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ISM France - Archives 2001-2021

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Palestine -

La logique de l’Occupation : La violence génère la violence

Par

L’oppression coloniale ne finira qu’à deux conditions :
• Le prix du colonialisme doit exéder ses bénéfices.
• Du côté de la puissance occupante aussi, un mouvement pacifique anti-colonial doit grandir, pour s’opposer au colonialisme sur des bases morales et pragmatiques.
C’est une avant-garde qui peut conduire le reste de la population à cette conclusion inévitable : il est temps de se retirer. Mais pour en finir, affirme Andoni, le prix obtenu des Israéliens ne nécessite pas et ne devrait pas nécessiter de "body bags"

J’ai récemment eu l’honneur de participer à une rencontre avec Ghassan Andoni, professeur de physique à l’université de Birzeit. Le professeur Andoni est le leader palestinien important d’un mouvement de résistance non-violente et cofondateur du Mouvement International de Solidarité.

Andoni a parlé de la « logique » de l’occupation de manière perspicace et extrêmement cohérente. En deux ans de cette seconde Intifada, il est bon de réfléchir sur ce que signifie l’occupation, tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens.

Andoni a d’abord dit que globalement les occupations coloniales avaient deux aspects : contrôle et expansion .
Le colonialisme israélien n’est pas différent. Quand Israël a conquis la Cisjordanie et Gaza sur la Jordanie en 1967, les Palestiniens sont passés de la sphère économique d’un pays très en retard à celle d’une économie nettement plus en avance.

En conséquence le niveau de vie des Palestiniens a rapidement augmenté. Dans les premières années (et encore aujourd’hui), les Israéliens aimaient souligner que c’était la preuve que les Palestiniens étaient plus riches sous le gouvernement israélien et devaient se sentir reconnaissants de vivre sous la protection israélienne.

Et de fait, jusqu’à ce que n’éclate la première Intifada, la résistance des Palestiniens de l’intérieur (par opposition à la diaspora palestinienne qui est la colonne vertébrale de l’OLP) était peu importante.

Néanmoins, au cours de cette période 600 000 hommes palestiniens avaient été arrêtés sous un prétexte ou un autre. Ce qui représente un tiers de la population, et reste le principal indicateur du contrôle colonial : restrictions et intimidations exercées même quand la population est calme.

Le but de ce contrôle est, évidemment, l’expansion. Le pouvoir colonial veut posséder et exploiter à son seul bénéfice la terre occupée.

Evidemment, tous les pouvoirs coloniaux, dans la mesure où ils se sentent confortés dans leur sentiment de propriétaire, augmentent leur volonté d’expansion, et à partir de là commencent à faire pression sur les populations locales. Expansion et exploitation franchissent inévitablement un seuil qui mène à l’explosion. Ce fut la première Intifada.

Andoni a dit dans son commentaire que la première Intifada fut relativement non-violente du côté palestinien. Et ayant moi-même servi dans l’armée israélienne au cours de cette période, je peux affirmer que l’Intifada s’est principalement exprimée au travers des jets de pierres, des grèves, des graffitis de slogans nationalistes sur les murs et des drapeaux palestiniens brandis illégalement.

La réponse colonialiste à n’importe quelle forme de résistance est d’augmenter le pouvoir sur la population opprimée. Au motif qu’une force extrême est nécessaire dès lors que la population indigène n’a plus peur, et à moins qu’une main ferme n’intervienne, la pire violence peut s’ensuivre.

Ce fut exactement la réponse israélienne à la première Intifada.


Le coût économique et social payé par Israël et en même temps la pression américaine a conduit au processus d’Oslo.

Il faut avoir à l’esprit que presque tous les Israéliens n’ont pas abandonné leur mentalité de colonialistes. Ils ont toujours l’impression que la Cisjordanie est « à nous ».

Ils ont compris Oslo, même la Gauche, comme une tactique destinée à calmer l’agitation des indigènes.

Quand on a simplement compris ça, on peut comprendre pourquoi durant les années du processus d’Oslo, Israël a augmenté sa pression sur la population palestinienne tout en augmentant de façon significative son étendue,

L’objectif était de limiter le plus possible ce que l’on concédait aux indigènes. Leur lâcher une petite concession pour mieux les faire taire plutôt que s’ occuper de l’injustice fondamentale de la situation.

