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Moyen Orient - 13 janvier 2007
Par Clayton E. Swisher
Clayton E. Swisher, directeur des programmes du Middle East Institute à Washington DC, est l'auteur de "The Truth About Camp David" (New York, Nation Books: 2004) –"La Vérité au sujet de Camp David".
La tournée au Moyen Orient du Secrétaire d'Etat américain, Condoleezza Rice, qui commence aujourd'hui, aura pour but de convaincre les soi-disant "Etats Arabes modérés" que sont l'Egypte, la Jordanie et l'Arabie Saoudite que les Etats-Unis sont finalement prêts, après six ans de promesses, à aider les Palestiniens à obtenir leur Etat.
Photo MAANnews/Charlotte de Bellabre : Le Secrétaire d'Etat américain, Condoleeza Rice, et le président palestinien, Mahmoud Abbas, se serrent la main après une conference de presse à Ramallah, en Cisjordanie Occupée, le 14 novembre 2006.
Alors qu'une médiation américaine de bonne foi serait bien accueillie, de nombreux Arabes accueilleront sa visite avec un scepticisme bien fondé, en se demandant pourquoi une Administration Bush qui est apparemment aux pieds d'Israël désire maintenant retrousser ses manches et aider les Palestiniens.
Six ans de vides promesses ont considérablement multiplié le scepticisme.
Les appels peu de temps après le 11 septembre 2001, les attaques pour un état palestinien, la pression appliquée par le Président George W. Bush sur le premier ministre israélien de l'époque, Ariel Sharon, pour mettre fin au premier siège du quartier général de Yasser Arafat à Ramallah en 2002, et même la "Feuille de Route" pour la Paix de 2002 n'ont été vus que comme des tentatives pour calmer la communauté internationale, en particulier les Arabes modérés, afin de préparer à la guerre en Irak.
Sans coopération arabe, en particulier celles de la Jordanie et de l'Arabie Saoudite, les projets américains pour renverser Saddam Hussein auraient terminé dans la même fiole de formol puisque nous savons maintenant ce qui était réservé à la question palestinienne.
Dans les exemples où l'Administration Bush a choisi de se concentrer momentanément sur la Palestine, les médias internationaux se sont précipités pour applaudir l'engagement des Etats-Unis, en espérant qu'une implication active suivrait.
Ce fût particulièrement vrai à la suite des élections présidentielles de 2004.
On s'attendait à ce que Bush récompense ses alliés de la coalition qui étaient allés affronter l'Irak en créant l'Etat palestinien trop souvent promis.
Puis en 2004, est arrivée l'annonce de Sharon d'un désengagement unilatéral d'Israël de la Bande de Gaza en 2005 – une initiative qui a permis à l'Administration Bush de rester concentrée sur l'Irak tout en utilisant jusqu'à la corde les pressions créées par des propositions de paix virtuelles aux autochtones à la région, à savoir l'officieuse Initiative de Genève entre l'Israélien Yossi Beilin et le Palestinien Yasser Abed Rabbo.
Bien que la Feuille de Route réclamait au moins un Etat palestinien temporaire d'ici 2005, l'administration a calculé que le geste "généreux" de Sharon mettait la responsabilité sur les Palestiniens
Mais le monde Arabe craignait que "Gaza d'abord" devienne "Gaza en dernier". En novembre 2005, Rice est venue dans la région pour garantir l'Accord sur le Déplacement et l'Accès pour donner de l'air à Gaza.
L'accord n'est toujours pas appliqué, l'excuse étant cette fois que l'élection palestinienne de 2006 a mené à la victoire du Hamas, en dépit de la précédente promesse de l'Administration que la recherche de la démocratie des Arabes obtiendrait le soutien de l'Amérique pour la liberté.
Les Arabes modérés ne se sont pas opposés à la dure réponse menée par les Etats-Unis à la victoire du Hamas. Selon leur interprétation, une réussite du Hamas pourrait signifier une victoire des Frères Musulmans ou d'autres Islamistes, ce qui menacerait leur gouvernement.
Quand priver les Palestiniens n'a pas réussi à renverser le Hamas, l'Administration s'est lancée dans des étapes plus agressives et plus antidémocratiques.
Alors que les discussions sur un gouvernement d'unité Fatah-Hamas bloquaient, les Etat-Unis ont décidé que puisque la politique ne fonctionnait pas, alors ils armeraient jusqu'aux dents leur parti. L'envoi d'argent et la formation de la Garde Présidentielle du Président Mahmoud Abbas, alors que l'Egypte et la Jordanie fournissaient des armes, a indiqué très clairement que les Etats-Unis s'attendaient à ce que le Fatah renverse le Hamas.
Au delà de l'élimination du Hamas et du blocage de l'essor des mouvements Islamiques Sunnites, il y a le pouvoir grandissant de l'Islam Shiite et les tentacules considérables de l'Iran dans toute la région ; de l'Irak au Liban jusqu'en Palestine.
Alors que l'Administration Bush se rend compte que le succès en Irak ne surviendra peut-être jamais, et avec une pression interne et internationale grandissante pour l'établissement d'une crédibilité régionale à travers la question palestinienne, les Etats-Unis doivent rechercher de nouvelles manières de façonner son legs, et la Palestine, n'est-ce pas.
Comme le Vietnam l'a démontré, les superpuissances confrontées à une défaite ont tendance à empirer les choses, en élargissant le conflit au lieu de se retirer avec dignité.
L'Amérique n'a pas besoin nécessairement de prendre la tête puisque l'argument de l'existence d'Israël gagne du terrain.
Et ne vous trompez pas : Aucun politicien américain, y compris les Démocrates, ne protestera contre les actions d'Israël quand il présentera son dossier disant que l'Iran est sur le point de fabriquer une arme nucléaire.
Ne lui restant plus que deux ans au pouvoir, l'Administration Bush veut voir le régime iranien humilié, si ce n'est renversé.
Les Néoconservateurs qui ont leurs yeux fixés sur l'Iran sont maintenus à flot par la nouvelle entente dans laquelle l'Egypte, la Jordanie, l'Arabie Saoudite et Israël se retrouvent sur la même longueur d'ondes quand il s'agit de se confronter au programme d'enrichissement d'uranium de l'Iran.
Ils veulent tous faire des affaires ensemble, y compris avec Israël - qui a les raisons et les moyens de dégrader les cibles iraniennes par des attaques aériennes - mais les Arabes modérés demandent des progrès sur la question palestinienne afin de conserver une certaine légitimité et éviter un embarras public.
Les questions que l'on doit se poser maintenant sont : A quelle hauteur les Arabes modérés vont-ils placer la barre ?
Est-ce que des gestes de rhétorique symboliques suffiront comme avant la guerre d'Irak ?
Est-ce que le bloc anti-Iran sera cette fois apaisé par des promesses de réelle ouverture du passage de Karni à Gaza et par "l'humanisation des checkpoints" avec un nouveau manteau de peinture ?
Est-ce que les Arabes modérés aideront Rice à entuber Abbas pour qu'il accepte un Etat avec des frontières temporaires et une souveraineté symbolique le long du tracé du mur de séparation d'Israël ?
La différence ici sera que les Palestiniens veulent et ont besoin d'une fn du conflit et de l'occupation pour vivre, alors que les Arabes modérés, Israël, et de manière plus significative les Etats-Unis veulent limiter le problème palestinien, du moins jusqu'à ce qu'on s'occupe de l'Iran.
D'ici là; la Palestine sera un autre problème de l'administration à régler.
Source : http://www.dailystar.com.lb/
Traduction : MG pour ISM
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