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ISM France - Archives 2001-2021

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Jénine -

La Palestine, Une Prison : Naplouse, Tubas, Jénine

Par

On rencontre difficilement un homme en Palestine qui n'a pas été en prison à un certain moment de sa vie.
Il y a 600.000 histoires identiques depuis le début de l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza en 1967.
Il y a également plus de 3,8 millions de ces histoires de réfugiés palestiniens nettoyés éthniquement de leurs maisons en 1948, qui souffrent d'une autre forme d'emprisonnement, incapables de retourner dans leurs villages, leurs terres, leurs pâturages, leurs maisons qu'ils ont été forcés d'abandonner à la hâte.

Aujourd'hui l'armée israélienne est entrée à nouveau dans le camp de Balata, occupant deux maisons et déclarant le couvre-feu pour la population qui soudainement s’est retrouvée à nouveau emprisonnée dans chaque maison.

Aujourd'hui un garçon agé de dix ans a été arrêté par les militaires israéliens pour avoir soi-disant 'transporté des explosifs du village agricole de Zawata à Naplouse ».

Aujourd'hui, l'armée israélienne a déployé un véhicule blindé de troupes (APC), une jeep de la Police des Frontières et des fils barbelés, alors qu’elle émettait un ordre déclarant la base/carrefour de Salem « Zone militaire fermée » (CMA) aux 30 Palestiniens et aux 2 internationaux qui étaient venus pour tenir une veillée pacifique en solidarité avec le prisonnier politique Hussam Khader.

Samedi, nous avons été témoin d'une incursion militaire israélienne sur le village de Taluza. Pendant six heures, les jeeps de l’armée israélienne et de la police des frontières ont imposé un couvre-feu sur le village. De temps en temps les soldats qui s’ennuyaient faisaient des simulations de sexe ou hurlaient dans leurs haut-parleurs installés sur les jeeps.

Au loin, on pouvait voir, sur la route en direction d’Assira Shamaliya, un groupe de soldats, dans deux jeeps, qui sautait sur le toit de leurs véhicules garés près de deux maisons palestiniennes. Ces cabrioles étaient de temps en temps ponctués par le bruit de tirs dans le village qui provenait des M16 des soldats.

Un conducteur qui a eu le malheur de s’aventurer vers le bas de la route à ce moment-là, a été détenu par ce même groupe de soldats pendant une demi-heure. Il a été incité à sortir de son véhicule et à s’approcher d’une jeep puis de l’autre, de retourner à sa voiture et encore et encore.

Alors qu’il était assis dans sa voiture à attendre que ces gosses âgés de 18 ans avec des arment décident s'ils allaient le laisser partir ou s'ils allaient le garder, les soldats dirigeaient les projecteurs montés sur le toit de leur jeep vers sa voiture et jouaient avec l'intensité des faisceaux ou la sonorité et le volume de leurs sirènes.


Par la suite, les troupes en ont eu assez du cruel pouvoir qu'elles exerçaient sur le conducteur et l’ont laissé passer. Pourtant, personne à Taluza n’ait été vraiment chanceux ce jour-là.

Ali Shoukad El-Fares, 35 ans, est mort dans sa maison d’une attaque cardiaque après que les militaires israéliens aient prononcé son nom dans les haut-parleurs, faisant de lui le 13ème martyr du village depuis le début de l'Intifada.

L'Imam local, cheik Mazen, nous a indiqué que que son attaque cardiaque était probablement dûe à la crainte d'Ali de retourner dans les prisons militaires israéliennes où il avait considérablement souffert entre les mains de ses geoliers.
Cette nuit, Ali a été enterré.
Comme dans un roman de Gabriel Garcia Marquez, c'était encore une autre mort qui dans l’histoire actuelle - qui est fabriquée de nos jours par les médias internationaux - passerait sans être mentionnée.


Hier, dans les bureaux de l'Union Générale des Femmes Palestiniennes de Jénine, nous avons assisté à une exposition de couture traditionnelle palestinienne. Deux soeurs nous ont expliqué une histoire dans un coin de la salle remplie de pièces fortement politisées.
Elles nous ont dit que leur sœur, Arij Mustafah Uruq - une des 78 femmes palestiniennes retenues dans le complexe des prisons des FOI qui s’étend de la Méditérannée au Jourdain - a été arrêtée le 27 juillet 2003 pour une soi-disant participation dans des activités militantes.

