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Palestine -

Comment conjurer le risque d'une perpétuelle soumission à l'Etat d'Israël

Par

Ce texte que feu Edward Saïd a écrit en 1993, n’a rien perdu de son actualité. Sa relecture peut nous aider à ne pas retomber dans les illusions et les erreurs d’analyses qui ont entouré les accords d’Oslo. Ce n’est pas exagéré de croire que les imposteurs qui refont surface autour de l’initiative de Genève, n’ont jamais quitté la scène. Silvia Cattori

Ecrivain d'origine palestinienne en exil aux Etats-Unis, Edward W. Said a été membre du Conseil national de l'OLP de 1977 à 1991 et il a participé aux efforts de paix. Pour lui, l'accord du 13 septembre 1993 est l'acte de reddition des Palestiniens. Afin de rompre l'inégal rapport de forces qui a conduit à un tel accord, la partie palestinienne doit d'abord se plier, en son sein, à l'exigence démocratique et abandonner une position minimaliste qui divise le peuple et affaiblit la résistance. Alors, de nouvelles négociations mèneront à une véritable réconciliation.

Rien ne transparaissait, dans la grande célébration médiatique du 13 septembre à Washington, de la capitulation infligée aux Palestiniens. En échange d'une poignée de main, ceux-ci voyaient soudain la plupart de leurs droits mis en suspens.
Le rituel de la réconciliation entre MM. Arafat et Rabin, sous l'oeil impérial du président américain, a éclipsé une vérité qui pourtant doit être dite: l'accord est un acte de reddition du peuple palestinien, une sorte de traité de Versailles.

Le pire, c'est qu'au cours des quinze dernières années, l'Organisation de la Palestine (OLP) aurait pu à maintes reprises négocier un accord meilleur que ce plan Allon (1) nouvelle manière, et à de moindres concessions unilatérales. Mais sa direction - elle ne le sait que trop - avait refusé toutes les ouvertures qui lui en offraient l'occasion.



Pour prendre un exemple, à la fin des années 70, le secrétaire d'Etat américain Cyrus Vance m'avait demandé de convaincre M. Arafat d'accepter la résolution 242 du Consel de sécurité assortie d'une réserve formulée par l'OLP (et acceptée par les Etats-Unis) pour insister sur les droits nationaux du peuple palestinien et sur l'autodétermination. M. Vance affirma que les Etats-Unis reconnaîtraient immédiatement l'OLP et inaugureraient des négociations entre la centrale palestinienne et Israël. M. Arafat a catégoriquement repoussé cette offre, comme, plus tard, il a refusé de saisir d'autres occasions similaires.



Vint la guerre du Golfe et les désastreuses prises de position de l'OLP qui lui firent perdre encore du terrain. A l'exception des décisions du Conseil national palestinien de 1988 (2), les bénéfices de l'Intifada ont été dilapidés. Ceux qui se font aujourd'hui les avocats du récent accord prétendent qu'il n'y avait pas d'autre choix: mais ils oublient de dire que s'ils en sont arrivés là, c'est pour avoir refusé toutes les autres possibilités.



L'autodétermination n'a de sens que si elle conduit les Palestiniens à la liberté, à la souveraineté et à l'égalité et non à une perpétuelle soumission à Israël. Beaucoup de responsables et d'intellectuels palestiniens persistent à présenter l'accord intérimaire comme une "victoire". M. Nabil Chaath, conseiller politique de M. Arafat, a même parlé à ce propos de "complète parité" entre Israéliens et Palestiniens. Mais c'est M. James Baker, ancien secrétaire d'Etat américain, qui a déclaré, dans un entretien télévisé, qu'Israël n'a rien cédé, à part sa reconnaissance de "l'OLP comme représentant du peuple palestinien". A la BBC, le 14 septembre, l'écrivain Amos Oz, qui se range parmi les "colombes" en Israël, a reconnu que "cela est la deuxième grande victoire du sionisme dans toute son histoire".



