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ISM France - Archives 2001-2021

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Israël -

Quelques réponses à l’âme israélienne troublée

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Dès l’instant où le Premier ministre a fait l’annonce de son plan de désengagement, le débat public autour de cette question est très inquiétant.
A gauche, un petit groupe met en garde, en toute logique, contre le fait qu’un retrait unilatéral de Gaza créera un vide dangereux.
Du centre émane un faible silence d’acceptation. Et tout le monde est submergé par les hauts cris "ne déracinez pas l’arbre" des colons et de leurs puissants soutiens au Comité central du Likoud.

La puissance de ce cri de protestation ne résulte pas simplement de la faiblesse idéologique du centre et de la gauche. Les rescapés du «camp de la paix» continuent certes à marmonner des slogans sur l’occupation et son prix, et le leadership de la gauche a effectivement été laminé – mais cela ne donne pas l’entièreté du tableau.



Les racines du succès de propagande des colons plongent profondément dans une réalité culturelle à la fois ancienne et nouvelle : cette réalité qui a été créée aux premiers jours d’existence de l’Etat.

A cette époque, où les chansons populaires chantaient la flûte du berger dans le désert et où les hommes politiques prononçaient leurs discours d’une voix chevrotante, évoquant le peuple qui avait reconquis sa terre et l’esprit de Joshua Bin Nun (Josué, ndt), la définition de la relation du peuple à sa terre était exclusivement biblique.

Des millénaires de pensée juive et de créativité, tant religieuse que séculière, en Eretz Yisraël comme dans la Diaspora, avaient été effacés, d’un coup.



Tout le monde préféra Samson, ce héros violent, à la profondeur de pensée d’un Spinoza ; le petit David arrogant, avec sa fronde, au psalmiste David, avec sa harpe, ou au David de la Gemara, qui médita le problème de la direction des hommes ; sans oublier Reb Yehoshua, qui supplanta Raban Gamliel [il s’agit du rabbin qui forma Saul, futur Saint-Paul, ndt], après sa destitution, pour cause de déconnexion d’avec son auditoire.



Durant les premières années d’existence de l’Etat d’Israël, le lien avec la Bible devint direct. Dieu, éliminé de cette conversation, demeura sous l’expression du "Rocher d’Israël", dans la Déclaration d’Indépendance, et on ne tarda pas à l’oublier complètement.

Dans son ouvrage «Le retour de Dieu» [God Returned], Avraham Burg décrit de quelle manière cette approche tiédasse a créé une énorme lacune culturelle dans la société israélienne, tant sur le plan religieux que sur le plan séculier.
Les résultats de ce vide, ce sont les colons qui sont en train de les cueillir, en ce moment, comme des fruits mûris à point.

Ils offrent à l’âme affamée des Israéliens qui recherchent désespérément une spiritualité, quelle qu’en soit la forme, une connexion instantanée non seulement avec la Bible et ses héros, mais avec un niveau au-dessus de tous ces héros : le plus haut niveau, le niveau du Dieu d’Israël et du commandement divin.


Dans un monde confus, post-moderne, déconstruit, les porte-parole du mouvement des colons offrent la dernière tentation à l’Israélien perdu, en quête d’une réponse à la question de savoir pourquoi il n’y a pas de fin au cycle des violences, et quel devrait être le prix de la paix, s’il doit en exister une un jour (ou tout au moins, du calme).


Ainsi, à la veille de Rosh Hashanah (Jour de l’An juif, célébré il y a quelques jours, ndt), le Rabbin Shlomo Aviner a publié un long poème dédié à «Maître Ahmad, Maître Mustafa», dans le numéro 478 de la revue B’Ahava Ubemuna [Avec amour et foi], lue par quelque 80 000 abonnés, dont beaucoup de ses disciples dévoués.


"Cette terre est la mienne", a écrit le rabbin, qui se présente habituellement lui-même comme libéral et large d’idées.
"Sarah, notre Mère, n’a-t-elle pas dit : Dis cette vérité et son fils, car cela n’héritera pas cette vérité avec mon fils, Isaac".
Et le poème continue : "Ceci est mien, je n’ai nulle intention de t’en donner ne serait-ce qu’un millimètre… D’ailleurs, je n’ai pas la permission de te donner des terres.".
Il n’a pas la permission : évidemment, parce qu’il a reçu un Ordre Divin, plus puissant que toute autre promesse.



La même semaine, au sujet de la même section de la Torah (Ha’azinu – Ecoute), Hagai Segal, s’exprimant dans Basheva (qui est qualifiée à juste titre de revue religieuse la plus diffusée en Israël : elle est distribuée à des centaines de milliers de foyers), a mentionné également le sacrifice d’Isaac, "un des points focaux des prières de Rosh Hashanah".

Le dilemme moral d’Abraham, d’après Segal, continue jusqu’à ce jour, et heureusement. Mais d’après lui, dès lors qu’il est clair que "tout mortel, même le secrétaire d’une association internationale d’hérétiques, accepterait de sacrifier son (propre) fils si instruction lui en était personnellement donnée par le maître de l’univers", la question devient celle de savoir pourquoi on a fait d’Abraham un paradigme ?
Réponse de Segal : A l’instant même où Abraham accepte l’ordre (divin), "il annonce par là même qu’il est prêt à obéir à des décisions qui sont trop sublime pour qu’il puisse les comprendre."



Après quoi, Segal extrapole, en ligne directe, à notre époque : "On ne doit pas obéir automatiquement à un sentiment de compassion", dit-il. "Les descendants d’Abraham ont été instruits à ne pas se fier en permanence à leur capacité à distinguer entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres… pas même au jugement de ceux qui ont mis en forme l’initiative de Genève, ou des procureurs généraux."



Voici, par conséquent, ce qu’Aviner, Segal et leurs émules offrent à la société israélienne : Détournez-vous de toute autre interprétation des textes bibliques (y compris les critiques impitoyables formulées contre Abraham par les sages, tel le silence assourdissant de la Rab’sha au sujet du sacrifice d’Isaac), au profit d’une médiation messianique entre un Dieu jaloux et à l’esprit borné, et une nation débile mentale d’hommes de laïcs faciles à duper – une conception selon laquelle le judaïsme serait une forme de pensée isolationniste et dangereuse, et finalement, l’éradication totale de l’ensemble des fondements universels sur lesquels le sionisme a fondé l’Etat du peuple juif.



C’est à cela, qui est le vrai discours – et non à l’obséquieuse campagne «l’Amour est de notre côté et il vaincra – que les Israéliens doivent aujourd’hui répondre.
S’ils ne se magnent pas, ce discours vaincra. Avec, ou sans amour.

Source : www.haaretz.com/

Traduction : Marcel Charbonnier

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