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Gaza - 1 avril 2005
Par Btselem
En quatre ans et demi, Israél a drastiquement restreint la liberté de mouvement pour entrer ou sortir de Gaza.
Ces restrictions ont fini par étrangler Gaza, au point que la région ressemble à une gigantesque prison.
La politique d’Israël a transformé la plupart des droits de l’homme (dont le droit à la libre circulation, à la vie de famille, à la santé, à l’éducation et au travail) en "manifestations humanitaires" qu’Israël fournit parcimonieusement.
Après le sommet de Sharm el-Sheik, en février 2005, Israël a pris des mesures pour améliorer significativement la situation humanitaire pour les Palestiniens, mais il y a eu peu de changements pour se rendre à Gaza ou en revenir et c’est pareil pour importer ou exporter les marchandises.
Ce rapport apporte des informations sur le viol permanent des droits de l’homme et de la loi internationale inhérent aux restrictions qu’Israël met à la circulation des gens et des marchandises entre Gaza et le reste du Monde, y compris entre Israël et la Cisjordanie .
Ce rapport met en garde contre la volonté d’Israël de refuser les responsabilités qui seront les siennes l’égard des habitants de Gaza après le retrait.
Gaza et la Cisjordanie : s’agit-il vraiment "d’unité territoriale absolue" ?
La fermeture du « passage sécurisé » entre Gaza et la Cisjordanie , en octobre 2000, a marqué le début d’un régime nouveau de séparation entre les deux régions, jamais rencontré jusqu’alors dans sa sévérité sous l’occupation israélienne.
Avec les Accords d’Oslo, Israël s’était engagé à traiter Gaza comme « une unité territoriale absolue ». En fermant Gaza, Israël a manifestement violé cet engagement.
La manière dont Israël décide d’accorder ou de refuser des permis de circuler entre Gaza et la Cisjordanie est parfaitement arbitraire, nullement transparente et a des effets douloureux dans tous les secteurs de la vie liés aux relations réciproques et à la dépendance mutuelle des habitants des deux régions. Par exemple, la politique d’Israël affecte la vie de famille et la capacité des habitants de Gaza à accéder à l’éducation et à recevoir des soins médicaux.
Contrairement aux affirmations de l’Etat selon lesquelles toute demande est examinée « à sa juste valeur », beaucoup de demandes sont rapidement rejetées sur des critères généraux liés à l’âge et au statut familial, alors que les services de la défense n’ont pas de soupçon véritable sur les requérants.
Depuis le début de l’Intifada, les déplacements de Gaza vers la Cisjordanie ont baissé de 98%. Dans la plupart des cas, quand les autorités refusent un permis, et qu’un avocat ou une association pour les droits de l’homme intervient ensuite, les autorités font machine arrière. Ce qui démontre clairement que la plupart des refus sont arbiraires.
Une des plus importantes manifestations de cette politique de séparation, c’est la pratique de l’expulsion des Palestiniens de Gaza qui se sont rendus en Cisjordanie , sous prétexte qu’ils résident illégalement en Cisjordanie . Israël n’a pas autorité pour ce faire, et ne le fait qu’en violation des Accords d’Oslo.
Des Palestiniens sont expulsés de chez eux, de leurs familles et de leur travail en Cisjordanie sans avertissement et sans qu’on leur laisse l’occasion de faire appel de leur expulsion.
Rafah Crossing et interdiction aux résidents de partir pour l’étranger
Depuis septembre 2000, Israël a imposé de lourdes restrictions aux habitants de Gaza qui veulent se rendre à l’étranger. Israël n’autorise les Palestiniens à sortir de Gaza que par Gaza Crossing.
Résultat : chaque fois qu’Israël décide de fermer ce Carrefour, il isole totalement Gaza de l’extérieur.
En 2004, Israël a interdit à tous les habitants de Gaza âgés entre 16 et 35 ans de se rendre à l’étranger. Cette restriction globale a été annulée après le sommet de Sharm el-Sheik.
Pourtant, des dizaines de milliers de Gazaouites ont été étiquetés « interdits de se rendre à l’étranger pour « raison de sécurité ».
Quelqu’un reçoit oralement un avis selon lequel il ou elle est considéré comme « interdit de se rendre à l’étranger pour raison de sécurité », sans explication.
Ici aussi « les raisons de sécurité disparaissent dans la plupart des cas après l’intervention d’un avocat ou d’une association des droits de l’homme.
