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ISM France - Archives 2001-2021

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Liban -

L¹homme qui ne s¹excusera pas même s¹il doit demeurer en prison un deuxième quart de siècle.

Par

Samir El kantar est né à Abiah le 22 juillet 1962.
Abiah est un village qui a une position privilégiée surplombant Beyrouth.
C¹est à l¹école locale qu¹il fit ses études primaires et qu¹il donna les premières preuves de son courage et de sa bravoure, tous ses amis d¹enfance en témoignent.
Ils racontent qu¹il écrivait sous sa photo "Le Chahid Samir El kantar".

Samir se battit à Tiba, pour repousser les troupes israéliennes lors de leur première invasion du sud Liban en 1978.

Il tenta par la suite de monter une opération militaire contre les envahisseurs à partir de la frontière jordanienne dans la région de Missan.
C¹est là qu¹il fut fait prisonnier le 31 janvier 1978. Il le demeura jusqu¹au 25 décembre 1978.

Le 22 avril 1979 il exécuta l¹opération Président Gamal Abdel Nasser, avec trois de ses amis: Abdel Majid Aslan, M¹Henna Al Mouaïd et Ahmed Al Abras. Samir était le chef de l¹opération avec le grade de lieutenant de la marine dans le Front de libération de la Palestine.



Naharia ou l¹opération impossible

L¹opération consistait à atteindre la colonie de Naharia et d¹enlever des soldats israéliens dans le but de les échanger contre des résistants détenus dans les prisons israéliennes.

C¹était la première opération maritime qu¹a connue le front nord de la Palestine. Le commando prit la mer à deux heures du matin, à partir des côtes de Sour (Tyr), au bord d¹un Zodiac aménagé pour augmenter sa vitesse.

Il a pu éviter les radars de la VIème flotte US et les garde-côtes israéliens et arriver sur la plage au petit matin. Naharia abritait la plus grande garnison militaire du front nord, en plus de l¹académie militaire, des casernes de police, de la garde et de l¹artillerie côtière, du système pré- alerte maritime ainsi que les fameuses vedettes militaires françaises de Cherbourg.

Le commando eut un premier accrochage avec une patrouille de police et tenta de pénétrer dans une maison, propriété de Amnon Sillâa, située directement sur la plage. Il réussit à pénétrer dans un grand bâtiment situé au n°61 de l¹avenue Jabotinsky puis se divisa en deux groupes de deux.

L¹accrochage avec la patrouille de police se solda par la mort du caporal Ilyahou Schahar de la colonie de Mâalout. Le commando réussit par la suite à capturer le savant atomiste Dany Haran et à l¹entraîner jusqu¹à la plage où se déroula l¹accrochage le plus sérieux quand Samir et ses compagnons voulurent s¹approcher de l¹embarcation.

Un des membres du commando fut tué et un deuxième blessé, puis plus tard Samir lui-même reçut 5 balles dans diverses parties du corps.



C¹est lui !

L¹ennemi mobilisa d¹importantes troupes et une bataille s¹engagea après que Samir se fut réfugié derrière les rochers.

Il raconte dans une de ses lettres qu¹il réussit à toucher le commandant du secteur nord, le général Yossif Tsahour, de trois balles à la poitrine, mais qu¹il ne connaissait pas sa cible et avait juste remarqué quand celle-ci tombait, qu¹il avait des étoiles à l¹épaulette et qu¹il était donc un officier de haut grade.

Il est à rappeler qu¹Israël avait caché l¹identité du général et ce n¹est que par la suite, lors du procès au cours duquel ont été évacués les témoins ainsi que les avocats, que son identité a été vaguement évoquée.

Plus tard, 10 ans après ce procès, le général avait déclaré à un journal israélien : "quand commença l¹opération de Naharia et que j¹ai entendu les sirènes d¹alerte, je me suis précipité à la caserne et j¹étais parti à la tête d¹une unité militaire en direction de la plage. C¹est là qu¹un jeune homme, de petite taille, me surprît par trois balles qui me firent perdre connaissance. Je n¹ai repris mes esprits qu¹à l¹hôpital.
Le ministre de la Défense et le chef d¹État-major se tenaient à mon chevet".

