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Palestine -

Analyse de la Situation Palestinienne sous Occupation dans les Secteurs Palestiniens de 1967

Par

> abusama@palnet.com

Khalil Nakhleh est écrivain et chercheur indépendant. Il peut être joint à l’adresse suivante : abusama@palnet.com.

Notre situation palestinienne actuelle peut être caractérisée franchement, comme l’avait décrite un observateur il y a plus de 20 ans, d'"atmosphère nationale fragmentée", où le pourcentage de pauvres est en augmentation constante et difficile à suivre, où nos pauvres rejoignent rapidement le groupe mondial insignifiant des "surplus de l'humanité", où la société palestinienne sous occupation glisse de façon très alarmante vers le règne des "forces de sécurité". Cela produit une tendance clairement visible vers l'émergence d'un "Etat policier", dépendant pour sa mise en place et sa continuité des financements extérieurs.

Analyse de la Situation Palestinienne sous Occupation dans les Secteurs Palestiniens de 1967


1. Notre situation palestinienne actuelle peut être caractérisée franchement, comme l’avait décrite un observateur il y a plus de 20 ans, d’"atmosphère nationale fragmentée", où plus de 80% se perçoivent comme souffrant de dépression et d'inquiétude, où le pourcentage des pauvres est en augmentation constante et difficile à suivre, où nos pauvres rejoignent rapidement le groupe mondial insignifiant des "surplus de l'humanité", où la corruption est perçue comme un signe de succès et comparée de façon positive à la société israélienne, où la société palestinienne sous occupation glisse de façon très alarmante vers le règne des "forces de sécurité", et où il y a un prolongement évident, prédéterminé, et approuvé au niveau politique de la compétence des tribunaux militaires sur les civils, et un total mépris pour la magistrature.

Cela produit une tendance clairement visible vers l'émergence d'un "Etat policier", dépendant pour sa mise en place et sa continuité des financements extérieurs.


2. La société palestinienne sous occupation est presque entièrement dépendante pour sa survie de l'aide extérieure et non de ses propres ressources et énergies productives : près d'un million de personnes vivent des salaires mensuels de l’Autorité Palestinienne, leur distribution à temps est conditionnée par la réception des dons de l'extérieur ; pas moins de 40 à 50.000 personnes vivent directement de leurs salaires dans des ONG financées depuis l’étranger, et plusieurs autres milliers vivent de projets des ONG, etc.
Ainsi, les moyens de subsistance de la plupart des Palestiniens qui ont des revenus "stables" sont hypothéqués par des décisions politiques extérieures et indépendantes de leur volonté.


3. En dépit des déclarations publiques proférant le contraire, rien n'avance réellement. Toutes les initiatives politiques officielles sont mortes en cours de route, ou, par euphémisme, "ont trébuché". Le citoyen moyen est bombardé quotidiennement de déclarations contradictoires qui conduisent à un état ambigu de confusion et de frustration.

Plus précisément :

• Les négociations avec Israël : tout indique qu’elles tournent autour de leur axe, sans aucun signe clair de résultat. Les déclarations publiques, qu’elles soient palestiniennes ou israéliennes, semblent pointer dans la même direction, c'est-à-dire, l’obtention du minimum des droits des Palestiniens n'a pas été approuvée, et le côté israélien n’est pas prêt à le faire.

• La tenue du très en retard 6ème Congrès national du Fatah (le dernier Congrès a eu lieu il y a 21 ans) : en dépit de l'actuel mouvement visible dans cette direction au cours des dernières années, la réalité est que sa tenue est empêchée par des approches et des luttes intestines à l’intérieur du Fatah qui sont liées au futur rôle et à l'identité du Fateh, et à la relation problématique et concurrente entre l'Autorité Palestinienne et l'OLP.

• La tenue du très discuté "dialogue national" entre le Fatah et le Hamas : cela ne va nulle part, non seulement en raison des approches opposées sur le type de "solutions" à la question palestinienne que préconise chaque partie, mais aussi en raison des camps opposés au sein de chaque groupe, et de leur alignement sur des parties extérieures concernées, par exemple, les États-Unis, Israël, les pays arabes, d'autres forces régionales, etc.


4. En conséquence, certaines lignes, ou alignements, d’affrontements potentiels, qui étaient toujours présentes, sont désormais cristallisées et exprimées, et font rapidement surface. Certaines de ces lignes de confrontations possibles qui sont susceptibles de faire surface plus clairement au cours de l'année à venir sont les suivantes :

• Une confrontation plus ouverte entre l'Autorité Palestinienne et l'OLP : depuis la décision adoptée par le Comité central de l'OLP, lors de sa réunion les 12-13 Octobre 1993 pour établir une Autorité Nationale Palestinienne subordonnée à l'OLP, les germes du conflit étaient présents. La relation actuelle s’est inversée. En effet, depuis Oslo, l'OLP a été de plus en plus marginalisée, ainsi que ses organes anachroniques et inefficaces. L'Autorité Palestinienne tente d’annexer l'OLP (comme l’a décrit un analyste).

