des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes dans les rues où se mêlaient des jeunes gens, des enfants et des internationaux.


Des jeeps des Forces de l’Occupation bloquaient la rue en direction de la maison du martyr, et pendant des heures, les ambulances n’ont pas pu lui porter secours.


L’armée a assiégé la maison de midi, heure de la mort du combattant, jusqu’en début de soirée.

Vers 17 h, un groupe d’internationaux auxquels des journalistes locaux avaient demandé de rester présents dans la zone, se dirigeaient vers la maison et ont reçu l’ordre de l’armée israélienne de faire demi-tour parce que l’armée allait faire exploser la voiture du combattant mort.

Au bout d’une demi-heure, la voiture du combattant tué a explosé et les ambulances ont pu approcher la maison et l’emmener. Les rues se sont soudain remplies des lamentations de la famille et des voisins venus soutenir la famille choquée du combattant.


En plus du membre de la résistance tué, deux personnes ont été blessées et trois autres ont été arrêtées. L’écho des tirs a continué de se faire entendre dans la ville tard dans la nuit.




Reportage de Filip
5 juillet

Vers 3h de l’après-midi les membres de l’ISM-Jénine ont reçu l’information qu’une incursion était en cours dans la vieille ville et qu’un Palestinien, Khalid al-Hawi, avait déjà été tué.

Quand nous sommes arrivés, nous avons trouvé un certain nombre de jeunes garçons qui étaient poursuivis à travers les rues par les soldats israéliens à bord de chars fabriqués aux Etats-Unis, des véhicules humvee et des véhicules blindés. Des bombes assourdissantes et des bombes fumigènes explosaient sur les gamins, dont certains n’avaient pas plus de 6 ou 7 ans, et ils répondaient en lançant des pierres.

Deux ambulances ont été détournées alors qu’on les avait évidemment appelées pour récupérer les blessés et les morts.


Nous avons rencontré un journaliste palestinien et l’avons suivi à deux blocs de là, vers une rue sur une colline assez pentue.


Comme nous nous montions vers une maison, nous avons croisé, en face de la maison, un groupe de soldats israéliens qui nous aboyèrent l’ordre de partir immédiatement.

Nous avons reculé d’une centaine de mètres et nous nous sommes abrités près d’un mur en béton pendant que les hélicoptères Cobra made in USA tournaient au-dessus de nos têtes et que les tirs crépitaient tout autour de nous, venant de presque partout dans la vieille ville.


Environ une heure plus tard, nous avons réessayé de nous approcher du sommet et de nouveau avons été renvoyés. Cette fois, pourtant, un journaliste sur le balcon de la maison proche de la porte nous a appelés : « Ils sont en train de faire exploser une voiture ». Nous ne savions pas exactement ce que ça voulait dire mais avons décidé de repartir nous mettre à l’abri.


Pendant que nous attendions là, une mère et plusieurs enfants adorables sont sortis de chez eux au mépris de leur sécurité pour nous offrir du café. Ils ne parlaient pas anglais mais semblaient heureux que nous soyons là.


Une demi-heure après, une énorme explosion en haut de la colline a secoué toute la zone. De la fumée noire a commencé à s’élever dans le ciel et, en approchant d’une voiture explosée, nous avons commencé à entendre des cris de terreur et de douleur en provenance de la maison.

Craignant le pire, nous nous sommes précipités dans sa direction.


Tout de suite, la maison avait été entourée par des jeunes palestiniens qui sont entrés pour rapidement retirer le corps qui n’était autre que celui de Khalid Al-Hawi et ils l’ont transporté sur un brancard vers l’ambulance qui arrivait.

Une femme qui se trouvait être sa femme pleurait sans pouvoir se contrôler en face de moi. Une femme frêle et âgée, presque aveugle, se frayait son chemin dans la foule en direction de la maison. Des foules de femmes et d’enfants pleuraient. La douleur semblait déferler le long des pentes de la colline pendant que l’ambulance partait.

Je suis resté à me poser des questions.

Pourquoi l’ambulance a-t-elle d’abord été refoulée au moment où Al-Hawi venait d’être tué ?
Pourquoi les Israéliens, qui peuvent réussir des assassinats ciblés très rapidement et très efficacement, sont-ils restés dans la maison d’al-Hawi pendant trois heures avant de faire exploser sa voiture ?

Ce qu’il y a de certain, c’est que cette exécution extrajudiciaire est contraire aux lois internationales. Et qu’Israël n’a pas d'autorité en Palestine.

Source : www.palsolidarity.org/

Traduction : CS pour ISM-France