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Israël - 28 septembre 2007
Par Dorothy
traduit de l'hébreu par Allan Solomonow
En fait, ces témoignages de soldats ne sont pas l'aspect le plus important de cet article. Briser le Silence, Le Courage de Refuser et B'tselem publient de nombreux reportages de ce genre.
Selon moi, les deux principaux éléments sont :
(a) le fait que les 2/3 des 21 soldats interviewés aient quitté Israel pour d'autres cieux, et
(b) la dernière phrase où la mère déclare : "J'ai envoyé à l'armée un gentil kibutznik, et j'ai récupéré un homme qui déteste les Arabes."
Cette phrase, plus que toute autre chose montre l'effet produit par l'enrôlement dans l'armée, en particulier dans les unités de combat, sur un individu.
L'article ci-dessous est une traduction abrégée d’un article de Dalia Karpel intitulé "Hamedovevet" (celui qui fait parler les gens).
L’article est paru dans le supplément du Hebrew Weekend, le 21 septembre 2007. Il est basé sur une enquête universitaire réalisée par Nofer Ishai-Karen et le Professeur de Sociologie, Joel Elitzur, de l'Université Hébraique publiée dans ALPAYIM Magazine Vol. 31.
L’article n’a pas été traduit en anglais et n’est donc PAS apparu dans l’édition en anglais de Ha’aretz
Une nouvelle étude confirme nos pires craintes
Dalia Karpel
Une enquête universitaire du Sociologue Nofer Ishai-Karen et du professeur de Sociologie. Joel Elizur, de l'Université Hébraique a été publiée vendredi dernier, seulement dans l'édition Hébreue de Haaretz. Nous pensons que tout le monde doit être au courant.
"Nous - les soldats israéliens - avons été envoyés là pour punir les Palestiniens", dit Ilan Vilenda, un soldat israélien qui a servi à Rafah pendant le premier Intifada.
Ilan est le seul soldat sur 21 à avoir accepté que son nom soit publié, après qu'il ait été interviewé par le psychologue Nofer Ishai-Karen.
Les soldats ont parlé librement à Nofer, qui avait servi avec eux dans le même peloton ASHBAL il y a 20 ans ; Ils ont dévoilé leurs émotions les plus secrets au sujet des crimes affreux auxquels ils ont participé : des Meurtres, les bris d'os à des enfants palestiniens, des actions d'humiliation, les destructions de biens, des cambriolages et des vols.
Témoignage du soldat "A":
"Dans notre base, nous avons décidé de transformer une ancienne douche dans notre base en une cellule de détention de fortune. Un Palestinien y a été placé, menotté et un bandeau sur la bouche pour qu'il ne puisse pas parler, ou bouger. Nous "'avons oublié là pendant trois jours".
Témoignage du soldat "B" :
"C'était ma première patrouille. D'autres tiraient tout simplement comme des dingues. J'ai commencé à tirer comme eux. Ils "m'ont lâché". J'ai pris mon arme et j'ai tiré. Personne n'était là pour me dire quoi que ce soit"
-- La psychologue Ishai-Karen a été choqué de constater que les soldats avaient apprécié l'"intoxication du pouvoir", et qu'ils avaient pris le plaisir à utiliser la violence.
Elle dit : "La plupart de mes interviewés ont apprécié leur propre violence provoquée pendant leur service dans l'armée d'Occupation."
Témoignage du soldat "C" :
"La vérité, c'est que j'aime cette merde - je l'apprécie. C'est comme être drogué.
Si je n'entrais pas dans Rafah, pour réprimer la rébellion – au moins une fois par semaine je devenais fou furieux."
Témoignage du soldat "D" :
Ce qui est génial, c'est que vous n'avez pas à suivre la loi ou un règlement. Vous estimez que VOUS ÊTES LA LOI ; vous décidez. Une fois que vous entrez dans les territoires occupés VOUS ÊTES DIEU".
Mutisme émotionnel
Témoignage du soldat "E":
Nous conduisions un APC dans Rafah. Un homme de 25 ans marchait à côté. Il n'a pas lancé de pierre sur nous ou quoi que ce soit. Alors sans raison, "X" lui a tiré dans l'estomac. Nous l'avons laissé gisant sur le trottoir".