• Une confrontation plus ouverte entre le gouvernement du Hamas dans la bande de Gaza et le gouvernement à Ramallah approuvé par le Fatah : l'accent sera mis plus particulièrement sur l'autorité et la légitimité du CPL et de la présidence, en particulier sur le mandant du président et le rôle du CPL et l'appel probable à de nouvelles élections.

• Une confrontation plus ouverte au sein de Fateh, en particulier entre la "jeune garde" et l’"ancien régime" dans le contexte du blocage de la convocation du 6ème Congrès National.

• Des alignements beaucoup plus clairs et potentiellement d'opposition entre d’une part, les capitalistes palestiniens en lice pour combler le vide politique soutenus par "leurs technocrates et intellectuels", et d’autre part, les groupes politiques factionnels traditionnels (par exemple, la récente attaque du Fatah contre Fayyad, etc.).

• Possibilité d'autres combinaisons.


5. Dans l'intervalle, le citoyen palestinien moyen, qui supporte chaque jour le poids de l'occupation militaire et économique, et les conséquences de la politique actuelle de collaboration avec l'occupation de l’Autorité Palestinienne, n'a pas de voix ou de soutien.
Avec leurs propres moyens et initiatives locales, ils essaient de résister, par une pratique quotidienne et par des moyens non violents, au vol de leurs terres et de l'eau, à leur incarcération dans des "entrepôts" (pour utiliser le terme de Jeff Halper), dans des enclaves créées par le mur de séparation (appelé avec bienveillance «barrière»), et dans les communautés et quartiers arabes de Jérusalem, et à la séparation généralement réussie de leur famille, des souvenirs historiques, des lieux de travail et des centres de services traditionnels, etc.
Ce sont ces gens qui, pour la plupart, n'ont pas confiance dans la «direction» politique, et quelle que soit la confiance qu'ils aient pu avoir à un moment donné, elle s’est rapidement érodée.
Cela s’est produit au moment où ils ont vu l’appareil politique et militaire de l'Autorité Palestinienne à Ramallah lancer une campagne agressive contre les associations caritatives qui fournissaient une aide sociale essentielle aux gens dans le besoin et fermer au moins 45 d'entre elles au cours des derniers mois, en réponse à la pression israélo-américaine (et le nombre est en augmentation).
Ce sont ces gens qui ont besoin d'une aide d'urgence en provenance des agences humanitaires pour survivre d'un jour sur l'autre.


6. Par conséquent, il existe d’effrayants signes visibles que le tissu social palestinien sous l'occupation se désintègre, et n'est pas protégé, si l'on en juge par la détérioration des valeurs culturelles, la montée de la criminalité, la disparition presque totale de la bienveillance traditionnelle, culturelle et sociale de ceux qui ont les moyens envers ceux qui ne les ont pas, la régression de la qualité de l'éducation et de la recherche, la primauté des intérêts individuels sur les intérêts nationaux collectifs, les signes de modes de consommation ostentatoire en remplacement des modes de production, etc.


7. Emergent de cette situation actuelle ce que l’on pourrait appeler, comme certains l’observent, des initiatives de la société civile, à la fois individuelles et collectives, qui mettent l'accent sur la nécessité d'une réflexion "stratégique" à plus long terme pour explorer des approches de "sauvetage" de la situation. On peut noter les suivantes :

La récente tentative ces derniers mois d’un vague groupe, appelé "Groupe de Stratégie de Palestine", pour "reprendre l'initiative" concernant l'avenir de l'actuel processus de négociations politiques et des solutions futures ;

• La récente tentative d’un groupe ad hoc de Jérusalémites gravement inquiets pour repenser «de façon stratégique» le statut et l'avenir des Arabes palestiniens de Jérusalem, en remplissant le vide du rôle officiel non-efficace et ambivalent de l'Autorité Palestinienne ;

• Les tentatives au cours des cinq dernières années par des militants politiques et sociaux palestiniens en Israël pour repenser "de façon stratégique" le statut et l'avenir de la minorité palestinienne en Israël, telles qu'elles sont exprimées dans des documents récemment publiés ;

• Les récents appels lancés par des organisations et des individus actifs de la société civile, à travers des conférences et des réseaux électroniques de la société civile, pour réorienter et axer les énergies populaires sur la distribution inégale, injuste et tordue des ressources financières, en mettant en évidence le sort de la population pauvre en Palestine.

