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ISM France - Archives 2001-2021

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La lassitude du chroniqueur et la machinerie fatiguée

Par

Jean Cassien a introduit, autour de l’an 400, l’organisation monastique en Europe depuis l’Égypte où elle vit le jour sous l’impulsion de l’ermite Pacôme Le Grand qui l’avait conçue sur un modèle militaire. Jean Cassien a consacré tout un livre à la description d’une fatigue particulière qui peut envahir l’âme du moine et l’assoupir à cause de dégoût, une langueur dans la psalmodie et une faiblesse dans la prière. Découragement et lassitude saisissent le moine dans ses pieuses occupations, surtout solitaires. Elle est grave car elle atteint la racine même de l’activité spirituelle, singulièrement la prière.

La lassitude du chroniqueur et la machinerie fatiguée

Cette fatigue où se mêlent ennui, dégoût, impuissance, tristesse même est décrite sous le nom d’acédie, du grec akedia qui signifie insouciance, négligence, indifférence mais aussi torpeur et fatigue. Véritable emprisonnement (empoisonnement) en soi, l’acédie est un ‘crime d’omission envers autrui’. Les maîtres spirituels enseignent qu’il ne sert à rien de la fuir, au contraire, elle se reconduit ainsi. C’est en lui résistant qu’elle est vaincue.

À l’observation de ce que produit la machinerie occidentale comme automatismes et réflexes face à ses effets pour elle inattendus et incompréhensibles car elle ne peut percevoir que ce qu’elle a projeté, un accablement, un découragement peut saisir son chroniqueur.
Il n’est ni moine, ni soldat.
Mais la répétition incongrue le lasse, l’épuise.
S’il renonce un instant à l’abandon, il se laissera pénétrer d’une énergie qui lui fera éprouver le temps et l’espace, reculera l’espèce de mort qui l’enserre de tous côtés. Il reprendra stylet et tablette, consignera le passage progressif au revers.

Une étude fondée sur des données recueillies entre 2000 et 2009 par National Center for Health Statistics a permis d’établir que désormais, même s’il est très sous-estimé, le suicide s’est accru de 15% et est devenu la première cause de mort violente aux US(a), loin devant les accidents de transport en net recul de 25%, l’empoisonnement ou les homicides.
En 2009, 39.000 étasuniens se sont donné la mort. En progrès mais loin de la performance de la Fédération de Russie avec 60.000 suicides par an (chiffres de 2003) pour près de deux fois moins d’habitants.
La détresse sociale aux US(a) peut se mesurer selon un autre indicateur, la baisse de l’espérance de vie, particulièrement parmi les couches sociales défavorisées.
De leur 14ème rang dans le classement mondial pour l’espérance de vie en 1985, les US(a) ont chuté au 41ème en 2010. Pour la première fois dans leur histoire, à statut éducationnel égal et faible, une femme blanche vivra moins longtemps que sa concitoyenne de peau noire. Parmi les facteurs de cette involution, obésité, tabagisme, abus de médicaments et de drogues certes, mais réduction de l’accès aux soins médicaux en parfaite corrélation avec l’amplification des profits engrangés par la fraction des 1% les plus riches et la réduction de leurs contributions fiscales.

La FAO annonce que plus de la moitié des 25 millions de Yéménites risquent de souffrir de détresse alimentaire en raison des prix des matières énergétiques et des denrées alimentaires, de la crise politique accompagnée d’un déficit des services sociaux. Une majorité des enfants de moins de cinq ans souffrent d’un retard de croissance lié à une malnutrition.
Des drones étasuniens ne manquent pas d’en éliminer une petite dizaine quotidiennement.
Dans le cadre de son département de coopération et d’action culturelle, le Ministère des Affaires étrangères de France recrutait un attaché à Sanaa pour aider à rédiger la nouvelle constitution du pays. Quand la diplomatie française n’émet pas des fatwas préconisant l’élimination de chefs d’États, comme Fabius l’a proclamé pour Bashar Al Assad, ou aidant à la réalisation de leur assassinat comme Juppé sous Sarközy pour Gadhafi, elle s’offre à la rédaction des textes les constituant.

Maurice Duverger avait été appelé par Hassan II pour l’élaboration de la Constitution marocaine de 1962. Inspirée de celle de la Cinquième République française, elle avait permis à un régime très particulier de sultanat de se transmuer en un mode de gouvernement monarchique jamais pratiqué dans cette contrée. Le sultan du Maroc était désigné puis validé comme Émir des croyants, selon une procédure complexe de la Moubayaa, véritable contrat signé entre différentes instances représentatives du peuple et le futur souverain. Au moins une fois dans l’histoire récente, un sultan, Moulay Abd El Aziz fut jugé et révoqué par le peuple de la ville de Fès en 1908 et remplacé par son frère Moulay Hafid. L’adoption de la Constitution par voie référendaire a été favorisée par une campagne qui a emprunté abondamment les moyens radiophoniques nationaux peu d’années après l’indépendance. Elle a éteint dans les mémoires, sous prétexte d’une modernité qui copiait un usage étranger, la pratique du pacte contracté entre un chef et son peuple qui peut le congédier si celui-ci est trahi ou rompu. La jeunesse marocaine qu a récemment manifesté contre la pratique de la beyaa, cérémonie annuelle d’allégeance au Roi, l’estimant féodale et rétrograde, ignore certainement son origine et sa signification profonde.

La Constitution marocaine de 2011, si elle n’a pas été rédigée directement par des constitutionnalistes français, a trouvé sa source dans l’école juridique française.

La démocratie imposée par les bombes humanitaires en Irak avait été couronnée par l’adoption d’une constitution écrite par un cabinet de juristes new-yorkais.

Parmi les résultats de la magnanimité occidentale, la guerre civile est toujours active en Irak avec les corollaires de l’insécurité, la baisse drastique du niveau d’éducation, de santé et de vie tout court.

Les troupes américaines officielles ont quitté le pays pour enrichir les armées déployées en Afghanistan. Les pays coalisés, dont la France et le Royaume-Uni, y réduisent leur contingent jusqu‘à leur départ total.
Pris de vertige et de fatigue.
Devant leur propre ineptie d’avoir avalisé la théorie absconse d’une guerre interminable contre le terrorisme.
Tacite relate dans ses annales la guerre menée par un général romain sous le règne de Claude contre la Bretagne, l’actuelle Grande-Bretagne. Lors de sa campagne, Ostorius s’est trouvé épuisé par le dégoût et les soucis. Il se faisait harceler par une forme de guérilla menée par les peuples insoumis. Il est mort de cette fatigue. Les ennemis de Rome même vaincus militairement prirent cette destruction morale comme une victoire et s’en réjouirent.

Un Hollande, un Cameron et un Obama ne sont-ils pas gagnés par la plus grande des lassitudes ?

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