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Tulkarem - 1 novembre 2007
Par Amira Hass
Si la parcelle de terrain appartenant à M. Salam Fayad, le Premier Ministre palestinien, était située à 50 mètres à l'ouest de son emplacement actuel, dans la partie supérieure du village de Deir al Ghusun, elle serait recouverte maintenant d'épines et de chardons.
Photo David Blumenfeld : un fermier de Deir al Ghusun récolte ses olives
Si elle était située à 50 mètres, ou tout au plus 100 mètres à l'ouest, la parcelle de Fayad se serait retrouvée de l'autre côté de la barrière de séparation, de l'autre côté de la porte 609, que les soldats ouvrent et ferment trois fois par jour pour permettre l'entrée à ceux qui ont réussi, après avoir investi des efforts considérables, à obtenir des autorisations pour se rendre sur leurs terres.
Deir al Ghusun, à huit kilomètres au nord de Tulkarem, s'étend sur une surface d'environ 15.000 dunums (1500 hectares) (y compris l'agglomération). Sur ces 15.000 dunums, 2.200 dunums (220 hectares) sont coincés entre la barrière de séparation et la Ligne Verte.
Ces terres appartiennent à environ 300 familles. Tout au long de l'année, en dehors de la pleine saison pour les agriculteurs, environ 150 personnes ont besoin d'autorisations permanentes pour accéder à leurs propriétés privées
Quelques centaines d'autres ont besoin d'autorisations pendant la cueillette des olives et à saison des récoltes. Sur les 10.000 habitants du village, environ 4.000 vivent de ces parcelles situées de l'autre côté de la barrière. Ou pour être plus précise : en théorie, ils devraient en vivre.
Des employés agricoles s'occupent des choux-fleurs et du maïs dans la parcelle de Fayad. Si ses terres étaient situées de l'autre côté de la barrière, les ouvriers ne pourraient probablement y travailler.
En se basant sur l'expérience des habitants, l'Administration civile accorde des autorisations d'entrée seulement aux propriétaires des terres et à leurs plus proches parents et non à des employés.
Khaled Abdul Latif Khader, l'un des parents de Fayad, est âgé de 61 ans. Il n'a pas d'enfants pour l'aider à cultiver ses 12 dunams qui lui appartiennent ainsi qu'à son épouse. Avant la construction de la barrière, il avait cinq employés.
Vendredi dernier, il s'est rendu sur sa parcelle, il a jeté un œil puis il est parti rapidement : C'était trop douloureux pour lui de voir ses olives que lui et son épouse ne peuvent pas cueillir, la terre qui sans eau s'est asséchée et les mauvaises herbes.
Si le terrain de Fayad était situé là, de l'autre côté de la clôture, et s'il avait décidé de la cultiver, lui ou sa proche famille voilà ce qu'il aurait dû faire : remettre une copie de ses papiers d'identité, son autorisation du Tabou (Département d'Enregistrement des Propriétés) le document d'enregistrement des terres de l'Autorité Palestinienne, tel qu'il a été approuvé par le bureau d'enregistrement des terres de l'Administration Civile, et la demande d'une "autorisation d'entrée dans la Seam Zone" (ligne de couture).
Lorsque le propriétaire décède, ses fils sont tenus de présenter un certificat de décès et d'un droit de succession, puisque la terre n'est pas enregistrée à leurs noms.
L'ensemble de ces documents est soumis à un responsable du conseil de village, qui les transmet ensuite à un fonctionnaire du bureau de Liaison Civile de l'Autorité Palestinienne qui se rend au bureau de l'Administration Civile israélienne dans la colonie de Kedumim et présente une moyenne de 35 demandes par semaine.
Et puis Fayad devrait attendre la réponse et l'autorisation.
Parfois, il faut deux semaines, parfois une semaine, parfois un mois et demi
La réponse négative est griffonnée à la main en hébreu sur la demande d'autorisation : "N.C. - Pas de passage". Sur le formulaire de demande d'Amar Ghanem, 27 ans, on peut lire dans la marge : "Reçu une autorisation de cueillette des olives pour une semaine." En d'autres termes, quelqu'un à l'Administration Civile a décidé qu'une semaine, c'était suffisant. Il n'a pas besoin de plus.
Le père d'Amar, Yasser Ghanem, est propriétaire de 17 dunams de terres de l'autre côté de la barrière, qu'il partage avec ses frères. Le 21 septembre, son ancien laissez-passer de deux ans a expiré. Il a présenté une demande pour une nouvelle autorisation bien avant sa date d'expiration.
Il a attendu et attendu et le laissez-passer attendu depuis longtemps pour lui et son épouse est finalement arrivé le 17 octobre. Il est valable du 16 octobre au 22 octobre. Sept jours, dont la première journée était déjà passée. Une femme de sa famille est décédée le 18 octobre. Yasser a passé trois jours dans la maison en deuil. Il ne lui restait plus qu'une seule journée.
Son frère Taisir et sa belle-sœur ont reçu une autorisation le même jour, le 17 octobre. Leur autorisation démarrait également le 16 du mois, mais il n'était valable que jusqu'au 18 octobre. Et Taisir avait récemment planté de nouveaux jeunes arbres qui doivent être arrosés tous les quatre jours.
Bakr Ibrahim avait un laissez-passer de trois mois qui a expiré le 6 octobre. Il a déposé une demande pour en obtenir un nouveau et depuis, il attend. Les olives sur les arbres attendent elles aussi.