Et le général Tsahour d¹ajouter « je n¹oublierai jamais de ma vie le visage du fidaï qui m¹avait atteint à la poitrine. Je sentis sur le coup comme si quelqu¹un me frappait avec un marteau. C¹est par miracle que j¹ai pu échapper à la mort. Au procès je l¹ai très bien reconnu, c¹est Samir El kantar".



L¹exécution immédiate ou la mort lente

En date du 24 avril 1979, le premier ministre israélien Menahem Begin proposa à la commission des Affaires étrangères et de la Sécurité, un projet de loi abrogeant une loi précédente prévoyant la peine de mort pour les fidayin. Il a été soutenu par Ezra Weizman, le ministre des Affaires étrangères, Haïm Landau, le ministre des Communications. Abraham Charar, le chef du Likoud à la Knesset s¹y opposa et exigea l¹application de la peine de mort.

Le 25 avril 1979, Itzhak Shamir promulgua un décret autorisant l¹application de la peine de mort pour les membres de l¹opération de Naharia et aux obsèques des morts de Naharia, Begin déclara « à propos du fidaï Samir El kantar, nous sommes en train de réfléchir à une vengeance que même Satan n¹a pas réussi à inventer ».


L¹opération de Naharia a eu d¹importantes conséquences dans les territoires occupés. Les colons de haute Galilée et du flanc ouest de la Galilée ont dormi dans les refuges durant plus d¹une semaine après l¹opération. Ezra Weizman annula une visite qu¹il comptait faire en Égypte, pour mettre au point les grandes lignes des relations de voisinage entre les deux pays, après les négociations et l¹accord de Camp David.

Les Israéliens tentèrent tout pour appliquer la peine de mort au prisonnier Samir. Le gouvernement israélien, à l¹unanimité de ses membres, décréta une loi dans ce sens. Mais ils se retrouvèrent devant une difficulté majeure puisque la loi israélienne ne prévoit exceptionnellement la peine de mort que pour les nazis. Tout le monde connaît dans ce domaine l¹affaire Eichman.

Les Israéliens essayèrent de réduire la peine à cinq fois la perpétuité, dans le but de faire un geste politique permettant de renforcer les relations avec l¹Egypte, mais aussi pour éviter qu¹il y ait un problème juridique et des pressions et des appels pour alléger la sentence.


Ainsi le 28 décembre 1980, la cour pénale de Tel Aviv condamna le prisonnier Samir El Kentar à 5 fois la perpétuité plus 47 années, c'est-à-dire l¹équivalent de 542 ans. Une peine surréaliste et exagérément lourde dans le seul but de garder Samir derrière les barreaux jusqu¹à la mort.

Cette peine est illégale puisque Samir, en tant que prisonnier de guerre, ne peut être jugé par un État étranger, selon les conventions de Genève qui garantissent les droits des prisonniers de guerre.

Au cours du procès, Samir demanda à assurer sa propre défense. Il déclara en substance « que peu lui importait qu¹il soit condamné à 100 ou 500 ans de prison et que le plus important était qu¹ils soient arrivés jusque-là pour affirmer leur présence, qu¹ils aient accompli ce qu¹ils voulaient faire pour prouver que, dans un avenir proche, le peuple palestinien recouvrira son identité nationale sur cette terre ».



Comment il fit ses études :

Samir et ses amis menèrent une grève de la faim durant 19 jours pour arracher le droit de suivre des études par correspondance. A l¹issue de nombreux et pénibles efforts, il fut autorisé en 1992 à s¹inscrire à l¹université ouverte de Tel Aviv qui dispense un enseignement par correspondance.

Il choisit les sciences sociales et humaines et obtînt sa licence au mois de juin 1997.
Il fit encore deux études supplémentaires : la première intitulée « les surprises militaires au cours de la 2ème guerre mondiale » et la seconde "Contradictions entre sécurité et démocratie en Israël".

Au mois de juillet 1998, il demanda à s¹inscrire dans une université libre en Israël pour des études supérieures. L¹administration pénitentiaire refusa sa demande prétextant qu¹il ne peut entreprendre des études qu¹en hébreu pour que les autorités puissent contrôler les contenus de l¹enseignement.

