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Ramallah - 28 septembre 2004
Par Jerry
Je vois un jeune soldat, ses yeux remplis de peur et de haine, lever sa matraque pour frapper à l’arrière de la tête des femmes palestiniennes. J’avance pour me mettre devant elles et lève mon bras pour défendre la femme. Je suis soulagé de voir le soldat se retourner et diriger son attention ailleurs.
Cependant, un autre soldat qui avait été témoin de l'incident tire rapidement une grenade assourdissante et la jette à mes pieds.
Je me retourne au moment où elle explose.
Les internationaux, dont certains viennent d’aussi loin que l'Angleterre, la Suède, l’Australie, et l’Ecosse, se sont réunis au centre pour les Jeunes de Budrus dans les Territoires Occupés près de Ramallah.
Alors que je suis assis à écrire tout en appréciant la douce brise et le soleil chaud du matin, un pacifiste palestinien me dit de rentrer rapidement à l'intérieur, car deux Humvees avec des soldats israéliens s'approchent.
Peu après 13 h, des écoliers passent, en rang dans leurs uniformes bleus tout en chantant et en scandant des slogans. Notre groupe d'internationaux les suit jusqu’à l'église, où les villageois et les manifestants se rassemblent. Une foule d'environ deux cents personnes se sont réunies pour la manifestation ainsi que des médias de différentes agences. Un grand jeune homme est entouré par des journalistes avec des appareils-photo et des micros pendant qu'il donne son discours sur les droits des Palestiniens à garder leur terre, et comment ils sont opprimés par l’occupation militaire israélienne.
Deux camionettes arrivent, transportant les manifestants israéliens. Je serre la main à un jeune homme de Tel Aviv, qui, plus tard, recevra des coups de pied et sera frappé par les soldats. Un coup de sifflet retentit et nous marchons tous dans les rues étroites et parsemées de rochers jusqu’à l'école du village. Le coordinateur m'informe que les rochers sont placés là délibérément par les villageois pour enpêcher les jeeps d'entrer.
Le soleil est franc et chaud, et l'odeur d'engrais est forte. Je jette un coup d'oeil dans ce que je pense être la salle de séjour d'une maison, et je vois une pièce pleine de chèvres. Une autre maison a sa pièce qui donne sur la rue pleine de poulets. De nombreux villageois soutiennent mais ne souhaitent pas être impliqués, ils se tiennent devant leurs portes avec de grands sourires. Les petits enfants nous font un signe, appréciant notre présence dans le village.
Nous marchons à travers une cour de jeux chaude et sablonneuse à l’arrière de l'école où nous nous arrêtons sur une surface rocheuse. Au-dessous de nous, dans une vallée remplie d'oliviers, sont positionnés onze soldats israéliens qui nous regardent, leurs armes prêtes. Ils se tiennent en ligne parallèle et sont vêtus en habit de combat.
Je repère rapidement le tireur d'élite qui tient le fusil avec l'équipement spécial qui tire des balles en caoutchouc. Chacun des onze soldats a des boîtes métalliques de gaz lacrymogène et des grenades assourdissantes attachées à leurs ceintures. Dans la vallée des oliviers - qui est le sujet de cette protestation - je vois une grande machine qui brise les rochers et dégage la terre. Depuis plus de cinq mois maintenant, les villageois protestent contre le déracinement de leurs oliveraies datant de plusieurs siècles pour construire la route du « Mur de Sécurité » israélien.
Je me faufile à travers la foule pour monter plus haut, hors de portée des armes. Puis, les chants et les frappements de main commencent. "Un, deux, trois, quatre, le mur doit disparaître. Cinq, six, sept, huit, Israël est un Rtat raciste!"
Plusieurs minutes plus tard, les discours commencent. Le chef de village s’en va. Puisque je ne parle pas arabe, je ne sais pas ce qui a été dit mais j'en ai une très bonne idée . Pendant que j'écoute, j'observe les soldats et je suis impressionné de leur calme. Ils sont à environ 2 mètres et regardent au-dessus d’eux la foule mélangée.
De temps en temps, le soldat responsable parle dans son micro, ou on marche pour dire quelques mots à son camarade. Il y avait un soldat féminin, que les villageois détestaient parce qu'elle était non seulement vicieuse, mais méchante et sans cœur, m’a-t’on dit plus tard.
