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Gaza - 30 novembre 2011
Par Eva Bartlett
Article du 27 novembre 2011
(Il y a quelques jours…)
Un grondement sourd couvre les klaxons des voitures et les cris des enfants qui jouent dans la rue, devant notre maison à Deir al-Balah, au centre de Gaza. Au son, qui rappelle vaguement celui d'un fourneau, nous reconnaissons un avion de chasse israélien qui survole nos cieux et empoisonne la tranquillité du milieu de matinée. Perdue dans mes pensées et la rédaction d'un article, j'avais presque oublié mon environnement : la Bande de Gaza où, à tout moment le vrombissement d'un avion de guerre peut surgir et où, à tout moment, le bruit sourd et assourdissant de sa bombe et ses vibrations se propagent à travers les villes, les cités et les terres.
Mais le grondement de l'avion de chasse israélien, qui fait des cercles au-dessus de nous, me ramène à la réalité, rendant le futile d'autant plus futile, et le possible d'autant plus possible.
Un F-16 de l'armée de l'air sioniste dans le ciel de Gaza verrouillée.
(La nuit dernière)
Je suis tirée du sommeil par une forte explosion, dont j'ai appris plus tard qu'elle avait eu lieu à Nusseirat, à quelques kilomètres au nord de chez nous. La puissance du F-16 israélien aux bombes d'une tonne (ou plus) est telle que nous pouvons la ressentir à Deir. Nous gardant bien d'aller voir ce qui se passe, nous attendons l'inévitable seconde explosion, qui arrive en quelques minutes, plus dure et plus forte, nous poussant instinctivement à nous couvrir la tête pour nous protéger de possibles débris et éclats. Heureusement pour nous, nous sommes assez loin cette fois et il n'y en a pas. Après cette seconde explosion et la possibilité d'un autre bombardement israélien, nous n'avons pas d'autre choix que d'attendre et d'y faire face (personne n'a d'abri ou de sirène à Gaza, on est touché ou épargné dans cette Bande verrouillée).
Au réveil, j'ai réalisé que les avions de chasse ont été remplacés par le sifflement exaspérant des drones, capables de surveiller ou de bombarder et mes oreilles novices ne sont pas suffisamment entraînées pour entendre la différence. Mais même sans savoir quelle sorte de drones est là-haut ce matin, nous sommes tous pourtant sous attaque psychologique, sachant qu'à tout moment Israël peut bombarder (et bombardera) un secteur, une maison, une mosquée, une voiture, et expliquer ensuite que c'est "un dommage collatéral".
A la lecture des nouvelles sur internet, je vois qu'Israël désapprouve les démarches Hamas-Fatah pour la réconciliation, et qu'il jure de couper l'eau et l'électricité à Gaza.
Selon l'AFP, Israël a averti samedi 26.11 qu'il coupera l'eau et l'électricité à la Bande de Gaza si les mouvements palestiniens rivaux Fatah et Hamas constituent un gouvernement d'unité.
"Le ministère des Affaires étrangères examine la possibilité de dégager Israël de la Bande de Gaza en ce qui concerne les infrastructures," a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Danny Ayalon lors d'une réunion publique, rapporte le site internet Ynet du quotidien Yediot Aharonot.
Et ceci alors que l'aquifère de Gaza est tarie, et que l'eau de Gaza est presque entièrement impropre à la consommation selon les normes de l'OMS. Pendant la période où les colons illégaux israéliens occupaient Gaza (de 1967 à 2005), ces derniers ont utilisé beaucoup plus d'eau que les Palestiniens (comme ils continuent de le faire en Cisjordanie et à Jérusalem occupées). Ces dernières années, les autorités israéliennes ont refusé d'autoriser les réparations et l'expansion des systèmes d'assainissement et des usines de retraitement de Gaza, laissant les eaux usées déborder et inonder les zones résidentielles et obligeant à pomper dans la mer de Gaza les eaux usées faute d'espace de rétention et de traitement.
Une partie du port de Gaza pollué par les eaux usées
Le groupe israélien de défense des droits de l'homme B'Tselem note, au sujet de l'eau potable contaminée à Gaza :
"(...) Le haut niveau en nitrates est de nature à causer de l'anémie parmi les enfants et la méthémoglobinémie (syndrome de l'enfant bleu) parmi les nourrissons, ce qui peut provoquer la suffocation et la mort. Une étude publiée en 2007, qui a examiné un échantillon de 340 nourrissons de Gaza, a montré que près de la moitié d'entre eux portait les symptômes inquiétants du syndrome.
