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Palestine -

Le Hamas entre l'anniversaire de sa création et les défis de l'étape actuelle

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Ici l'article en arabe sur Al-Zaytouna Center. Il est paru, en arabe, sur Al-Jazeera.net le 23 décembre 2011.

Alors que le Hamas célèbre le vingt-quatrième anniversaire de sa création, le mouvement, qui est devenu partie intégrante de l'équation palestinienne, est confronté à de nombreux défis car il se trouve à un carrefour et doit s'adapter aux développements de l'étape actuelle. Au fil des ans, le Hamas a acquis de l'expérience et s'est mieux organisé. De plus, il a réussi à renforcer sa position au sein de la société palestinienne tout en établissant des relations politiques aux niveaux arabe, islamique et international. Cependant, il a maintenant la charge de davantage de responsabilités, il a davantage d'ennemis et il est confronté à davantage de critiques. En outre, les gens peuvent nourrir à son égard des attentes qui dépassent ses capacités ou bien lui poser des interrogations auxquelles il ne peut pas facilement répondre.

Le Hamas entre l'anniversaire de sa création et les défis de l'étape actuelle

Anniversaire de la fondation du Hamas, Gaza, 14 décembre 2011 (photos sur Occupied Palestine)
Huit caractéristiques du Hamas

Huit spécificités caractérisent le Hamas qu'on retrouve rarement dans une organisation ou un mouvement palestinien. La première est son discours islamique modéré en harmonie avec les convictions de la population et son appartenance culturelle. La deuxième est son grand dynamisme, qui lui a permis de travailler dans des circonstances difficiles et de retrouver force et vitalité après des coups rudes. La troisième est sa structure institutionnelle basée sur la Shura (démocratie consultative) qui lui a permis de maintenir sa cohésion et sa force et de renouveler sa direction et d'élire ses institutions démocratiques tous les quatre ans, indépendamment des circonstances. La quatrième est sa nature globale qui embrasse tous les aspects de la vie, politiques, sociaux, caritatifs, jihadistes et éducatifs. A cet égard, le Hamas a réussi à maintenir une communication continue avec les Palestiniens à différents niveaux. Cinquième caractéristique, le Hamas représente aux yeux des Palestiniens et des Arabes la lutte militaire exceptionnelle car il a été le fer de lance de la résistance, en particulier depuis 1993. La sixième caractéristique est sa grande popularité, en Palestine et à l'étranger, qu'il a pu confirmer dans différentes situations. En sept, le Hamas est généralement et comparativement caractérisé par son absence de corruption ce qui a conféré à ses ses dirigeants popularité et respect. La dernière et huitième caractéristique du Hamas est sa présence dans les pays arabes et islamiques, où il jouit là aussi de la popularité des masses qui lui assurent un soutien moral et financier, en particulier en tant qu'extension des Frères musulmans qui bénéficient d'un large soutien dans le monde arabe.

Les perspectives et les défis auxquels le Hamas doit faire face

Au 24ème anniversaire de sa fondation, le Hamas semble faire face à plusieurs perspectives qui nécessitent une lecture plus critique pour promouvoir sa vision et ses projets et répondre aux défis actuels. Cet article fera la lumière sur quatre de ces points.

Changement et Réforme

Le premier point est la difficile mise en œuvre de son programme Changement et Réforme, notamment sous occupation en Cisjordanie . Le Hamas a réussi jusqu'à présent à imposer ses conditions dans l'accord de réconciliation signé en Egypte le 3 mai 2011 qui conduirait à la formation d'un gouvernement d'unité nationale et à des élections générales en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Mais quelle est la conception du Hamas des notions de changement et de réformes ? Le slogan en lui-même est très séduisant ; cependant, le processus de réforme s'est avéré pratiquement impossible à mettre en œuvre sous l'occupation israélienne, en particulier par un mouvement de résistance comme le Hamas. Tant que l'occupation existe, elle pourra fermer les frontières, empêcher les importations et les exportations, restreindre la liberté de circulation des personnes et des marchandises et confisquer les fonds, en plus de détruire l'infrastructure palestinienne économique, agricole et éducative. En conséquence, si le parti administrant la Cisjordanie ne fait pas de concessions, il sera facile aux autorités d'occupation de contrecarrer ses efforts, fermer les institutions qu'il gère et mettre ses personnalités en prison. C'est ce qui s'est passé en 2006 et 2007.

Le Hamas sera donc en compétition avec le Fatah pour exercer une autorité susceptible de s'effondrer à tout moment, tandis que cette détention même du pouvoir pourrait bien annoncer le début de son déclin politique. De plus, la participation du Hamas aux prochaines élections peut avoir des conséquences négatives sur le mouvement, indépendamment du résultat. S'il les remporte, le mouvement sera assiégé et ses efforts seront ruinés ; s'il les perd, il ne pourra pas conserver ni le soutien populaire ni la "légitimité" obtenus en 2006. En conséquence, le Hamas sera la cible de la nouvelle autorité qui aura obtenu la légitimité populaire et constitutionnelle. Apparemment, Israël et les Etats-Unis ne semblent pas disposés, cette fois, à accepter que le Hamas participe aux élections, sauf s'ils sont à peu près sûrs qu'il les perde. Par ailleurs, de nombreux Palestiniens - même ceux qui ont de la sympathie pour le Hamas - pourraient être réticents à voter en faveur de ses candidats, sachant qu'il ne pourra pas appliquer son programme.