En revanche, la reconnaissance du droit d'Israël à exister implique une série de renoncements de la part des Palestiniens: renonciation à la charte de l'OLP, à la violence et au terrorisme et à toutes les résolutions de l'ONU, à l'exception des 242 et 338 qui ne disent pas un mot des Palestiniens, de leurs droits ou de leurs aspirations.

Car, on le sait, bien d'autres résolutions ont été votées qui, depuis 1948, reconnaissent des droits aux réfugiés de Palestine, notamment le droit au retour ou à des compensations. D'autres textes, en d'autres enceintes internationales - Communauté européenne, Mouvement des non-alignés, Organisation de la conférence islamique, Ligue arabe et, à nouveau, ONU - ont dénoncé les colonies de peuplement israéliennes, les annexions de Jérusalem et du Golan, les crimes commis par l'occupant.



L'Intifada n'incarnait pas le terrorisme et la violence, mais le droit de résister. Il semblerait que l'OLP y a renoncé, bien qu'Israël continue d'occuper la Cisjordanie et Gaza. Dans le document signé le 13 septembre, la sécurité d'Israël est la considération dominante, alors qu'il n'y est pas question du sort des Palestiniens victimes des incursions israéliennes.

Dans sa conférence de presse du même jour, M. Rabin a tenu des propos sans équivoque quant au maintien de la souveraineté israélienne sur le Jourdain, les frontières avec l'Egypte et la Jordanie, Jérusalem, les colonies de peuplement et les routes. Rien, dans l'accord, ne suggère que les Israéliens vont renoncer à leurs actes de violence contre les Palestiniens ou qu'ils indemniseront les victimes de leur politique depuis quarante-cinq ans, comme l'Irak a dû le faire après son retrait du Koweït.



Ni M. Yasser Arafat, ni ses proches compagnons de l'OLP qui rencontrèrent les Israéliens à Oslo n'ont jamais vu de leurs yeux ce qu'est une colonie israélienne. Il y en a maintenant plus de deux cents, principalement sur les collines, les promontoires et aux points stratégiques, à travers toute la Cisjordanie et Gaza. Sans doute nombre d'entre elles seront-elles démantelées, délaissées par leurs habitants. Mais les plus importantes ont été conçus pour rester.
Le système routier qui les relie à Israël rompt la continuité du territoire entre les grands centres de population palestiniens.
La superficie des terres accaparées par ces implantations ou frappées d'expropriation représente plus de 55 % des territoires occupés.
Le Grand Jérusalem, annexé par Israël, inclut une grande part de terrains pratiquement usurpés - au moins 25 % du total.
A Gaza, les dix-sept colonies juives accaparent au moins 30 % des terres.
En outre, Israël puise dans toutes les nappes phréatiques de Cisjordanie et prend 80 % de l'eau pour ses colonies ou même pour ses propres besoins - sans parler de la "zone de sécurité" dans le Sud du Liban.
Sur ces problèmes de la terre et de l'eau, les accords d'Oslo ne prévoient rien dans l'immédiat.



Qui plus est, ce sont les Israéliens qui détiennent toutes les informations permettant de dresser l'état des lieux, sans les avoir jamais communiquées aux Palestiniens - pas plus qu'ils ne partageaient avec eux les revenus des impôts extraordinairement élevés qu'ils leur ont fait payer pendant vingt-six ans. Certes, les Palestiniens avaient mis en place leurs propres commissions techniques (avec la participation de non-résidents). Mais c'est à se demander si la partie palestinienne aux négociations d'Oslo a tenu compte de leurs travaux.



En fait, tout se passe comme si les Palestiniens, loin d'être les victimes du sionisme, en étaient les agresseur invités à faire acte de contrition.

