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Jérusalem - 1 juillet 2005
Par Geoffrey Aronson
Ma'ale Adumim est l'une des plus importantes réalisations de la campagne de colonisation d'Israel.
Dans la bataille vieille d'un siècle entre les Arabes et les Juifs, cette ville a amassé deux des ingrédients gagnants du conflit : la terre et la population.
Aujourd'hui, avec près de 30.000 habitants et le contrôle d'une surface de 60 km2, elle est la plus peuplée de toutes les colonies autres que celles situées à Jérusalem-Est, avec une réserve de terre qui promet une croissance continue de la population.
Cartes de la région de Jérusalem montrant toutes les colonies qui l'entourent dont Maale Adumim
Les cinq villages palestiniens voisins ont actuellement plus d'habitants, mais les expropriations favorisant Ma'ale Adumim ne leur ont laissé qu'une surface de 4,6 km2.
Par ces faits, Ma'ale Adumim a gagné une renommée très convoitée, non seulement en tant qu'élément du "consensus national" d'Israël, en jouissant en conséquence du soutien de tous les principaux partis israéliens, mais également la reconnaissance de l'administration Bush en tant que l'une des" nouvelles réalités sur le terrain" à laquelle tout accord Israélo-Palestinien devra s'accomoder.
Ma'ale Adumim illustre l'utilisation par Israël de la colonisation civile comme instrument de la politique de stratégie nationale.
La mission de la colonisation dans les territoires occupés avait été proclamé par le Ministre de la Défense de l'époque, Ariel Sharon, à son retour du sommet de Wye Plantation en octobre 1998, où un accord mort-né avait mené au redéploiement d'Israël en Cisjordanie .
Sharon avait exhorté les colons "de partir, courir, [ et ] de prendre d'autres collines, d'agrandir le territoire. Tout ce que vous prendrez restera entre nos mains. Tout ce que nous ne prendrons pas sera à eux."
Comme le phénomène des "avant-postes" que les remarques de Sharon ont suscité, la création et la colonisation de Ma'ale Adumim sont nées dans un brouillard de confusion délibérée et avec peu de respect non seulement envers les conventions internationales interdisant la colonisation mais également envers les lois israéliennes décrétées pour la réguler.
Ma'ale Adumim représente l'une des premières œuvres de colonisation de Gush Emunim (ndt : groupe fondamentaliste juif), et a joui du soutien critique du Ministre de la Défense de l'époque, Shimon Peres, à sa création.
À l'origine, l'avant-poste, un "camp de travail" de 22 familles, a été établi en 1975 sans autorisation formelle du gouvernement mais avec l'appui actif de Peres.
Une fois en place, les protecteurs de Ma'ale Adumim ont négocié pour qu'il ne soit pas évacué en instituant un raisonnement qui est maintenant utilisé depuis plus de trois décennies avec grand succès.
Avec Elon Moreh, le "blanchiment" de son statut en tant que colonie civile désormais "légale" fut l'une des premières actions du gouvernement de Menachem Begin en 1977.
Les terres du secteur E-1 à proximité qui ont attiré récemment l'attention du public ont été expropriées à l'origine pendant cette période.
Dans les années 80, Israël a classé le secteur en tant que "terre d'Etat" et donc disponible pour la colonisation israélienne.
La localisation de Ma'ale Adumim sur le sommet d'une colline contrôlant la route entre Jérusalem et le pont Allenby en direction de la Jordanie n'était pas un accident.
Son positionnement à cet endroit fut plutôt le produit d'une stratégie naissante de colonisation favorisant la création de nombreux "blocs" de colonies dans l'ensemble de la Cisjordanie comme principaux moyens pour empêcher l'autodétermination palestinienne.
L'expansion de la colonisation était et reste au coeur du combat d'Israël contre les Palestiniens pour réduire à néant le contrôle des territoires occupés et de son destin politique.
En septembre 1980, le chef du Département Colonisation de l'Organisation Sioniste Mondiale, Matityahu Drobless, a écrit dans un rapport décrivant le programme d'expansion des colonies : "La terre d'Etat et les terres qui se trouvent en jachère en Judée et Samarie doivent être prises immédiatement, afin de coloniser les secteurs qui se situent entre les centres des minorités (c.-à-d. : les Palestiniens) ainsi que ceux qui se situent autour, dans un effort de minimiser autant que possible le danger du développement d'un autre état arabe dans ces secteurs.
S'il est divisé par des communautés juives, il sera difficile pour la population minoritaire de créér une unité et une continuité territoriales et politiques."
Le gouvernement Begin a défini Ma'ale Adumim comme un aimant pour la croissance de population en 1978.
En 1992, quand sa population a atteint 15.000, elle a été désignée comme la première "ville" israélienne en Cisjordanie .
L'intégration des 12.000 dunams adjacents connus sous le nom d'E-1 en tant que partie de Ma'ale Adumim et le plan pour sa colonisation a été amorcée par Yitzhak Rabin, qui, le 2 février 1994, a approuvé la demande d'un promoteur israélien de construire un hôtel sur le secteur. Cette décision s'est ensuite développée en un plan d'aménagement pour l'ensemble du secteur.
En août 1994, le commandant de l'IDF a déclaré que l'ensemble du secteur serait inclus dans des limites de Ma'ale Adumim.
Tous les premiers ministres suivants ont soutenu le plan alors qu'il faisait son chemin dans la la bureaucratie tortueuse de l'aménagement israélien.