Pamir les implications de cette politique, il y a l’interdiction faite aux Gazaouites de se rendre à l’étranger ce qui affaibli leurs possibilités d’avoir des soins médicaux corrects, indisponibles à Gaza.
Les longues attentes combinées avec l’incertitude qui mine les nerfs de savoir si oui ou non quelqu’un peut partir, augmentent la souffrance des malades et de leur famille.
Beaucoup de Palestiniens qui ont besoin de soins urgents à l’étranger ont dû envoyer une demande à la Haute Cour de Justice pour obtenir qu’Israël admette qu’en fait il n’a aucune objection à leur départ pour l’étranger.
Des familles déchirées : Voyager entre Gaza et Israël
Depuis le début de l’occupation jusqu’en 2000, il y eu un trafic régulier entre Gaza et Israël en raison des liens extensifs des familles entre habitants de Gaza et citoyens et habitants arabes d’Israël.
En septembre 2000, Israël a imposé l’interdiction presque totale aux Gazaouites d’entrer en Israël pour rendre visite à leur famille.
Il a aussi réduit drastiquement la possibilité pour les Israéliens d’entrer dans les zones de Gaza contrôlées par l’Autorité Palestinienne : les permis d’entrer à Gaza ont chuté de 98%.
Le système de permis pour Israéliens qui veulent aller voir leur famille à Gaza est une manifestation de mépris et de déraison, et viole de façon patente le droit à la vie de famille.
En plus, depuis le début de l’Intifada, Israël a rendu difficile pour les couples dont l’un est Israélien et l’autre habitant de Gaza, de vivre ensemble sous le même toit, et en conséquence, pour les enfants de vivre avec leurs deux parents.
Un obstacle commun qu’Israël impose aux familles séparées consiste à suspendre aux Israéliens leur permis d’entrer à Gaza, généralement après une attaque palestinienne ou durant une opération militaire d’importance.
Israël suspend les permis globalement sans préavis et sans indiquer combien de temps cette suspension durera.
La très grande majorité de ceux qui détiennent ces permis sont des femmes qui ont la citoyenneté israélienne ou résident en Israël et qui sont mariées à des Gazaouites.
Les femmes qui ont quitté Gaza pour une brève visite en Israël deviennent « bloquées » et ne peuvent plus retourner chez elles, auprès de leurs maris et de leurs enfants.
En janvier 2002, Israël a décidé de ramener la durée des permis d’entrer pour les familles séparées de 3 mois à 1 seul mois. Les femmes qui souhaitent respecter la loi doivent aller au checkpoint d’Erez, au cours d’opérations militaires et autres conditions difficiles, douze fois dans l’année pour renouveler leur permis.
A cause de toutes ces conditions, nombreuses sont les femmes qui ne parviennent pas à Erez à temps pour renouveler leur permis. Quand ensuite elles essaient d’obtenir un nouveau permis, leur demande est rejeté au motif qu’elles sont restées illégalement dans le territoire de « l‘Autorité Palestinienne ».
Le siège économique de Gaza
Le contrôle quasi complet d’Israël sur l’économie de Gaza est notable dans deux domaines principaux : contrôle de la circulation des travailleurs palestiniens employés en Israël, et contrôle de la circulation des marchandises sortant ou entrant à Gaza.
Pour obtenir un permis de travail en Israël, les Palestiniens doivent répondre à certaines conditions déterminées par la sécurité.
Mais Israël établit aussi des quotas au nombre de permis qu’il délivre à ceux qui passent les contrôles de sécurité.
Ces quotas sont décidés par l’échelon politique pour des raisons sans rapport avec la sécurité.
Résultat de tous ces quotas et barrages, depuis le début de l’Intifada, il y a eu une chute importante du nombre de travailleurs Gazaouites employés en Israël.
Alors qu’à la veille de l’Intifada (les trois premiers trimestres de l’an 2000) quelques 26000 habitants de Gaza entraient quotidiennement en Israël pour travailler, le nombre moyen au troisième trimestre 2004 n’a été que d’un millier, une baisse de 96%.
Quand l’Intifada a éclaté, Israël a interdit la circulation des marchandises par le Checkpoint d’Erez, détournant toutes les exportations et la plupart des importations sur Karni Crossing.
Cette décision a pour résultat de paralyser complètement le commerce avec l’étranger toutes les fois qu’Israël décide de fermer Karni Crossing.