En se basant sur des conversations fortuites avec les agents, les habitants de Deir al Ghusun expliquent le changement - de l'attribution d'autorisations pour une période de deux ans à seulement quelques jours – comme étant une conséquence du changement à la tête du Ministère de la Défense : Le bureau d'Amir Peretz avait fait comprendre aux agents de l'Administration Civile qu'il était important de cueillir jusqu'à la dernière olive. Mais la dernière olive n'a pas d'importance pour Ehud Barak.
Ce dimanche, 18 autorisations sont arrivées dans les bureaux du conseil du village: cinq sont valables pour un an, l'une pour trois mois, six entre 12 jours et quatre semaines, et les six autres sont valables pour deux jours.
Husni Abdullah est l'un des agriculteurs qui, dans l'après-midi du 28 octobre, a reçu l'autorisation qu'il attendait depuis le début du mois. Le permis est valide du 28 octobre au 29 octobre. La surface de son terrain : 34 dunams (3.4 ha).
Une récolte d'une journée
Le 24 octobre, il a adressé une lettre, via les activistes de Machsom Watch, au Colonel Sharon Afek, le conseiller juridique des "Forces de Défense Israélienne" pour la Cisjordanie .
Dans cette lettre, il a expliqué sa situation ainsi que celle de son cousin, Hafez. Tous les deux n'ont pas d'enfants. Ils cultivent tous les deux la même parcelle. Ils avaient tous les deux un laissez-passer de deux ans. Aucun d'eux n'a obtenu un renouvellement de leur laissez-passer à temps bien qu'ils aient déposé leurs demandes en septembre.
"C'est vrai", note-il dans la lettre, "qu'il y a trois autres membres de la famille possédant une autorisation : l'un est handicapé et ne peut pas travailler, et certainement pas tout seul; Un second est en train d'étudier en Jordanie et le troisième est l'épouse de Husni. Comment peut-elle récolter les olives toute seule sur une superficie de 34 dunams ?"
Après avoir reçu enfin une autorisation de deux jours (qui s'est avérée être d'une journée), il a de nouveau écrit au conseiller juridique, en utilisant les services de Machsom Watch. "L'autorisation est ridicule", écrit-il.
Seulement à peu près 10 habitants du village n'ont pas reçu d'autorisation, pour des raisons de "raisons de sécurité." L'un d'eux est Jafar Abdul Munim. Il avait une autorisation de deux ans, valable jusqu'au 4 novembre de cette année. Il a oublié l'autorisation dans la poche de son pantalon qui est parti au lavage. Quand il a demandé une nouvelle autorisation, l'Administration civile l'a soudain informé qu'il "n'aurait pas de laissez-passer pour des raisons de sécurité."
Munim a également envoyé une lettre au conseiller juridique des FDI via Machsom Watch. Dans cette lettre, il a affirmé qu'il n'y avait aucune raison de le transformer en un risque pour la sécurité, et il a demandé à être invité devant les comités spéciaux (nom de code: "comités agricoles") des services de sécurité du Shin Bet afin de prouver qu'il ne représentait pas soudainement un risque pour la sécurité.
Seul son frère a une autorisation pour travailler sur la parcelle de 22 dunams (2,2 ha). "Mon frère ne peut pas effectuer le travail tout seul", a écrit Jafar au Colonel Afek. "Une grande partie de la récolte pour laquelle nous avons travaillé tellement dur toute l'année pour subvenir aux besoins de notre famille va aller à la poubelle."
Il s'agit d'une déclaration qui pourrait devenir le credo de nombreux habitants dans le village du Premier Ministre palestinien.
L'administration civile affirme qu'il n'y a aucun changement dans la politique d'attribution des autorisations et que les procédures sont déterminées par "un organisme professionnel incluant un officier chargé de l'agriculture, avec comme principale préoccupation de rendre les choses plus faciles pour les habitants et de réduire au minimum les préjudices causés aux agriculteurs."
Dans sa réponse, les autorités israéliennes ont affirmé que la durée des autorisations "était déterminée en fonction de la surface de la parcelle. Dans le passé, à la lumière de l'approche laxiste, de nombreuses autorisations (pour les agriculteurs et les travailleurs) ont été accordées à des habitants qui n'y avaient pas droit, parce que la surface de leurs parcelles était petite, à un tel point que nous soupçonnons une tentative d'obtention frauduleuse d'autorisation, et le travail de la terre n'a certainement pas besoin de beaucoup de jours de travail ou d'embaucher un certain nombre d'employés. Chaque demande est traitée différemment, ce qui explique les différences dans la durée des réponses. "
En d'autres termes, d'après la réponse de l'Administration Civile, nous pouvons conclure que les permis sont en fait accordés à des ouvriers".
Le conseil de Deir al Ghusun affirme que la décision sur la durée des autorisations est arbitraire et qu'elle ne tient pas compte des propriétés familiales, de l'habituel travail coopératif et du fait que certains des héritiers n'ont jamais mis les pieds sur leur terrain et qu'il le laisse aux soins des autres frères et soeurs.
Les agriculteurs disent également que la saison de la cueillette des olives est suivie de la saison de cueillette des amandes et que la culture des terres nécessite un travail prolongé qui va au-delà de la récolte des olives.
Source : http://www.haaretz.com/
Traduction : MG pour ISM
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Cueillette des olives
Amira Hass
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