Le résultat était inévitable.

En premier lieu, la première Intifada a fait naître la conscience nationale des Palestiniens et leur a appris que la résistance peut donner des résultats.

Ensuite le contraste entre l’espoir d’Oslo et la détérioration de la vie quotidienne autant que le vol continuel des terres par les Israéliens, tout a contribué a provoqué un sentiment de frustration et d’aliénation de la part des Palestiniens.

L’explosion d’une deuxième Intifdada était inévitable.

Quand elle éclate - avec les mêmes caractéristiques que la première - c’est une résistance populaire, relativement non-violente.

Cette fois, pourtant, les Israéliens vont répondre avec une brutalité invraisemblable.

Ainsi que le note un récent rapport d’Amnesty International : La majorité des enfants palestiniens ont été tués dans les Territoires Occupés quand les éléments de l’IDF ont répondu à des manifestations et des jets de pierres avec une force illégale, excessive et meurtrière. Quatre vingt enfants palestiniens ont été tués par l’IDF dans les seuls premiers trois mois.

Le colonialisme dit : "Regardez ce qui arrive quand vous essayez d’apaiser les indigènes. Vous leur donnez un doigt et ils veulent le bras tout entier. Nous leur avons montré qui est le patron maintenant, avant que les choses n’empirent".

A un certain moment, les colonialistes commencent à considérer toute la population indigène comme une bande de sauvages ou de "terroristes" irréductibles. Les indigènes sont perçus comment dénués de toute retenue morale et par conséquent, il n’est nul besoin de s’entendre avec eux.

Evidemment la logique colonialiste a un effet inverse sur la population indigène.

La violence utilisée contre eux ne fait qu’augmenter leur volonté de résister.

On doit avoir à l’esprit que la Palestine est une région très petite et extrêmement peuplée. L’utilisation massive de la force à l’intérieur de zones où vivent des masses de civils conduit à faire un nombre énorme de victimes civiles.

Andoni souligne qu’en important la guerre dans les villages et les villes de Palestine, Israël a créé une atmosphère telle que les Palestiniens se sont dit qu’il fallait que les Israéliens paient le même prix.

De plus, souligne encore Andoni, la victime croit toujours que tous ses actes sont moralement justifiés, y compris le meurtre.

Si bien qu’après quelques mois de forte pression, particulièrement après l’arrivée au pouvoir d’Arik Sharon, la campagne d’attentats-suicides du Hamas a vraiment commencé avec le soutien populaire palestinien.

Et plus tard, le terrorisme du Hamas a été perçu comme équivalent moralement au terrorisme d’Etat d’Israël.

De plus et compliquant le panorama, il se trouve que les Israéliens ne sont pas seulement colonialistes, mais ils se perçoivent eux-mêmes, en tant que Juifs, comme les victimes spécifiques du monde.

Tout se justifie quand il s’agit des Juifs : "parce que nous avons souffert pendant la deuxième guerre mondiale".


Cette conjonction entre l’état de victime et l’arrogance coloniale a donné à l’occupation israélienne une nature particulièrement meurtrière et dangereuse.

Un excellent aperçu de cette mentalité est sensible dans l’article de Ran HaCohen (en fait tous ses articles sont excellents et valent d’être lus).

On note : Un autre soldat refusnik, a expliqué que, même à Gaza, il sentait clairement qu’il défendait ses parents et sa petite amie là-bas, au pays : "Sauver sa propre famille, son propre peuple, était un devoir moral, même si certains de nos actes étaient ressentis comme moralement problématiques".

En fait, le terme « dilemme moral » a été utilisé par tous les participants ; pour certains, c’est une vieille tradition israélienne que de « tuer et pleurer » là où le cœur torturé par un « dilemme moral » exonère la conscience des actions immorales ».

La logique de l’occupation, autant que la mentalité du « tirer et pleurer » prend toute sa force dans un article du New York Times concernant la lourde domination d’Israël sur Naplouse en Cisjordanie .

D’un autre côté, dit un colonel israélien, commandant une brigade d’infanterie qui est maintenant gardien de cette ville de 200 000 habitants palestiniens : "Ils souffriront jusqu’à ce qu’ils comprennent. Mon job est de mettre fin aux attentats suicides".


