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Grande Bretagne -

Comment le "nouvel anti-sémitisme" encourage l'Holocauste nucléaire

Par

Jonathan Cook, qui habite à Nazareth, est l’auteur de l’ouvrage "Sang et Religion : Il faut démasquer l’Etat "juif et démocratique"" (Blood and Religion : The Unmasking of the Jewish and Democratic State), publié par les éditions Pluto Press et disponible aux Etats-Unis auprès des University of Michigan Press

L'évolution de la longue campagne qui a donné naissance ce mois-ci au rapport grotesque sur l'anti-sémitisme auquel tous les parlementaires britanniques ont pris part trouve sa source dans le lobby intensif du gouvernement israélien qui a commencé il y a plus de quatre ans, au début de l'année 2002.

À ce moment-là, alors qu'Ariel Sharon mettait en pièces les lambeaux restants des accords d'Oslo en ré-envahissant les villes de Cisjordanie qui avaient été remises à l'Autorité Palestinienne dans son déchainement destructeur connu sous le nom d'Opération Bouclier Défensif, il a appelé les médias israéliens à entrer dans la bagarre.

Les journaux locaux ont commencé à souligner sans fin les inquiétudes au sujet de l'apparition d'un "nouvel anti-sémitisme", un thème qui a été rapidement repris avec enthousiasme par le lobby sioniste costaud aux Etats Unis.

Ce n'était pas la première fois, naturellement, qu'Israël demandait aux loyalistes américains de l'aider à sortir des problèmes.

Dans "Beyond Chutzpah" (ndt : Au delà du culot monstre) Norman Finkelstein documente l'avènement des affirmations au sujet d'un nouvel anti-sémitisme à la terne performance d'Israël pendant la guerre du Yom Kippur 1en 973.

À cette occasion, espérait-on, l'accusation d'anti-sémitisme pourrait être déployée contre les critiques afin de diminuer la pression sur Israël pour qu'il rende le Sinai à l'Egypte et qu'il négocie avec les Palestiniens.

Israël avait alerté le monde d'une autre vague d'anti-sémitisme au début des années 80, alors qu'il faisait l'objet d'une critique sans précédent pour son invasion et son occupation du Liban.

Ce qui distinguait le nouvel anti-sémitisme du racisme anti-Juif traditionnel qui a mené aux camps de la mort en Allemagne, disent ses instigateurs, c'était que cette fois-ci, il englobait la Gauche progressiste plutôt que l'Extrème-Droite.


Les dernières affirmations d'anti-sémitisme ont démarré leur vie au printemps 2002, avec le site internet en langue anglaise du respecté quotidien libéral israélien, Haaretz, qui a pavoisé pendant de nombreux mois un supplément en ligne spécial d'articles sur le "nouvel anti-sémitisme", avertissant que "la haine historique" était rétablie en Europe et Amérique.

Le refrain a été bientôt repris par le Jérusalem-Post, un journal de Droite en langue anglaise régulièrement utilisé par l'establishment israélien pour étayer le soutien de sa politique auprès des juifs de la Diaspora.

Comme ses précurseurs, arguent les apologistes d'Israël, la dernière vague d'anti-sémitisme vient des mouvements progressistes occidentaux – bien qu'avec une nouvelle distorsion.

Un anti-sémitisme occidental toujours présent mais en grande partie latent était alimenté avec frénésie par l'influence politique et intellectuelle croissante des immigrés musulmans extrémistes. L'implication était qu'une alliance profane avait été engendrée entre la Gauche et l'Islam militant.

Ces opinions ont été diffusées d'abord par des membres du gouvernement Sharon.
Dans une interview publiée par le Jérusalem Post en novembre 2002, par exemple, Binyamin Netanyahu avait averti que l'anti-sémitisme latent redevenait actif :
"De mon point de vue, il y a beaucoup de gens en Europe qui s'opposent à l'anti-sémitisme, et beaucoup de gouvernements et responsables qui s'opposent à l'anti-sémitisme, mais la tendance y existe. C'est ignorer la réalité que de dire qu'elle n'est pas présente. Elle a maintenant été épousée et stimulée par la force la plus efficace et la plus manifeste de l'anti-sémitisme, qui est l'anti-sémitisme islamique venant de certaines des minorités islamiques dans les pays européens. Ceci est souvent déguisé comme de l'anti-Sionisme".

Netanyahu a proposé "d'enfoncer le clou" en commençant une campagne agressive de relations publiques "d'auto-défense".

Un mois plus tard, le président israélien, Moshe Katsav, a choisi la cible la plus faible de toutes, en prévenant lors d'une visite d'Etat que le combat contre l'anti-sémitisme devait commencer en Allemagne, où des "voix d'anti-sémitisme pouvaient être entendues".

La principale cible de la nouvelle campagne d'anti-sémitisme était le public des Etats-Unis, le généreux patron d'Israël. Là-bas, les membres du Lobby israélien se transformaient en choeur de fatalité.

