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ISM France - Archives 2001-2021

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Palestine -

Aller en Palestine

Par

> deborah@mecaforpeace.org

Deborah Agre est directrice de développement pour l'Alliance des Enfants du Moyen Orient (Middle East Children's Alliance - MECA) à Berkeley, Californie et co-dirige des délégations annuelles de MECA en Palestine/Israël. La prochaine délégation aura lieu du 1er au 12 juillet 2008. Pour plus d'informations : www.mecaforpeace.org.

Presque chaque jour, je pense, je parle et je lis sur la Palestine. Mais cela faisait plus de trois ans depuis mon dernier voyage et il y a des choses qu'on ne peut vraiment comprendre qu'en y allant, voir le paysage et sa destruction, les insultes et blessures quotidiennes de l'occupation, et surtout, connaître quelques personnes, écouter leurs histoires et être invités dans leurs vies.

Aller en Palestine


Ce qui reste de la maison familiale de Yacoub Odeh, dans le village détruit de Lifta (photo Judith Mahoney Pasternak)


Yacoub Odeh était le guide de ce tour de douze jours de l'Alliance des Enfants du Moyen Orient à travers la Palestine/Israël. Il est devenu un ami et m'a raconté et montré des choses que je sais que je n'oublierai jamais. A 67 ans, Yacoub semble porter avec lui toute l'histoire de la Palestine moderne. Et c'est par-dessus tout une histoire - et une expérience continue - de perte terrible.

Le premier jour, Yacoub nous a emmenés à Lifta, le village à l'ouest de Jérusalem où il est né et où il a vécu jusqu'en 1948 lorsque lui, avec sa famille, ses voisins et environ 750.000 palestiniens ont été chassés de leurs maisons par les milices qui deviendraient bientôt l'armée israélienne.

Après avoir descendu à pied le chemin pentu jusqu'à ce qui avait été le centre du village, quelqu'un a demandé à Yacoub ce qu'il se souvenait de sa vie d'enfant ici. Il a dit, avec emphase : "Je m'en souviens ex-ac-te-ment. Ex-ac-te-ment" et puis il s'est tourné, a regardé un figuier, à côté, et nous a dit que ses cousins plus âgés grimpaient à l'arbre lorsque les figues étaient mûres et les faisaient tomber, pendant que lui et ses frères attendaient en bas avec impatience pour en attraper.

En face de nous, il y avait la source que les villageois utilisaient pour leurs maisons et pour les jardins en terrasse et les vergers luxuriants, envahis par les mauvaises herbes mais toujours là. Aujourd'hui, une douzaine de colons israéliens en habit orthodoxe se rafraîchissaient à la source.

Yacoub nous a emmenés aux pressoirs à olives, à l'école, et aux vestiges de la maison familiale – seulement quelques murs de pierre démolis. "C'était ma maison. Là où je suis né", dit-il. Il nous a montré l'alcôve qui servait de magasins de bonbons où il nous a fait une imitation comique de lui, enfant, chassé par les propriétaires, se cachant et puis revenant pour en prendre d'autres. Il nous a aussi montré les graffiti, les déchets et des endroits où les carreaux de mosaïque ont été volés.

Si la Nakba – la Catastrophe que les Palestiniens ont vécu lorsque l'Etat d'Israël a été créé – n'était pas arrivée, Lifta serait resté certainement comme il était en 1948. Ou il serait devenu une chose du passé, comme tellement de communautés agricoles dans des endroits qui ont été modernisés partout dans le monde. Le problème, c'est que les Palestiniens ont été privés de choisir la direction de leurs propres vies, ou celle de leur nation.

En attendant, Yacoub a passé dix-sept ans comme prisonnier politique dans les geôles israéliennes, une expérience sur laquelle il revient encore et encore.

Alors que nous sommes en voiture à travers le Désert du Néguev, Yacoub regarde par la fenêtre, hoche la tête et se souvient : "J'ai passé dix ans dans le Néguev, mais tout ce que j'ai vu, c'est l'intérieur de ma cellule". Nous passons devant un hôpital et il nous dit qu'il a été soigné pour des blessures graves infligées par les gardiens israéliens de la prison qui lui ont versé du café brûlant et éteint leurs cigarettes sur la tête. "Quand l'infirmière m'a vu, elle a hurlé au soldat israélien : "Comment as-tu pu faire ça ?" et il a répondu : "Ce n'est pas ma faute, je ne fais que l'amener ici". "Oui", dit Yacoub en soupirant et mettant la main sur la cicatrice de son crâne où il y a une plaque de métal. "Oui, il avait raison. Ce n'était pas sa faute."

J'ai passé ma dernière soirée en Palestine avec Yacoub, sa femme et ses trois enfants, chez eux à Jérusalem Est occupée. Avec trois amis de prison, ils ont construit les appartements – sans permis.

Obtenir un permis de construire à Jérusalem, ou seulement ajouter une fenêtre à une maison, est un processus coûteux et hasardeux. Et à la fin, les Palestiniens obtiennent rarement les permis, alors ils bâtissent sans et risquent la démolition. En tant que surveillant pour des Droits de l'Homme et le Logement au Centre de Recherche pour la Terre et le Logement, Yacoub enquête sur les démolitions des maisons à Jérusalem. Tous les jours, il rencontre des familles dont sa propre famille pourrait un jour partager le sort.

Il me tarde de revenir en Palestine et de revoir Yacoub et mes autres amis. Mais aussi important que ce soit pour moi, personnellement, je crois que le travail le plus important que je peux faire, moi et les autres aux USA, pour la Palestine, est ici chez moi – faire changer les cœurs et les esprits, et la politique de notre gouvernement.

Souvent, je pense que quoique nous accomplissions, c'est trop petit, c'est trop tard. Mais c'est déjà quelque chose, et nous devons tous continuer à faire notre part, "nonobstant les difficultés et les obstacles terribles", comme disait feu Edward Said, qui ajoutait :

"Pourquoi ? Parce que c'est une cause juste, un idéal noble, une quête morale pour l'égalité et les droits humains."


Source : Electronic Intifada

Traduction : MR pour ISM

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