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Ramallah - 9 décembre 2004
Par Sarah
Budrus a accueilli mardi sa 49ème manifestation contre le mur. Plus de 150 membres du village, 60 Israéliens, et 25 internationaux sont venus pour protester. Elle a été planifiée et coordonnée par le village et des Israéliens
37 Israéliens ont été détenus et 4 ont été arrêtés lors de la manifestation. Lorsqu’on leur a demandé leurs identités, ils tous ont donné le nom d'Ahmed Awad, un homme de Budrus qui a été arrêté, il y a trois mois, pour avoir résisté de façon non-violente contre le Mur.
Ci-dessus : Le Mur de l’Apartheid, en rouge et en bleu, il rendra la vie presque impossible aux communautés emprisonnées. Extrait de la carte de l'affiche de la campagne de novembre 2003 – PENGON.
Des garcons jètent des pierres en Palestine, mais pourquoi ?
Pensent-ils vraiment qu'ils pourront blesser un soldat, arrêter la construction d'une colonie ou du mur ou arrêter une incursion dans leur village ou leur ville ?
Peut-être toucheront-ils un soldat et le soldat aura une contusion qui durera une semaine ou quelque chose comme ça, mais ils ne seront pas tués par cette pierre.
Les soldats tirent des balles en caoutchouc et des balles réelles, qui tuent et otent la vie.
La partie du mur d'annexation qui est actuellement en construction à Budrus est située très près de l'école.
Chaque matin les bulldozers et les marteaux-piqueurs se réveillent et commencent le travail avant que les étudiants et les professeurs arrivent à l'école.
Quand les garçons entrent dans l'école, ils peuvent voir le chantier de construction du terrain où ils jouent parfois au football avant que l'école commence.
Chaque jour, les travaux couvrent les rires des enfants et le gazouillement des oiseaux. Derrière la construction, le secteur est une base de formation militaire israélienne, un grondement constant de tirs.
Les soldats se tiennent près des bulldozers et du matériel de construction, regardant de l’autre côté de l'école, dans une forêt où les enfants peuvent jouer. Ils pointent leurs armes vers la cour de l’école et hurlent sur les enfants s'ils s’en éloignent pour jouer dans les oliveraies entre le mur et l'école.
Le mur encercle leur village et huit autres villages. Bientôt, il y aura seulement un accès pour entrer et sortir du secteur tout entier.
Cela prendra des heures pour aller à Ramallah, où se situent les universités et les hôpitaux les plus proches, sans mentionner le travail.
Aussi, pourquoi les garçons jettent-ils des pierres ?
La pierre est un acte symbolique de la résistance, un défi à l’occupation israélienne.
Avant et après l’école, les garçons jettent parfois des pierres sur les soldats qui sont trop loins pour être touchés. En retour, les soldats tirent du gaz lacrymogène, des bombes assourdissantes et des balles en caoutchouc. La cour de l’école est jonchée de restes de ces armes.
Depuis peu, les soldats entrent plus régulièrement dans le village. Deux jours cette semaine, ils sont venus le matin à l'école pour arrêter trois jeunes garçons qui avaient jeté des pierres.
Les professeurs leur ont refusés d’entrer dans l'école.
Les soldats ne connaissaient pas les noms de garçons mais ils pouvaient les identifier.
Les professeurs savaient quels garçons ils recherchaient, ils ont donc fait changer de vêtements aux garçons et ils leur ont fait quitter l'école en cachette.
Ces deux derniers jours, les autres internationaux et moi sommes allés à l'école pour essayer de décourager les soldats de revenir, ils ne sont jamais venus et, si tout va bien, ils cesseront de venir à l'école. Naturellement, si les soldats ne protégeaient pas les ouvriers qui construisent le mur, les garçons n'auraient rien pas de pierres à jeter.
S'il n'y avait aucun bulldozer ou humvee, ils joueraient au football comme des garçons ordinaires après l’école.
