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Jérusalem - 3 mars 2004
Par Ed
L’ International Solidarity Movement est une organisation non-gouvernementale palestinienne regroupant des pacifistes palestiniens et internationaux travaillant à promouvoir la lutte pour la liberté en Palestine et pour la fin de l’occupation israélienne. Nous utilisons des méthodes de résistance non-violentes et des actions directes pour affronter et défier les Forces illégales d’occupation israélienne et leur politique.
Tout autant que la détresse de la vie sous occupation, presque tous les Palestiniens que j’ai rencontrés m’ont dit qu’ils voulaient vivre en paix avec leur voisin israélien. Comme Nadeem, un homme que j’ai rencontré à Beit Surik me dit qu’il « comprend qu’Israël a le droit d’exister (le long de la « Ligne Verte ») mais il ne sait pas si son fils comprendra la même chose après avoir vu ce qui a cours ici.
Photo : ISM
Biddu et huit autres villages de la région du nord-ouest de Jérusalem saisissent en ce moment la cour Suprême contre le tracé du Mur d'Apartheid qui devrait démarrer bientôt dans cette région.
Dimanche dernier, la Cour Suprême a ordonné l’arrêt des travaux pour une durée de sept jours jusqu'au dimanche 7 mars. Plus tard la seconde audience a été reportée à mercredi prochain pour laisser le temps aux villageois de préparer leur défense. C'est la première fois qu'un tribunal israélien se prononce contre la construction du mur, même si ce n’est que temporairement.
Pourtant, comme d’habitude avec les bonnes nouvelles ici, ça n’est pas aussi bien que ça a l’air au premier abord.
La Cour a ordonné que l’armée rencontre les représentants des villages et leur montre les plans détaillés du tracé du Mur pour qu’il puisse préparer la prochaine audience.
Jeudi, le conseil de la municipalité de Beit Surik a déclaré que son avocat avait rencontré les représentants de l’armée deux jours plus tôt. Mais la rencontre s’est avérée parfaitement stérile d’autant plus que l’armée n’a fourni aucune carte, aucun plan, aucun document.
Ils se sont contentés de mentionner vaguement des collines, des montagnes et des pistes de jeep.
Le refus de l’armée d’obéir à l’ordre de la Cour n’est pas une surprise, puisque le Ministre de la Défense, Shaul Mofaz, est décidé à construire le mur, sans s’occuper de la décision de la Cour puisqu’il a décidé que la Cour n’avait aucun droit à intervenir dans les problèmes de sécurité.. Il a aussi appelé à reprendre le travail aussi rapidement que possible, et à travailler « jour et nuit » pour terminer le mur.
Les bulldozers qui travaillaient dans la région ne sont pas restés inactifs très longtemps, puisqu’ils ont recommencé le travail à At-Tira, un village qui se trouve juste à l’extérieur de la zone concernée par l’ordre de la Cour.
Mais les gens de cette zone n’ont pas perdu l’espoir. Ils sont en train d’organiser encore plus de manifestations non violentes pour les jours à venir : prier sur la terre ; replanter les arbres et reconstruire les murs détruits par les bulldozers.
Quand les travaux repartiront, comme prévu la semaine prochaine les actions non violentes contre le mur seront presque impossibles.
Evidemment, les bulldozers travaillent entourés d’un grand nombre de policiers et de soldats qui « dispersent » les militants, et tabassent souvent les Palestiniens assis ou debout sur le chemin. Les soldats lancent du gaz lacrymogène et tirent des balles en métal enrobées de caoutchouc souvent à cent mètres des sites du travail, rendant difficile de s’approcher des bulldozers.
Les méthodes « non létales » de contrôle de la foule que déploie l’armée ont souvent des conséquences fatales.
Hier, ont eu lieu les funérailles de Mohammed, un jeune de 17 ans resté en réanimation depuis que, la semaine dernière, il avait été blessé à la tête par une balle en métal enrobée de caoutchouc. Un vieil homme de 70 ans est mort d’une crise cardiaque après avoir inhalé trop de gaz lacrymogène. Un jeune homme a été blessé à la tête par une bombe lacrymogène tirée à moins de vingt mètres de lui.
A la manifestation de la semaine dernière à Biddu les soldats ont tiré à balles réelles en dépit d’une déclaration de l’armée selon laquelle ils n’utilisaient que du gaz lacrymogène et des balles en métal enrobées de caoutchouc. Des témoins disent que la zone était jonchée de cartouches vides de M16 et deux jeunes Palestiniens ont été tués par balles.
Les balles que l’armée prétend n’avoir pas tirées ont fait 2 veuves et six orphelins de plus.
Mardi, j’ai rencontré Ali,20 ans, qui a été blessé dans le dos au cour de la manifestation. Il m’a dit que des Forces spéciales israéliennes en civil se trouvaient parmi les manifestants palestiniens et qu’ils avaient commencé à jeter des pierres pour exciter les shebabs.
Quand les soldats ont commencé à lancer du gaz lacrymogène, les Forces spéciales ont mis des chapeaux de couleur pour se faire identifier par l’armée et ont essayé d’arrêter une foule de gens. Ils n’ont même pas essayé d’attraper les shebabs qui lançaient leurs pierres, mais se sont acharnés sur les organisateurs de la manifestation non violente et sur ceux qui faisaient chanter les chants de victoire. Les gens s’agglutinaient les uns contre les autres pour rendre les arrestations difficiles et repousser les Forces spéciales.
