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USA - 3 janvier 2010
Par Sana
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Cette expérience politique globale, avec Codepink, a été pour moi, en toute honnêteté, décevante et irritante.
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Clarifions un point. Pour autant que je déteste l’Egypte, l’Egypte n’occupe pas les territoires palestiniens. Israël oui. Je veux dire que dans une certaine mesure, en faisant tout ça, j’ai le sentiment que nous avons détourné d’Israël beaucoup de la pression parce que la couverture médiatique montre juste un groupe de gens qui manifestent au Caire, ce qui envoie le message que nous avons un problème avec l’Egypte pour le mal qu’elle fait, alors que nous étions ici pour attirer l’attention sur l’OCCUPATION ISRAELIENNE et l’Opération Plomb Durci, menée par ISRAEL il y a un an.
Je suis sûre qu’il va me falloir du temps pour traiter tout ce qui s’est passé au Caire avec la Gaza Freedom March au cours de la semaine dernière et plus, mais voici quelques-unes de mes pensées et sentiments initiaux. Bien sûr, ce ne sont que ma propre opinion et mes réflexions et elles ne sont sûrement pas les mêmes que celles des 1.300 autres personnes qui étaient au Caire. Ceci étant dit, allons-y :
Cette expérience politique globale, avec Codepink, a été pour moi, en toute honnêteté, décevante et irritante. Je vais être franche, je n’ai pas participé à beaucoup des protestations qui ont eu lieu au Caire parce que j’avais des questions sérieuses sur la manière dont tout était pris en main et la manière dont la marche semblait vraiment se désintégrer et s’effilocher quand chacun a réalisé que nos chances d’aller à Gaza étaient en fait proches de zéro. Dès la toute première réunion qui a eu lieu Place Tahrir, il a été demandé aux personnes qui devaient rester à Gaza plus longtemps (après le 2 janvier) de ne participer à aucune de ces manifestations parce que si nous arrivions à Gaza avec le moindre dossier ou histoire de problèmes avec les Egyptiens – ça nous empêcherait d’entrer. Les gens nous ont dit de nous « dissocier complètement de la marche » et que parce que l’Egypte n’est pas une démocratie, « rien de ce que nous faisons ne les fera changer d’avis » - ce qui a tristement fini par arriver en dépit du fait que les gens ont souvent manifesté, ont été parqués et même quelques-uns frappés. Morale de l’histoire : On n’est pas aux Etats-Unis, ils s’en fichent que vous soyez Américains, et nous n’avons pas fait des milliers de kilomètres pour protester en Egypte.
Cette pensée à part, il y a eu tellement de problèmes critiques sur la manière dont les choses ont été faites et les décisions prises que j’ai eu beaucoup de mal à participer à quoique ce soit organisé par la Marche au Caire.
J’ai le sentiment qu’il n’y a eu aucun aperçu sur la manière dont travaille le gouvernement égyptien, ou l’opinion publique égyptienne au sens large. On ne peut pas penser qu’un pays, qui a scrupuleusement suivi les consignes des USA et d’Israël, ferait un virage à 360° et ouvrirait les frontières dès qu’un groupe d’activistes se montrerait, quelque soit son importance numérique. Quiconque est quelque peu familier avec la politique de ce conflit sait que le rôle de l’Egypte à maintenir la souffrance palestinienne n’est pas un concept nouveau. Ceci dit, le fait que Codepink ne se soit pas préparé au revers très prévisible que l’Egypte a asséné en fermant ses frontières m’a laissée vraiment perplexe. Lorsque nous avons appris le lundi que les frontières seraient fermées et que personne n’entrerait, je me suis dit que c’était une position très attendue (en particulier après que des infos sur le mur d’acier de l’Egypte aient juste été diffusées) et que le comité directeur et d’autres avaient sûrement vu ça venir et que certainement des projets et stratégies de remplacement étaient prêts maintenant que l’Egypte avait abattu ses cartes. Mais un ou deux jours après, lorsque tout le monde a commencé à arriver et qu’il était temps de décider de ce que nous allions faire, il a semblé que ces petites actions fragmentées (la grève de la faim ici, le sit-in français là) étaient des actions que les groupes organisaient par eux-mêmes, avec à peine de soutien du collectif. Il n’y eut aucun message unitaire excepté « sortez dans les rues et protestez ». J’ai eu l’impression que chacun faisait ce qu’il voulait et qu’au lieu de se centrer sur l’occupation, on allait maintenant s’en prendre au gouvernement égyptien –dont je sais parfaitement ce qu’il fait et combien il contribue et ajoute à la souffrance palestinienne – et que ce n’était pas pour ça que j’étais venue ici.