• Ce qui est clair, c'est que les «tabous» politiques, économiques et sociaux traditionnellement acceptés (par exemple, la fonction et la continuité de l'Autorité Palestinienne, le maintien de l'occupation israélienne, le statut de Jérusalem, la totale dépendance à l'égard de l’aide politique extérieure pour la survie, la dette future, l'augmentation rapide du fossé entre la nouvelle élite politico-économique et les pauvres, etc) sont brisés et remis en cause par ces «initiatives».


8. Quels scénarios possibles pourraient générer cette situation ? Je m’attends aux suivants :

Des efforts investis par des intérêts politiques pour maintenir le statu quo ; ceci implique peut-être que :

- le Président Abbas pourrait décréter la dissolution du CLP contrôlé par le Hamas avant l’expiration de son mandat le 9 Janvier 2009 pour faire en sorte qu'il ne gêne pas la prolongation de son mandat ;

- Le "Comité Exécutif" de l’OLP pourrait prolonger son mandat de quelques mois supplémentaires (peut-être 6 mois) ;

- Il pourrait appeler à de nouvelles élections présidentielles et législatives, qui pourraient n’avoir lieu qu’en Cisjordanie (et à Jérusalem), et qui garantiraient au Fatah le contrôle du nouveau (mini) CLP du Fatah en Cisjordanie ;

- Le Hamas pourrait déclarer l'ensemble du processus illégitime et en violation de la Loi Fondamentale Palestinienne, et il pourrait ne pas reconnaitre la légitimité ni du président ni du "nouveau" CPL ;

- Il pourrait continuer à installer son emprise et son autorité dans la bande de Gaza, en élisant son propre président de "Gaza" et peut-être remanier le gouvernement ;

- Cela officialiserait, en effet, la division et la séparation entre la Cisjordanie et Gaza ;

- Suite à l’action israélienne de déclarer Gaza "territoire ennemi", le président basé à Ramallah pourrait déclarer Gaza "région rebelle", ou "gouvernement voyou", qui laisserait la porte ouverte à plus de sanctions et de répression, et une possible "ré-occupation" par l'armée israélienne, conjointement avec les forces de sécurité fidèles à Abbas ;

- Un tel scénario serait acceptable pour Israël et les États-Unis et, peut-être, pour l'Union Européenne.

- L'implication est, bien entendu, l'effondrement total de l’unité de l’ANP (Autorité Nationale Palestinienne), comme prévu dans les Accords d'Oslo, et son remplacement par deux mini-autorités : l’APR (Autorité Palestinienne de Ramallah) et l’APG (Autorité Palestinienne de Gaza).


Le Président répond aux préoccupations de la population pour la sauvegarde de l'unité nationale et écoute les mises en garde de certains États arabes en :

- Annonçant sa démission après l'Eid, et permet, en fait, au président du CPL emprisonné (Dr. Aziz Dweik, ndt) d’assumer son rôle en 2009, et de préparer de nouvelles élections présidentielles et législatives qui se tiendront en Janvier 2010, dans toutes les régions ;

- Dans le même temps, un nouveau gouvernement intérimaire de "professionnels" pourrait être formé et approuvé par le CPL contrôlé par le Hamas ;

- Cette approche sera soutenue par la population et par certains Etats arabes, alors que les États-Unis et Israël ainsi que certains dirigeants bien placés et corrompus du Fatah d’Oslo qui bénéficient illégitimement de la poursuite du statu quo s’y opposeront.


9. Quel que soit le scénario qui se matérialisera, une chose est claire : la pauvreté augmentera, plus de gens n'auront pas ou très peu de nourriture ; les revenus stables pourraient devenir rares ; les capitalistes palestiniens changeants et peu fiables partiront (avec leur capital) à la recherche d'autres environnements pour faire des bénéfices sûrs, etc. Cependant, le besoin immédiat et à court terme d'aide humanitaire et d’interventions de secours sera certainement surmonté.


10. Dans une telle situation, juxtaposer l'aide humanitaire à l’aide au "développement" est une équation artificielle. À moins que les organisations humanitaires s'engagent à modifier une situation militaire et politique généralisée afin de générer les conditions nécessaires pour le "développement durable", leur principale tâche et responsabilité, il me semble, est d'assurer la fourniture de l'aide humanitaire et de secours ( au sens large) au nombre en augmentation des communautés palestiniennes appauvries, marginalisées et incarcérées, qu'ils soient des réfugiés "officiels" ou non.


11. Dans ce processus, il est également clair que la responsabilité des organisations humanitaires est de faire en sorte que la fourniture de l'aide humanitaire ne soit pas elle-même un processus de corruption, et qu’elle ne corrompe pas ceux qui en bénéficient.

Source : http://www.kanaanonline.org/

Traduction : MG pour ISM

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