Témoignage du soldat "F" :
Quelques "durs" ont développé une "idéologie", selon laquelle nous devons réagir brutalement même pour des événements mineurs. Une femme m'a jeté une sandale. Je lui ai donnée un coup de pied entre les jambes. Elle a eu une fracture. Elle ne pourra plus avoir d'enfants.
La prochaine fois, elle ne me jettera pas ses sandales à la figure… et quand une autre femme m'a craché au visage, elle a reçu la crosse de mon fusil dans la figure. Elle ne peut plus cracher maintenant.
Le soldat "G" a décrit sa première entrée forcée dans une maison pour arrêter un Palestinien.
"Il était vraiment grand, environ 30 ans. Il a refusé la détention. Nous l'avons frappé mais ne pourrions pas le forcer à descendre. Certains sont venus nous jeter des pierres. Nous l'avons frappé et nous lui avons dit de s'allonger. Jusqu'à ce qu'il le fasse enfin. Nous l'avons emmené à la base. À ce moment-là, il avait perdu connaissance. Il est mort quelques jours plus tard."
Nofer Ishai-Karen : "Certains sous-officiers ont encouragé les soldats à se comporter brutalement, et ils leur ont montré l'exemple."
Témoignage du soldat “H” :
Après avoir passé deux mois à Rafah, un nouveau commandant est arrivé. La première patrouille sous son commandement avait lieu à 6 h. Rafah était sous couvre-feu.
Pas âme qui vive dans les rues. Puis il a vu un petit garcon, d'environ 4 ans, qui jouait dans le sable dans la cour de sa maison. Le gosse faisait un château de sable.
Soudain l'officier, un type du Génie, s'est mis à courir derrière le gosse. Nous l'avons suivi. Il a attrapé le gosse et il lui a cassé le coude. Il a cassé le coude du gamin ! Que je sois damné si je ne dis pas la vérité !
Puis l'officier lui a marché sur le ventre à trois reprises avant de partir. Nous ne pouvions pas en croire nos yeux … Mais le lendemain, nous sommes partis en patrouille avec ce type et les soldats ont commencé à l’imiter…
Qu'est-il arrivé ensuite ?
Certains gars ne pouvaient pas l'encaisser. Le cas du traitement violent de trois adolescents, auxquels un sergent-chef a lié les mains et les pieds, les a poussé à alerter un officier supérieur.
"Quand le toubib est arrivé, les garçons saignaient de partout, leurs vêtements étaient trempés de sang, et ils tremblaient de peur.
Ils ont dû se mettre à quatre pattes comme des chiens et ils avaient peur de bouger."
L'officier a été puni de trois mois de détention. Mais le commandant du peloton a soutenu l'officier et il a réprimandé les soldats scrupuleux pour avoir ‘calomnié le peloton".
Nofer Ishai-Karen : "La valeur sacrée dans l’armée (israélienne), c'est la "solidarité des combattants", c’est-à-dire une loyauté envers vos camarades de combat".
Les pelotons protégeaient leurs secrets, comme une famille défend son "mouton noir". Les camarades considèrent les soldats consciencieux comme des traîtres, dit Nofer Ishai-Karen.
L'affaire a été totalement étouffée quand notre "brave type" fut excommunié et mis en quarantaine par l'ensemble du peloton.
Et l'officier ? Il a quitté le pays et il vit maintenant aux Etats-Unis. La majorité des soldats de ces pelotons ont quitté Israël. Seuls 5 sur 6 vivent encore en Israël.
Nofer a étudié les deux pelotons ESHBAL et ESHKHAR, ce dernier yant été encore plus violent, dit-elle.
Enfin, retour sur Ilan Vilenda, le seul soldat ayant autorisé Nofer à citer son nom et même à le photographier. Vilenda était un sergent-chef en charge des ‘opérations’.
Témoignage d’Ilan Vilenda :
"Notre boulot, c’était de les tabasser … J’ai personnellement frappé deux garçons. J'ai utilisé mes mains ou une matraque. Nous frappions plus durement les adultes (Palestiniens). Nous agisions comme des policiers mais en dehors des lois.
Il y avait ce Palestinien qui avait une télévision chez lui.
C'était la coupe du Monde de Football et nous avions l'habitude d'envahir sa maison pour voir les matchs. A la fin il en a eu assez, et il nous a demandé de prendre la télé et de partir.