Faut-il balayer de la mémoire les dizaines de milliers de morts sous les bombes dans les camps, les hôpitaux et les écoles du Liban; l'expulsion de huit cent mille personnes en 1948 (dont les descendants se chiffrent à près de trois millions, pour la plupart des réfugiés sans patrie); la conquête des terres et des biens; la destruction de plus de quatre cents villages palestiniens (3); l'invasion du Liban et tous les ravages de l'occupation militaire pendant vingt-six ans...?

Faut-il oublier tout cela, pour n'assumer que la responsabilité des actes de terrorisme et de violence au motif qu'Israël a toujours réduit la résistance des Palestiniens à des actes de terrorisme et de violence?



Certes, la reconnaissance de l'OLP par Israël est un grand pas en avant. Mais en acceptant de remettre à plus tard, "au stade final des négociations", la discussion des problèmes de la terre et de la souveraineté, les Palestiniens ont fait peu de cas de leurs propres revendications - internationalement reconnues - sur la Cisjordanie et Gaza - qui désormais deviennent des "territoires disputés" ( "disputed territories") comme si les Israéliens avaient un droit égal sur eux.



Il semble que les Israéliens aient calculé qu'en laissant l'OLP se charger de la police à Gaza celle-ci se débarrasserait de son opposition – dont Hamas n'est qu'une composante. S'il en est ainsi, les Palestiniens sortiront fort affaiblis de la période intérimaire et il est à craindre qu'ils ne soient plus capables de contester les revendications israéliennes quand viendra la phase finale des négociations. Sans doute à dessein, le document d'Oslo ne prévoit pas de mécanisme particulier pour assurer le passage du statut intérimaire à un statut ultérieur: le statut intérimaire serait-il promis à devenir permanent?



Selon certains journalistes israéliens (4), M. Rabin négocierait dans les six prochains mois avec l'OLP un nouvel accord pour ajourner les élections et permettre ainsi à la centrale palestinienne de continuer à diriger les affaires. D'autre part, à deux reprises au moins l'été dernier, M. Arafat a fait allusion à son expérience du gouvernement datant des dix années pendant lesquelles il "contrôla" le Liban - mince réconfort pour les Libanais et les Palestiniens qui se souviennent de cette période. Et même si les élections devaient se tenir comme prévu, on ne voit pas comment cela se passerait concrètement, en l'absence d'institutions démocratiques enracinées dans la population.
On a pu lire dans la presse arabe (5) des informations non confirmées selon lesquelles l'OLP avait déjà désigné des ministres faisant partie de son cercle restreint à Tunis et des ministres adjoints choisis parmi ses fidèles en Cisjordanie et à Gaza (le docteur Haydar Abdel Shafi a récusé une telle offre).
Quand on sait combien M. Arafat est jaloux de son pouvoir et du contrôle exclusif qu'il exerce sur les finances de l'OLP, la mise en place d'institutions vraiment représentatives paraît problématique.



Pour ce qui concerne les questions de sécurité intérieure et de développement, Israël et l'OLP sont maintenant sur la même longueur d'onde. Des membres de l'organisation palestinienne ou certains de ses conseillers ont, depuis plus d'un an, des contacts avec les services du Mossad (6) pour assurer la sécurité personnelle de M. Arafat, mais aussi pour organiser le maintien de l'ordre dans les territoires occupés car il est à prévoir que les manifestations de résistance ne sont pas près de cesser puisque l'armée israélienne ne va pas se retirer, mais seulement se redéployer.
D'autant que les colons israéliens resteront sous une juridiction distincte, celle du gouvernement militaire. Que les forces de l'OLP soient appelées à devenir les auxiliaires de la police israélienne n'est pas une perspective enthousiasmante pour les Palestiniens. Des soldats de l'Armée de libération de la Palestine ont refusé de suivre l'entraînement qui les préparait à des tâches de police à Gaza.