Le ministre de la Défense, Yitzhak Mordechai, a approuvé le plan en 1997, après quoi il a été approuvé par la Haute Cour israélienne dans une décision rejetant une pétition déposée contre lui par les Palestiniens.
Le gouvernement de Netanyahu a cependant décidé de geler le processus quand les projets de colonisation à Har Homa et Ras al-Amud ont progressé. Mais un plan plus détaillé, comprenant alors des nouvelles routes et bâtiments, a été déposé mi-1999. Cette décision a aussi survécu à une contestation devant les tribunaux par les Palestiniens.
Les aspects environnementaux du projet ont été approuvés en juin 2002, la dernière étape avant l'approbation par le Ministre de la Défense.
Début 2005, le premier ministre Sharon et le ministre de la Défense Shaul Mofaz ont autorisé une enquête de terrain, après quoi le plan sera prêt pour l'approbation finale par le Conseil Suprême de l'Aménagement israélien.
Le maire de Ma'ale Adumim, Benjamim Kashriel, affirme que la construction à grande échelle débutera en 2007. Mais déjà, un complexe de bâtiments y a été récemment construit pour la police des frontières israéliennes, qui occupe actuellement un emplacement lorgné par des colons à Ras al-Amud.
Rattacher ce territoire à l'entreprise de colonisation accomplit deux objectifs complémentaires.
• D'abord, en reliant Ma'ale Adumim via E-1 aux secteurs colonisés de Jérusalem-Est, Israël, selon les termes de Meron Benvenisti, "crée une continuité territoriale juive des abords de Jericho à la plaine côtière."
• En second lieu, cela "sépare irrévocablement la partie nord de la Cisjordanie de la partie sud, en étranglant 50.000 Palestiniens habitant dans ses environs" et leur refuse les réserves critiques de terre pour le développement et le logement.
Jan de Jong, le cartographe du rapport, a noté que "bien plus que la construction à Har Homa, l'exécution par Israël du plan E-1 confrontera les Palestiniens à une diminution dramatique des options pour une Jérusalem Arabe. Si elle n'est pas contestée efficacement, la situation actuelle de la partie Jérusalem Arabe en tant qu'étendue déconnectée des quartiers à prédominance sordides deviendra permanente, la transformant en une relique essentiellement symbolique d'une communauté arabe."
L'opposition palestinienne au plan a été moins décisive dans l'ajournement de l'exécution du plan que les réserves exprimées par Washington. Au cours des années, une série de demandes américaines, la plus récente lors du sommet de Crawford entre Sharon et Bush, a obtenu le refrain israélien habituel : "Il s'agit d'un vieux projet, encore bien loin d'être exécuté et aucune décision finale n'a été prise."
Sharon a observé que le plan E-1 posait un dilemme, non pas pour Israël, mais pour Washington, qui a dû rationaliser son opposition à l'expansion de la colonisation par une lettre de Bush en avril 2004 soutenant les changements de frontières pour fournir des logements dans "les principaux centres de population israélienne" en Cisjordanie .
De toute façon, Israël a depuis bien longtemps anticipé l'opposition américaine à l'expansion de la colonisation.
En tant qu'ancien officiel au Département d'Etat, Aaron Miller, a noté lors d'une apparition récente à Washington que pendant ses presque 25 années dans le gouvernement, il n'y avait jamais eu "de conversations honnêtes sur ce que faisaient réellement les Israéliens sur le terrain. Nous ne nous sommes pas non plus préparés à imposer, au moins ces sept ou huit dernières années, un coût aux Israéliens pour leurs actions."
Dans un interview avec le Jerusalem Post en date du 22 avril, Sharon a expliqué :
"Le projet de construction E-1 est un vieux projet, datant de près de 10 ans. Si je m'en souviens bien, il a été commencé quand les Travaillistes étaient au gouvernement. Il est vrai que l'annonce du plan a récemment créé une tempête partout dans le monde, et à mon avis, disons qu'elle a mis le président bien loin d'une position simple. Mais c'est un plan qui a encore besoin d'être travaillé pendant de nombreuses années. Je suis sûr que nous en reparlerons avec les Américains."
Les Etats-Unis ont toujours, disons depuis 1968, été opposés à la colonisation juive. Les Etats-Unis ont été opposés aux colonies juives sur les Hauteurs du Golan. Ils se sont opposés aux colonies juives en Judée et Samarie et dans la bande de Gaza. Et ils n'ont jamais changé de position.
Israël, pendant ces années, a vu une grande importance au fait de s'emparer des parties stratégiquement importantes de Judée et de Samarie. Mais même sur ces sujets sans accord, je pense que la relation -- certainement la relation que j'ai créé -- nous a permis de trouver des moyens de traiter toutes les questions.
Aluf Benn a rapporté dans Ha'aretz le 25 mars que : "Il n'y a eu aucune tentative évidente de l'administration américaine d'arrêter le projet. Du côté israélien, ils disent que la construction de E-1 est essentiele pour la future existence du bloc de Ma'ale Adumim, et ceci est également compris à Washington. La chose principale est que cela soit fait en silence."
Sharon a expliqué qu'Israël ne peut pas "s'attendre à recevoir un accord américain explicite de construire librement dans les colonies."
Il comprend également qu'Israël n'a aucun besoin d'une telle approbation, et qu'il peut bien vivre avec la politique américaine inefficace de longue date.
Comme cela était noté de façon pertinente dans l'éditorial du Baltimore Sun, "Si l'administration Bush veut arrêter l'expansion des colonies, il devra faire plus que s'en plaindre."
Source : www.fmep.org/
Traduction : MG pour ISM
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