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ISM France - Archives 2001-2021

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Ramallah -

Le goût de l'occupation

Par

Pour quelqu'un qui aime écrire, je suis assise devant cet ordinateur sans un mot pour exprimer ce qui se produit ici en Palestine occupée.
Sans métaphores. Sans langage figuré. Sans histoires à briser le coeur.
Seulement la connaissance qui vous prend aux tripes et vous opprime que nous ne pouvons pas continuer à vivre tel que nous le faisons pendant que cela continue en notre nom et avec nos dollars d'impôts.

Cette semaine, j'ai goûté au gaz lacrymogène, mais ce n'est rien comparé au très petit goût d'occupation que j'ai expérimenté cette semaine. Si cette occupation n'est pas du terrorisme alors je ne sais pas ce que c'est.
C'est quelque chose qui me donne mal au coeur.


Chez moi, ces dernières années, j'ai souvent ressenti la pression des bottes dans mon dos, mais par rapport à l'oppression qu'il y a ici, cela ressemble à des pantoufles .

Ici, il se produit toujours quelque chose de soudain, d'inattendu et d'inexplicable.

Les armes, les bottes, l'utilisation presque habituelle de la force.

Toujours l'attente d'un évènement.

Bi'lin est un simple petit village (environ 2000 habitants), qui est menacé par le mur sinueux.

Tandis que j"écris sur les conséquences économiques de ce vol de terre, je me sens obligée de parler à mes amis des conséquences immédiates pour ces gens aimables qui osent protester contre le vol de leur terre et de leur moyen d'existence.

Oui, les militaires israéliens ont utilisé du gaz lacrymogène, des bombes assourdissantes, des balles en caoutchouc et des balles en métal recouvert de caoutchouc contre les villageois quand ils ont manifesté vendredi dernier.

Oui, ils se sont en effet approché d'une famille avec des enfants et des internationaux à une distance de 5 mètres, ils ont pris la position d'attaque et nous ont jeté deux grenades à percussion, en terrorisant les beaux enfants qui, seulement quelques secondes avant, nous offraient le thé.

Oui, ils ont retourné des poubelles dans le village tout en continuant leur agression contre les protestataires après les avoir obligés à retourner dans le village.

Et oui, non contents de terroriser le village, ils y ont passé la journée.

Ce soir, au milieu de la nuit, soldats sont entrés dans la ville et ont pénétré dans la maison d'un vieux couple à leur poursuite de jeunes hommes qui avaient osé, un peu plus tôt dans la journée, menacer la quatrième plus grande puissance militaire au monde avec des pierres.
Sans arrêter personne, les soldats ont saccagé la maison du couple.

Un checkpoint a été également installé au milieu de la route qui mène à ce village rural et où des voitures ont été arrêtées par les soldats qui essayaient d'appréhender les jeunes hommes dont ils avaient pris les photos pendant la manifestation.

La nuit, nous avons attendu d'autres représailles. Mais les villageois résistent.


L'un des plus importants aspects de cette résistance est le refus des villageois à succomber au désir du gouvernement israélien de briser leur volonté.

La vie continue et nous avons été reconnaissants d'avoir eu l'occasion de passer du temps avec les gens du village, dans leurs maisons et dans leurs jardins.


Hier était un jour particulièrement important pour moi.

Un de nos amis dans le village nous a invités à passer l'après-midi à l'école mixte de Bil'in où près de 400 enfants du village vont à l'école, du cours élémentaire à la terminale. En tant que professeur, j'ai été émue par les discussions intelligentes et sérieuses que nous avons eues avec les étudiants que nous avons rencontrés.

Les étudiants ont un programme d'études complet qu'ils suivent et l'école fonctionne quotidiennement en dépit de la présence militaire, des arrestations, et de la terreur de cette occupation.


Lorsque l'école fut terminée, des groupes de filles se sont rassemblés autour de nous dans la cour de récréation et elles nous ont fait partager leurs expériences et leurs rêves. Dans un anglais presque impeccable, elles ont parlé de leurs désirs de devenir des professeurs et des médecins.

Un peu plus tôt, leur principal nous avait parlé des difficultés qu'il rencontre pour fournir une éducation normale aux enfants du village pendant ces "jours difficiles" et du stress post-traumatique qui affecte ces jeunes.

Il était très difficile de quitter ces étudiants intelligents et vifs et nous avons été ravis quand l'un des étudiants nous a invités dans sa maison pour le café.

Comme cela se fait en Palestine, sa mère nous a souhaitée la bienvenue et peu de temps après, plusieurs membres de la famille et des femmes du village nous ont rejoints pour la discussion. Leur vie est dure et leurs histoires doivent être dites.

Elles nous ont indiqué qu'il y a peu travail pour les hommes et que la vie au jour le jour est très difficile. Un des frères qui nous ont rejoints est un étudiant d'université qui, comme la plupart des jeunes hommes palestiniens, a connu l'intérieur des prisons israéliennes.

En tant qu'épouse, mère, professeur, mon coeur se brise. Je comprends que des choses simples comme aller à l'école et préparer les repas constituent la résistance.

C'est bien pour nous les femmes de passer du temps avec les filles et les femmes du village. Nous avons été tellement bien accueillies.

La nuit je me suis demandée à quel point je serais une bonne maman si j'attendais chaque nuit le bruit des bottes.
Si en envoyant mon fils quitter la maison chaque jour , je devrais le faire en sachant que son retour ne serait pas garanti.
Si je devrais voir les rêves de mes filles balayés par un système régi par les checkpoints et les armes.


Aujourd'hui, nous avons rejoint une manifestation dans le village de Deir Sharaf, situé à l'extérieur de Naplouse où Israël vide ses ordures et où les produits chimiques d'une toute nouvelle usine à l'extérieur de la décharge affectent les arbres et la végétation.

Nous avons rejoint les gens du village ainsi que plusieurs autres internationaux et activistes israéliens dans une marche silencieuse jusqu'à la décharge et puis nous sommes revenus au village pour boire un verre de soda.

Bien que la décharge soit sur la terre palestinienne dans une magnifique caverne que la municipalité voudrait développer comme lieu touristique, une colonie voisine se fait vraiment de l'argent avec la décharge, en faisant payer le droit de déposer les ordures.

Les manifestations ici sont importantes, mais nous devons faire beaucoup plus à la maison.

Nous avons du sang sur les mains.

Source : www.palsolidarity.org

Traduction : MG pour ISM

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