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Palestine -

Gaza 2012 : La longue route de la Palestine vers la liberté

Par

Haidar Eid est professeur agrégé de littérature postcoloniale et postmoderne à l'Université al-Aqsa de Gaza et conseiller politique à Al-Shabaka, le réseau politique palestinien. La version en anglais de cet article a été publié sur Al-Akhbar le 12.12.2012.

"L'injustice est humaine ; mais plus humaine encore est la guerre contre l'injustice." Bertolt Brecht
La longue marche de la liberté en Afrique du Sud est marquée par deux immenses tragédies : le massacre de Sharpville en 1960 et le soulèvement de Soweto en 1976, qui ont ont galvanisé la résistance intérieure et international contre le régime d'apartheid. Ces évènements ont fini par aboutir à la libération longtemps attendue de Nelson Mandela et à la fin de l'un des systèmes les plus inhumains que le monde ait jamais connu.

Gaza 2012 : La longue route de la Palestine vers la liberté

Une écolière palestinienne passe devant des membres des brigades al-Qassam, la branche armée du Hamas, qui participent à un défilé anti-Israël à Gaza-ville, le 2 décembre 2012 (Photo : Reuters/Mohammed Salem)
Sans Sharpville et Soweto, parmi d'autres dates marquantes vers la victoire sur le colonialisme de peuplement, l'Afrique du Sud serait toujours dirigée par une minorité de colons blancs fanatiques prétendant accomplir la parole de [leur] Dieu.

La longue marche de la Palestine vers la liberté a traversé des événements similaires déchirants, de la Nakba de 1948 aux huit jours du dernier assaut sur Gaza.

Pour comprendre Gaza en 2012, il faut remonter à son origine en 1948. Deux tiers des Palestiniens de Gaza sont des réfugiés qui ont été expulsés de leurs cités, de leurs villes et de leurs villages en 1948. Dans son livre Après le dernier ciel, l'intellectuel palestinien défunt Edward Said affirmait que chaque Palestinien sait parfaitement bien que ce qui nous est arrivé au cours des six dernières décennies est "une conséquence directe de la destruction de notre société par Israël en 1948 (...)".

Le problème, argumentait-t-il, est qu'on ne peut pas tirer une ligne claire et directe de nos malheurs de 1948 à nos malheurs actuels, à cause de "la complexité de notre expérience".

Avec une superficie de 360 km², Gaza est le plus grand camp de réfugiés sur terre, un rappel de la Nakba qui continue. Ses habitants sont devenus les Palestiniens les plus indésirables, le cœur noir que personne ne veut voir, les "nègres" du sud des Etats-Unis, les indigènes noirs d'Afrique du Sud, la population en trop avec laquelle l'ashkénaze puissant, macho et blanc ne peut pas coexister.

D'où les appels à "aplatir" Gaza et à la "renvoyer au Moyen-Age."

Fin 2008-début 2009, pendant 22 jours, Gaza a été bombardée par des hélicoptères Apache et des F-16 qui ont tué plus de 1400 civils. Comme si ce n'était pas suffisant, Israël a décidé de revenir à Gaza en 2012 et a répété les mêmes crimes pendant 8 jours, tuant cette fois plus de 175 civils et en blessant 1399 autres. Ce sont des pertes massives pour une population d'un peu plus de 1,5 million de personnes.

Les frappes aériennes d'Israël, qui détruisent des infrastructures essentielles et terrifient la population civile, sont une forme de châtiment collectif contre le peuple palestinien. Et pire, elles constituent des crimes de guerre reconnus comme tels par le droit humanitaire international, en particulier les Conventions de Genève.

Pourtant, les crimes de guerre d'Israël restent systématiquement impunis. La "communauté internationale" officielle ne semble pas s'intéresser à la souffrance des Palestiniens indigènes. Le très admiré, "meilleur que Bush", président étatsunien, Obama pense qu'"Israël a le droit de se défendre". Le même droit ne semble pas s'appliquer aux Palestiniens.