L’Autorité palestinienne de l'Eau estime que près de 40% de l'incidence de la maladie à Gaza est lié à l'eau potable polluée. Selon des organisme d'aide internationale, chez 20% des familles gazaouies, au moins un enfant de moins de cinq ans souffre de diarrhée résultant de l'eau polluée. Une étude des Nations-Unies publiée en 2009 estime que la diarrhée est la cause de 12% des décès d'enfants à Gaza. Le manque d'eau potable est de nature à causer la malnutrition des enfants et nuit à leur développement physique et cognitif."
Aujourd'hui, Israël veut aggraver la punition collective des 1,6 million de Palestiniens (dont la moitié a moins de 18 ans) en leur refusant complètement l'eau.
Les groupes israéliens B'Tselem1 et Gisha affirment tous les deux qu'Israël continue d'occuper la Bande de Gaza, malgré le retrait des colonialistes israéliens de Gaza en 2005 (grâce auxquels les colonies israéliennes se sont massivement et rapidement étendues en Cisjordanie et à Jérusalem occupées). En tant que puissance occupante, Israël est obligé de satisfaire les besoins humains de base aux Palestiniens de Gaza. Au lieu de cela, Israël dénie activement et systématiquement pratiquement tous les besoins concevables de la population de Gaza, et le dernier en date est la menace de lui refuser l'eau.
La centrale électrique de Gaza bombardée par l'aviation sioniste en janvier 2009
A lire :
- Pénurie d'électricité à Gaza : qui a éteint les lumières ?
Rapport Gisha, mai 2010 (en anglais, 12 pages, PDF).
"En juin 2006, dans le cadre d'une opération militaire tout azimut suite à la capture du soldat israélien Gilad Shalit par des combattants de Gaza, l'aviation israélienne a bombardé la centrale électrique et détruit ses six transformateurs. Les dégâts n'ont été que partiellement et progressivement réparés jusqu'à ce qu'en décembre 2007, la centrale atteigne une capacité de production de 80 MW, qui aurait pu réduire la pénurie électrique de 9%. Cependant, la capacité de production de la centrale est limitée parce que son fonctionnement dépend de l'achat de diesel industriel à Israël, qui a depuis 2007 limité la quantité de carburant dont il autorise le transfert à la Bande de Gaza."
- Guide sur le bouclage de Gaza : selon les propres mots d'Israël
Rapport Gisha, septembre 2011 (en anglais, 6 pages, PDF)
"De juin 2007 à juin 2010, Israël n'a autorisé l'entrée à Gaza que des produits "vitaux pour la survie de la population civile". Israël a même mis au point des formules mathématiques déterminant la quantité et le type de nourriture que les habitants de Gaza seraient autorisés à acheter. Ces formules ont été révélées à la suite d'une demande soumise par Gisha selon la loi sur la Liberté de l'Information. Les restrictions ont déterminé, par exemple, que les habitants de Gaza pourraient acheter du hummous, mais pas s'il est assorti de pignons de pins ou de champignons. Le papier, les vêtements et les chaussures ont été interdits, comme le thé et le café pendant diverses périodes.
La politique actuelle continue d'interdire l'entrée des matériaux de construction, au motif que le Hamas pourrait s'en servir pour construire des bunkers. Cette restriction est maintenue en dépit du fait que les matériaux de construction continuent d'entrer à Gaza par les tunnels. Selon un rapport des Nations Unies, davantage de matériaux de constructions entrent à Gaza par les tunnels que par les passages frontaliers avec Israël.
L'interdiction de l'exportation de marchandises de Gaza n'est pas fondée sur des préoccupations sur le contenu de cargaisons particulières, mais est plutôt une restriction d'ensemble sur tous les produits. Même quand Israël a fait une exception à l'interdiction et a autorisé l'exportation de produits agricoles vers l'Europe, comme ce fut le cas pendant la saison hivernale récente, il a empêché les habitants de Gaza de commercialiser les mêmes produits en Israël ou en Cisjordanie . Ceci en dépit du fait qu'avant l'imposition de restrictions sur les exportations, 85% des marchandises en provenance de Gaza commercialisées en dehors de la Bande étaient vendus en Israël et en Cisjordanie . La demande pour les marchandises et produits agricoles de Gaza continue d'exister en Cisjordanie et en Israël (y compris des marchandises qui sont en définitive commercialisées à l'étranger par des exportateurs israéliens).
Israël autorise les joueurs de football à aller de Gaza en Cisjordanie , mais n'autorise pas les étudiants de Gaza à fréquenter les universités de Cisjordanie . Cette interdiction est en place depuis 2000."
Source : In Gaza
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