En plus, les procédures et les méthodes de vérification des marchandises et de leur transport vers Gaza et vers l’extérieur, détériorent la possibilité des commerçants palestiniens d’avoir un programme raisonnable même quand Karni Crossing est ouvert.
Certaines de ces procédures et de ces méthodes sont d’évidence irrationnelles et entravent inutilement la circulation des marchandises.
Les marchandises sont déchargées et passent par des contrôles de sécurité qui les abîment.
La majeure partie des marchandises provenant de Gaza ou qui lui sont destinées sont contrôlées plus d’une fois jusqu’à leur destination finale.
Même si les contrôles de sécurité sont nécessaires, il y a des moyens techniques pour les effectuer sans dommages ni retard pour les marchandises.
Le résultat de cette série d’obstacles qu’Israël met aux déplacements des marchandises, c’est que les fabricants palestiniens trouvent difficile de se battre à la fois pour exister et pour gagner des clients. Ceci a drastiquement réduit le paysage de l’activité économique à Gaza.
L’effet cumulatif des restrictions de circulation affectant les marchandises et l’entrée des travailleurs en Israël, a terriblement fait augmenter le chômage et la pauvreté à Gaza.
En septembre 2000, le chômage atteignait 26,9% (71.000 personnes).
A la fin de 2004, le chiffre du chômage atteignait 39,4% (115.000 personnes).
Le Bureau Central de Statistiques Palestinien estimait le seuil de pauvreté pour une famille de deux adultes et quatre enfants à moins de 1851 NIS - nouveaux shekels israéliens - de dépenses mensuelles.
A partir de cette définition, à la fin de 2004, 77,3% de la population de Gaza vivaient dans la pauvreté, soit un total de 1.033.500 personnes.
Au début de l’Intifada, le chiffre était de 42%.
Selon un projet de recherche du PCBS et de la Banque Mondiale, 23% des habitants de Gaza, 323.000 personnes, souffrent de « grande pauvreté » et ne disposent pas du niveau minimum de subsistance. (205 NIS par personne et par mois), même en tenant compte du montant de ce qu’ils reçoivent des organisations internationales.
Le Plan de Retrait : Est-ce qu’il met vraiment fin aux responsabilités d’Israël ?
Après le retrait, on s’attend à ce qu’Israël garde le contrôle des zones clefs qui affectent directement la capacité des habitants à exercer leur droit, surtout dans les régions dont il est question dans ce rapport.
En dépit de ça, le gouvernement a déclaré à propos du retrait que « l’achèvement du plan rendra nulles et non avenues les revendications concernant les responsabilités d’Israël envers les Palestiniens de Gaza ».
Ces déclarations sont infondées, selon la loi humanitaire internationale ; une situation d’occupation est créée quand, résultant d’un conflit armé, un état obtient « le contrôle effectif » d’un territoire dans ses frontières souveraines.
Un contrôle effectif ne signifie pas une présence militaire permanente dans toute la zone. Même après avoir redéployé ses forces armées et avoir évacué ses colonies, Israël maintiendra un contrôle complet sur toutes les frontières de Gaza, sur son espace aérien, son domaine côtier, et ses eaux territoriales.
Le contrôle d’Israël affecte directement et clairement la capacité des populations locales à gérer les principaux aspect de leur vie.
En plus, le gouvernement a déclaré qu’il était prêt à continuer des opérations militaires dans Gaza, non pour répondre à une attaque, mais à titre de « mesures préventives » .
Aussi longtemps que ces méthodes de contrôle restent entre les mains israéliennes, la déclaration d’Israël sur « la fin de l‘occupation » est remise en question.
La responsabilité d’Israël à l’égard des habitants de Gaza après le retrait dérive aussi de ses obligations par rapport à la loi internationale sur les droits de l’homme.
Contrairement à l’attitude traditionnelle d’Israël, cette loi ne s’applique pas seulement à la souveraineté de son propre territoire, mais partout où il exerce son autorité.
Israël continuera à répondre légalement de ses actes et de ses manquements qui violent les droits des habitants de Gaza même après le retrait. Il a cette responsabilité et peu importe si son contrôle de Gaza équivaut à « un contrôle effectif » et à une occupation continue.
Source : http://www.btselem.org/Download/200503_Gaza_Prison_Abstract_English.doc
Traduction : CS pour ISM
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1 avril 2005