A ce moment là, les soldats se sont mis à tirer à balles réelles et il a été touché dans le dos. En allant se faire soigner, la voiture qui l’emmenait a été bombardée de gaz lacrymogène, les soldats ayant très bien vu qu’il y avait un homme en sang à l’intérieur. Le conducteur a perdu connaissance et il a dû continuer à pied pour aller au Centre Médical.
De la même manière qu’ils avaient essayé d’arrêter les organisateurs et les manifestants, l’armée et la police les a visés alors qu’ils ne manifestaient justement pas.
Les villageois de Qatanna, un autre village proche, dont beaucoup travaillent dans la colonie israélienne voisine de Har Adar, se sont entendus dire par les Forces de sécurité de la colonie que si l’un d’entre eux étaient pris en train de manifester ils ne seraient plus autorisé à venir travailler.
Un agent de banque qui travaille près de Ramallah s’est vu interdire de passer au checkpoint parce qu’il avait pris à la manifestation et ne retrouverait l’autorisation de passer que lorsque les gens de Biddu cesseraient de causer des troubles.
Quelqu’un d’autre n’a pas pu obtenir de permis de circuler simplement parce qu’il est de Biddu. A la réunion du Conseil, on nous a parlé d’un chauffeur de taxi qui a été arrêté à un checkpoint et emmené dans les bois où il a été battu. Quand nous avons demandé pourquoi, il semble qu’il ait été battu simplement parce qu’il était de Biddu.
Tous ceux à qui j’ai parlé avait quelque chose à dire sur la façon dont l’occupation agresse la totalité de la société palestinienne.
Un homme qui travaille à la Banque Arabe de Ah Ram m’a raconté la semaine dernière comment des soldats armés sont entrés dans les agences de Ramallah et ont volé dix millions de dollars au motif qu’ils saisissaient des fonds qui pouvaient être utilisés pour "encourager la terreur".
N’importe comment, si cela devait se renouveler, la Banque Arabe dont le siège est en Jordanie serait obligée de fermer toutes les agences de Cisjordanie , ce qui serait un désastre pour l’économie. Le frère de cet homme qui vit actuellement aux Etats-Unis dit qu’il voulait retirer son argent de la Banque Arabe, parce qu’il ne s’y sentait plus en sécurité.
Si l’argent part de Cisjordanie , l’économie et toutes les communautés souffriront encore plus.
Qalqilia, dans le nord ouest de la Cisjordanie est maintenant totalement encerclé par le mur, avec un seul passage pour entrer et sortir : un checkpoint. Ce checkpoint a été fermé pendant plus d’un mois et demi depuis que le mur est fini de construire ! Même quand il est ouvert, il y a toujours des problèmes. Par exemple des gens se sont vu ordonner d’attendre trois heures parce que le chien, celui qui vérifie chaque entrée ou sortie, allait partir, ou que, fatigué, il avait besoin de dormir.
L’armée a le droit de décider si et où les gens peuvent construire dans certaines zones, et de détruire toutes les maisons construites sans permis. A Nabi Samuel, un petit village qui sera à l’extérieur du mur, n’a obtenu aucune autorisation de construire depuis presque dix ans. La mosquée n’est autorisée qu’aux prières du vendredi et uniquement aux habitants du village.
A Beit Surik, l’armée a refusé l’équipement en canalisations et pompes pour une source locale qui fournit de l’eau depuis des années, et maintenant l’eau s’échappe. Ils ont aussi refusé que les villages soient reliés au système d’eaux usées des colonies israéliennes voisines bien que les habitants des colonies étaient d’accord.
Il est difficile de voir comment tout cela est un problème de sécurité et facile de voir pourquoi tant de Palestiniens croient que les autorités israéliennes essaient de les pousser à quitter leur terre. Le village de Beit Surik a été détruit en 1948. Les villageois avaient fui et étaient revenus le reconstruire. Il fut à nouveau détruit en 1956 et de nouveau reconstruit. Encore détruit au cours de la guerre de 1967 et encore reconstruit.
Mais, maintenant, ils ont le sentiment que l’armée cherche à détruire jusqu’au nom et jusqu’à l’esprit du village pour qu’il ne puisse plus jamais être rebâti.
Tout autant que la détresse de la vie sous occupation, presque tous les Palestiniens que j’ai rencontrés m’ont dit qu’ils voulaient vivre en paix avec leur voisin israélien. Comme Nadeem, un homme que j’ai rencontré à Beit Surik me dit qu’il « comprend qu’Israël a le droit d’exister (le long de la « Ligne Verte ») mais il ne sait pas si son fils comprendra la même chose après avoir vu ce qui a cours ici.
Et tous ne cessent de me demander pourquoi.
Pourquoi Israël nous fait ça ?
Pourquoi Balfour nous a-t-il privés de nos terres pour la donner à Israël en 1917 ?
Pourquoi le monde ne se soucie pas de nous ?
Pourquoi personne ne parle de notre histoire ?
Pourquoi les gens en Europe et en Amérique ne comprennent-ils pas ce qui se passe ici, alors qu’ils sont tellement intelligents pour envoyer des gens dans l’espace ?
Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
Malheureusement, je n’ai toujours pas de réponse.
Source : www.palsolidarity.org
Traduction : CS pour ISM-France
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