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Palestine - 31 octobre 2009
Par Khaled Amayreh
Comme si le processus de paix au point mort et presque moribond entre l'Autorité Palestinienne (AP) et Israël ne rencontrait pas suffisamment de problèmes, le Président de l'AP Mahmoud Abbas a lâché une bombe cette semaine lorsqu'il a déclaré que « des élections présidentielles et législatives » auraient lieu en Cisjordanie, dans la Bande de Gaza et à Jérusalem Est le 24 janvier 2010.
Le décret est plus que problématique puisque le régime d'Abbas soutenu par l'Occident n'a aucun contrôle sur Jérusalem Est, qu'Israël considère comme sa « capitale éternelle et une », ni sur la Bande de Gaza, qui est contrôlée par le Hamas.
De plus, le moindre semblant d'autorité qu'a le régime de l'AP en Cisjordanie est complètement soumis au bon vouloir israélien. Ce qui signifie que si Abbas est sérieux quant à la tenue d'élections dans les trois territoires séparés à la date indiquée, il devra les coordonner tant avec Israël qu'avec le Hamas.
Israël a d'ores et déjà indiqué qu'il n'autoriserait pas automatiquement Abbas à tenir des élections en Cisjordanie , et on peut sérieusement douter que le gouvernement le plus à droite dans l'histoire d'Israël permette que des élections aient lieu à Jérusalem Est. A moins, bien sûr, qu'Israël obtienne un bon prix politique de la faible Autorité Palestinienne, en d'autres termes l'assurance de l'abandon du Rapport Goldstone.
Pour ce qui est du Hamas et des autres factions palestiniennes, les réactions vont du rejet total à des réserves profondes.
Rejetant l'appel, qu'ils voient comme une tactique de pression sur le Hamas à signer le document de réconciliation négocié par l'Égypte, les dirigeants du Hamas contrent Abbas, arguant que le mandat du chef de l'AP a expiré et qu'il ne sera pas en mesure d'organiser de véritables élections sans la Bande de Gaza. « Tenir des élections dans la seule Cisjordanie est la prescription définitive d'un désastre national, » a dit Ismail Radwan, dirigeant du Hamas et porte-parole du mouvement à Gaza.
De même, l'organisation du Jihad Islamique a qualifié le décret électoral d'Abbas de « tentative claire de perpétuation de la principauté Dayton » en Cisjordanie , allusion au Général américain Keith Dayton, qui entraîne et supervise les forces de sécurité de l'AP.
Même le Front populaire de Libération de la Palestine (FPLP), membre fondateur de l'OLP, a exprimé sa consternation. Le dirigeant actuel du groupe, Mahmoud Mallouh, a déclaré que la restauration de l'unité nationale palestinienne était plus important que la tenue d'élections.
Évidemment, Abbas n'a pas dit qu'il abandonnait complètement tout effort de réconciliation avec le Hamas. Il a pourtant affirmé qu'organiser des élections à la date désignée était « un impératif légal et constitutionnel. »
Hamas et de nombreux intellectuels palestiniens se sont gaussés de cet argument, qui donne l'impression que l'AP est un État indépendant et souverain, avec une constitution bien établie, alors qu'en fait, le régime de l'AP, en particulier à Ramallah, est à peine plus qu'un simple sous-traitant des autorités israéliennes d'occupation. Après tout, n'est-ce pas l'armée israélienne, et non l'AP, qui contrôle chaque rue et chaque coin de Cisjordanie ?
On ne sait pas clairement si Abbas bluffe pour prendre de vitesse et manœuvrer le Hamas, ou bien s'il veut vraiment ces élections. Auquel cas les répercussions directes et indirectes de la tenue d'élections en Cisjordanie sans la Bande de Gaza sous contrôle du Hamas affecterait profondément et négativement l'arène politique palestinienne, ainsi que les efforts de paix conduits par les Américains.
De plus, les résultats d'une élection à laquelle moins de la moité des votants participerait ne seront pas très crédibles, exacerberont davantage la crise palestinienne, et pourraient conduire à une rupture irréversible entre la Cisjordanie et la Bande de Gaza.
Au sujet des efforts conduits par les Américains pour reprendre les pourparlers de paix entre l'AP et Israël, qui n'ont abouti jusqu'à maintenant à aucune avancée, il est clair qu'ils devront être plus ou moins gelés si Abbas est déterminé à tenir des élections. Continuer à s'impliquer dans un processus de paix manifestement stérile handicaperait sérieusement les efforts d'Abbas quand il ira courtiser les électeurs palestiniens pour qu'ils l'élisent comme « président » pour un second mandat.