Dans la logique du nouvel ordre économique mondial


LA seule question qui fasse une quasi-unanimité parmi les Palestiniens est celle du développement, envisagée avec candeur. La communauté internationale et les Palestiniens de la diaspora apporteront une aide substantielle aux régions qui vont devenir autonomes. Mais tout ce qui concerne le développement de la Palestine devra passer par le canal d'un comité de coopération économique conjoint israélo-palestinien - encore qu'il soit stipulé dans l'accord d'Oslo que "les deux parties coopéreront, ensemble et de manière unilatérale, avec des partenaires régionaux et internationaux dans la réalisation de ces objectifs". Puissance économique et politique dominante dans la région, qui plus est allié des Etats-Unis, Israël continuera à contrôler l'économie palestinienne - ses industries manufacturières, ses exportations, ses travailleurs - qui dépend à 80 % de l'Etat juif. En face, à part un nombre restreint d'entrepreneurs et une petite classe moyenne, la population palestinienne est dans sa grande majorité composée de gens pauvres et sans terre, à la merci de leurs employeurs israéliens qui les utilisent comme main-d'oeuvre bon marché.



"Peu importe qu'il y ait un Etat palestinien, un statut d'autonomie ou un Etat jordano-palestinien", déclarait récemment M. Dov Lautman, président de l'Association des industriels israéliens.
Les frontières économiques entre Israël et les territoires doivent rester ouvertes (7)."
Israël a tous les atouts, y compris celui de ses relations avec les Etats-Unis, pour absorber l'économie palestinienne qui va ainsi se trouver dans un état de dépendance permanente. Et, au-delà, c'est la pénétration sur les marchés arabes qui devient possible.



Tel est le sens d'une évolution somme toute voulue et façonnée par les Etats-Unis, seule superpuissance désormais, pour qui le nouvel ordre mondial est fondé sur la domination économique de quelques multinationales géantes - quitte à accepter la paupérisation du plus grand nombre, y compris dans les pays riches. Parce que l'accord israélo-palestinien du 13 septembre s'inscrit dans cette logique, les populations que l'OLP est censée représenter ne doivent pas s'attendre, dans leur grande majorité, à beaucoup de miracles.



A juste titre, les résidents de Cisjordanie et de Gaza se réjouissent à la perspective de voir des soldats se replier et l'aide financière affluer. Mais cela ne signifiera pas la fin de l'occupation, ni de la dépendance économique, ni de l'insécurité. Reste aussi l'énorme problème des Palestiniens vivant en Jordanie, sans parler des centaines de milliers d'autres maintenus dans la condition de réfugiés sans patrie et sans égalité de droits en Syrie, au Liban, et partout ailleurs dans le monde arabe où les Etats "amis" les ont toujours soumis à une discrimination juridique.



La médiocrité des résultats obtenus à Oslo tient en grande partie à l'incompétence technique de l'équipe de l'OLP qui discutait en anglais – une langue que M. Arafat et ses émissaires connaissent mal - sans aucun conseiller juridique (les deux principaux experts juridiques de l'OLP avaient démissionné en signe de protestation; M. Arafat et ses subordonnés se trouvaient affronter seuls le corps au complet des experts du ministère israélien des affaires étrangères). Il sera difficile de réparer les dégâts si l'on ne fait appel, au moins sur le plan technique, à des gens capables de penser par eux-mêmes et qui ne soient pas les simples instruments d'une autorité palestinienne unique.



Il importe de ne pas se tromper sur la nature de l'Etat auquel on aspire. A quelles tyrannies, à quelles distorsions sociales et à quelles guerres intestines l'ordre postcolonial, sous la houlette des intérêts occidentaux, n'a-t-il pas conduit! Pas plus que le fondamentalisme religieux, le pur nationalisme n'apportera à lui seul la réponse aux nouvelles sociétés en quête de modernité. Si la Palestine doit échapper au sort du Liban ravagé par le chaos de la guerre civile, ou de l'Irak soumis à la tyrannie de M. Saddam Hussein, il est des questions spécifiques qui ne peuvent être éludées.



