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Liban - 13 mai 2008
Par Khaled Saghyieh
Laissons de côté les mauvaises intentions. Pour justifier les deux décisions, considérées par Hezbollah comme une menace sur son armement, le chef du gouvernement a déclaré qu'il voulait "construire l'Etat". Face a la réaction militaire armée de Hezbollah et de ses alliés, un haut fonctionnaire a regretté l'aspect précipité et l'inopportunité de ces mesures gouvernementales, soulignant que la construction de l'Etat était une opération qui devait s'inscrire dans la durée.
Le premier Ministre, lui, n'a trouvé que le slogan : "On ne recule pas sur la construction de l'Etat" pour défendre sa position.
Le problème n'est pas uniquement une question de timing.
Le pouvoir libanais s'applique à démontrer que le conflit, qui dure depuis trois ans, est un conflit entre "l'Etat" et "le mini-Etat de Hezbollah à l'intérieur de l'Etat". Comme quoi la coalition du 14 mars se bat pour établir l'Etat et en finir avec le mini-Etat, tandis que l'opposition oeuvre en sens inverse.
Le pouvoir ne cesse de répéter des expressions du genre "monopole de la violence", "Etat de droit", "lois", "institutions", croyant que ce discours lui fera remporter d'avance la bataille "éthique". Qui est-ce qui oserait soutenir l'idée d'un mini-Etat contre celle d'un Etat protecteur de tous ses citoyens et garant de la paix civile ?
L'opposition a généralement répondu à ce discours en mettant en doute les intentions de l'équipe au pouvoir sur la base du passé de ses leaders. Une équipe constituée d'une troupe d'ex-seigneurs de guerre et de spéculateurs immobiliers ("des assassins et des voleurs", d'après Sayyed Hassan Nasrallah) n'est pas apte à porter un programme d'édification étatique.
La participation, principale revendication de l'opposition, suppose qu'un Etat efficace et équitable (et résistant) peut être mis sur pied par quelqu'un comme Michel Aoun, pas Fouad Siniora.
Il se peut bien que la pratique du pouvoir par la "majorité" soit différente de celle qui serait exercée par l'opposition.
Pourtant, l'Etat que propose Siniora n'est pas fondamentalement différent de l'Etat de Michel Aoun. Tous les deux parlent de construire un Etat comme s'il en existait un modèle prêt à l'emploi, et tous les deux imaginent quelque chose de proche du schéma des Etats européens modernes. Seulement, la réalité montre bien l'impossibilité de ce type d'"Etat" au Liban, qui plus est ce modèle, auquel les deux camps se réfèrent, n'est même pas majoritairement appliqué dans le monde.
Pour sortir de l'impasse actuelle, il faut abandonner l'idée d'un "modèle" applicable, et prendre en compte les spécificités de la réalité libanaise. Faute de quoi, le projet de "construction de l'Etat", qu'il soit sincère ou non, se transformera en un projet de destruction de la société et de la paix civile. Preuve en est, la forte aspiration du premier Ministre à voir l'armée jouer un rôle différent dans le cadre des combats actuels.
Notre situation n'est pas unique au monde. Contrairement à ce qu'en pensent certains, de nombreux cycles de violence dans le monde ont été déclenchés par un discours "moderniste", simpliste, visant à appliquer un modèle imaginaire sur une réalité extrêmement complexe, ou à détruire une structure sociale bien établie à coup de décrets officiellement appliqués par l'armée.
Que serait-ce pour un pays comme le Liban, où l'option facultative d'un mariage non religieux a failli provoquer une guerre civile ?
Source : Al Akhbar
Traduction : Nadine Acoury
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Khaled Saghyieh
13 mai 2008