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ISM France - Archives 2001-2021

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Liban -

Barbouzes israéliens, syrophobie et une paix qui a du mal à percer

Par

On savait qu’il allait se produire quelque chose.
J’avais rencontré un vieux collègue journaliste, autour d’un café, samedi, et nous nous étions confié mutuellement qu’il y avait une ambiance nouvelle – menaçante – à Beyrouth.
Nous n’évoquions pas la vie hors de prix ni les sempiternelles histoires de corruption, mais le langage incendiaire dans lequel s’exprimait désormais la vie politique libanaise.

« Walid Jumblatt a intérêt à compter ses abattis », observa mon collègue. J’acquiesçai. Tout juste en janvier dernier, le dirigeant druze du Liban avait annoncé que c’était des « éléments » [sans doute : « ‘anâçir », ndt] du parti Baath syrien qui avaient trucidé son père, Kamal Junblatt, en 1975.



Que voilà des propos explosifs – et ces propos, Walid les a tenus devant un public chrétien maronite à l’Université Saint-Joseph ! La réponse, la semaine dernière, fut encore plus lourde de dangers. Le parti Baath a exigé de l’Etat libanais qu’il poursuive M. Junblatt pour diffamation et haute trahison.

Puis Omar Karaméh, le Premier ministre libanais insipide et outrageusement pro-syrien – qui succède à Rafiq Hariri – a affirmé que les représentants de l’opposition politique libanaise qui exigent le retrait de la Syrie du Liban sont en train de « travailler pour Israël ». D’autres ont utilisé le mot « Mossad », à la place du mot « Israël ». Au Liban, ce genre de discours conduit généralement à la déflagration.



Les élections à venir – accompagnée d’une tentative de charcutage électoral susceptible de priver les factions anti-syriennes d’une partie de leurs sièges parlementaires – ont eu le don d’aggraver la controverse déjà largement entamée par l’adoption au Conseil de Sécurité de l’ONU de la résolution 1559, principalement soutenue par les Etats-Unis et la France, et qui exige le retrait de toutes les troupes syriennes du Liban.



Bien sûr, on le sait, ces troupes sont venues ici, au Liban, en 1976, en vertu d’un accord de la Ligue Arabe permettant, espérait-on, de mettre fin à la guerre civile – ce qui ne se produisit malheureusement pas – et cet accord avait à l’époque été approuvé par le président Jimmy Carter, et aussi – pour partie – par Israël.

Mais l’accord signé après la guerre civile, en 1989, à Taïf [Arabie saoudite], préconisait un retrait des troupes syriennes dans la vallée de la Biqâ’, située dans la partie orientale du Liban, chose que la Syrie n’a pas fait. Ses protégés au Liban ont annoncé à grands cris qu’ils ne voulaient à aucun prix que les Syriens s’en aillent.



Le président français Jacques Chirac n’a cessé d’insister sur la nécessité de leur départ. Hariri était l’un des meilleurs amis de Chirac. Ils avaient même pris une bière ensemble dans le centre restauré de neuf de Beyrouth, lors de la dernière visite du président français au Liban. A l’époque : aucun garde du corps. Pas de sécurité. Mais les choses ont drôlement changé, depuis…



Voici quelques semaines, les Américains s’en sont mêlés, avertissant qu’ils ne tolèreraient aucune violence avant la tenue des élections libanaises – ce qui s’est passé hier a montré où les ennemis de l’Amérique se mettaient cet avertissement – et réitérant leur exigence d’un retrait de la Syrie. « Pas question, tant que toutes les autres résolutions de l’ONU n’auront pas été mises en application », a répliqué Emile Lahoud, le Président de la République libanaise, constamment opposé à M. Hariri et en permanence fidèle à la Syrie.



Les Israéliens doivent quitter la Cisjordanie avant que la Syrie ne parte du Liban.

Les chrétiens libanais, opposés à la Syrie, ont insisté sur la violation des accords de Ta’if par Damas – ce qui est exact.

Karaméh et Nabih Berri, président du Parlement, ont tenu une grande conférence afin de faire observer que les exigences des Américains et de l’opposition libanaise – comportant notamment le désarmement du Hizbollah – n’étaient rien d’autres que des politiques américaine et israélienne. Ce qui n’est pas faux non plus.



Dimanche dernier, des véhicules blindés libanais ont descendu la Corniche (front de mer) à Beyrouth. Je connais deux amis qui ont d’ores et déjà acheté de grandes quantités d’eau minérale en bouteilles.
L’un d’entre eux a acheté un nouveau générateur. Manœuvres de routine, allez-vous me dire ?
Précautions contre un été particulièrement brûlant, ou en vue des habituelles pannes du réseau électrique beyrouthin ? Va savoir, Charles…



Les Libanais n’ont plus le moindre appétit pour la guerre. Le conflit qui a pris fin en 1990 a détruit leurs familles et leurs domiciles, ôtant presque tout sens à leur vie. Une nouvelle génération est revenue, après avoir étudié à l’étranger, ambitieuse, irritée par le confessionnalisme impénitent de la vie officielle tout autant que par la présence militaire syrienne, pourtant considérablement réduite.

Mais les services du renseignement syrien sont bien encore là – leur QG est situé dans la ville d’Aanjar, dans l’est du Liban – et leur chasse aux espions israéliens et aux traîtres éventuels a tourné à l’obsession.


Dans ce sombre scénario, M. Hariri envisageait l’avenir avec confiance, ne voyant le mal nulle part et prétendant n’entendre aucun signe préoccupant.

On peut dès lors se demander quel rôle réel il jouait, dans l’opposition ?

Etait-il ce simple observateur désintéressé, regardant avec condescendance depuis la terrasse de son palais les petits nains de la politique libanaise en train de se chamailler autour de frontières politiques charcutées ?

Ou bien avait-il d’autres ambitions ?

Ce qui s’est passé hier a montré que quelqu’un, quelque part, pensait que tel était le cas…

Source : http://news.independent.co.uk/world/fisk/story.jsp?story=611211

Traduction : Marcel Charbonnier

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