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Gaza - 9 août 2008
Par Khaled Amayreh
La dernière confrontation entre le Hamas et le Fatah dans la bande de Gaza a élargi le gouffre qui sépare les deux plus grands mouvements politiques palestiniens. La "Bataille de Shijaiyeh" a fait rage pendant 48 heures dans la banlieue est de la ville de Gaza, laissant 11 morts et 110 blessés. Plusieurs bâtiments et maisons ont été complètement détruits. Des dizaines d'activistes du Fatah, dont certains seraient responsables du bombardement de la plage de Gaza le 25 Juillet, qui a tué six personnes, parmi lesquelles une petite fille de six ans, ont été arrêtés.
Des centaines de membres du clan Helis allié au Fatah ont fui en Israël après que les forces du Hamas aient envahi leur quartier.
Certains des évadés ont été tués tandis que d'autres ont été refoulés par les troupes israéliennes, pour être arrêtés par le Hamas.
La majorité des hommes du clan ont été autorisés à retourner dans leur famille après que les dirigeants du Hamas aient déclaré que leur "campagne de sécurité" ne ciblait pas une famille en particulier, mais plutôt "des criminels et des assassins" qui se cachaient dans le quartier Shijaiyeh.
Au début, le président de l'Autorité Palestinienne (AP) Mahmoud Abbas a demandé qu'Israël renvoie tous les "réfugiés" à Gaza "parce que nous ne voulons pas laisser Gaza au Hamas". Sa position a déclenché un tollé dans les rangs du Fatah en Cisjordanie , certains de ses dirigeants accusant Mahmoud Abbas de trahir ses disciples en les livrant au Hamas pour être torturés et tués. Finalement, Abbas a cédé et a demandé à Israël de permettre aux fuyards d'entrer en Cisjordanie .
Israël, qui récolte les fruits du conflit inter-palestinien qu'il a exacerbé, a d'abord incarcéré les hommes du Fatah en fuite après les avoir forcés à se déshabiller devant les caméras de télévision.
Cette conduite humiliante n'a déclenché aucune réaction de la part de l'Autorité palestinienne en Cisjordanie . Puis, le 4 août, plus de 100 membres du clan Helis ont été emmenés à Jéricho où ils ont été hébergés dans un camp de fortune à condition qu'ils restent dans les limites de la ville du désert et qu'ils ne se déplacent pas vers d'autres parties de la Cisjordanie . D'autres évadés ont été emmenés vers une prison militaire israélienne, sans aucune explication.
En Cisjordanie , l'AP dominée par le Fatah a riposté par une vague d'arrestations de personnalités orientées d'un point de vue religieux et soupçonnées de sympathie pour le Hamas. La répression a ciblé des savants religieux, des journalistes, des responsables élus de conseils municipaux et des fonctionnaires. Le Hamas a déclaré que des centaines de ses partisans avaient été arrêtés alors que les forces de sécurité de l'AP fermaient des dizaines d'institutions associées au Hamas, y compris des clubs culturels et sportifs et des centres sociaux. Le Hamas a répondu en arrêtant des dirigeants politiques du Fatah dans la Bande de Gaza, dont Zakaria Al-Agha, membre du Comité exécutif de l'Organisation de Libération de la Palestine, et Ibrahim Abul-Naja, un homme politique local du Fatah.
Les arrestations de dirigeants politiques du Fatah ont attiré de vives réactions, même de certains dirigeants du Hamas en Cisjordanie et à Gaza qui ont fustigé la mesure sans précédent comme "un dépassement de la ligne rouge", et se réduisant à "une imitation du comportement hors la loi du Fatah".
Les critiques ont forcé le Hamas à libérer tous les détenus politiques et à rouvrir les bureaux et institutions affiliés au Fatah précédemment fermés sur ordre de Saïd Siyam, Ministre de l'Intérieur Hamas à Gaza. À Ramallah, Abbas avait ordonné un peu plus tôt la libération des "détenus politiques" raflés par la police de l'AP la semaine dernière, bien que, au moment où nous écrivons ces lignes, beaucoup d'entre eux soient encore en garde à vue.
La défaite du Fatah dans le quartier Shijaiyeh a mis un terme à tous les espoirs que pouvait caresser le Fatah d'arracher Gaza au Hamas par la force. Le Fatah espérait que des bombardements sporadiques et des insurrections localisées génèreraient suffisamment de troubles et de chaos pour provoquer un soulèvement populaire contre le gouvernement Hamas.
Aujourd'hui, la guerre entre les deux, pour un temps au moins, se limite à des mots.
Ziyad Abou Ein, un des plus implacables ennemis du Hamas au sein du Fatah, a appelé la direction de l'Autorité palestinienne à "mettre le Hamas hors-la-loi une fois pour toutes" et à déclarer Gaza "région dissidente".
"Gaza doit être reprise par la violence, le feu et le sang", a-t-il fulminé.
Discours repris par d'autres dirigeants du Fatah, qui ont demandé le déploiement de forces arabes et internationales à Gaza ainsi que la poursuite des dirigeants du Hamas pour crimes contre l'humanité, et qui ont été tournés en ridicule dans la bande de Gaza.
Le faucon dirigeant du Hamas Mushir Al-Masri a raillé les "bruits de bottes" venant de Ramallah, traitant Abou Ein de "absurde et insensé". Un autre dirigeant du Hamas, Sami Abu Zuhri, a prévenu que le groupe militant pourrait envahir la Cisjordanie , tout comme elle a pris le contrôle de la bande de Gaza, si le Fatah le provoquait.
"Le Fatah peut s'attendre à un soulèvement contre lui s'ils continuent à réprimer le Hamas en Cisjordanie . Si les arrestations et les autres formes de répression se poursuivent, elles aboutiront à des réponses spontanées, qu'elles viennent de combattants de la résistance ou du peuple", dit Abu Zuhri.
Ni les menaces du Fatah de reprendre Gaza par la force, ni les menaces du Hamas d'envahir la Cisjordanie ne peuvent être prises au sérieux. Compte tenu des réalités sur le terrain, le Fatah ne pourrait reprendre Gaza que si l'armée israélienne réoccupait l'enclave côtière et la livrait ensuite au Président de l'AP, Abbas, auquel cas le Fatah serait perçue par les Palestiniens et les Arabes comme un entité collaborationniste vis-à-vis d'Israël et une guerre civile palestinienne s'ensuivrait.
Le Hamas et le Fatah semblent tous deux savoir qu'Israël est l'ultime vainqueur et le peuple palestinien le perdant dans ce conflit de plus en plus tribal. Malheureusement, aucun des deux groupes ne semble pour l'instant prêt à abandonner les calculs bornés qui dirigent la confrontation.
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Khaled Amayreh
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