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Ramallah - 12 mars 2005
Par Bella
Mais ça...
Ces garçons ont tous risqué leur vie pour faire ça.
Et la destruction d'une lourde porte en métal, des chaines, des clotures électriques, des fils barbelés, avec une paire de ciseaux et de nombreuses mains nues, tout cela me donne envie de pleurer. Nous avons regardé le film que les Suédois ont enregistré.
Pendant qu'ils abattaient la Barrière, ils scandaient : "Non au mur! Oui à la paix!"
Pour être un peu plus variés, ils ont même scandé des slogans en Hébreu qu’ils avaient appris des pacifistes israéliens.
Budrus : Des jeunes Palestiniens abattent le Mur
Vendredi après-midi, je suis arrivée à Ramallah en provenance d’Hebron et j’avais décidé de dormir dans le nouvel appartement de l’ISM pour prendre une douche et laver mes vêtements : très excitant.
Mais j’étais dans la ville depuis seulement une demi-heure quand nous avons reçu un appel d'Abu Ahmed, un vieil homme très apprécié de Budrus, le village qui a manifesté bravement plus de 50 fois l’an dernier et qui a vu le Mur destiné au vol des terres déplacé sur la Ligne Verte, sauvant ainsi une quantité énorme de terres qui étaient volées. Abu Ahmed a indiqué que les militaires israéliens étaient entrés dans Budrus sans raison apparente et qu’ils tiraient à balles réelles en plein milieu du village. Nous pouvions entendre les tirs répétés et inquiétants qui couvraient sa voix.
Ainsi sans prendre ma douche prévue depuis longtemps, j'étais dehors pour retrouver N et S qui rentraient de la manifestation contre le Mur d'aujourd'hui à Bil'in, et nous avons pris un taxi "spécial" pour Budrus bien que la nuit soit tombée.
Quand nous y sommes arrivés, les choses étaient assez joyeuses. Plusieurs pacifistes israéliens trempés qui avaient également participé à la manifestation de Bil'in, et quelques réalisateurs suédois (qui étaient là par pur hasard) diffusaient des images et téléphonaient des communiqués de presse depuis chez Abu Ahmed. Ils confirmèrent que l'armée était partie du village – ce qui expliquait l'atmosphère de fête.
L'armée israélienne était venue à Budrus, puis entrée dans le village, qui célébrait un mariage, et ils ont commencé à tirer des balles réelles.
Les shebabs (les jeunes), qui ont toujours évité de jeter des pierres pendant les manifestations à Budrus pour que tout le monde puisse agir de façon non violente, ont pensé qui si l'armée venait tirer dans le village, les pierres étaient une réponse raisonnable. Trois personnes ont été blessées par des balles en métal recouvert de caoutchouc.
L'armée a arrêté un des garçons – H – puis a quitté le village. Après que l'armée soit partie du village, les jeunes hommes de Budrus sont allés démolir un morceau entier de la Barrière de Saisies de Terres!
Je ne pense pas que cela se soit déjà produit auparavant ailleurs et je n’en croyais presque pas mes yeux ce matin quand nous sommes allés voir.
Ok, j’avais déjà vu beaucoup de barrières détruites – sur des bases aériennes, des barrages routiers, près des laboratoires d'essais sur animaux. Le plus émouvant était le reportage sur la barrière du centre de détention des réfugiés à Woomera en Australie qui avait été détruite par des Australiens pour que les réfugiés puissent s'échapper.
Mais ça... Ces garçons ont tous risqué leur vie pour faire ça. Et la destruction d'une lourde porte en métal, des chaines, des clotures électriques, des fils barbelés, avec une paire de ciseaux et de nombreuses mains nues, tout cela me donne envie de pleurer. Nous avons regardé le film que les Suédois ont enregistré. Pendant qu'ils abattaient la Barrière, ils scandaient : "Non au mur! Oui à la paix!"
Pour être un peu plus variés, ils ont même scandé des slogans en Hébreu qu’ils avaient appris des pacifistes israéliens.
La nuit dernière nous avons dormi chez Abu Ahmed, en attendant d’inévitables représailles.
C'est un nouveau précédent et l'armée le sait.
Abu Ahmed a indiqué que le témoignage d'un soldat peut mettre le jeune homme - H - qui a été arrêté, en prison pendant 6 mois pour le lancement d’une pierre. Mais la nuit fut tranquille. Ce matin, nous sommes allés voir la barrière – ou plutôt ce qui en restait !
Alors que nous en récupérions quelques morceaux et que nous nous demandions s'ils se vendraient autant que les morceaux du Mur de Berlin (une nouvelle idée pour la collecte de fonds), nous avons entendu le grondement d'un hummer de l'armée, et nous avons vite battu en retraite jusqu’à un point d’observation.
Les soldats sont sortis avec une silhouette en civil.
Etais-ce H ?
Le laisseraient-ils partir?
Pourquoi mes jumelles étaient-elles à Qawawis quand j'en avais besoin ?
Le hummer a à nouveau grondé, et la mince silhouette a traversé les portes brisées et s’est dirigée en notre direction.
C'était vraiment H. "Kiif halek?" (Comment vas-tu ?) ai-je crié. Il s’est approché et a souri. "Je ne vous vois pas bien. Ils... " et il a fait un geste en montrant ses marques autour des yeux, indiquant qu’il avait eu les yeux bandés .
Nous avons eu Abu Ahmed sur son portable et il a dit à H d'ignorer les instructions des soldats qui étaient d'attendre dix minutes jusqu'à ce qu'ils lui rapportent son téléphone portable. Nous n'aimions pas non plus du tout ça. Aussi nous sommes remontés vers le haut de la colline ensemble. En quelques minutes, les shebabs couraient dans notre direction, rayonnants, pour embrasser H et pour examiner s’il était blessé. Ils l'ont entouré pour l'escorter jusqu'au village, en chantant et en scandant des slogans. Nous les avons suivi.
Mais quand nous avons atteint le centre du village, une femme juste derrière nous a crié : "Jesh!" (soldats).
La plupart des garçons sont restés autour d’H, mais quelques uns se sont mis à courir vers la jeep que nous venions d’apercevoir s’arrêter juste derrière nous. Nous avons suivi, mais avant que nous les ayons rattrapés, elle était partie. "La police normale, pas la police des frontières," (qui arrêtent les internationaux) a dit Abu Ahmed.
"Je pense qu'ils sont venus pour essayer d’arrêter les Israéliens."
Les garçons ont continué à grimper vers la maison en haut de la colline, et nous avons fait de même. Ce soir, je suis à nouveau à Ramallah parce que demain je dois partir pour Naplouse. Mais N est resté à Budrus avec une nouvelle équipe d’Israéliens et un autre ISMer le rejoindra. Personne pense que l'armée israélienne laissera tomber cette affaire.
Quand les villageois de Budrus vont se coucher ce soir, ils ne dormiront que d’un oeil.
L’an dernier, Abu Ahmed a créé son propre slogan pour les manifestations de son village : il est anglais.
Les garçons le scandaient aujourd'hui, c’est un slogan multilingue : "We can do it! We can do it!" ("Nous pouvons le faire! Nous pouvons le faire!")
Source : www.palsolidarity.org
Traduction : MG pour ISM-France
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