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Palestine -

L’Etat Palestinien tel qu’Israel l’exige

Par

Al-Ahram Weekly 23 - 29 Decembre 2004 No. 722

Il ne sert à rien de se demander pourquoi le Premier ministre britannique et le directeur de la banque mondiale n’ont jamais rendu visite à Arafat de son vivant. Personne ne répondra.
Mais ils étaient présents le 20 décembre 2004 lorsque G.W. Bush nous a rappelé qu’il était le premier président américain à reconnaître officiellement le principe de la création d’un état palestinien.

Toutefois le principe était implicite dans les propositions de Clinton à Camp David II et même Sharon avait déclaré qu’il reconnaissait la nécessité de créer un état palestinien bien avant Bush.

Alors qu’est-ce qui distingue l’offensive diplomatique actuelle sur la Palestine, explicitement, implicitement ou d’une manière ou d’une autre ?

La question de la Palestine est aujourd’hui présentée comme le problème d’un état, rien d’autre qu’un état : un état sans frontières, sans capitale et sans cause nationale, juste un état.

Il y a une tentative concertée de créer l’impression que si « un état » (en mettant l’accent sur l’article indéfini) est offert aux Palestiniens, ils ne peuvent pas refuser.

Après tout, tout le monde sait que c’est dans ce but qu’ils se sont battus.

Alors, quand on le leur offre sur un plateau, que veulent-ils de plus ?

On ne peut s’empêcher d’être frappé par la coïncidence entre l’optimisme de Sharon et un optimisme arabe très particulier. Quelque chose de discordant et instinctivement nos yeux louchent et nos oreilles se dressent. Certainement, les deux sens ne peuvent pas être faux ou peut-être l’un des deux sens doit-il s’adapter à l’autre.


Les Israéliens voient des présages de grands changements dans le discours de Sharon le 16 décembre au congrès de Herzliya. Il est certain que dans le langage israélien et sa substance, le discours était optimiste et méritait ainsi d’être qualifié de « discours aux opportunités historiques.


Mais si Sharon est optimiste, les Arabes ont toutes les raisons de se demander pourquoi. Ils n’ont aucune raison de partager ce sentiment à moins d’en accepter le contenu.

L’optimisme israélien qui voit des « opportunités historiques » dans le discours de Sharon peut seulement provenir d’une «amélioration dans la position stratégique d’Israël» comme Sharon l’a dit dans son discours, une composante majeure qui réside dans «le plus important accomplissement» du plan de retrait que représentent "les arrangements entre le Président américain Bush et moi."

Et Sharon continue en faisant appel aux dirigeants palestiniens pour qu’ils partagent son optimisme en "prenant une décision historique d’arrêter ceux qui soutiennent la terreur" car en prenant une telle décision historique les dirigeants se qualifieront comme partenaire "en coordonnant divers éléments relatifs à notre plan de retrait avec un gouvernement qui est prêt et capable de prendre en main les zones que nous quitterons."


Sharon s’attend à ce que les Palestiniens, qui n’eurent pas leur mot à dire dans la conception de ce plan et ont refusé d’y répondre, considèrent l’empressement d’Israël à donner à une Autorité palestinienne, en charge du maintien de la sécurité au nom d’Israël dans les zones qu’ils évacueront, comme un grand compromis et donc un facteur d’optimisme.

Sharon continue pour dire que si l’Autorité palestinienne remplit bien sa tâche, cela engendrera des négociations de paix complètes, tout en notant qu’il n’est pas question d’aller au-delà de ce qui a été convenu entre Bush et Sharon évidemment.

Une nouvelle fois les Palestiniens doivent acclamer le retour à la table des négociations sur la base de l’entente Bush/Sharon qui incarne la formule israélienne d’un règlement permanent, l’accomplissement politique majeur du plan de retrait dont nous rappelons qu’il s’agit d’une grande réussite. Voilà ce qui doit nous rendre optimiste !


Si l’entente avec Bush est la base de l’optimisme de Sharon, il n’en résulte pas que les Arabes devraient frémir à l’unisson. Ainsi que Sharon l’a si bien expliqué dans son discours, Bush s’est engagé à soutenir l’annexion de Jérusalem et des blocs de colonies à Israël et l’exclusion du droit au retour dans le cadre d’une solution permanente.

Cependant, au lieu d’une impulsion pour réformer l’ordre arabe, au lieu de travailler franchement ensemble pour défendre les droits des Arabes et des Palestiniens contre les desseins de Sharon d’annexer les plus grands morceaux possibles des territoires occupés, au lieu de contrer son incitation, laquelle était flagrante dans son discours, contre la Syrie et la résistance palestinienne et autres sujets similaires qui nous donneraient de réelles raisons d’espérer, certains Arabes et Palestiniens se sont précipité pour adopter ce vernis d’optimisme officiel sharonien qui camoufle à peine ce qui devrait nous procurer un motif d’inquiétude gravissime (à supposer que nous ayons une opinion collective sur le sujet.)

Ces Arabes et Palestiniens optimistes ont trouvé du réconfort ou une justification en argumentant que le plan de retrait fait partie de la « Feuille de route. »

Malheureusement, ils ne dupent qu’eux-mêmes.