Les discours et les chants ont continué pendant plus de deux heures avant que la foule de sépare et commence à s’éloigner lentement. J'ai vu un couple de pacifistes israéliens d'un certain âge passer près de moi, le visage inquiet. Ils étaient bien habillés, comme s’ils allaient à une garden-party au lieu d'une protestation.
Comme le site se vidait, j’aurais dû partir avec eux. Ils venaient de partir quand j'ai vu un jeune jeune palestinien d’environ 10 ans ajuster sa fronde et lancer un pierre au-dessus des têtes des manifestants en direction des soldats.
La pierre fut l'excuse qui a encouragé les soldats à entrer en action. Immédiatement, une boîte métallique de gaz lacrymogène a été tirée par les soldats, et les bombes assourdissantes ont éclaté. Chacun a commencé à courir, moi inclus. Nous sommes seulement parvenus à courir quelques mètres, des grenades assourdissantes et du gaz lacrymogène tombant tout autour de nous, quand j'ai entendu un cri d'internationaux, "Ici, à l’intérieur !"
Ceci s'est avérée être une erreur, parce que nous étions emprisonnés dans une grotte d’arbres et de buissons sans issue. J'ai été stupéfié par la rapidité avec laquelle les soldats se sont arrangés de la colline pentue, et furent sur nous immédiatement.
Les cinq soldats ont donné l’ordre à notre groupe de douze : "A terre !" Nous nous sommes rapidement assis, enchevêtrés en se donnant le bras pour constituer un groupe compact. Le jeune pacifiste suédois est effrayé et me demande de le serrer plus fort. Un officier se tient au-dessus de nous, demande nos passeports et braille des questions. Les soldats sont en colère et ils jurent. Un soldat traîne par le cou le pacifiste de Tel Aviv dans notre groupe, car les trois autres soldats lui donnent des coups de pied et le frappent de leurs matraques. Le jeune Israélien est silencieux et ne résiste pas à leurs coups.
Je commence à bouger pour l’aider, mais le jeune homme Suèdois près de moi dit : "Non, Non. Nous devons rester ensemble. "Un jeune Palestinien, un garçon d’environ 12 ans est à genoux derrière moi. Je peux sentir ses genoux dans mon dos pendant que son corps entier tremble de peur. Je l'atteins à l’arrière et prends sa main pour le réconforter, et je sens sa réponse à travers notre poignée moite.
Le soldat, l'oeil dur et l’adrénaline forte, se déplace parmi nous et pose plus de questions. Après environ quinze minutes assis dans un groupe sous le soleil, les soldats ont emmené les Palestiniens et les Israéliens. A ceux qui restaient, ils ont dit : "Rentrez. Vous êtes dans une zone militaire. Vous n'avez rien à faire ici!"
Soulagés de ne pas avoir été arrêtés, nous nous sommes levés tous les cinq et nous sommes repartis dans la rue. Les fouilles maison par maison à la recherche d’autres pacifistes ont continué pendant le reste de l'après-midi et de la soirée. Nous avons appris plus tard que le coordinateur palestinien et une pacifiste internationale (qui je me rappelle réprimandait les soldats), ont été attrapés et frappés. Sur notre chemin de retour ver le Centre pour Jeunes, le Humvee avec les pacifistes arrêtés a reculé vers nous, les portes arrière ouvertes.
Plusieurs soldats ont évité des villageois qui essayaient d'empêcher les soldats d'emmener les personnes arrêtées.
Étrangement, ceux qui se sont impliqués sont les femmes et les enfants.
Nous n’avons vu aucun homme.
Il y a beaucoup de bousculades, alors que nous restons à observer sur les côtés.
La bousculade a duré pendant plusieurs minutes, jusqu’à ce que le Humvee soit en bas de la colline.
Je vois un jeune soldat, ses yeux remplis de peur et de haine, lever sa matraque pour frapper à l’arrière de la tête des femmes palestiniennes. J’avance pour me mettre devant elles et lève mon bras pour défendre la femme. Je suis soulagé de voir le soldat se retourner et diriger son attention ailleurs.
Cependant, un autre soldat qui avait été témoin de l'incident tire rapidement une grenade assourdissante et la jette à mes pieds.
Je me retourne au moment où elle explose.
Au même moment, le Humvee a atteint le coin de la rue, s'arrête, tourne et accélère, tout en jurant sous une pluie de cailloux de la taille de balles de baseball.
Ainsi se termine un autre jour de manifestation à Budrus.
Source : www.palsolidarity.org/
Traduction : MG pour ISM-France
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