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ISM France - Archives 2001-2021

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Jayyous -

Jayyous : Protester en plantant des oliviers

Par

Avec dix internationaux nous sommes arrivés au checkpoint de Qalqilya pour aller camper du côté israélien du mur d’Apartheid avant l’action symbolique de plantation d’oliviers prévue le lendemain.
Cette plantation symbolique de jeunes oliviers a lieu sur le site du mur d’Apartheid près de la terre volée d’Abu Azzam.
Nous camperons sous une tente sur sa terre volée et ensuite nous rejoindrons l’important groupe composé de 300 membres de Ta’ayush pour la manifestation en début d’après-midi.

30 décembre 2004

Avec dix internationaux nous sommes arrivés au checkpoint de Qalqilya pour aller camper du côté israélien du mur d’Apartheid avant l’action symbolique de plantation d’oliviers prévue le lendemain avec des membres de Ta’ayush (une association israélienne de militants de la paix).

Cette plantation symbolique de jeunes oliviers a lieu sur le site du mur d’Apartheid près de la terre volée d’Abu Azzam.
Nous camperons sous une tente sur sa terre volée et ensuite nous rejoindrons l’important groupe composé de 300 membres de Ta’ayush pour la manifestation en début d’après-midi.


Abu Azzam m’embarque sur son tracteur avec tous les bagages des autres internationaux. Il n’y a pas de remorque sur cette petite merveille et nos nombreux sacs à dos sont entassés autour d’Abu Azzam. Je me tiens sur une sorte de système de suspension et je me cramponne pour protéger ma chère vie.

Nous rebondissons sur des fossés boueux, le tracteur fait par moment des embardées jusqu’à chavirer. Ouah ! Tout autour de moi il y a des orangers et des citronniers, cet endroit est magnifique. Les bagages et moi sommes transférés sur un autre tracteur avec cette fois une remorque. Ouf ! Je mange des mandarines que m’ont tendues des travailleurs agricoles


Nous arrivons à l’endroit où nous allons dormir, une baraque de travailleurs mais en réalité une maisonnette bien équipée.
Les autres sont arrivés un peu plus tard, et dans la soirée Abu Azzam raconte la tragique histoire de sa terre volée autour du feu de camp.

La terre initialement prévue pour le mur, dans la région de Jayyous, a été vendue par un fermier à l’Etat israélien. L’Etat israélien a ensuite voulu acheter les terres d’à côté, mais les autres fermiers ont refusé de vendre. Aussi l’Etat Israélien s’est accaparé de la terre en redessinant simplement les cartes.

Dans le cas d’Abu Azzam, ils ont transformé son oliveraie en carrière et ne l’ont même pas averti quand ils ont fait exploser sa colline. L’explosion s’est répercutée comme un tremblement de terre sur ses orangeraies. Leurs plans pernicieux consistent à construire une colonie, un mur et une route au beau milieu de ses superbes vergers.

Notre action de demain consistera à planter de jeunes plants d’oliviers sur les cicatrices laissées sur la terre par les bulldozers, de manifester jusqu’aux grilles qui séparent les terres de Jayyous au village de Jayyous et de rejoindre les manifestants qui arrivent par le côté palestinien du mur (électrifié)



31 décembre 2004

Le matin arrive et un véhicule hummer dépasse notre cabane au moment où,assis dehors, nous sommes en train de prendre notre petit déjeuner. Nous apercevons des soldats qui nous observent de derrière le château d’eau.
La nuit d’avant nous avons grimpés sur la tour pour voir la lune se lever, tout semblait si tranquille inondé du chaud halo de la lumière lunaire et maintenant l’intense désespoir causé par un état fasciste dévaste cette terre. Nous n’avions pas réalisé que l’armée était proche de nous.

Les 300 membres de Ta’ayush arrivent avec des banderoles pacifistes suivis par quinze véhicules de sécurité. Avec enthousiasme, ils se mettent à planter de jeunes arbres devant les caméras de télé. Il y a toutes sortes de policiers et de soldats qui arrivent avec le groupe, l’armée normale, l’uniforme bleu de la police des frontières, et la police des colons dans des camionettes blanches.