De crainte que nous oubliions, l’auteur de la «Feuille de route» a pris la peine de décrire sa vision d’où cette route va mener. Cette destination, ainsi que les politiciens arabes le savent bien, n’est pas contenue dans la feuille de route mais dans la « vision » détaillée par Bush dans sa lettre de garanties à Sharon.

La meilleure preuve de la faillite du raisonnement qui affirme que le plan de retrait, partie intégrante de la feuille de route, est la raison pour adopter l’optimisme de Sharon, se trouve dans l’attitude que le gouvernement israélien a prise récemment devant les tribunaux israéliens.

Dans un litige entre deux colonies, une à l’intérieur de la ligne verte, l’autre à l’extérieur, la première revendiquait que la deuxième s’agrandissait illégalement.

Les avocats de la première colonie accusèrent la colonie Alfi Manshi (au-delà de la ligne verte) d’avoir construit ce qu’on appelle une nouvelle agglomération située à 2 km de la colonie, que ce projet était en effet une nouvelle colonie et violait en tant que telle la feuille de route qu’Israël avait approuvée.


Le représentant du gouvernement rétorqua que le gouvernement ne reconnaissait pas la portée légale ou le bien-fondé de la feuille de route. Mais juste au cas où nous n’aurions pas compris le message, le chef de cabinet de Sharon, Doc Weissglass, ne fut pas aussi subtil.

Dans son discours à Herzliya prononcé 2 jours plus tôt, il déclarait que la feuille de route n’était pas la conception d’une solution permanente mais était un guide pour les phases du processus de négociation, ni plus, ni moins.

Autrement formulé il nous dit : "si vous, les Arabes, voulez considérer le plan de retrait comme une partie de la feuille de route, il n’y a pas de problème pour Israël. "

Mais qu’en est-il l’état palestinien, pourraient demander certains.
N’avez-vous pas dit que Sharon approuvait cette idée ?

Ainsi fit-il, même avant que la feuille de route ne soit révélée.
Mais pour Sharon, un état palestinien veut dire une séparation démographique.

Cela veut dire un état sur la plus petite terre possible contenant le plus grand nombre possible de Palestiniens, un état construit suivant la logique du plan historique d’Alon et d’après le concept d’autonomie de Begin.

Mais plus important pour Sharon, l’état est maintenant devenu une condition préalable pour continuer les négociations vers un règlement final.

Oui, ce qui depuis Rabin a été considéré comme la contrainte déplaisante d’un règlement permanent est devenu une requête israélienne qui doit être satisfaite non pas avant le règlement permanent mais à la place de celui-ci.

Pour Sharon, un état palestinien est un autre mot pour dire une période intermédiaire prolongée. Que cet état soit créé sur un peu plus ou un peu moins de 40% des territoires occupés n’est pas la question.

La question est d’en faire la pierre angulaire d’une phase d’intérim prolongée après laquelle des négociations auront lieu avec un gouvernement qui aura démontré sa compétence à gouverner, lequel sera ainsi reconnu pour ses capacités à monopoliser les moyens de répression et à organiser ses affaires sociales et légales.

Une fois cet état en place, selon la façon de penser de Sharon, tout le monde se détendra, car les négociations sur les principaux sujets du règlement final pourront avoir lieu à une allure calme et distinguée jusqu’à la fin des temps si les négociateurs des deux bords le désirent, parce qu’alors la nature du conflit aura été transformée en une dispute entre deux états.


Et de quels sujets capitaux deux pays peuvent-ils bien discuter ?

Des frontières évidemment. Des petites querelles de frontières. Certainement pas de droits nationaux ou d’autres sujets concernant la libération nationale et certainement pas du droit au retour des Palestiniens.

Naturellement, l’état palestinien établi à Gaza et sur une portion de la Cisjordanie aura le droit de délivrer des passeports aux réfugiés palestiniens s’il le désire. En fait, il pourra tout aussi bien accorder le droit au retour aux réfugiés pour s’entasser à l’intérieur de ses frontières.

Ceci serait sont droit en tant qu’état, un droit que Sharon accorderait de bonne grâce, et si ce n’est pas de bonne grâce il ferait une objection pour ensuite, malgré ses réticences, faire encore une «concession douloureuse.»


Ceci est la vision qu’a Sharon d’un état palestinien.

C’est son alternative à un état souverain avec pour capitale Jérusalem, dans le respect des frontières de 1967 et le droit au retour des réfugiés.

Et pas un seul mot de la feuille de route ne contredit sa « vision.
C’est aussi son alternative à l’obligation de négocier avec un mouvement de libération. Il y a une grande différence entre négocier un statut final avec un état et avec un mouvement de libération.

Des douzaines d’états ont des querelles de frontières, il n’y a rien de particulièrement urgent ou déstabilisant à les régler, contrairement aux causes de libération nationale.

Sharon n’a aucune intention d’aborder ces dernières questions et les Palestiniens abandonneront également l’opportunité de les aborder s’ils acceptent la création d’un état en dehors du cadre d’une solution juste, globale et permanente, un état amputé dès sa conception et dont Sharon a l’intention de faire la solution définitive.

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