Budrus a accueilli mardi sa 49ème manifestation contre le mur. Plus de 150 membres du village, 60 Israéliens, et 25 internationaux sont venus pour protester. Elle a été planifiée et coordonnée par le village et des Israéliens.
37 Israéliens ont été détenus et 4 ont été arrêtés lors de la manifestation. Lorsqu’on leur a demandé leurs identités, ils tous ont donné le nom d'Ahmed Awad, un homme de Budrus qui a été arrêté, il y a trois mois ,pour avoir résisté de façon non-violente contre le Mur.
Il est en détention administrative depuis trois mois, un système juridique spécial établi par le gouvernement israélien pour les Palestiniens, un système juridique qui n'accorde aucun droit aux Palestiniens.
Plus de 40 Israéliens avaient prévu de se faire arrêter pour montrer leur solidarité avec Ahmed Awad.
Ils ont le privilège de prendre part à la désobéissance civile de cette façon, parce qu'ils savent qu'ils seront libérés, un droit que les Palestiniens ne possèdent pas. Sous détention administrative, les Palestiniens peuvent être retenus sans charges contre eux pendant une période indéfinie.
Mardi, la manifestation s'est transformée en champ de bataille avec des jeunes garçons qui lançaient des pierres et des soldats israéliens qui utilisaient du gaz lacrymogène, lds bombes assourdissantes et des balles en caoutchouc. Le gaz lacrymogène s’est infiltré dans beaucoup de maisons près de l'école.
Une femme israélienne, est tombée sur une bombe assourdissante qui a éclaté sous elle, brûlant légèrement ses cheveux et sa peau. L'ambulance qui l’évacuait a été aspergée de gaz lacrymogène.
Les soldats ont occupé une maison dans le village et sont montés sur le toit pour lancer encore plus de gaz lacrymogène et de bombes assourdissantes.
Par la suite, quand la nuit est tombée, les soldats ont finalement quitté Budrus et les familles sont allés dîner après un jour épuisant d'inhalalation de gaz lacrymogène et de tentatives d'échapper aux soldats.
Au début de cette année, quand j'étais dans Budrus, Ahmed Awad, également connu sous le nom d'Abu Hassan, avait invité à déjeuner 15 internationaux et Israéliens dans sa maison. Chacun d’entre nous avons été servi de cinq types différents de potage, un demi-poulet, un bol énorme de riz, du pain et tout le thé et le café que nous voulions.
Lorsque nous sommes partis, nous ne pouvions à peine marcher, et nous étions énormément reconnaissants pour ce repas généreusement offert par sa famille. Ahmed est un berger de moutons et de chèvres. Une grande partie de la terre où il emmène paître ses moutons et ses chèvres est maintenant sous contrôle israélien.
Pendant qu'il est en prison, son frère s’occupe des animaux, un travail qu’ils partageaient tous les deux. Les Israéliens qui étaient venus déjeuner ce jour-là étaient des voisins et des invités, pas des occupants et des envahisseurs.
Ce type de gestes renforcent les liens et la confiance entre deux peuples qui sont séparés les uns des autres et qui ont appris à se détester.
La population de Budrus et beaucoup d'Israéliens sont devenus de véritables amis, un signe plein d'espoir pour ce qui sera un long processus de construction de la confiance et de vie ensemble en tant que voisins.
Rencontre avec la famille de Mousa
Hier, j’ai eu l'honneur de rencontrer la famille de mon ami Mousa, mon ami du Vermont, pour ne pas parler du merveilleux jardinier qu’il est. Mousa vient d'Abud, un village de 2.200 personnes situé à l’ouest du District de Ramallah. Sa famille a été adorable, avec le thé, un repas délicieux, et les bébé à choyer.
Chrétiens et Musulmans partagent le village et vivent côte à côte. Cette communauté a été épargnée de l’enfermement par le mur d'Annexation. Cependant, ils ressentent quotidiennement les effets de l’occupation.
Trois colonies illégales israéliennes entourent Abud :
• Bet Arie, construite en 1982, a confisqué 800 dunums au village d’Abud.