De plus, si des élections ont lieu à la date envisagée, le Fatah devra tenir un discours radical et réaffirmer son engagement aux constantes palestiniennes, dont les deux questions cardinales que sont Jérusalem et le droit au retour des réfugiés palestiniens, déracinés de leurs maisons et villages lorsqu'Israël a été créé il y a plus de 60 ans. Il devrait même recourir, du moins comme tactique électorale, à l'affirmation de son engagement dans la lutte armée contre Israël.
Pour ce que cela vaut, cela aurait un impact négatif sur le processus de paix puisque cela saperait la capacité de l'administration Obama à réaliser son objectif de plus en plus illusoire d'établir un État palestinien viable dans les territoires occupés.
La semaine dernière, le président US Barack Obama a appelé Abbas, l'assurant qu'il veillerait à la création d'un État palestinien indépendant. Obama n'a pas précisé quand un tel État verrait la lumière du jour, pas plus qu'il n'a mentionné quoique ce soit sur les efforts américains pour obtenir d'Israël qu'il gèle l'expansion de la colonisation juive en Cisjordanie . Abbas ferait bien de se souvenir que le président George W. Bush a pris les mêmes engagements, et qu'il a échoué.
Obama était supposé faire un discours de politique étrangère cette semaine qui révèlerait les nouvelles idées américaines pour faire avancer le processus de paix au point mort au Moyen Orient. Il n'est pas clair si le non-événement avait quelque chose à voir avec la décision d'Abbas d'organiser des élections en janvier prochain.
Ce qui est clair cependant, c'est qu'Abbas est visiblement désabusé, et même au bord de l'abattement, tandis que toutes les garanties et promesses américaines d'obtenir d'Israël le gel de sa saisie frénétique de la terre palestinienne se sont avérées fausses. Un officiel palestinien a confié que le président est « très déprimé », Il a aussi décrit les efforts de paix US comme « la plus grande tromperie ». « Si Obama, avec tout son pouvoir, n'obtient pas qu'Israël gèle la construction ne serait-ce que d'un seul immeuble à Jérusalem Est, serait-il raisonnable de notre part d'attendre de lui qu'il arrache Jérusalem Est à Israël, qu'il autoriser le rapatriement des réfugiés, et, surtout, qu'il établisse pour nous un État viable et territorialement contiguë ? »
Cette semaine, des médias israéliens ont rapporté qu'Abbas songeait sérieusement à remettre sa démission, aux motifs qu'il n'avait aucune réussite avec laquelle impressionner les électeurs palestiniens pendant la campagne électorale.
L'information non confirmée a alerté l'administration Obama, qui s'est empressée d'assurer Abbas que les USA prendraient un certain nombre de mesures non précisées pour redorer son blason auprès de son peuple.
Cependant, la promesse américaine semble être surtout de la rhétorique, puisque la moindre avancée d'Abbas requérait d'importantes concessions israéliennes en Cisjordanie ; ce qui est hautement improbable, du moins pour l'instant, étant données la composition et la nature idéologique du gouvernement israélien actuel.
Une sortie possible de l'horizon étroit auquel Abbas est confronté pourrait prendre la forme de certaines concessions du Fatah envers le Hamas, probablement en coordination avec l'Égypte. Mais même ceci ne serait pas vu d'un bon œil par les Américains, puisque la restauration de l'unité palestinienne radicaliserait vraisemblablement la position palestinienne globale et rendrait les Palestiniens plus déterminés dans leurs exigences d'un retrait total israélien de tous les territoires occupés en 1967.
Hani Al-Masri, personnalité proche de la direction de l'AP, a déclaré que la tenue d'élections générale en l'absence de réconciliation nationale mènerait à un désastre. « Le président se comporte comme si la Palestine occupée était la Suisse. Il oublie que nous sommes toujours en lutte pour nous débarrasser de la cruelle occupation israélienne. Et dans de telles circonstances, l'unité nationale est bien plus importante que de soi-disant considérations constitutionnelles. »
Al-Masri considère de plus que le conflit entre le Fatah et le Hamas est avant tout « de nature politique, et non constitutionnelle, » et qu'il requiert donc une solution politique. « Ne pas vouloir admettre cette réalité pourrait conduire à un suicide politique national et à une capitulation totale aux diktats israéliens. Abbas se goure complètement s'il pense que la position palestinienne dans les négociations avec Israël serait plus forte en l'absence d'unité nationale. »
Source : Exposing Israel
Traduction : MR pour ISM
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