Le programme de la résistance

Le deuxième défi concerne la combinaison problématique entre résistance et pouvoir. Détenir le pouvoir, gérer la vie quotidienne des gens et mettre en œuvre des projets de développement nécessitent une pacification en plus d'un flux continu d'argent et la libre circulation des transports. En pratique, cela requiert une sorte de coexistence avec l'occupation et la suspension de tout projet de confrontation.

Ainsi, après avoir déclaré la fin de la hudna (la trêve) à la fin de 2005, le Hamas l'a renouvelée après avoir remporté les élections législatives en 2006, bien que cela ne lui ait pas épargné le siège ni les attaques israéliens. Par ailleurs, lorsque le Hamas a décidé de venger le massacre de Shati' et l'assassinat de la famille de Huda Ghalia, il a mené l'opération "Illusion dissipée" et capturé le caporal israélien Gilad Shalit. En conséquence, Israël a arrêté plusieurs députés Hamas, désorganisant ainsi le travail du Conseil législatif. Il a aussi arrêté plusieurs ministres du gouvernement Hamas et lancé les opérations "Pluie d'Eté" et "Nuages d'automne" contre Gaza, tuant 505 Palestiniens et blessant 2.205 autres.

Tandis que le gouvernement Hamas maintenait sa position de non-reconnaissance d'Israël, et confirmait le choix de la résistance et à le refus de l'Accord d'Oslo, il a dû faire face au siège israélien, arabe et international. De plus, Israël a coupé toutes formes de soutien financier et empêché tout transfert de fonds dans la Bande de Gaza, y compris le produit des taxes qu'il perçoit pour l'Autorité palestinienne.

Malgré la résilience démontrée par le Hamas pendant le siège et les attaques israéliens contre Gaza, le mouvement a petit à petit perdu sa capacité à lancer des attaques contre les Israéliens autour de Gaza et s’est trouvé au contraire en position de défense. Avant l'opération "Plomb Durci" (27.12.2008-18.01.2009), le Hamas refusait toute trêve et lançait des dizaines de missiles, quotidiennement, pour qu'Israël lève le siège de Gaza. Comme exemple c’est bien ce qui s'est passé à la fin de la trêve, le 19.12.2008 et les sept jours qui ont suivi. Cependant, malgré sa ténacité et son mépris de l'attaque israélienne, le Hamas a dû opérer une réorientation non déclarée de sa politique et se montrer prêt à une trêve si les Israéliens mettaient fin aux attaques. Ainsi, alors même que Gaza incarnait le bastion de la résistance, l'instinct de conservation s’avérait comme une nécessité urgente, indépendamment des justifications.

En conséquence, dans l’hypothèse où le Hamas resterait déterminé dans son engagement dans la voie de la résistance, il devra chercher à modifier la base sur laquelle l'Autorité palestinienne (AP) a été fondée et exhorter les Israéliens à respecter les choix du peuple palestinien. Néanmoins, cette alternative ne semble pas réaliste, pour le moment. L'autre alternative est que le Hamas transforme le rôle de l'AP, de sorte qu’au lieu de fournir des services à l'occupation israélienne elle devienne une autorité qui adopte le choix de la résistance. Ce qui, par voie de conséquence, signifierait l'effondrement du gouvernement actuel et laisserait aux Israéliens la gestion de la vie quotidienne de la population. Pendant ce temps, les factions palestiniennes s'occuperaient du travail politique, de la résistance à l'occupation et du soutien à l’endurance du peuple palestinien. C'est une alternative qui mérite l'attention mais elle est difficile à mettre en œuvre en l’absence d’un consensus national palestinien et de la conviction en la futilité de la poursuite du processus de paix en cours.

La réconciliation palestinienne

Le troisième défi est lié à la réconciliation palestinienne. Malgré la signature de l'accord, la relation entre le Hamas et le Fatah est fondée sur des bases fragiles , et reste entachée de craintes et de méfiance des deux côtés. De plus, il existe de véritables divergences au niveau idéologique et une disparité entre la vision islamique qui refuse de reconnaître Israël, et une autre vision laïque pragmatique qui accepte l'établissement d'un Etat palestinien sur 23% de la terre palestinienne et envisage de reconnaître Israël. En outre, un côté considère la résistance comme une priorité et continue de refuser les conditions du Quartet pour la levée du siège, tandis que l'autre estime que les conditions du Quartet ne sont pas gênantes et cherche la solution par un règlement pacifique et la voie de la négociation.

