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Hébron -

Quand les fêtes apportent la haine : La journée de Sarah à Hébron occupée

Par

27.11.2019 - La fête juive de Shabbat Chayei Sarah (la journée de Sarah) a eu lieu à Al Khalil (aussi connue sous le nom d'Hébron) durant le week-end du 22-23 novembre. Pendant deux jours, environ 50.000 colons israéliens se sont rassemblés dans la ville pour célébrer la fête à l'endroit que les sionistes considèrent comme leur droit religieux (bien qu'il soit historiquement palestinien et se trouve clairement dans la délimitation des Territoires Palestiniens).

Quand les fêtes apportent la haine : La journée de Sarah à Hébron occupée

Les banderolles de la propagande extrémiste et raciste installées dans le quartier H2 à al-Khalil à la veille de la Journée de Sarah, une importante fête juive.
Pendant des semaines, la zone a été aménagée et préparée pour accueillir des milliers de visiteurs. Les colons israéliens de la colonie illégale voisine de Kiryat Arba devaient être rejoints par d'autres Juifs pratiquants venus de partout en Israël, ainsi que de pays étrangers comme la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. L’atmosphère a été créée par une propagande sioniste manifeste ornant les rues, comme une banderole proclamant que "la Palestine n'a jamais existé - et n'existera jamais" (photo ci-dessus). Des secteurs entiers de la vieille ville et de ses environs ont été occupés par des kiosques, des tentes et des caravanes pour le week-end. Des billets VIP exclusifs et chers pour célébrer la "Journée de Sarah" étaient disponibles pour des centaines de dollars US, permettant aux participants de rencontrer et de dîner avec les chefs religieux, les membres de la Knesset et les commandants des Forces israéliennes.

Vendredi après-midi, des milliers de fidèles sont arrivés dans la ville et la présence déjà énorme des forces d'occupation israéliennes (habituellement 4.000 soldats gardent les 400 colons israéliens) était encore plus importante que d'habitude. Des mesures de sécurité renforcées ont été mises en place et des routes principales ont été bloquées, entravant la circulation des Palestiniens autour de la ville et contraignant les magasins arabes à fermer dans un environnement économique déjà étouffé (en raison de la fermeture d'entreprises et de zones par ordre militaire et de la forte répression du commerce et du tourisme par les restrictions à la circulation aux postes de contrôle).

Beaucoup des colons en visite étaient ostensiblement armés, avec des armes de poing ou des armes automatiques, contrairement aux Palestiniens pour qui il est illégal de porter une arme, qui sont étroitement surveillés à tous les nombreux points de contrôle.

Chaque jour, le Mouvement de solidarité internationale (ISM) recevait des informations faisant état d'attaques graves et violentes contre des Palestiniens vivant dans ou traversant des zones où les colons remplissaient les rues.

Vendredi soir, sur la "Route de la prière" menant à la grande colonie de Kiryat Arba, un groupe de 8 Palestiniens a été attaqué dans un salon de coiffure. ISM a parlé à l'une des victimes, Fayed, qui a signalé qu'un grand nombre de colons avaient forcé l'entrée du magasin de son père. Malgré leurs tentatives pour persuader les colons de partir, d'autres sont arrivés pour se joindre à l'attaque. Jusqu'à 100 colons ont pulvérisé du gaz poivré, jeté des pierres, des chaises et des morceaux de bois, endommageant les biens et blessant Fayed, son frère, son oncle et son père. Le cousin de Fayed, âgé de 21 ans, a eu la main fracturée, tandis que lui et son oncle et son père ont été blessés à la tête et aux bras et ont dû être hospitalisés. La police a finalement fait partir les colons, mais aucune arrestation n'a eu lieu. Seuls des détails minimes de l’attaque ont été consignés et il n'y a pas eu d'autre enquête sur ce crime.

Plus tard dans la nuit, d'autres attaques violentes perpétrées par des groupes de colons israéliens contre des Palestiniens ont été signalées dans le même secteur, notamment une agression contre un enfant qui a été frappé à coups de pied et aspergé de gaz poivré, l'obligeant à être transporté à l'hôpital. Une mariée palestinienne a également été harcelée et attaquée par des colons alors qu'elle célébrait son mariage.

Malgré le poids de l'occupation qui pèse sur eux, les attaques brutales et non provoquées des colons et la frustration face au manque de protection des autorités, Fayed et sa famille résistent patiemment. "Notre vie ici est dure, mais nous devons résister. Nous essayons d'être gentils avec tout le monde... de les traiter gentiment, nous ne voulons pas de violence. La violence n'est pas la solution… les colons portent des fusils M16. C'est normal pour nous et notre situation ici - d'être attaqués, arrêtés, tués. On a grandi avec ça. Que pouvons-nous faire ? Nous n'avons pas beaucoup de pouvoir ou de soutien. On ne peut pas se battre avec des armes, ce n'est pas la solution. Combien de Palestiniens ont été tués ? Les armes à feu et les couteaux ne sont pas libres, ils ne libèrent pas la Palestine. Nous ne sommes pas contre les Juifs, nous sommes contre les sionistes et les colons, et contre ceux qui occupent nos maisons.”

Photo
Les forces israéliennes harcèlent des photographes et des journalistes palestiniens lors de la journée de Sarah à Hébron, le 22 novembre.


