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Palestine - 20 février 2008
Par Cnaan Liphshiz
Un groupe d’intellectuels allemands en visite (en Palestine, ndt) ont exhorté Berlin, lundi dernier, de modifier ce qu’ils ont qualifié de soutien aveugle à Israël enraciné dans l’Holocauste, affirmant que la création de l’Etat d’Israël avait fait, des Palestiniens, des victimes de l’Holocauste nazi, eux aussi.
Ces quatre intellectuels, le Dr. Reiner Steniweg, le Pr. Gert Krell, le Pr. Georg Meggle et Jorg Becker, ont participé à un débat, lundi, au Netanya Academic College, consacré à l’avenir des relations germano-israéliennes. Ils font partie des vingt-cinq signataires d’une pétition à propos de cette problématique, qui avait circulé dans les médias allemands à la suite de la deuxième guerre du Liban.
D’après le manifeste de cette pétition, la responsabilité allemande vis-à-vis des Palestiniens est « un des aspects de l’Holocauste qui fait l’objet d’une attention très insuffisante ». Le document poursuit, arguant du fait que c’est l’Holocauste que l’Allemagne a perpétré qui a entraîné « la persistance de la souffrance au Moyen-Orient tout au long des six dernières décennies, et qui est devenue, aujourd’hui, absolument insupportable ».
Cette situation, toujours d’après la pétition intitulée « Amitié et Critique », en raison du fait que « sans l’Holocauste des juifs, la politique israélienne ne se considérerait pas fondée – voire contrainte – à piétiner les droits humains des Palestiniens et des Libanais. »
Sans l’Holocauste, ajoute le document, Israël n’aurait pas bénéficié du même soutien politique et matériel de la part des Etats-Unis. Les chercheurs nous ont déclaré (Haaretz) que cela vaut, aussi, pour le soutien de l’Allemagne à Israël.
« Ainsi, ce n’est pas seulement Israël qui est fondé à réclamer une considération spéciale de la part de l’Allemagne. En tant qu’Allemands, nous partageons non seulement une responsabilité vis-à-vis de l’existence d’Israël, mais aussi pour les conditions de vie du peuple palestinien », ont conclu les universitaires.
Les quatre signataires ont assisté au débat à l’invitation de l’ancien président de la Knesset, Dov Ben-Meir, qui en était l’organisateur. En décembre 2006, Ben-Mer a écrit ce qu’il a qualifié de « réponse amicale » à ce manifeste allemand, une réponse qu’il fit, à son tour, circuler dans les médias.
Dans sa réponse, Ben-Meir a déclaré que le manifeste originel reflétait une approche « simpliste ». Une des principales causes du conflit et de la situation qui est actuellement celle des Arabes et des Palestiniens, a-t-il dit, fut l’intransigeance, de leur part, et leur recours à la violence, au lieu du dialogue.
Concédant que l’attitude de l’Allemagne vis-à-vis d’Israël s’inscrit dans une « relation spéciale » fondée sur l’Holocauste, Ben-Meir a dit, durant le débat, que cette relation – qui comporta d’énormes réparations allemandes payées à Israël dans les années 1950 – était avant tout une question d’intérêt allemand, avant que d’être une question relevant de l’intérêt d’Israël.
« En acceptant de passer l’éponge sur le passé nazi de l’Allemagne, la nation juive a garanti à l’Allemagne un passeport d’entrée dans la famille des nations, après que l’Allemagne eut été considérée comme un pays paria, en raison de son passé nazi », a-t-il dit.
Le débat, qui attira près de cent-cinquante personnes, a eu lieu dans le cadre d’un panel de discussion. Les représentants des universitaires allemands étaient notamment le Pr Meggle, spécialiste de l’anthropologie philosophique à l’Université de Leipzig, et le Dr. Steinweg, chercheur à la branche de Linz du Centre Autrichien d’Etudes pour la Paix et la Résolution des Conflits [Austrian Study Center for Peace and Conflit Resolution].
Steinweg a indiqué que le groupe a réussi à éclaircir certains malentendus à propos du manifeste, lequel, d’après lui, avait été interprété erronément comme un appel à mettre un terme à la longue amitié germano-israélienne.
Les participants locaux à la tribune comprenaient un ex-ambassadeur d’Israël en Allemagne, Shimon Stein, la correspondante du journal allemand Die Zeit, gisela Dachs, ainsi que le professeur Moshe Zimmermann, directeur du Centre Koebner Minerva d’Histoire allemande, près l’Université Hébraïque de Jérusalem.
Zimmermann a déclaré que la question de l’Holocauste était actuellement l’objet d’une manipulation politique à la fois de la part d’Israël, et de l’Allemagne. « Les Israéliens essaient d’utiliser ce problème pour dépeindre les personnes qui critiquent Israël sous les traits d’antisémites. En même temps, ce manifeste est une tentative de manipulation des sentiments de culpabilité des Allemands vis-à-vis de l’Holocauste, en les projetant sur les Palestiniens », a-t-il argué.
« Si les Allemands veulent se sentir coupables de l’Holocauste, alors ils devraient plutôt s’en tenir aux Polonais, aux Hollandais et aux juifs. Inutile d’aller aussi loin que de se sentir coupable de ce qui est arrivé aux Palestiniens… », a-t-il ajouté.
Commentant la discussion animée qui s’ensuivit, Herman Bunz, du Friedrich Ebert Stiftung – l’organisation privée allemande à but non lucratif qui avait financé la visite des universitaires allemands – a dit aux orateurs : « Nous sommes en présence de la meilleure chance d’avoir entre nous un malentendu. Mais je ne saurais que vous conseiller de faire le contraire. »
« C’est une minorité, mais ils forment de jeunes esprits allemands, et nous ne pouvons pas nous permettre de repousser leurs critiques du revers de la main, au motif qu’elles seraient « antisémites ». Nous devons prendre ces critiques en compte », a déclaré M. Ben-Meir.
Source : Haaretz
Traduction : Marcel Charbonnier
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Cnaan Liphshiz
20 février 2008