Actuellement, Samir essaie de parvenir à préparer un magistère sur le thème de la démocratie et a pratiquement surmonté les difficultés posées par l¹administration de la prison, son leitmotiv étant "puisque les Israéliens tiennent à ce que je demeure en prison, alors pourquoi ne pas préparer un doctorat" ?

Dans une lettre transmise par l¹intermédiaire de la Croix rouge, en date du 11 août 1996, Samir raconte dans les détails la manière dont il était parvenu à s¹inscrire et à suivre ses études par correspondance à l¹université de Tel Aviv : 'Après d¹énormes difficultés et des efforts gigantesques, nous avons été autorisés à nous inscrire dans les universités israéliennes. Vous savez sans doute qu¹elles ont un bon niveau et qu¹elles n¹ont rien à envier à celui des universités occidentales. Moi-même j¹ai réussi à m¹inscrire à l¹université de Tel Aviv qui dispense un enseignement par correspondance".


A la fin des études qui l¹ont mené à la licence, les autorités pénitentiaires lui cachèrent longtemps les résultats des examens pour jouer de ses nerfs.

Il écrivit "qu¹il a attendu longtemps avant d'être informé de son succès, réalisant ainsi une grande victoire morale et intellectuelle sur les sionistes, après leur avoir asséné une grande défaite militaire et politique en 1979. J¹aime toujours les victoires !".

Voici le texte de la lettre qu¹il avait reçu de l¹université alors qu¹il était dans sa geôle : "L¹université libre délivre le présent diplôme de sortie avec la mention B.A, à Samir El kantar qui a terminé l¹ensemble des programmes officiels dans les matières de sciences humaines et sociales et réussi ses examens et toutes ses obligations universitaires".

Le professeur Ilyahou Nessim, président de l¹université, se crut même obligé de faire accompagner le diplôme et les notes obtenues (76/100), d¹une lettre de félicitations dans laquelle il dit notamment : "Avec la fin de vos études et l¹obtention de votre diplôme B.A de l¹université libre, nous vous souhaitons de grands succès dans l¹avenir. Nous réalisons les difficultés que vous avez surmontées et les grands efforts que vous avez déployés pour réaliser ce succès. Nous vous exprimons notre grande satisfaction de ce que vous avez accompli et nous espérons tous que la somme de savoir et de compétence, dont vous avez donné la preuve lors de vos études, vous serviront plus tard et vous aideront dans votre vie".



Je ne m¹excuserai jamais !

Samir considère que même s¹il devait passer encore 25 ans en prison, il ne présentera jamais des excuses aux familles des personnes tuées lors de la fameuse opération de Naharia, ni de signera des regrets pour ce qu¹il avait accompli, ajoutant : "Je ne regrette qu¹une seule chose, c¹est d¹avoir été privé de défendre mon foyer, ma famille, ma terre et ma patrie lors de l¹invasion israélienne de 1982, alors que j¹ai eu l¹honneur de défendre ma nation en 1979".

Au mois de février 2003, Samir a refusé une proposition faite par l¹administration pénitentiaire israélienne à tous les détenus qui ont passé plus de 20 ans en prison, les invitant à formuler une demande écrite de libération et d¹expliquer les raisons personnelles d¹une telle demande.

Samir a décliné l¹offre et refusé de faire la demande, estimant qu¹il n¹y pas lieu de personnaliser une affaire strictement politique. Samir continue à défendre cette position et déclare que le pan de vie passé dans les prisons sionistes, était pour la Palestine, sa cause et son peuple. Un peuple qui continue à subir tous les jours, une guerre totale d¹extermination.

Il déclare enfin qu¹il ne permettra jamais à l¹administration pénitentiaire de l¹entraîner dans le chemin d¹une issue et d¹un salut personnels, affirmant que sa liberté personnelle n¹avait de sens que si elle était accompagnée de celle de sa patrie : celle- ci viendra sûrement un jour, portée par les mains endolories par la caillasse de la terre qui écrase tout occupant.



Traduit de l'arabe par Ahmed Manaï, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique (www.tlaxcala.es). Cette traduction est en Copyleft.

Source : http://www.assafir.com/

Traduction : Ahmed Manaï

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