Tous ces uniformes escortent les manifestants jusqu’à la grille. La police des frontières et l’armée cherchent à rompre le ordon (de manifestants) en face de nous, mais le groupe fait demi tour et part dans les oliveraies en sautant par dessus les obstacles qui parsèment le chemin vers le mur. Les uniformes obligent tous les manifestants à repartir par un passage étroit qui descend des collines entre deux murs. Ce qui ne nous laisse qu’une stratégie de sortie hasardeuse si les choses devaient mal tourner.


A environ 300 mètres des barrières, le chemin monte dans la colline et fait un virage sec avant de longer le mur qui divise la ferme et les terres du village de Jayyous.

Les forces de sécurité nous empêchent de continuer vers l’entrée pour rejoindre les manifestants palestiniens que nous pouvons voir à distance courir vers la grille. Une petite délégation de 4 manifestants israéliens est autorisée à aller vers le village où il y a Abu Azzam et une femme qui agite un rameau d’olivier.

Il y a des acclamations tandisqu’ils traversent puis repartent. En même temps, une cariole tirée par un âne et transportant deux ouvriers agricoles s’avance en tanguant sur la route irrégulière et coupe notre manifestation.
La police de l’armée et celle des frontières arrêtent la charrette puis l’autorise à continuer en direction de la grille.
Cela rend le trajet lent et difficile vers la colline où le personnel de deux jeeps qui y sont stationnées l’arrête une fois de plus.

Ils exigent qu’un homme descende et quitte la charrette. Puis une fois de plus on leur permet de continuer.

Ils s’éloignent en longeant le mur en direction cette fois du véhicule hummer stationné à une centaine de mètre de la grille.

Ils sont arrêtés et on ne leur permet pas de continuer. Un militant et moi observons avec inquiétude l’avancée de la charrette avec. En même temps, les Ta’ayyush sont dispersés et renvoyés à leurs bus.

Quelques uns d’entres nous, les ISMERs, discutons avec la police des frontières qui nous oblige ensuite à remonter dans les bus de l’autre côté de la carrière loin de notre cabane.
Nous partons en passant délibérément devant les soldats et la police des frontières.

La route est parsemée de grosses flaques que nous approchons avec précaution avec la crainte que des jeeps ne s’approchent pour nous éclabousser.
La police des colons gronde en dépassant les soldats dans leur véhicule de transport et les éclabousse, et nous rions quand nous entendons leurs cris indignés : « Non ! Non ! Non ! ». Un militant rusé s’est arrangé pour prendre une photo des soldats sautant, furieux d’être mouillés et pleins de boue.

Nous essayons de revenir à la cabane par la carrière illégale, un véhicule hummer grogne derrière nous et deux soldats en sautent et nous demandent où nous allons. Nous leur expliquons que nous allons chercher nos affaires et ils nous laissent.

"Nous allons vous escorter" disent les soldats.
Je réponds : "J’aimerais mieux pas, je n’aime pas les gens qui portent des fusils"
.

Ils marchent derrière nous et nous nous cramponnons aux rochers et aux buissons d’épines en nous dirigeant vers la cabane. Ils s’accroupissent derrière le château d’eau une fois de plus, tandis que nous nous laissons tomber dans des chaises en plastique pour du café et des mandarines.
Je n’en ai jamais mangé autant de toute ma vie !

Nous attendons l’arrivée du puissant tracteur d’Abu Azzam, avec sa remorque, cette fois, qui nous transporte avec nos affaires jusqu’au village de Jayyous. La remorque est bourrée, nous y sommes onze si bien qu’il n y a pas trop de place pour les pieds. Nous nous cramponnons et chantons dans le soleil couchant en nous dirigeant vers la grille.