Au début de la campagne, la véritable motivation du Lobby n'était pas cachée : il voulait étouffer un débat naissant parmi la société civile américaine, en particulier empêcher les églises et les universités de désinvestir -- retirer leurs investissements substantiels -- d'Israël en réponse à l'opération Bouclier Défensif.

En octobre 2002, après qu'Israël ait réellement réoccupé la Cisjordanie , le toujours fiable Abraham Foxman, directeur de la Ligue Anti-Diffamation, accablait de critiques ceux qui appelaient au désinvestissement d'Israël avec les nouveaux antisémites.

Il a poussé une nouvelle institution établie par le gouvernement israélien appelée le Forum pour la Co-ordination de la Lutte contre l'anti-sémitisme à exprimer clairement "ce que nous savons dans nos coeurs et nos entrailles : quand cette ligne (de l'anti-sémitisme) est dépassée."

Une quinzaine de jours plus tard, Foxman a pris son rythme de croisière, en avertissant que les juifs étaient plus vulnérables que jamais depuis la Seconde Guerre Mondiale. "Je n'aurais jamais cru de toute ma vie que je ou nous serions préoccupés à ce niveau-là, ou que [nous affronterions) une intensité de l'anti-sémitisme que nous rencontrons", a-t'il dit au Jérusalem Post.

Faisant echo à l'avertissement de Netanyahu, Foxman a ajouté que la propagation rapide du nouvel anti-sémitisme avait été rendue possible par la révolution des communications, principalement internet, qui permettait aux Musulmans de relayer leurs messages de haine à travers le monde en quelques secondes, infectant les gens dans le monde entier.

Il est maintenant clair qu'Israël et ses loyalistes avaient à l'esprit trois principaux objectifs quand ils ont commencé leur campagne. Deux étaient des motifs familiers aux précédentes tentatives de souligner un "nouvel anti-sémitisme". Le troisième était nouveau.

Le premier objectif, et probablement le mieux compris, était d'étouffer toute critique d'Israël, en particulier aux Etats-Unis.

En 2003, il est devenu de plus en plus évident pour des journalistes comme moi que les médias américains, et bientôt une grande partie des médias européens, devenaient de plus en plus timides pour imprimer même une critique tempérée d'Israël qui était habituellement autorisée.

Avant qu'Israël ait commencé à intensifier la construction de son mur monstrueux à travers la Cisjordanie au printemps 2003, les rédacteurs étaient peu disposés à toucher à l'histoire.

Comme le quatrième pouvoir était réduit au silence, plusieurs des voix progressistes dans nos universités et nos églises l'ont été aussi. Le désinvestissement a été entièrement enlevé de l'ordre du jour.

Des organisations McCarthyistes comme CampusWatch ont aidé à imposer le règne de l'intimidation. Les universitaires qui ont tenu bon, comme Joseph Massad de l'Université de Colombia, ont attiré l'attention vindicative de nouveaux groupes d'activistes comme le David Project.


Un second objectif, moins remarqué, était un désir pressant d'empêcher tout dérapage parmi les nombreux juifs à l'intérieur d'Israël qui pourrait bénéficier aux Palestiniens pendant que les deux groupes ethniques approchaient de la parité démographique dans la région connue des Israéliens comme le Grand Israël et des Palestiniens comme la Palestine historique.

La démographie avait été une obsession de longue date du mouvement Sioniste : pendant la guerre de 1948, l'armée israélienne a terrorisé ou fait partir de force 80% des Palestiniens vivant à l'intérieur des frontières de ce qui est devenu Israël pour garantir son nouveau statut d'Etat juif.

Mais à l'approche du Millénium, après l'occupation par Israël de la Cisjordanie et de Gaza en 1967, et la croissance rapide des populations palestiniennes opprimées dans les territoires occupés et à l'intérieur d'Israël, la démographie a été à nouveau poussée au sommet de l'agenda de la politique israélienne.

Pendant le deuxième Intifada, alors que les Palestiniens luttaient contre la machine de guerre israélienne avec une vague d'attaques-suicides contre des autobus dans les principales villes israéliennes, le gouvernement de Sharon a craint que les juifs israéliens commencent à considérer l'Europe et l'Amérique comme un pari plus sûr que Jérusalem ou Tel Aviv. Le danger était que la bataille démographique pouvait être perdue si les juifs israéliens émigraient.

En suggérant que l'Europe en particulier soit devenue un germoir de fondamentalisme islamique, on espérait que les juifs israéliens, dont beaucoup ont plus d'un passeport, auraient peur de partir.

Un sondage réalisé par l'Agence Juive dès mai 2002 montrait, par exemple, que 84% des Israéliens croyaient que l'anti-sémitisme était encore devenu une menace sérieuse pour la communauté juive.

En même temps, les politiciens israéliens ont concentré leur attention sur les deux pays européens avec le plus grand nombre de population juive, la Grande-Bretagne et la France, qui ont également un nombre significatif de Musulmans immigrés. Ils ont souligné une apparition supposée de l'anti-sémitisme dans ces deux pays dans l'espoir d'attirer leurs populations juives en Israël.