Son procès militaire aura lieu le 13 avril de cette année et elles espèrent alors voir leur soeur. Les lettres occasionnelles que la famille reçoit d'Arij ont inspiré l’aînée des soeurs à réaliser un pièce de couture dépeignant un bras enchaîné tirant sur un mur dans lequel une carte de la Palestine semble logée. Le slogan au-dessus de la pièce résume les sentiments de beaucoup en Palestine : "Il vaut mieux mourir que d’affronter l'enfer de ces prisons."

Et partout la Palestine, l’enfermement en prison est devenu de plus en plus la norme pour les ouvriers, les paysans, les professeurs, les étudiants, les hommes et les femmes ordinaires de tous âges et de toutes affiliations politiques.
Les Palestiniens enfermés dans la Bande de Gaza.
Les Palestiniens enfermés à Al-Mawarna, un ghetto dans le plus grand ghetto qu’est Gaza.
Les Palestiniens pris dans les nouvelles enclaves créées par le mur, comme Qalqilya, derrière Um al Rihan, les villages autour de Baqa ash Sharqiya, les villages palestiniens près de la colonie d'Alfe Menashe, la population d'Azzun Atma et ainsi de suite.
Pour ne pas mentionner tous les villages en Palestine qui sont fermés au trafic des véhicules et coupés des principaux centres urbains de la Cisjordanie et de Gaza.
Les Palestiniens emprisonnés dans « des zones militaires fermées », dans les secteurs désignés comme 'secteur C' lors d’Oslo;
Les Palestiniens emprisonnés dans la vieille ville d’Hébron;
Les Palestiniens emprisonnés dans Naplouse sous bouclage;
Les Palestiniens emprisonnés dans leurs maisons pendant les couvre-feux;
Les Palestiniens détenus aux points de contrôle;
Les Palestiniens en prison, y compris des centaines d’enfants prisonniers comme Tareq Mahazne (12 ans), Jafa Dararme (12 ans) et Ibrahim Sawafta (14 ans) qui ont été arrêtés le 26 février de cette année dans la région de Tubas.


On rencontre difficilement un homme en Palestine qui n'a pas été en prison à un certain moment de sa vie.
Il y a 600.000 histoires identiques depuis le début de l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza en 1967.
Il y a également plus de 3,8 millions de ces histoires de réfugiés palestiniens nettoyés éthniquement de leurs maisons en 1948, qui souffrent d'une autre forme d'emprisonnement, incapables de retourner dans leurs villages, leurs terres, leurs pâturages, leurs maisons qu'ils ont été forcés d'abandonner à la hâte.

C’est peut-être pourquoi Hussam Khader est une telle menace pour les Israéliens !
Un réfugié, de Balata, un critique de l’occupation, et quelqu'un qui persiste dans la résistance même en prison ou devant un tribunal militaire qui est une parodie de la justice.
En ce moment, il y a 7 500 cas comme celui d’Hussam.

Tôt jeudi matin, 5 hommes de plus ont été arrêtés dans le camp de réfugiés de Balata, trois frères de la famille Assi et deux membres de la famille Harb/Odi.

L’un d'eux était Ahmed Ismail Harb Odi (21 ans) qui n'avait jamais passé un jour en prison, comme nous l’a expliqué son père en état de choc.
Ahmed était un étudiant en comptabilité à l'université ouverte d'Al-Quds à Naplouse.
Il était également un organisateur local de la Youth Charitable Care Society (YCCS), qui cherchait à améliorer l'état de la jeunesse dans le camp. Si aider à installer des espaces sûrs tel qu’un Internet Café pour femmes seulement, travailler à créer un centre de la jeunesse et traîner avec des amis ou étudier, est une menace à la sécurité, Ahmed semble s’être affiché comme un « agitateur » typique sous un régime d’occupation.
Cela fait maintenant plus de quatre jours depuis son arrestation et sa famille et ses amis ont à peine entendu un mot de leur fils et ne savent pas pourquoi il a été arrêté. Ils savent seulement qu'il est détenu au Centre de détention de Huwwara.


Il y a plus de statistiques comme celles citées ci-dessus, plus de chiffres, plus d'additions au calcul de l’occupation.