L'une d'elles tient à l'existence d'une diaspora palestinienne qui a porté M. Arafat et l'OLP au pouvoir, les y a maintenus et qui se voit maintenant condamnée à un exil permanent ou au statut de réfugié. Cette diaspora représente au moins la moitié de la population palestinienne et ses besoins, comme ses aspirations, ne peuvent être négligés, surtout si l'on attend d'elle, comme il le semble, un soutien politique et matériel pour Gaza et Jéricho. Une petite fraction de cette communauté en exil est représentée par les diverses organisations politiques "hébergées" en Syrie. Mais il existe un grand nombre de personnalités indépendantes (certaines, comme MM. Chafic El Hout et Mahmoud Darwich ont démissionné pour manifester leur désaccord) qui ont un rôle important à jouer pour exiger des changements dans la structure de l'OLP, tempérer le triomphalisme du moment, mobiliser le soutien des communautés palestiniennes partout dans le monde afin de faire progresser la marche vers l'autodétermination. Des communautés qui, au demeurant, sont restées singulièrement indifférentes depuis le début des négociations de Madrid.



Il est temps, alors, de procéder au recensement des Palestiniens, auquel les Etats-Unis, Israël et les Etats arabes se sont toujours opposés, de crainte qu'il ne favorise, malgré la dispersion et la dépossession, la constitution d'une nation. Ce serait là un acte d'accomplissement historique et politique, pour un peuple privé de sa souveraineté. Et, surtout, cela permettrait de donner corps à un besoin général de participation démocratique que l'alliance prématurée entre l'OLP et Israël est en train de court-circuiter.



Un tel recensement ferait inévitablement ressurgir la question du retour pour ceux des Palestiniens qui ne sont ni de Cisjordanie ni de Gaza. Bien qu'elle ait été différée jusqu'aux négociations sur le statut final, c'est une question qui demande à être examinée d'urgence. Déjà, le gouvernement libanais, par exemple, s'est mis à l'unisson de toutes les factions du pays qui se sont prononcées contre la citoyenneté et la naturalisation des trois cent cinquante mille à quatre cent mille Palestiniens résidant au Liban, pour la plupart des gens pauvres, sans Etat, installés là en permanence. Une situation semblable se développe en Jordanie et en Egypte (8). Or ce sont ces populations qui ont payé le prix le plus élevé. Israël appliquant le droit au retour pour chaque juif qui souhaite s'établir dans le pays, il en résulte une iniquité inouïe, qui perdure depuis un demi-siècle.



Il est exclu que tous les réfugiés de 1948 veuillent, ou puissent, retourner dans un Etat aussi exigu qu'un Etat palestinien. Mais comment imaginer qu'ils accepteront de s'entendre dire d'aller "s'installer" ailleurs, ou de renoncer à exprimer leur choix entre le droit au retour ou les compensations? Ni l'OLP, ni les personnalités palestiniennes indépendantes ne devraient attendre les négociations sur le statut final pour demander réparation au nom des victimes. A cet égard, alors que le gouvernement israélien souhaite que l'OLP ferme ses "pseudo-ambassades" à l'étranger, certains bureaux devraient pouvoir au contraire enregistrer les demandes de rapatriement, compensations ou autres formes de réparation.



Le droit inaliénable à la résistance


EN somme, il faut abandonner cet esprit de résignation qui a conduit aux accords d'Oslo pour chercher à conclure, avec les Arabes et les Israéliens, des accords parallèles qui répondent cette fois aux aspirations nationales, et non simplement municipales, des Palestiniens. Ce qui n'exclut pas la poursuite de la résistance, aussi longtemps que perdureront l'occupation et les colonies. L'une des questions passées sous silence jusqu'ici, soit dans les textes, soit dans les discours, est de savoir si, dans sa renonciation à la violence et au terrorisme, l'OLP inclut les actes de résistance non violente, la désobéissance civile, etc. Ce sont là les droits inaliénables de tout peuple privé de sa souveraineté et de son indépendance et ils doivent être défendus.