Clarifions un point. Pour autant que je déteste l’Egypte, l’Egypte n’occupe pas les territoires palestiniens. Israël oui. Je veux dire que dans une certaine mesure, en faisant tout ça, j’ai le sentiment que nous avons détourné d’Israël beaucoup de la pression parce que la couverture médiatique montre juste un groupe de gens qui manifestent au Caire, ce qui envoie le message que nous avons un problème avec l’Egypte pour le mal qu’elle fait, alors que nous étions ici pour attirer l’attention sur l’OCCUPATION ISRAELIENNE et l’Opération Plomb Durci, menée par ISRAEL il y a un an. Pourquoi les gens criaient-ils « Free Egypt » pendant les manifestations ? Cela n’a pas de sens, nous n’avions aucune cible.
Je veux croire que la Gaza Freedom March a essayé de faire le mieux qu’elle pouvait, étant donné les circonstances, mais honnêtement cela a juste conduit à ce que beaucoup de gens pensent qu’ils avaient quelque chose à faire, n’importe quoi, puisque nous n’étions pas autorisés à aller à Gaza. Ne vous méprenez pas, je suis une fervente partisane de la résistance et des manifestations publiques, et même d’être arrêtée lorsque c’est nécessaire, etc. mais vous ne pouvez pas vous lancer là-dedans sans des tonnes de préparation, sans des tactiques propres d’escalade menant à une action directe de masse, et sans une base SOLIDE en Egypte (ressources, liens, avocats, etc.) pour les gens qui prennent ces risques. Sinon, vous finissez juste par avoir l’air d’un paquet d’étrangers stupides (pour la plupart Américains) qui protestent, s’assoient par terre, font une grève de la faim – pour quoi ? Nous sommes venus ici pour apporter de l’aide et nous tenir en solidarité avec la population palestinienne de Gaza – et si cela n’était pas possible, alors nous aurions pu mener toutes ces actions chez nous, dans nos villes où nous savons comment les choses fonctionnent, de quelles ressources nous disposons, et nous pouvons évaluer avec précision quel type de risque nous sommes prêts à prendre. Après ces quelques derniers jours, j’ai le sentiment que tout ce que nous avons fait, c’est agiter l’Egypte pendant un laps de temps bref, dépenser beaucoup d’argent alimentant l’économie de ce pays injuste et rendre plus dure la vie quotidienne de la population du Caire.
Lorsque nos projets sont tombés à l’eau et que nous avons compris que nous ne rentrerions pas à Gaza, il y aurait dû avoir une réunion/discussion de masse, avec un vote de tous les délégués sur ce que nous pensions être la meilleure chose à faire.
Mais quand on a demandé aux gens de réfléchir et de venir avec leurs idées, il y a eu de graves fragmentations et des gens comme les délégués français, qui occupaient la zone en face de l’Ambassade avaient le sentiment qu’ils n’étaient pas soutenus, ou des moments comme lorsque la délégation japonaise au complet est partie, le lendemain de son arrivée, pour la Cisjordanie . Je n’ai cessé pendant ces derniers jours de me demander « Mais nom de nom qu’est-ce qui se passe ici ? » et « Qu’est-ce que c’est que tout ça ? » Et pour dire la vérité, je ne sais toujours pas parce que je ne pense pas que la Gaza Freedom March le savait elle-même.
Le coup des « 100 personnes pour Gaza » fut lui aussi un autre fiasco qui n’a fait que davantage diviser ce groupe et notre travail.
Au départ, Codepink a accepté cette offre et lui a accordé foi puisque les femmes étaient allées voir et parler à Suzanne Mubarak. Elles ont proposé, dans un temps très court, une liste des personnes qui pourraient passer, ne réalisant pas que c’était une énorme erreur. Quelques heures après, elles se sont rendues compte que c’était une mauvaise idée, ont envoyé un message officiel disant qu’elles avaient « refusé » l’offre et pourtant, voilà que des gens continuaient à monter dans les autobus ? A nouveau, « qu’est-ce qui se passe ? »
Je réalise que cet article est un peu long, et que ce ne sont que quelques-unes de mes premières pensées au sujet de ces derniers jours. Mais c’est ce que je pense en ce moment : autant j’aimerais vraiment n’accuser que la dictature égyptienne répressive pour l’échec de la Gaza Freedom March, autant je crois que Codepink, et notre vieille arrogance/ignorance étrangère, ont beaucoup à voir avec cet échec. Tristement, le peuple palestinien est toujours sous occupation et je souhaite très bonne chance au convoi Viva Palestina qui semble avoir une meilleure prise que nous sur la manière de faire avec toute cette absurdité.
Source : Palestine ThinkTank
Traduction : MR pour ISM
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