Chaque chiffre est lié à un visage humain, à un nom, à une histoire. Ce sont les histoires de l’occupation, et elles continuent chaque jour.

"Si vous vous rappelez de toute la peine, vous souffrirez toute votre vie," dit un étudiant de l'université ouverte d'Al-Quds à Jénine que nous nous avons croisé dans un magasin de falafel convenablement appelé « nouveau Beyrouth ».

Amira Hass a récemment écrit que les mots nous manquaient, que la fiction surréaliste qu’est la vie en Palestine ne peut pas être transmise à ceux qui ne l'ont jamais goûtée, qui n’ont jamais eu à conduire à travers les oliveraies, et en dehors des routes principales, avec les lumières éteintes aux heures sombres de la nuit afin d’emmener son épouse à la ville la plus proche pour que votre enfant puisse naître.


C'est une réalité dans laquelle Umm Mohamed adopte les internationaux qui visitent sa maison avec grand soin et de généreuses portions de pain fait maison, de fromage et de confiture parce qu'elle n'a pas vu ses propres enfants depuis des mois, bien qu'ils étudient à moins de 10 kilomètres de distance.

Une réalité dans laquelle Wadi-EL-Bidan, la voie principale de communication de Taluza à Nablus, est isolée par des monticules de la terre, la chaussée écrasée et gardée par un tank.

Une réalité dans laquelle un nouveau mirador, une colonie, une base militaire, une route de contournement, un mur, une porte, une barrière sont construits, érigés, agrandis, déplacés, etc. chaque jour afin de vous enserrer encore plus à l’intérieur.

Une réalité en laquelle ces processus sont nommés 'démocratiques ', 'visionnaires', 'modérés » et 'pacifiques' ?

Une réalité dans laquelle une résistance en grande partie non-violente à ces actes est appelée comme 'terroriste 'et dans laquelle ceux qui s'opposent à cette politique sont stigmatisés avec toutes sortes d'épithètes.

Une réalité dans laquelle les patients de la clinique de la Croix Rouge à Tubas se pèsent sur une balance qui est perforée par un trou de balle, dans laquelle les balles surviennent aussi fréquemment que changer de rue, et dans laquelle les rues sont transpercées par les marques des chenilles de tanks.


C'est dommage que l’on donne actuellement plus d'espace à ces justifications de domination coloniale qu’aux voix demandant la justice au cours des débats publics en Amérique du Nord et en Europe.
Une Justice non seulement pour la Palestine, mais pour le Sud tout entier, qui est systématiquement dépouillé des fruits de centaines d'années de lutte anti-coloniale et refusé de toute forme signicative d'autodétermination.

C'est une tragédie qui frappe non seulement la Palestine, mais se répand également dans les logiques de l’occupation en Irak, en Afghanistan, en Bosnie, au Kosovo, et à Haïti.

C'est une logique qui informe sur les relations entre le conquérant et le conquis, entre l'oppresseur et l’opprimé.

C'est une logique dans laquelle les habitants autochtones des sociétés coloniales doivent être empêchés d'avoir une véritable liberté, dans laquelle les logiques de la ségrégation dominent, dans lequel un système de capitalisme mondial et sans frontière impose un ordre régimenté d’emprisonnement et de militarisation sur une masse bourgeonnante et appauvrie de l'humanité.

Ce sont ces logiques qui se jouent ici, avec leurs particularités régionales et leurs leçons universellement appropriées. Tout ces tragédies peuvent-elles être enregistrées sans une note de doute parmi leurs auteurs ?

Etant donné les actuelles « initiatives de paix » et les projets "Pacificateurs" sur la table, des initiatives qui ne donnent aucune chance à une véritable autodétermination palestinienne, qui ont eu pour conséquence les invasions de l'Irak, le renversement d'Aristide, le silence de la Gauche pendant le génocide soutenu par les Américains au DR Congo, on peut seulement faire une pause et se demander de quoi auraient besoin les prochaines étapes vers une contruction d’une véritable solidarité internationale qui pourrait contenir cette offensive menaçante.
Alors que les logiques coloniales qui ont averti de la dépossession des Palestiniens dans la première partie du 20ème siècle sont rétablies et mondialisées, l'appel pour mondialiser l'Intifada n'a jamais été plus urgent....

Source : www.palsolidarity.org

Traduction : MG pour ISM-France

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