"Je suis né dans un kibboutz, dans une famille dont les valeurs étaient celles de la "Gauche Sioniste". Les Palestiniens nous jetaient des tonnes de pierres. Bien qu’au début mon engagement idéologique retenait mes actes, j'ai accumulé de la colère et je l’ai relâchée violemment. Cela devait arriver.
Nous étions là "pour les faire payer". Mes opinions politiques ont changé aussi. Je soutiens maintenant le Parti National Religieux d’extrême droite".
Quand il a été libéré de l'armée, Vilenda et cinq autres Israéliens ont été arrêtés à Goa en Inde pour la possession de LSD.
"Je voulais servir mon pays. C’était mon devoir … mais l'ensemble de l’IDF exécute des ordres illégaux."
Qui est responsable ?
Le Général Matan Vilna'i (maintenant vice-Ministre de la Défense sous les ordres d’Ehud Barak) était à l’époque (pendant la première Intifada) le chef du commandement Sud de l’IDF.
Il venait souvent voir notre peloton et discutait avec les soldats, dit Nofer. Mais … et voilà … les "Instruments du DEMENTI et de la DISSIMULATION’ ont fonctionné…"
En outre : L’armée israélienne ne fournissait pas d’entraînement régulier à l'unité, elle ne donnait pas aux soldats des permissions régulières, ou du temps libre pour récupérer et se reprendre. Les soldats interviewés ont maintenu que plus ils opéraient (contre les Palestiniens à Rafah) sans permission, plus ils devenaient violents dans leur imposition de leur genre "Loi et Ordre".
Ils ont affirmé que (les commandants de) l'armée étaient conscients de la dérive vers la violence, et qu'ils l’encourageaient pour économiser des effectifs".
NOTES :
Le Général Matan Vilna’i devait savoir ce qui se passait. Des hauts gradés qui ont servi en Cisjordanie Occupée ont exprimé des avertissements analogues contre le comportement de l’armée israélienne.
"Les ordres laissaient un trou béante une marge … de "zone grise" non spécifiée de façon intentionnelle, ce qui encourageait le comportement violent des soldats", a déclaré le Colonel de Réserve Elisha Shapira, qui a servi dans le secteur de Naplouse à la même époque. Nous disions aux soldats "Ne frappez pas les Palestiniens – mais amenez-les à l’interrogatoire "avec la grosse tête" – explosée".
Les événements sur lesquels a enquêté Nofer Ishai-Karen se sont déroulés il y a environ 17 ans.
La situation s’est encore détériorée depuis cette époque.
Maintenant un général de l’armée israélienne et des forces aériennes se vante ouvertement d’actes de vengeance contre des civils Palestiniens.
Le Général de division Eliezer Shkeidi a été très fier d’annoncer que ses pilotes passaient le mur du son au-dessus de Gaza, produisant des bangs sonores.
Ils causent de graves symptômes post-traumatiques chez les jeunes enfants ; ils ont également causé des fausses couches chez les femmes enceintes.
Le bombardement aveugle de maisons palestiniennes a causé récemment de nombreuses morts, dont de nombreux enfants. Peut-être enfin et surtout : le gouvernement israélien, soutenu par Washington, a déclaré qu’il pourrait interromprait l'approvisionnement en électricité et en carburant à Gaza.
[1] C'est une traduction abrégée d’un article de Dalia Karpel intitulé "Hamedovevet" (celui qui fait parler les gens). L’article est paru dans le supplément du Hebrew Weekend, le 21 septembre 2007. L'article est basé sur une enquête universitaire réalisée par Nofer Ishai-Karen et le Professeur de Sociologie, Joel Elitzur, de l'Université Hébraique publiée dans ALPAYIM Magazine Vol. 31.
[2] L’article n’a pas été traduit en anglais et n’est donc PAS apparu dans l’édition en anglais de Ha’aretz.
[3] Le professeur de Sociologie Joel Elizur, de l’Université Hébraïque, qui a guidé Nofer Ishai-Karen dans sa thèse de Maitrise, a servi comme réserviste dans le Département de Santé Mentale de l’armée israélienne. Mais l’IDF ne l’a pas autorisé à faire des recherches sur la violence des soldats israéliens. Les chercheurs possèdent les enregistrements audio des interviews.
[4] A ma connaissance, l’armée israélienne n’a jamais été accusée d’un seul cas de mauvais traitement ou de meurtre de Palestiniens par des soldats devant un tribunal approprié.
Source : http://www.thepeoplesvoice.org/
Traduction : MG pour ISM
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