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Palestine - 10 novembre 2015
Par Haidar Eid
09.11.2015 - Que se passe-t-il en Palestine ? Est-ce une nouvelle intifada ? Si oui, quels sont ses slogans ?
Beaucoup comparent la situation actuelle en Palestine avec l'Afrique du Sud de l'apartheid. Les chefs tribaux des bantoustans sud-africains - les "foyers nationaux" ["homeland"] théoriquement indépendants et dirigés par des Noirs créés par le gouvernement raciste - croyaient qu'ils étaient des chefs d'Etats souverains. Le régime de l'apartheid a promu la fiction de l'indépendance noire sous son contrôle global pour essayer de légitimer et de perpétuer la domination blanche.
Al-Khalil, 5 novembre 2015
Alors que le mouvement anti-apartheid et la plupart des pays ont rejeté l'idée d'une séparation fondée sur l'identité raciale en Afrique du Sud, la direction palestinienne se targue d'avoir jeté les bases de son propre bantoustan, affirmant que c'est "l'Etat de Palestine".
Pour que le sionisme survive en Palestine, "l'autre" - le peuple palestinien indigène - doit être assimilé et asservi sans qu'il soit conscient de cet asservissement. Ce fut la pensée qui a sous-tendu la décision d'Israël d'accorder aux Palestiniens "l'autonomie" sous l'Autorité palestinienne. C'est la logique des Accords d'Oslo de 1993 entre Israël et l'Organisation de Libération de la Palestine, qui ont créé cette autorité.
Oslo avait pour but d'amener la reddition des Palestiniens et de créer parmi eux une conscience passive, mais ses architectes n'ont pas prévu qu'Israël créerait son antithèse - le défi et la réaction - résultant de décennies de nettoyage ethnique, de colonialisme de peuplement et d'apartheid.
Ils n'ont pas tenu compte de l'héritage de résistance civile et politique, qui est devenue la marque de fabrique de la lutte palestinienne. La formation du Comité national pour le Boycott, en 2007, deux ans après l'appel au boycott, au désinvestissement et aux sanctions (BDS) lancé par plus de 170 organisations de la société civile palestinienne et autour duquel s'est formé un consensus écrasant, la résistance à la machine de guerre d'Israël en 2009, 2012 et 2014 dans la Bande de Gaza et le soulèvement actuel, tout cela représente ce que j'appelle un processus de dé-Osloïsation.
L'illusion étatique
Oslo contenait la promesse -illusoire comme elle a toujours été- qu'un-tiers de la population palestinienne, celle qui vivait dans la Bande de Gaza et la Cisjordanie , réaliserait son "rêve national" d'Etat sur un petit 22 pour cent de la Palestine historique.
Mais l'impossibilité de réaliser même cela - Israël enracinant son occupation et étendant sans relâche sa colonisation en Cisjordanie , et plaçant Gaza sous siège permanent- a fini, ironiquement, par relancer la question embarrassante des droits des deux-tiers restants : les millions de réfugiés dépossédés à l'intérieur et à l'extérieur de la Palestine historique et les 1,5 million de citoyens palestiniens de troisième classe d'Israël.
Les Accords d'Oslo n'ont prêté qu'un intérêt de pure forme aux millions de réfugiés palestiniens dispersés dans le monde entier à cause de la Nakba, le nettoyage ethnique de la Palestine par les milices sionistes en 1948.
Mais les élites palestiniennes qui ont signé Oslo ont plus ou moins explicitement rassuré Israël qu'elles étaient prêtes à sacrifier les droits de ces réfugiés en échange d'un Etat. Les Palestiniens en Israël n'ont pas du tout été mentionnés.
Oslo a été conçu -au mieux- pour améliorer les conditions d'oppression (tout en faisant de quelques Palestiniens des partenaires de l'occupation) et ainsi de débarrasser Israël du "problème" palestinien. En fin de compte, ça n'a même pas abouti à ça - sauf pour une petite élite palestinienne qui a bénéficié d'accords économiques avec Israël.
La génération d'Oslo
La plupart des événements qui ont eu lieu à Gaza depuis les élections au Conseil législatif palestinien de 2006 - remportées par le Hamas, qui s'était opposé aux accords de 1993 - ont représenté un rejet complet d'Oslo et de ses conséquences.
Et si l'on note que quelque 80 pour cent des Palestiniens à Gaza sont des réfugiés en provenance d'autres parties de la Palestine, les résultats des élections de 2006 dans la Bande de Gaza et en Cisjordanie deviennent plus compréhensibles en tant qu'actes anti-coloniaux et anti-Oslo.
Mais les signataires d'Oslo et leurs sponsors complices le cachent délibérément.
La résistance des Palestiniens dépend, comme celle des Sud-Africains noirs sous le régime inhumain d'apartheid, et les Africains-américains sous les lois Jim Crow, de leur plus haute position de force morale après la dépossession de leurs droits et de leur terre.
La victoire palestinienne sera le résultat inévitable de leur "sumoud" -leur constance sur leur terre- qui n'a pas vacillé, malgré le sentiment qu'ils se battent seuls contre Israël.
Ce qui a contribué à maintenir en vie le régime d'Oslo aussi longtemps, c'est la promesse toujours plus faible que la rédemption -sous la forme d'un "Etat" et de "l'auto-détermination"- est au bout du chemin. Mais la génération Oslo, les Palestiniens nés après ou dans la période de la signature des accords, n'y croient pas. Ils en ont marre et leur message est clair : le problème n'est pas seulement l'occupation, mais aussi le colonialisme de peuplement, l'apartheid, le nettoyage ethnique et la politique génocidaire d'Israël.
Le soulèvement actuel -qu'on l'appelle ou non Intifada- peut être le creuset d'où émergera une nouvelle direction, qui pourra comprendre l'unité de la cause de tous les Palestiniens, qu'ils soient à l'intérieur ou à l'extérieur de la Palestine historique, qu'ils soient réfugiés d'aujourd'hui ou depuis de longues et douloureuses décennies.
C'est une génération qui nous dit qu'elle est opposée à toutes formes de collaboration avec l'occupant. C'est une génération qui n'a rien vu sortir d'Oslo à part la défaite et l'humiliation, et elle veut s'en débarrasser.
Ils disent -et nous devons les entendre- que la coexistence basée sur la colonisation et l'apartheid n'est pas du tout de la coexistence. C'est l'esclavage et ils ne l'accepteront plus.
Les jeunes de Palestine nous disent : nous voulons tous nos droits, et nous n'accepterons rien de moins.
Source : Electronic Intifada
Traduction : MR pour ISM
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