Le lendemain, toute la vieille ville et une grande partie de la zone normalement libre (connue sous le nom de "H1") a été bouclée, ce qui a permis à des milliers de colons d'effectuer des visites religieuses de la ville. Beaucoup étaient ivres, scandaient des chants anti-palestiniens provocateurs, criant des insultes et urinant sur les biens palestiniens. Au fur et à mesure que la journée avançait, le comportement des colons est devenu de plus en plus violent, avec de nombreux incidents où ils ont jeté des pierres, des bouteilles et d'autres objets sur les Palestiniens et leurs maisons ; ils ont également essayé d’entrer de force dans des maisons palestiniennes en escaladant des murets. L’armée israélienne est restée passive, se contentant de superviser le passage des foules dans les secteurs palestiniens.

Dans un incident choquant, un groupe de colons a attaqué la maison d'un activiste palestinien connu, Imad Abu Shamsiya, qui a été fréquemment pris pour cible depuis qu'il a dénoncé le meurtre d'un Palestinien par un soldat de l’armée d’occupation il y a plusieurs années.

Imad et sa famille sont parmi les quelques Palestiniens assez courageux pour continuer à vivre à Tel Rumeida, une partie d'une zone au cœur de la vieille ville qui a été désignée ‘zone militaire restreinte’ (appelée "H2"). Depuis 1968, Al Khalil a vu l'établissement de colonies juives illégales et, au cours des 20 dernières années, la région a connu un afflux massif de colons fondamentalistes qui croient avoir le droit d'occuper la terre pour des raisons religieuses. Il s'agit de certains des colons les plus extrémistes d'Israël, qui commettent régulièrement des abus et des actes de violence contre les résidents palestiniens, y compris les enfants qui vont à l'école. De nombreux Palestiniens ont été chassés de chez eux et pour ceux qui restent, vivre dans ce quartier est extrêmement dangereux. Leur vie et leur intégrité physique sont quotidiennement menacées.

Samedi, alors que les rues de Tel Rumeida étaient inondées de milliers de nouveaux colons armés, la violence et l'intimidation se sont intensifiées. De nombreux rapports font état d'attaques contre le peuple et les biens palestiniens. On a vu des images d’énormes groupes de colons ivres grimpant sur les toits des maisons palestiniennes, agressant et intimidant les résidents.

Samedi, Imad est resté confiné à la maison avec ses petits-enfants, à cause du grand nombre de colons qui défilaient et se rassemblaient dans les rues, rendant dangereux pour les Palestiniens de quitter leurs maisons. Imad a entendu des colons grimper sur son toit et essayer de pénétrer chez lui par l'entrée. Il a appelé des amis pour qu'ils viennent l'aider et a essayé en vain de convaincre les colons de partir. La horde de colons criait des insultes, crachait et lançait des pierres et des bouteilles. Quelques instants plus tard, Imad a entendu pleurer là où dormait son petit-fils de 18 mois. En courant dans la pièce, il a découvert qu'un colon avait jeté une pierre à travers la fenêtre ouverte, blessant l'enfant à la tête.

Cette partie de la ville étant bouclée et l’accès très restreint, une ambulance n'a pas pu se rendre à la maison pour venir chercher de l'enfant. Il a dû être transporté à travers les rues, protégé par un cercle de voisins contre les colons qui continuaient à essayer d'attaquer le groupe qui tentait de rejoindre l'ambulance.

Imad explique que des soldats israéliens sont arrivés chez lui pendant l'attaque, mais qu'ils n'ont fait que regarder et ne sont pas intervenus pour mettre un terme à la violence. Quand les Palestiniens sont arrivés pour apporter leur soutien, les soldats les ont repoussés et maintenus en arrière, menaçant de les arrêter. L’armée n'a pas non plus prodigué les premiers soins à l'enfant blessé et ne s'en est pas soucié.

Photo
Une pancarte sur la rue Shuhada, Hébron. Le gouvernement israélien a fermé les maisons des Palestiniens vivant dans cette rue et leur interdit de la parcourir, elle est réservée aux Israéliens.


Pendant tout le week-end, il était évident que le nombre important de soldats et de policiers israéliens visait à protéger les colons, et non les résidents palestiniens qui n’ont bénéficié d’aucune protection, même quand ils étaient attaqués. La police n'a pas non plus mené d'enquête sur les divers incidents ni tenté de traduire en justice les colons qui ont commis des actes de violence contre les Palestiniens.

Cela suscite une fois encore des inquiétudes quant au fait que l’armée israélienne ferme les yeux sur la violence et lui permet de se produire, ou bien qu'elle n'a tout simplement aucun pouvoir ni autorité pour contrôler les colons agressifs. Le risque pour les Palestiniens qui tentent de résister à l'occupation et à la violence, comme Imad, est d'être punis, seuls ou collectivement, pour leur défi face au génocide rampant de la terre et du peuple palestiniens.

En essayant de documenter et d'observer la violence et les abus, les militants d’SM ont subi l'hostilité et l'agression des colons et de l’armée, y compris des menaces physiques et verbales, des restrictions de circulation ; la police a pris des photos de nos passeports, a menacé de nous arrêter, pour tenter de nous empêcher de faire notre travail. Les militants pro-palestiniens risquent d'être expulsés, y compris d’être interdits de séjour pendant dix ans, ce qui aurait pour effet de réduire au silence et d'empêcher la documentation des violations des droits humains en Palestine.


Source : Palsolidarity

Traduction : MR pour ISM

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