En conséquence, il y a désaccord sur le projet national et la détermination de ses priorités. Abu Mazen contrôle toujours le rythme du processus de réconciliation, et il le bloque depuis plus de sept mois (depuis mai 2011) par son insistance à nommer Salam Fayyad au poste de Premier ministre. De plus, il pourrait d'un point de vue politique utiliser la réconciliation pour faire avancer la candidature de l'Etat palestinien aux Nations Unies. Enfin, Abbas n'a commencé sérieusement à envisager la réconciliation, quà la suite de l'échec de la déclaration de l'Etat palestinien.

Pourtant, Abu Mazen insiste sur l'engagement dans le processus de paix alors qu’il sait pertinemment bien que les conditions américano-israéliennes entraveraient la formation d'un gouvernement d'unité nationale, s'opposeraient à l'élargissement du champ des libertés en Cisjordanie , empêcheraient la restructuration de l'appareil sécuritaire sur une base nationale acceptée par le Hamas et les autres factions de la résistance et, finalement, refuseraient toute coopération avec un gouvernement que le Hamas dirigerait ou auquel il participerait.

La réconciliation palestinienne est, en soi, une priorité nationale. Cependant, son utilisation tactique, le manque d'élan et d'un mécanisme pour sa mise en œuvre, outre le monopole d'Abu Mazen sur le contrôle de la procédure de réconciliation, font qu'Abu Mazen est plus à même de manœuvrer et de présenter des initiatives. Présider l'AP et l'OLP et jouir d'un soutien arabe et international lui donneraient la main et mettraient le Hamas sous la pression du changement de situation. A moins que le Hamas ne trouve un mécanisme efficace pour l'application de l'accord, il devra faire face à une réconciliation vide de contenu, pendant que l'autre côté mettra en œuvre ce qui l’arrange.

Les soulèvements arabes

Le quatrième défi a à voir avec les soulèvements arabes et leur impact sur la cause palestinienne et sur le Hamas. Ce défi comporte de mutiples implications et il impose au Hamas d’accorder davantage d'attention à la volonté populaire qui exige de surmonter les divisions, d'accueillir toutes les tendances et de construire une base commune sur le plan national .

A un autre niveau, la situation fournit au Hamas de nouveaux espaces stratégiques, plus proches de son idéologie et plus favorables à son programme de résistance. Ainsi, le développement des soulèvements arabes (en particulier en Egypte) pourrait freiner le processus de paix et écarter toute normalisation avec Israël. De plus, dans cette hypothèse, le siège de Gaza serait levé et le Hamas gagnerait des alliés arabes stratégiques qui soutiendraient la réconciliation et la réorganisation de la maison palestinienne sur de nouvelles bases ; le Hamas et les factions de la résistance seraient de fait impliquées dans l'OLP et dans le choix des priorités nationales. Néanmoins, le fait que les régimes arabes soient occupés par leurs affaires internes pourrait avoir des implications négatives sur la cause palestinienne. D'où la nécessité pour le Hamas de souligner l'importance de la dimension arabe et islamique des mouvements qui demandent le changement, en particulier ceux qui sont menés par la tendance islamique qui jouit d’une grande popularité dans la rue arabe et d'une relation forte avec le Hamas.

Il est possible que les soulèvements arabes jettent une ombre sur la relation entre le Hamas et la Syrie et le soi-disant axe de l'opposition. En fait, le Hamas a perdu une partie de son influence à l'étranger à cause des évènements qui ont lieu en Syrie. Le Hamas ne nie pas l'importance de sa relation avec la Syrie ni les services que le régime en place lui a fournis, ainsi qu'aux autres forces de la résistance.

En fait, cette relation a bénéficié aux deux côtés d'un point de vue stratégique et politique. Cependant, le Hamas est un mouvement populaire, avec une position de premier plan parmi le peuple syrien, qui le soutient. Mais son idéologie est fondamentalement basée sur la réalisation de la liberté, la dignité et le respect de la volonté du peuple. C'est pourquoi le Hamas a répété qu'il n'oublierait pas le soutien du régime, soulignant qu'il est contre toute conspiration qui viserait la Syrie et sa position de soutien à la résistance. Pourtant, le Hamas est aussi en faveur des justes revendications du peuple syrien. Il a exprimé le souhait, depuis le début, que le régime accomplisse des réformes sérieuses et permette aux Syriens d'exprimer leur volonté et a bien exprimé son soutien d’un transfert pacifique du pouvoir sans bain de sang et sans intervention étrangère. Néanmoins, le Hamas est maintenant contraint de déterminer sa position d'une manière décisive. Si le Hamas maintient sa position actuelle envers la Syrie, cela entraînerait des implications sur ses relations avec l'Iran et le Hezbollah.

Dans tous les cas, on attend du Hamas qu'il soutienne la volonté exprimée librement par le peuple syrien et la revendication d’un régime démocratique et transparent, qu’il condamne toute intervention étrangère, et qu’il se montre solidaire de la résistance qui reflète l'authenticité du peuple syrien.

Source : Al-Zaytouna Center for Studies and Consultations

Traduction : MR/NA pour ISM

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