• Puis en 1988, la construction d'Ofraim a pris 650 dunums supplémentaires au village.
• Plus récemment en 2001, les militaires israéliens ont établi une colonie militaire, Naveh Iyyre, pour le stockage les véhicules et l'équipement militaires, qui a saisi 60 dunums de terre.
Le transport sur deux des trois routes principales en direction d’Abud est empêché par des barrages routiers, des blocs énormes de ciment placés au milieu de la route.
Les blocs de ciment sont encore présents sur la la route qui est actuellement ouverte. Les blocs sont sur le côté de la route ainsi les militaires peuvent à tout moment enfermer totalement le village.
Presque quotidiennement les militaires entrent dans le village pour faire monter la tension. Ils n'ont aucune raison sauf de provoquer le village. Les soldats ont demandé au maire pourquoi les garçons jetaient des pierres sir les jeeps. Il a répondu de façon éloquente : "si les soldats en venaient pas dans le village, les garçons ne jetteraient pas des pierres."
La situation économique dans le village reflète la situation dans le reste de la Cisjordanie et de Gaza. Depuis le début du deuxième Intifada, presque tous les Palestiniens ne sont pas autorisés à entrer en Israël ou dans les colonies pour travailler.
250 personnes d'Abud allaient travailler en Israël et dans les colonies. Maintenant elles sont sans emploi ou cherchent un travail à Ramallah, comme tout le monde dans la région. Avec un taux de chômage aussi élevé, les salaires ont baissé à Ramallah.
Tout comme la plupart des villages ruraux en Cisjordanie , chaque famille à Abud possède des oliviers.
Avant 2000, ces familles exportaient l'huile d'olive vers la région d’Hébron, Gaza et la Jordanie, mais depuis le deuxième Intifada, le gouvernement israélien a imposé la fermeture (l'incapacité pour les personnes et les produits de quitter leur secteur proche).
Au cours de ces dernières années, l'importation d'huile d'olive en provenance de pays tels que l'Espagne, ont fait baisser le prix de l'huile d'olive, rendant impossible la survie avec la vente d'huile d'olive.
En 2001, le gouvernement Israélien a coupé 3.500 oliviers à Abud, qui étaient plantés le long d’une route pour colons israéliens seulement. Les militaires israéliens ont prétendu que les Palestiniens pourraient se cacher derrière les arbres et tirer sur les colons qui utilisaient cette route. Pour la "sécurité", Abud a perdu 3.500 oliviers. Les militaires ont dégagé cent mètres de chaque côté de la route.
Selon Elias Azar, maire d'Abud et arrière-cousin de Mousa, en raison des graves difficultés économiques, environ la moitié de la population d'Abud vit à l’extérieur du village (2.200 autres personnes). Ils sont partis à Ramallah ou en Jordanie ou aux Etats-Unis s’ils ont pu obtenir des visas.
Quand j'étais à Abud, je suis allé voir Dina, une mère énergique de cinq beaux enfants. Son mari a été assassiné l'année dernière devant ses enfants, et à ce jour personne sait pourquoi. Cette histoire est semblable à l'histoire de tant d'autres martyrs.
Maintenant Dina doit faire vivre toute seule ses cinq enfants et sa vieille mère. Elle nettoie les salles de classe dans l’une des écoles d’Abud.
Alors que j’étais assise avec la famille et que je pratiquais le peu arabe que je connais, je regardais les yeux de ces enfants et j’avais envie de pleurer. Ces enfants, âgés de 7 à 12 ans, qui ont assisté au meurtre de leur père, leurs yeux n'étaient plus innocents, et leur enfance leur a été volée en quelques minutes.
Cette image, une image d'horreur absolue, sera avec eux pour le reste de leurs vies.
Pourtant, leurs sourires restent dans ma mémoire.
Voir la carte de la région de Ramallah
Participer à la Campagne demandant la libération d'Ahmad Awad
Source : www.palsolidarity.org
Traduction : MG pour ISM-France
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