De même, le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague pense que le Hamas est "le principal responsable" de la crise actuelle, et que c'est lui qui peut y mettre fin rapidement. Ceci malgré le siège mortel imposé à Gaza depuis plus de cinq ans, à tel point qu'Israël a même compté les calories pour limiter les quantités de nourriture qui entrent à Gaza pendant le blocus.

Le fait que les Palestiniens de Gaza ne soient pas nés de mères juives est une raison suffisante pour les priver de leurs droits à vivre à égalité avec les citoyens de l'Etat d'Israël. Par conséquent, comme les noirs autochtones d'Afrique du Sud, ils doivent être isolés dans un bantoustan, conformément aux termes d'Oslo. S'ils montrent la moindre résistance à ce plan, ils doivent être punis en transformant la Bande de Gaza entière en une prison à ciel ouvert.

Les Etats-Unis comme la Grande-Bretagne font preuve d'une ignorance délibérée et impensable devant la réalité brutale causée par Israël à Gaza. En conséquence du blocus d'Israël sur la plupart des importations et des exportations et autres mesures destinées à punir les Palestiniens, environ 70% de la population active de Gaza est au chômage ou sans salaire, selon les Nations-Unies, et environ 80% de ses habitants vivent dans une misère noire.

Obama et Hague l'ignorent-ils ?

Comme l'a dit Hamid Dabashi :
"Obama aime dire que les Israéliens ont le droit de se défendre. Mais ont-ils le droit de voler toujours plus de Palestine, de terroriser ses habitants et de continuer à consolider un Etat raciste d'apartheid ? L'Afrique du Sud avait-elle aussi le droit d'être un Etat raciste d'apartheid, l'Afrique du Sud avait-elle le droit de pratiquer l'esclavagisme, et l'Inde le fondamentalisme hindou ?"

La seule option pour les Palestiniens est de suivre le même chemin que la lutte sud-africaine. La campagne sud-africaine de l'intérieur visait à mobiliser les masses sur le terrain plutôt que les gouvernements indifférents du monde. Qu'auraient-ils pu espérer de gens comme Margaret Thatcher, Ronald Reagan et Helmut Kohl ? Ce fut aux Sud-Africains ordinaires et aux citoyens du monde de montrer leur rejet moral des crimes commis par l'affreux régime d'apartheid.

Dans la longue marche de l'Afrique du Sud vers la liberté, il n'y eut aucun compromis sur les droits fondamentaux de l'homme. Les tentatives de l'apartheid de stigmatiser "la violence noire" et "la haine intrinsèque" vis-à-vis de la civilisation occidentale et de la démocratie n'ont pas tenu la route.

De même, la société civile internationale, et quelques gouvernements, n'est pas dupe de la campagne israélienne de propagande où l'attaquant se transforme en victime. Au cours des années, les Palestiniens ont été complètement déshumanisés. A la place de Reagan et Thatcher, nous avons Obama et Hague, qui blâment la victime et condamnent la résistance à l'occupation, à la colonisation et à l'apartheid.

Mais les Sud-Africains n'ont pas attendu que l'administration américaine "change d'avis." La campagne mondiale BDS, lancée par des militants sud-africains anti-apartheid, conjuguée à une mobilisation massive intérieure sur le terrain, fut la recette pour la libération, loin de la façade d'"indépendance" fondée sur les identités ethniques. De même, l'appel palestinien au boycott, aux désinvestissements et aux sanctions a pris une énorme ampleur depuis 2005. Gaza 2012, comme Soweto 1976, ne peut pas être ignoré : une réponse de tous ceux qui croient en une humanité commune est indispensable.

Gaza 2012 a indéniablement donné une énorme impulsion au processus ; tous les Palestiniens, à l'intérieur et à l'extérieur de la Palestine historique, ont réalisé que "Oui, nous pouvons !" Nous ne sommes plus la partie la plus faible, la victime passive qui n'ose pas taper sur les parois d'une citerne, comme dans le livre de Gassan Kanafani Des hommes dans le soleil, mais nous nous identifions plutôt au personnage du livre d'Hamid Dabashi All That is Left To You, le héros palestinien qui décide d'agir.

Source : Al Akhbar

Traduction : MR pour ISM

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