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Tunisie - 15 janvier 2011
Par Badia Benjelloun
Inclinons-nous respectueusement devant le courage et l’abnégation du peuple tunisien qui n’a pas cédé à ce régime despotique devenu caricatural de tant de corruption et de népotisme. 4 semaines de protestation continues, une centaine de morts et au bout de ces sacrifices, le départ de la Famille et du chef de clan mafieux honni. Une victoire et un bonheur à savourer sans modération.
Mais d’ores et déjà, il lui faut savoir se tenir uni, ce peuple ami.
Il lui faut s’accepter dans toutes ses composantes et proclamer un gouvernement d’union nationale chargé de mettre en place des élections libres. Sa responsabilité est historique à cet égard car il ne fait qu’anticiper ce qui ne manquera pas de se produire en Égypte, l’autre République monarchique caricaturale d’abus et de soumissions à des intérêts non nationaux.
Non seulement les prisonniers politiques immédiatement relâchés doivent prendre une part active au processus de Libération, mais le dictateur en fuite doit être arrêté et jugé, ses biens et ceux de la Famille nationalisés, ses comptes à l’étranger saisis. Les gouvernements récalcitrants à la restitution des deniers du peuple tunisiens seront coupables de recel et de vol.
Tous les gages accordés à l’Empire ont été insuffisants pour garantir le maintien au pouvoir d’un système sclérosé et fait du tissu de la corruption. La normalisation avec Israël, son refus de boycotter l’entité sioniste criminelle et coloniale, la participation pompeuse et honteuse de Son ex-Majesté Ben Ali à la comédie d’Annapolis ne valent pas protection suffisante contre la volonté d’un peuple déterminé. Que les fantoches des alentours l’apprennent.
Les munitions made in Israël et les conseils des sociétés israéliennes spécialisées dans la « sécurité » (entendre ici par sécurité répression d’émeutes populaires) qui se prévalent d’une expertise de vingtaine d’années d’opérations de police confiées à l’armée d’occupation ont prouvé leur inutilité.
C’est bien pourquoi l’offre d’aide proposé par la Ministre des Affaires étrangères de France était à la fois pathétique ; la morgue cynique de l’ancienne puissance tutélaire n’était plus de mise car d’autres officines la concurrençaient avec moins de conditions et de ‘meilleurs’ services. Cependant, la franchise un peu naïve de la MAM mettait en lumière de qui le dictateur tenait sa légitimité, de ce centre devenu introuvable de l’Empire.
L’Empire est aux prises avec son obsolescence accélérée. Il ne sait plus où donner de la tête.
Certes, la France fait débarquer des cargos chargés d’armes à Bouaké et sans doute des hommes aussi pour reprendre en mains la Côte d’Ivoire et remettre au pas le Gbagbo de moins en moins conciliant pour le partage exclusif des ressources ivoiriennes avec l’Occident, les puissances dites émergentes sont passées par là avec un meilleur deal. Mais l’intervention militaire tant attendue tarde à se réaliser. La France avec son président velléitaire aux prises avec une crise économique européenne sans précédent ne sait pas y faire. Dimensionné juste pour galvaniser les foules contre l’ennemi intérieur islamiste, il est tétanisé par l’impuissance de plus en plus évidente de son féal, son Amérique bien sionisée à lui.
Les peuples arabes peuvent arracher leur Libération, là, maintenant.
Les Us(a) sont embourbés dans leur déficit, et comme ils empruntent 40 cents pour chaque dollar dépensé, la perte du privilège exorbitant du dollar comme référence mondiale est imminente et l’un des mécanismes de la domination usaméricaine va vite appartenir au passé.
Pas seulement. Leurs ‘guerres’ perpétuelles et ingagnables en Palestine, en Afghanistan, en Irak et au Pakistan menées plus pour la sécurité d’Israël que pour contrôler la réserve pétrolière de l’Orient arabe et du Caucase menées avec des milices privées et les méthodes expéditives d’hommes de main sans stratégie absorbent leurs capacités au point de réduire drastiquement leur contrôle de leur chasse gardée en Amérique latine. Chavez et Morales tiennent envers et contre toutes leurs manœuvres de déstabilisation ratées. Quand Robert Gates, le Secrétaire du DoD hérité par Obama de Bush le deuxième, court en Chine Populaire quémander une réduction de la course à l’armement au vu de l’exhibition ostentatoire de l’avion de combat furtif chinois, le monde entier mesure l’inefficacité des menaces du Centre.
Depuis novembre 2005, date de la révolte des banlieues en France, il a été porté à la connaissance du public à peine averti que gouverner, ce n’est plus prévoir, mais seulement réaliser des opérations de vulgaire police et mener des opérations de réclame à bon prix avec de vieilles bonnes cordes grosses comme plusieurs ficelles, la peur bien articulée autour de l’envahissement de l’étrange étranger et ses mœurs si barbares et si hostiles.
Comment peut-il en être autrement, la réalité du pouvoir (voire même de la transcendance divine, voir les allégations de Loyd Blankfein courtier en affaires divines) a été depuis longtemps abandonnée au pouvoir des banques. Les instances financières et toutes leurs ressources intellectuelles, énormes car elles détournent et captent les meilleurs éléments universitaires mondiaux, sont structurellement MYOPES car organiquement constituées à prélever du profit à court, très court terme. Les gouvernements qu’elles portent au pouvoir sont doués de la même incapacité à penser l’avenir, tout voués qu’ils sont à dissimuler les calamités économiques, chômage et appauvrissement. Il est tout à fait symptomatique que la France ait porté à sa présidence un ministre de l’Intérieur, avocat d’affaires minable, sans autre talent politique que la provocation et l’intimidation du pauvre. Elles ont montré la limite vite atteinte de la souveraineté des pays de l’Union Européenne en imposant le FMI dans les mécanismes de sauvetage des banques et par le règlement de leurs pertes aux jeux de hasard par l’endettement des peuples et les politiques d’austérité. À leur tour, comme les anciens pays dits sous-développés ou en développement, les européens vont goûter aux joies des réformes structurelles qui ont condamné à la pauvreté pour des décennies les peuples du monde tiers.
Un, deux, trois et de quatre.
Bons arithméticiens et bons algébristes, les Arabes vont démontrer qu’ils savent compter et que la Révolution tunisienne qui a chassé le dictateur chéri de l’Occident n’est que la première d’une série qui va les libérer de toutes les dictatures légitimées par le même Occident. Ce machin qui s’est pris pour un Empire est en train de s’effondrer par sa périphérie. Les cyber-guérilleros ont contribué, la publication par Wikileaks des télégrammes de l’ambassade étasunienne à Tunis décrivant par le détail le système mafieux de l’ancien régime et la mise au point de kit de survie par Anonymous aux internautes, par le détournement de moyens de communication à l’exposition au monde entier en temps réel de la lutte à sa réussite. La chaîne qatarie en a informé jusqu’au paysan des confins marocains.
Nous disons au Peuple de Tunisie avec toute la force de nos espoirs :
Ne te laisse pas usurper Ta Révolution.
Reste Uni.
Nous sommes à tes côtés.
Que ton soulèvement soit le prélude à la libération des peuples voisins.
Tu disposes de plus qu’une fenêtre de tir pour réussir ta tâche, un immense boulevard t’est ouvert.
Badia Benjelloun
15 janvier 2010.
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Badia Benjelloun
15 janvier 2011