Mais il reconnaît aussi qu’à un certain niveau le problème réside dans les actions : "Quand on regarde tout cela avec les yeux des Palestiniens, on peut comprendre pourquoi ils nous détestent tellement".

Néanmoins, il veut se persuader lui-même en pensant, comme le font tous les colonialistes, qu’il obtiendra finalement la victoire : "Nous sommes à la moitié d’une guerre de cent ans. C’est ce que je dis à mes soldats".

Mais l’article montre la futilité de cette pensée en présentant la partie palestinienne : Ghassan W. Shakah, le Maire de la ville, est apprécié des responsables israéliens parce qu’il est une force « positive ». Il a exprimé son opposition aux attentats suicides. Mais il a ironisé à l’idée qu’en rendant la vie impossible, on pouvait les empêcher.

"Nous devons penser logiquement", a-t-il dit "Les gens comme moi, qui ont 50 ou 60 ans, quand vous mettez la pression sur eux, ils utilisent leur cerveau. Mais quand vous mettez la pression sur des garçons de 17 ou 18 ans, vous ne créez qu’aigreur et colère. Je ne crois pas que cette pression puisse retomber » a-t-il dit « Cette pression ne peut que pousser à construire une bombe et à commettre un suicide".

A ce point de vue font écho des jeunes interviewés aujourd’hui. L’article a été écrit à la suite d’une journée d’extrême violence à Naplouse. Deux garçons palestiniens de dix ans ont été tués. Leur « crime » : avoir jeté des pierres contre un tank israélien.

Le même jour un jeune soldat israélien a été tué. Son « crime » : avoir cru aux mensonges qu’on lui a enseigné - à savoir, qu’il protégeait sa patrie.

Ce jeune soldat est le neveu d’un ami d’enfance. J’ai eu le cœur brisé en entendant la nouvelle. Mais ces garçons de 10 ans ont eux aussi des mères, des pères, des frères et des sœurs. Trois familles détruites par la logique de l’occupation.

De nouveau selon un rapport d’Amnesty :
"Les enfants sont nettement les plus touchés dans ce conflit. La Force Israélienne de Défense (IDF) aussi bien que les groupes armés palestiniens montrent un mépris absolu pour la vie des enfants et des autres civils", a déclaré Amnesty international.

On doit reconstruire le respect de la vie humaine. Il n’y a qu’un nouvel état d’esprit chez les Israéliens et les Palestiniens qui puisse empêcher l’assassinat d’autres enfants.

L’impunité dont jouissent les soldats de l’IDF et les groupes palestiniens responsables de la mort des enfants a sans aucun doute créé une situation telle que le droit à la vie des enfants et des civils de part et d’autre n’a que peu sinon pas du tout de valeur.

Assez de ces explications et de ces excuses inacceptables ; Et le gouvernement israélien, et l’Autorité palestinienne doivent agir rapidement et fermement et enquêter sur l’assassinat de chacun des enfants et obtenir que les responsables de tels crimes soient poursuivis devant les Tribunaux.

La logique de l’occupation est vraiment une forme de maladie mentale.
La violence appelle une violence sans fin. Andoni et beaucoup d’autres chez les Palestiniens essaient de changer l’équation.

Ils tentent de transformer la résistance palestinienne en un soulèvement populaire.


Andoni dit que l’oppression coloniale ne finira qu’à deux conditions :

• Le prix du colonialisme soit exéder ses bénéfices.

• Du côté de la puissance occupante aussi, un mouvement pacifique anti-colonial doit grandir, pour s’opposer au colonialisme sur des bases morales et pragmatiques.

C’est une avant-garde qui peut conduire le reste de la population à cette conclusion inévitable : il est temps de se retirer. Mais pour en finir, affirme Andoni, le prix obtenu des Israéliens ne nécessite pas et ne devrait pas nécessiter de "body bags" (housses mortuaires).
Néanmoins du côté des Palestiniens il en est qui continueront à réclamer le prix du sang.

Les Israéliens et leurs cousins Juifs américains, en raison de leur arrogance coloniale et de leur certitude d’être des victimes, se cramponnent à la logique de l’occupation et échouent à comprendre les transformations qui se font chez les Palestiniens.

Nous faisons pareil à notre plus grand péril..

Source : http://groups.yahoo.com/group/rapprochementpalestine/

Traduction : CS

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