Le contingent suédois chante une chanson sur Pippi Longstocking (Note : héroïne de BD : la petit fille la plus forte du monde) et nous chancelons devant les soldats. Ils demandent à chacun d’entre nous de descendre du tracteur. Je m’approche d’eux en chantant un refrain populaire et leur tends mon passeport. Ils nous laissent passer et nous nous mettons en marche vers le village pour y rencontrer les internationaux de Jayyous.

Nous réveillonnons pour la nouvelle année ensemble dans une fête d’enfer avec des Pringel (Note : marque de chips) et du Fanta et nous échangeons nos vœux de paix pour l’année qui commence ;



1er janvier 05

Nous avons décidé de rester à Jayyous une journée de plus à la demande des villageois pour les aider à ramasser les olives. A cause de la clôture électrique et des grilles qui morcellent les terres, les Israéliens ont donné des permis aux fermiers pour qu’ils aillent sur leurs propres terres ; pas de permis, pas d’entrée.

Le nombre de permis distribués est extrêmement limité et ne permet pas assez de main d’oeuvre pour récolter toute la production.
Les olives pourrissent souvent à même les branches. Les villageois espèrent qu’avec nos passeports nous pourrons entrer sur leur terre et les aider à ramasser les olives.

Ils nous disent que les grilles sont ouvertes à 8h du matin et qu’ainsi nous nous diviserons en deux groupes, le mien ira avec celui de la terre de Mohammed qu’on peut atteindre par la grille n°26.


Nous arrivons. La grille est composée de deux épaisseurs, l’épaisseur interne est électrifiée, celle de l’extérieur est entourée de chaque côté par des douves pleines de lames coupantes, qui s’étendent, dirait-on, à l’infini.

Une pancarte sur le mur extérieur indique les heures d’ouverture.
Les horaires sont gribouillés sur la pancarte avec un marqueur et peuvent changer au caprice de l’armée. Trois séquences de 15 minutes déterminées dans la journée sont les seuls moments où les villageois (et seulement ceux qui sont assez chanceux pour avoir le permis spécial si parcimonieusement attribué) peuvent entrer sur leur terre.

Et oui, les horaires ont été changés dans la nuit par les petits lutins de l’armée. Le matin, l’ouverture du mur se fait entre 8h à 8h15, mais maintenant c’est de 6h à 6h15
Nous avons raté l’accès du matin.

L’un de nous appelle en se marrant une soi disant «hot line humanitaire», ils ne voudront pas admettre que le mur est leur affaire.
Ensuite nous essayons d’appeler un numéro d’urgence, c’est un service d’aide en tant que tel, et ils nous disent que nous pouvons appeler qui nous voulons mais qu’ils ne nous aideront pas !

Un véhicule Hummer s’arrête pour je ne sais quelle raison et dit à Mohamed que la porte ouvrira à 12h30. Nous partons pour l’instant mais décidons de revenir à 12h30 pour voir s’ils nous ont menti.

Nous revenons et oui, vous avez gagné, ils nous ont menti ! Nous frappons contre le mur dans une session improvisée de percussion et chantons : «Laissez-nous passez, laissez-nous passer ! ».


Des enfants jettent des pierres dans la zone de barbelés, ça ressemble à un ensemble de détecteurs. Un autre Hummer arrive du village droit sur nous. Ils nous disent que nos passeports ne nous permettront pas de franchir le mur et que seuls ceux qui sont munis de permis de fermiers seront autorisés à passer.

A 13h45 la porte s’ouvre, les tracteurs passent ainsi qu’un gros troupeau de moutons, - image biblique traditionnelle, mais il est surprenant de voir cette image communément utilisée par les illustrateurs chrétiens une peu partour traverser le mur électrifié et les barbelés à lames. Deux petits enfants gardent les moutons, derrière leur grand-père, les guidant le long des interminables barbelés à lames.

On ne nous laisse pas passer. Sans nous, Moahmmed ne voit pas d’intérêt à ce que nous traversionsn aussi, nous retournons au village en nous sentant inutile.

Source : www.palsolidarity.org

Traduction : CS pour ISM-France

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