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Palestine - 5 mars 2013
Par Samer Issawi
Mon histoire n’est guère différente de celles de nombreux autres jeunes Palestiniens, qui ont grandi, depuis leur naissance et toute leur vie, sous occupation israélienne. A 17 ans, j’ai été arrêté pour la première fois, et emprisonné pendant deux ans. J’ai à nouveau été arrêté alors que j’avais une vingtaine d’années, au pic de la seconde Intifada, à Ramallah, à l’occasion d’une des nombreuses invasions israéliennes dans les villes de Cisjordanie – ce qu’Israël a appelé Operation Defensive Shield. J’ai été condamné à 30 ans de prison pour des charges relatives à ma résistance à l’occupation.
Rassemblement de familles palestiniennes en solidarité avec les grévistes de la faim devant les locaux de la Croix-Rouge, à l'est de Jérusalem occupée (Photograph: Mahmoud Illean/Demotix/Corbis)
Je ne suis pas le premier membre de ma famille à être emprisonné pour avoir participé à la longue marche de mon peuple vers la liberté. Mon grand-père, un des membres fondateurs de l’OLP, a été condamné à mort par les autorités du Mandat britannique, dont les lois sont encore utilisées à ce jour pour opprimer mon peuple. Il est parvenu à s’échapper quelques heures avant son exécution. Mon frère, Fadi, a été tué en 1994, alors qu’il n’avait que 16 ans, par les forces israéliennes pendant une manifestation en Cisjordanie , suite au massacre de la Mosquée Ibrahimi d’Hébron. Medhat, un autre frère, a passé 19 ans en prison. Mes autres frères, Firas, Ra’afat et Shadi, ont tous été emprisonnés entre 5 et 11 ans. Ma sœur, Shireen, a été arrêtée à de nombreuses reprises et a passé un an en prison. La maison de mon frère a été détruite. L’eau et l’électricité chez ma mère ont été coupées. Ma famille, et tout le peuple de ma cité adorée Jérusalem, sont continuellement harcelés et attaqués ; mais ils continuent à se battre pour défendre les droits des Palestiniens et des prisonniers.
Après près de 10 années passées en prison, j’ai été libéré dans le cadre de l’accord négocié par l’Egypte, entre Israël et le Hamas, de libération de prisonniers palestiniens en échange de celle du soldat Gilad Shalit.
Pourtant, le 7 juillet 2012, j’ai à nouveau été arrêté près de Hizma, un quartier situé dans la municipalité de Jérusalem, et accusé d’avoir enfreint les conditions de ma libération (soit l’interdiction de quitter Jérusalem). D’autres personnes, qui avaient également été libérées dans le cadre de cet accord, ont aussi été arrêtées, dont certains sans aucune raison. C’est pourquoi j’ai entamé une grève de la faim le 1er août 2012 afin de protester contre mon emprisonnement illégal et la violation de l’accord par Israël.
Ma santé s’est gravement détériorée, mais je vais poursuivre ma grève de la faim jusqu’à la victoire ou jusqu’à la mort en martyr. C’est la seule pierre qui me reste à lancer contre les tyrans et les geôliers, à la face de leur occupation raciste qui humilie notre peuple.
Je puise ma force dans toutes les personnes libres dans le monde qui veulent la fin de l’occupation israélienne. Mon cœur affaibli supporte l’épreuve grâce à leur solidarité et à leur soutien ; ma faible voix gagne en puissance de ces voix qui sont plus fortes et qui parviennent à traverser les murs des prisons.
Mon combat n’est pas seulement pour ma propre liberté. Mes camarades en grève de la faim, Ayman, Tarik, Ja’afar, et moi nous battons pour tous les Palestiniens, contre l’occupation israélienne et ses prisons. Ce que j’endure est peu comparé au sacrifice des Palestiniens de Gaza, où des milliers de personnes ont été tuées ou blessées dans les attaques sauvages menées par Israël, ou en raison du siège inhumain et inédit qui leur est imposé.
Néanmoins, un soutien supplémentaire est nécessaire. Israël ne pourra pas maintenir son oppression sans l’appui des gouvernements occidentaux. Ces gouvernements, et notamment la Grande Bretagne, qui ont une responsabilité historique dans la tragédie de mon peuple, devraient imposer des sanctions à l’Etat israélien jusqu’à ce qu’il mette fin à l’occupation, reconnaisse la Palestine, et libère tous les prisonniers politiques palestiniens.
Ne vous tracassez pas si mon cœur cesse de battre. Je suis encore vivant pour le moment, et le resterai même après ma mort parce que Jérusalem coule dans mes veines. Si je meurs, c’est une victoire, si nous sommes libérés, c’est une victoire, parce quoi qu’il advienne, j’aurai refusé de me soumettre à l’occupation israélienne, à sa tyrannie et à son arrogance.
Source : The Guardian
Traduction : CR pour ISM
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