En France, par exemple, des attaques anti-sémites particulières ont reçue une abondante couverture médiatique : de celle d'un rabbin qui a été poignardé (il s'est avéré plus tard qu'il s'était poignardé lui-même) à celle d'une jeune femme juive attaquée dans un train par une bande d'anti-sémites (sauf que plus tard il s'est avéré qu'elle n'était pas juive).

Sharon a tiré profit du climat de peur fabriqué en juillet 2004 pour affirmer que la France était atteint "de l'anti-sémitisme le plus sauvage", invitant les juifs français à venir en Israël.


Cependant, le troisième objectif n'avait pas été vu avant. Il reliait l'apparition du nouvel anti-sémitisme avec l'augmentation du Fondamentalisme Islamique en Occident, impliquant que les extrémistes musulmans affirmaient un contrôle idéologique sur la pensée occidentale. Cela sonnait bien dans l'atmosphère de post 11 septembre.

Dans cet esprit, des universitaires juifs américains comme David Goldhagen ont caractérisé l'anti-sémitisme comme étant en "évolution" constante.
Dans un article intitulé "la mondialisation de l'anti-sémitisme" publié dans l'hebdomadaire juif américain Forward en mai 2003, Goldhagen expliquait que l'Europe avait exporté son anti-sémitisme raciste classique vers le monde arabe, qui réinfectait l'Occident.

"Alors les pays arabes ont réexporté la nouvelle démonologie hybride vers l'Europe et, en utilisant les Nations Unies et d'autres institutions internationales, vers d'autres pays dans le monde. En Allemagne, en France, en Grande-Bretagne et ailleurs, l'expression et l'agitation anti-sémites intensives d'aujourd'hui utilisent de vieilles expressions appliquées par le passé aux juifs locaux – accusations de semer le désordre, vouloir subjuguer les autres -- avec le nouveau contenu primordialement dirigé contre les juifs à l'extérieur de leurs pays".

Cette théorie d'une contagion de haine envers les juifs "flottant librement" et répandue par les Arabes et leurs sympathisants via internet, les médias et les institutions internationales, a trouvé beaucoup d'admirateurs.

La journaliste néo-conservateur britannique Melanie Philips a affirmé d'une façon populaire, si ce n'est risible, que l'identité britannique était bouleversée et éliminée par une identité islamique qui transformait son pays en capitale de la terreur, "Londonistan".

Cet objectif ultime des partisans "du nouvel anti-sémitisme" était aussi réussi parce qu'il pouvait être facilement combiné avec d'autres idées associées à la guerre contre le terrorisme de l'Amérique, comme le clash des civilisations.

Si c'était "nous" contre "eux", alors le nouvel anti-sémitisme a posé; dès le début; le principe que les juifs étaient du côté des anges. C'est à l'occident chrétien de décider s'il veut faire un pacte avec le bien (le judaïsme, Israël, la civilisation) ou le mal (l'Islam, Oussama Ben Laden, Londonistan).

Nous sommes loin d'atteindre le bout de cette route perfide, parce que la Maison Blanche est en faillite d'initiatives politiques en dehors de sa guerre contre le terrorisme et parce que la place d'Israël est assurée pour le moment au coeur de l'agenda neoconservateur de l'administration américaine.

Cela a été très clair la semaine dernière quand Netanyahu, le politicien le plus populaire en Israël, a ajouté encore une autre couche de sottise mortelle à la machine néoconservatrice alors qu'elle se dirige vers une confrontation avec l'Iran concernant ses ambitions nucléaires.
Netanyahu a comparé l'Iran et son président, Mahmoud hmadinejad, à Adolf Hitler.

"Hitler s'est d'abord lancé dans une campagne mondiale et il a ensuite essayé d'obtenir des armes nucléaires. L'Iran essaye d'obtenir d'abord des armes nucléaires. Par conséquent, de cette perspective, il est beaucoup plus dangereux", a déclaré Netanyahu à des décisionnaires israéliens de l'anti-terrorisme.

L'implication de Netanyahu était transparente : L'Iran cherche une autre solution finale, celle-ci visera Israël et l'ensemble de la communauté juive.

L'heure des comptes est à portée de main, selon Tzipi Livni, le ministre israélien des affaires étrangères, qui affirme contre toute évidence que l'Iran est seulement à quelques mois de posséder des armes nucléaires.

"Le terrorisme international est un terme erroné", a jouté Netanyahu, "Non pas parce qu'il n'existe pas, mais parce que le problème est l'Islam militant international. C'est le mouvement… qui actionne la terreur au niveau international, et qui est le mouvement qui prépare l'ultime terreur, le terrorisme nucléaire".

Confronté aux conceptions maléfiques "des fascistes islamiques", comme ceux en Iran, l'arsenal nucléaire d'Israël -- et l'holocauste nucléaire d'Israël peut et semble préparé à se déclencher : il peut être présenté comme le salut du monde civilisé.

Source : http://electronicintifada.net/

Traduction : MG pour ISM

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