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ISM France - Archives 2001-2021

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Europe -

Un boycott qui ne dit pas son nom

Par

Le Professeur James Bowen est le président national de la Campagne de Solidarité Irlande-Palestine.

Au 19ème siècle, les modifications de la Loi Ottomane ont créé une nouvelle classe de grands propriétaires, dont la famille Sursuq de Beyrouth, qui a acquis de grandes étendues en Palestine du nord. Une situation similaire existe depuis longtemps en Irlande, où la plus grande partie de la terre appartient à des propriétaires absents, dont beaucoup vivent en Grande-Bretagne.

Un boycott qui ne dit pas son nom


Des Palestiniens appellent au boycott des produits israéliens, dans le centre de Ramallah, le 3 août 2006. (Fadi Arouri/MaanImages sur Electronic Intifada)

Les années 1880 ont toutefois initié des dynamiques qui ont mené les deux pays dans des directions différentes.

En 1882, les premiers immigrants sionistes sont arrivés en Palestine, démarrant le processus qui a mené ensuite à l'éviction des métayers indigènes, lorsque des magnats comme les Sursuq leur ont enlevé la terre sous les pieds en la vendant au Fonds National Juif.

A l'opposé, en 1880, les métayers irlandais ont engagé un processus qui les a transformés en possesseurs - occupants. Un ancien officier de l'armée britannique a joué un rôle dans ce drame, et son nom est resté comme mot nouveau dans de nombreuses langues.

L'Irlande de l'Ouest souffrait à nouveau de conditions proches de la famine. La récolte de pommes de terre était mauvaise pour la troisième année consécutive. Le Capitaine Charles Cunningham Boycott, agent de Lord Erne, propriétaire absent d'une propriété dans le Comté de Mayo, a refusé la demande des métayers d'une réduction du loyer et, à la place, en septembre 1880, a obtenu des notices d'expulsion contre onze d'entre eux pour défaut de paiement du loyer.

Trente ans plus tôt, les expulsions avaient chassé un très grand nombre d'Irlandais vers l'Amérique du Nord.

Mais c'étaient en d'autres temps : un mouvement national des droits des métayers, la Ligue pour la Terre, venait d'être créé, sous la direction de Charles Stewart Parnell, un descendant de la classe possédante, qui avait hérité des sympathies pro-métayers de sa mère américaine, une femme dont le grand-père avait été l'un des gardes du corps de George Washington.

Lors d'un discours, le 19 septembre 1880, Parnell a souligné la stratégie de la Ligue :

"Lorsqu'un homme prend la terre dont un autre a été chassé, vous devez l'éviter lorsque vous le croisez sur la route, vous devez l'éviter dans les rues de la ville, vous devez l'éviter dans les magasins, vous devez l'éviter à la foire et au marché, et même dans la salle de prières, vous devez le laisser dans une solitude complète, le mettre dans une sorte de quarantaine morale, l'isoler du reste de ses semblables, comme s'il était un lépreux du temps jadis, vous devez lui montrer votre haine."

Trois jours après, des magistrats ont essayé d'appliquer les avis d'expulsion de Boycott contre les métayers, et la politique de la Ligue pour la Terre est entrée en vigueur. Dans l'espace de 2 mois, le nom de Boycott était devenu synonyme d'ostracisme, il a quitté sa propriété et les propriétaires comme le gouvernement ont découvert le pouvoir des gens ordinaires.

L'année suivante, Westminster mettait des fonds gouvernementaux à la disposition des métayers qui voulaient acheter leurs fermes.

Israël vole depuis trop longtemps la terre dont les Palestiniens ont été expulsés, et la haine se répand partout dans le monde. En Irlande, des photos des bulldozers israéliens côtoient celles des béliers des propriétaires. Même un ancien président US a assimilé la "hafrada" ("séparation" en hébreu) à l'apartheid. Le dégoût a atteint un tel niveau que même des institutions très conservatrices, qui évitent habituellement la politique, sont amenés à exprimer leur préoccupation.

Aosdana, l'académie des artistes sponsorisée par l'Etat irlandais, est l'une d'entre elles. Son assemblée générale annuelle du 28 mars a approuvé la résolution ci-dessous :

"Se souvenant de l'appel du 4 août 2006 par lequel des cinéastes, artistes et employés culturels palestiniens demandent la fin de toutes coopérations avec les événements et institutions culturelles financées par l'Etat israélien, Aosdana souhaite encourager les artistes et institutions culturelles irlandaises à réfléchir profondément avant de s'engager dans de telles coopérations, gardant toutefois toujours en mémoire le courage indéniable des artistes, écrivains et intellectuels israéliens qui s'opposent aux politiques illégales de leur propre gouvernement envers les Palestiniens."

Sous son apparence de résolution conciliante, c'est un véritable appel au boycott qui ne dit pas son nom. Sa signification n'a pas échappé au Dr. Zion Evrony, l'ambassadeur d'Israël à Dublin. Le même jour, il a publié un communiqué de presse bourré de clichés qui auraient pu marcher il y a quelques décennies, lorsque le peuple irlandais n'était pas encore averti des horreurs infligées par Israël aux Palestiniens.

Il est également possible que la rapidité de la réponse du Dr. Evrony soit due au fait que la force de l'émotion des artistes irlandais avait été relayée par la presse irlandaise.

L'auteur de la motion, la dramaturge Margaretta D'Arcy, qui est juive, avait écrit dans The Irish Times du 16 février que : "J'étais réticente à appeler au boycott culturel d'Israël jusqu'à ce que je visite le pays pour la première fois en novembre dernier… J'ai alors été convaincue qu'un boycott culturel était nécessaire, au moins en signe de solidarité avec ceux qui, en Israël, combattent l'inégalité, la discrimination et la ségrégation de leur société."

Elle poursuit en citant "Vol de Terre", de Yehezkel Lein, publié par B'Tselem – le centre israélien d'information pour les Droits de l'Homme dans les Territoires occupés : "L'entreprise de colonisation des territoires occupés a créé un système de ségrégation basé sur la discrimination qui n'a peut-être aucun parallèle dans le monde depuis le régime d'apartheid de l'Afrique du Sud."

Mme D'Arcy termine en disant : "Mon oncle est parti vivre en Terre Sainte dans les années 1920 pour participer à la réalisation d'un rêve utopique de paix, de justice et d'égalité entre les Juifs et les Arabes. Ce n'est qu'à son arrivée qu'il a réalisé combien il s'était trompé. Il aurait mieux fait de rester à Londres et de lutter pour la paix, la justice et l'égalité en Angleterre."

Parnell avait terminé son appel à l'action en disant que "aucun homme ne sera assez avare, ou n'aura perdu toute honte qu'il osera défier l'opinion publique de tous les hommes sensés."

Elle et lui ont raison.

Source : The Palestine Chronicle

Traduction : MR pour ISM

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