Envoyer cet article
Gaza - 28 mai 2008
Par PCHR
"Ils sont arrivés à 4h du matin avec deux bulldozers, et ils sont partis à 8h. Je suis propriétaire de cet élevage de poulets avec mes trois frères, et nous avons travaillé nuit et jour pendant 18 ans pour monter cette affaire. Les Israéliens ont tout détruit en moins de quatre heures."
La ferme avicole de Nasser Jaber a été passée au bulldozer par les Forces israéliennes d'occupation (FIO) il y a 10 jours, aux premières heures du 16 mai, pendant qu'il dormait chez lui à Rafah, au sud de la Bande de Gaza. Il est toujours abasourdi. D'un air las, il nous guide au milieu des ruines de ce qui fut son exploitation pendant 18 ans.
"Pour moi et mes frères, c'était un projet pour toute la vie", dit-il pendant que nous escaladons les gravats, les fils de fers, les plaques de métal renversées et des milliers de poulets en putréfaction. "Je n'ai jamais appartenu à aucune faction politique, et je n'ai jamais été en prison. Je ne sais pas pourquoi ils ont fait ça." Les employés de la ferme qui commencent à dégager les gravats portent tous des masques sur le visage. Quarante mille cadavres de poulets écrasés sont là, au milieu des décombres, et la puanteur est écoeurante.
Lorsque les ouvriers ont donné l'alerte que les FIO étaient en train de détruire la ferme au bulldozer, Nasser Jaber ne s'est pas précipité, il est resté chez lui, attendant que les Israéliens partent enfin. "Ca aurait été trop dangereux d'y aller pendant qu'ils détruisaient tout", dit-il. "Ce n'est pas la première fois que les Israéliens viennent. La frontière n'est qu'à deux kilomètres et demi, et ils envahissent le secteur tous les mois. Ils avaient déjà détruit un de nos murs, puis la citerne à eau. Mais rien de cette ampleur." Une des parties de la ferme, une immense grange contenant 9.000 poulets, a été épargnée dans l'attaque, bien que Nasser Jaber dise que les volailles sont traumatisées, et elles pondent peu.
L'élevage produisant 45.000 œufs par jour – maintenant la production a chuté à 2.000, et Nasser Jaber est inquiet parce que les Israéliens peuvent revenir finir la destruction de ce qui reste de sa ferme. Il estime qu'entre eux, lui et ses frères, ils ont déjà perdu plus d'un million de dollars. "Je suis un fermier paisible", dit-il. "Mais ils détruisent nos maisons, notre terre, tout."
Abdul Halim Abu Samra, directeur des Relations Publiques à la branche voisine du Centre Palestinien pour les Droits de l'Homme de Khan Younis, dit que les FIO détruisent systématiquement la terre agricole dans toute la Bande de Gaza, en particulier dans les zones frontalières. "Nous avons une bonne terre fertile à Gaza, mais les fermiers palestiniens en ont été chassés, près des frontières, par l'intimidation et les attaques comme celle-ci. La terre est maintenant presque vide un kilomètre avant la frontière orientale, parce que c'est trop dangereux pour les gens d'y vivre et d'y travailler".
Tandis que nous roulons nord est, en direction du carrefour de Sofa (un des cinq passages entre Gaza et Israël), nous voyons très peu de gens, juste un vieil homme menant un âne et une charrette. Ces régions rurales près de frontière orientale de la Bande de Gaza se vident, parce que les fermiers, donc beaucoup ont travaillé là depuis des générations, ont maintenant trop peur de vivre et de travailler sur leurs propres terres. Les limites de la Bande de Gaza, qui ne fait que 40 km de long et 10 de large, sont encore rétrécies par les invasions israéliennes incessantes.
La destruction délibérée des propriétés civiles est illégale, selon la loi internationale sur les droits de l'homme et la loi humanitaire, dont la 4ème Convention de Genève (Articles 33 et 53). Depuis le début du 2ème Intifada en septembre 2000, le PCHR a constaté la destruction délibérée de plus de 40.000 donums (1 donom = 1.000 m²) de terres agricoles dans la Bande de Gaza. Cette année seulement, près de 3.000 donums de terres agricoles autour de Rafah et de Khan Younis ont été détruites par l'armée israélienne (dont 500 donums au cours des 7 derniers jours). Ruinant des parcelles de légumes et des fermes tenues par des familles, contribuant à la dévastation économique catastrophique de la Bande de Gaza.
A 15 km des ruines de la ferme de Nasser Jaber, Mohammed Hamdan Abu Daggah se tient au milieu des restes de son usine de ciment, localisée à 4 km du carrefour de Sofa, et qui a été détruite par les bulldozers des FIO il y a trois jours, le 24 mai.
"J'ai ouvert cette entreprise en janvier 2007", dit-il. "Ma famille a tout investi dans cette usine. Nous avons réussi à importer un bon équipement sous licence, et nous avions beaucoup de travail pour des clients locaux et pour les Nations Unies, ici, à Gaza. Mais les Israéliens sont arrivés avec 3 bulldozers, et ils ont tout détruit."
L'usine d'Abu Daggah employait 40 personnes, qui sont maintenant sans travail. Comme Nasser Jaber, Abu Daggah dit qu'il n'a aucune idée du pourquoi son usine a été visée. "Je n'ai jamais eu de problème et je n'ai jamais été arrêté. Ils n'avaient absolument aucune raison de faire ça – mais maintenant, nous n'avons plus rien, sauf de lourdes dettes que je ne peux régler."
Source : Palestinian Centre for Human Rights
Traduction : MR pour ISM
Afin d'assurer sa mission d'information, ISM-France fait appel à votre soutien.
L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient. Les auteurs du site travaillent à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui leur seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas l'ISM ne saurait être tenu responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont il n'a pas la gestion, l'ISM n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
10 novembre 2021
Les prisonniers du tunnel de la Liberté défient leurs geôliers en plein tribunal (Vidéos)24 octobre 2021
Formidable mobilisation de soutien à Georges Ibrahim Abdallah et à la Palestine ce samedi à Lannemezan (65)13 octobre 2021
Des soldats israéliens rouent de coups et arrêtent un militant palestinien pendant la récolte des olives12 octobre 2021
Les étudiants et les diplômés de français participent à la cueillette des olives à Gaza20 septembre 2021
641 actes de résistance en Cisjordanie depuis l'opération "Tunnel de liberté"19 septembre 2021
Les troupes israéliennes capturent les deux derniers des six prisonniers politiques palestiniens évadés de Gilboa17 septembre 2021
Point sur la situation au Liban16 septembre 2021
L'avocat Mahajna rencontre Mahmoud Al-'Arda et confirme les tortures subies par les résistants évadés depuis leur capture12 septembre 2021
Abu Obeida : Tout accord d'échange n'aura lieu que s'il inclut les prisonniers libérés de la prison de Gilboa9 septembre 2021
100 Palestiniens blessés lors d’attaques des forces d'occupation (vidéos)Gaza
Nettoyage ethnique
PCHR
28 mai 2008