A en croire l'OLP, tous les opposants à l'accord d'Oslo seraient des terroristes ou des fondamentalistes. C'est oublier que Hamas et le Djihad islamique, hostiles à cet accord, certes, ont fait savoir à plusieurs reprises qu'ils n'useraient pas de la violence contre d'autres Palestiniens. Qui plus est, ils ne regroupent pas même un tiers des habitants de Gaza et de Cisjordanie . Quant aux groupes installés à Damas, ils paraissent frappés de paralysie, ou de discrédit (pour des raisons évidentes). Mais l'opposition ne se résume pas à ces mouvements, loin de là (9). Elle inclut des partisans du sécularisme, des gens engagés en faveur d'une solution pacifique au conflit israélo-palestinien et qui sont de vrais démocrates et des réalistes. Ces gens-là sont bien plus nombreux qu'on ne le croit. Leur préoccupation essentielle, pour l'heure, est la nécessaire réforme interne de l'OLP, qui va également mobiliser les populations et les partis des territoires occupés.



Enfin, aux Israéliens et aux Palestiniens qui partagent la même foi dans le droit égal des deux peuples à l'autodétermination, il reste à mener une bataille solidaire pour obtenir la disparition des iniquités - car il serait prématuré de conclure que les disparités vont s'estomper comme par enchantement. Les Palestiniens n'ont plus guère de choses à offrir, mais les Israéliens peuvent faire pression sur leur gouvernement pour qu'il mette fin à l'occupation, aux expropriations, aux implantations de colonies. Maintenant, la lutte contre la pauvreté, l'injustice et le militarisme peut être menée en commun sans que les Israéliens se croient obligés de mettre en avant leurs rituelles exigences de sécurité. Car s'ils n'éprouvent pas dès aujourd'hui un sentiment de sécurité, ils ne l'éprouveront jamais. Tel est le vrai test qui permettra de juger si la poignée de main symbolique du 13 septembre 1993 a marqué un premier pas vers la réconciliation et la paix véritable.



Notes:
(1) NDLR. - Le plan Allon proposait, en 1973, trois chaînes d'implantations israéliennes en Cisjordanie : le long du Jourdain, sur les collines de Samarie et le long de la route entre Jérusalem et Jéricho, afin d'assurer la sécurité d'Israël. Le reste de la Cisjordanie davait être allouée à la Jordanie, sauf Jéricho. Ce plan n'a jamais été officiellement approuvé, mais il s'est trouvé en partie réalisé de facto pour ce qui concerne les implantations de colonies.
(2) NDLR. - Lors de sa dix-neuvième session, tenue du 12 au 15 novembre à Alger, le Conseil national palestinien a notamment proclamé l'indépendance de l'Etat arabe de Palestine avec Jérusalem pour capitale.
(3) NDLR. - A propos de la destruction de villages arabe en 1948, lire Walid Khallid, All That Remains, The Palestinian Villages Occupied and Depopulated by Israël in 1948, The Institute for Palestine Studies, Washington, DC, 1992, 636 pages, 59 dollars.
(4) Cf., par exemple, Uzi Benziman dans Haaretz, 3 septembre 1993.
(5) Cf., entre autres, Al Hayat, Londres, 27 septembre 1993.
(6) Cf. Boston Globe, 17 septembre 1993.
(7) Lire l'étude d'Asher Davidi dans MERIP, n° 184, septembre-octobre 1993, Washington, DC.
(8) Cf. Christian Science Monitor, 28 septembre 1993.
(9) Lire à ce propos l'excellente étude de Mouin Rabbai dans Middle East International, 24 septembre 1993.
931101MD3635

Novembre 1993, page 4;5

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