Israël - 18 décembre 2003

Des attaques verbales contre les Arabes israéliens à la Conférence d’Herzliya

Par Yair Ettinger

Dans un bref discours intitulé "Apprendre de l’Iran et de l’Egypte", Dr. Yitzhak Ravid, un important chercheur de Rafael, l’Autorité israélienne de Développement de l’Armement, a proposé que l’Etat conduise une politique rigoureuse de planning familial en direction de sa population musulmane, déclarant que "les salles d’accouchement de l’hopital Soroka de Be’er Sheva se sont transformées en usines pour la production d’une population arriérée."

Les orateurs de la Conférence d’Herzliya concernant les questions de sécurité sont revenus jeudi sur les commentaires controversés tenus la veille par le ministre des Finances, Benjamin Netanyahu. Ce dernier avait affirmé que les Arabes israéliens constituaient une menace démographique pour le pays.

Dans un bref discours intitulé "Apprendre de l’Iran et de l’Egypte", Dr. Yitzhak Ravid, un important chercheur de Rafael, l’Autorité israélienne de Développement de l’Armement, a proposé que l’Etat conduise une politique rigoureuse de planning familial en direction de sa population musulmane, déclarant que "les salles d’accouchement de l’hopital Soroka de Be’er Sheva se sont transformées en usines pour la production d’une population arriérée."

Mais le général de brigade Uzi Dayan a nié jeudi que les citoyens de l’Etat constitueraient un jour une menace démographique et a averti que les problèmes principaux résidaient dans les relations entre les Juifs et les Arabes et le manque de cohésion sociale.

Les remarques de Netanyahu ont suscité de vives critiques, les plus virulentes provenant des rangs des députés de gauche et d’un groupe de défense des droits civils.


"La bombe démographique de Netanyahu est nauséabonde et raciste", a dit le député Ahmed Tibi (Hadash). "Dans peu de temps, Netanyahu et ses sbires placeront des barrages routiers à l’entrée des villages arabes pour lier les trompes des femmes arabes et les asperger de spermicide."

Lors de la conférence, Netanyahu a dit qu’il ne se sentait pas vraiment concerné par le problème démographique posé par les Palestiniens et qu’Israël finirait par abandonner son contrôle sur les terres où les Palestiniens vivent. Il a ajouté qu’il ne pouvait imaginer un avenir dans lequel "des Israéliens sensés" essaieraient de faire des Palestiniens soit des citoyens israéliens, soit "des sujets réduits en esclavage."

Au contraire, le ministre des Finances a reproché aux Arabes israéliens de déséquilibrer la balance démographique israélienne et a indiqué que si le pourcentage des citoyens arabes dépassait les 20% actuels, Israël ne pourrait pas rester à la fois juif et démocratique.

"S’il y a un problème démographique, et il y en a un, il concerne les Arabes israéliens qui vont rester des citoyens israéliens", a dit Netanyahu, ajoutant qu’une économie solide était nécessaire pour attirer des immigrants juifs. Sur 6,6 millions de citoyens israéliens, environ 1,3 millions sont arabes. Trois autres millions d’Arabes vivent en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.


L’Association israélienne pour les Droits Civils a indiqué s’être plainte par lettre auprès de Netanyahu pour ses propos.

"Les commentaires de ce genre attisent les flammes de la haine, du racisme et de la discrimination qui sont la réalité quotidienne des citoyens arabes israéliens et sape la confiance élémentaire qui cimente une société démocratique", a déclaré l’organisation.


Les Arabes israéliens se plaignent de subir une discrimination de la part des autorités dans l’attribution des fonds publics, en particulier concernant les collectivités locales et l’éducation. Les chiffres du chômage et de la pauvreté sont plus élevés parmi les arabes israéliens que chez les Juifs.

Radio Israël a rapporté mercredi soir que le ministre du Commerce et de l’Industrie, Ehud Olmert, avait défendu les commentaires que certains députés ont qualifié de racistes, en disant que Netanyahu avait mis le doigt sur un problème démographique existant mais que le problème le plus important résidait "entre le Jourdain et la mer Méditerranée."


Le député Azni Bishara de Balad (Alliance Démocratique Nationale) a dit qu’accuser les habitants d’origine d’un territoire de constituer un problème démographique serait considéré dans n’importe quel pays comme une remarque raciste.

"Personne dans le monde n’aime entendre que son existence même pose un problème démographique", a déclaré Bishara sur les ondes de la Radio militaire. "Même dans un pays en voie de développement, on trouverait cela raciste."


Le député Issam Makhoul (Hadash) a déclaré que Netanyahu était un "danger raciste pour la démocratie".

"Un dirigeant qui considère que 20% de la population d’Israël est une menace démographique et les traite comme un problème existentiel, est lui-même un danger raciste pour la démocratie, la rectitude et l’autorité de la loi. Il devrait être démis de ses fonctions pour le bien des deux peuples", a t-il dit.


Le député Talab a-Sana (Liste Arabe Unie) a demandé : "Comment Netanyahu réagirait si quelqu’un en Europe ou aux Etats-Unis disait que le taux de reproduction des Juifs Haredi est un problème démographique ? Nétanyahu applique deux mesures."


Yossi Sarid (Meretz) a dit que Netanyahu avait mis en marche une détérioration irrévocable des relations entre les Juifs israéliens et les Arabes israéliens.

Sarid a ajouté qu’il était stupéfiant de voir comment "les grands dirigeants pouvaient se révéler de petits fanatiques. Le problème palestinien dans les territoires n’a pas encore été résolu et déjà certains insistent pour créer un problème avec les Arabes israéliens".

Selon Sarid, "à Herzliya, Netanyahu a versé un réservoir d’huile sur le feu des relations entre les citoyens juifs et arabes en Israël et un millier de pompiers n’arriverait pas à éteindre le feu allumé par un homme peu sérieux".


Netanyahu a averti qu’une majorité juive était nécessaire pour qu’Israël reste à la fois juif et démocratique. "Si leur nombre atteint 35-40% alors l’Etat juif sera aboli", a t-il dit. Il a également déclaré que si le taux de population arabe demeurait à 20%, mais que les relations étaient tendues et empreintes de violence, alors le tissu démocratique de l’Etat serait détérioré.

Selon lui, l’économie est le facteur le plus important qui poussera les Juifs à émigrer vers Israël. "Ca me rend fou de voir que grâce aux impôts peu élevés, un flux de capitaux s’est créé à Moscou. Si nous voulons que les Juifs viennent ici, nous devons avoir une économie prospère et dynamique. Si nous voulons que les Arabes israéliens soient intégrés, nous devons avoir une économie prospère et dynamique."

Il a dit qu’il était nécessaire d’améliorer le niveau de l’enseignement, surtout pour les citoyens arabes. Netanyahu a ajouté que le Mur de séparation aiderait aussi à empêcher un "excédent démographique" de Palestiniens venant des territoires.

Source : www.haaretzdaily.com/

Traduction : Ibtissem Almi