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ISM France - Archives 2001-2021

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Gaza -

Qui contrôle réellement le passage de Rafah ?

Par

Mon ami Patrick et moi sommes arrivés au Caire la nuit dernière et nous nous sommes levés tôt ce matin pour le passage de Rafah à Gaza.
Nous ne sommes pas partis aussitôt que nous avions prévu, en raison d'une suite comique d'erreurs impliquant le fait que nos hôtes n'ont pas pû se réveiller malgré nos cris et nos violentes secousses, des conducteurs qui avaient des voitures qui ne fonctionnaient pas et les conflits/arnaques omniprésents des chauffeurs de taxi.

J'ai décidé de couvrir ma tête pour la frontière, et peut-être pendant tout le temps de ma présence à Gaza s'il semble que les gens préfèrent cela.
Une amie palestinienne qui venait nous chercher à la frontière me l'avait demandé, parce qu'elle a peur qui nous soyons enlevés. Mon amie Nagwan, chez qui je me suis arrêtée au Caire, m'a attachée mon écharpe.

Elle a l'habitude de porter le hijab, donc cela semblait bien plus authentique que si je l'avais fait moi-même. Aux nombreux checkpoints que nous avons passés pour aller à Rafah, le conducteur disait, "Ce sont des Américains," et les soldats se demandaient pourquoi j'avais la tête couverte.

Nous avons finalement atteint la frontière vers 14 h.

Au début, tout le monde pensait que nous étions des Palestiniens. Les gens nous faisaient signe d'aller tout droit, mais j'ai repèré une pancarte où l'on pouvait lire : "Taxe de Sortie," et j'ai pensé que peut-être nous étions censés payer la taxe ici.

Cela fonctionne comme ça à la frontière jordanienne, et si vous n'avez pas le timbre qui indique que vous vous avez payé la taxe, vous devez faire demi-tour et attendre encore. Car nous étions là à observer, un garde a pris nos passeports.

Il a demandé à Patrick d'où nous étions, et Pat a répondu en arabe que nous étions Américains, et le garde a dit : "Ok, elle a un hawiyya?" en faisant référence à la carte d'identité palestinienne. Il n'a même pas semblé croire Pat quand il a répondu non.

Les gardes de sécurité égyptiens qui portaient des brassards où étaient écrit "Ministère du Tourisme et des Antiquités," ont regardé une liste et nous ont dit que nous n'étions pas dessus, ce que nous savions déjà par notre ami Laila, qui avait fait pression sur le Ministère palestinien des Frontières pour que nous ayons une autorisation.

Ils nous ont dit que nous ne pourrions pas entrer, et semblaient prêts à nous renvoyer à Arish, la ville voisine.

Nous avons persisté et nous nous sommes assis dans le petit bureau de sécurité pour appeler les gens que nous connaissions afin de découvrir ce qui se passait.

Plus tard, nous avons compris que si nous ne nous étions pas arrêtés, nous aurions pu traverser, peut-être qu'au checkpoint suivant, ils auraient supposé que nous étions sur la liste. C'est dur de l'apprendre.

Nous avons parlé à Ashraf Dahlan, la personne chargée de s'occuper des demandes faites par les Étrangers pour passer par Rafah.
Il est le neveu de Mohammed Dahlan, une personnalité importante dans l'Autorité Palestinienne. Laila nous a dit qu'elle n'avait jamais vue un bureau aussi grand que celui d'Ashraf à Gaza.

Ashraf a indiqué à Pat que les papiers avaient été envoyés aux Européens, qui selon lui, ont l'ultime autorité pour décider si nous pouvons entrer ou non.

Au cas où vous ne seriez pas au courant de l'accord, le passage des frontières de Rafah a été ouvert parce que James Wolfensohn, l'ancien responsable de la Banque Mondiale et maintenant l'envoyé américain en Israël-Palestine, est venu à Gaza près de deux mois après le très publicisé désengagement. Il a constaté que c'était une prison, et que personne n'était autorisé à y entrer ou à en sortir.

Donc, Condoleeza Rice est arrivée et a utilisé toutes les pressions financières possibles pour forcer Ariel Sharon, qui avait toujours son cerveau à ce moment-là, à accepter une frontière entre Rafah, du cêté palestinien et Rafah en Egypte.

La frontière devait être contrêlée par l'Autorité Palestinienne sous la surveillance de l'Union Européenne et l'Egypte, et les Israéliens étaient autorisés à observer depuis une pièce voisine via des caméras.

La frontière a été ouverte le week-end de Thanksgiving, avec de nombreuses retransmissions télévisées et les spectateurs du monde entier ont pû voir les gardes-frontières palestiniens tamponner les passeports des Gazéens souriants qui se précipitaient pour étreindre les membres égyptiens de leur famille et acheter des cigarettes.

Mais cela fonctionne comme ça seulement pour les Palestiniens (quand cela fonctionne, parce qu'elle a été fermée brusquement un certain nombre de fois, laissant des personnes coincées de l'autre cêté d'où elles vivaient, ne sachant pas quand elles pourraient rentrer à la maison).

Pour les Étrangers, c'est plus délicat. Des représentants de l'OLP ont déclaré à deux reprises à un ami que les Étrangers ne peuvent pas en aucun cas utiliser le passage.

J'ai appelé la mission de l'OLP à Washington et on m'a dit qu'il n'y avait absolument aucun problème, vous pouvez y aller, vous n'a pas besoin d'autorisation, il tout sera pris en compte à la frontière.

Heureusement, Pat ne les a pas crus et en a parlé autour de lui. Il s'est renseigné sur la procédure officielle : Vous soumettez votre demande à l'Autorité Palestinienne, qui l'envoie au bureau de liaison, qui est composée de Palestiniens, d'Européens et d'Israéliens.

Là, personne ne connaît exactement qui prend la décision finale, et quelles en sont les raisons.

Certains disent que ce sont les Européens, d'autres disent que ce sont les Palestiniens; Les Palestiniens, évidemment, disent que ce sont les Israéliens, bien que cela ne doit absolument pas l'être.

Quand Ashraf nous a indiqué que ce n'était plus de son ressort, Pat l'a entendu dire, "Maintenant, c'est aux Is---Européens."

Certains ont raconté qu'entrer par Rafah était "facile", ce qui, j'en suis sûre, signifie qu'ils ne sont pas passés par ce processus bureaucratique. On a dit à Pat que moins de 5% des demandes étaient refusées.

Avant l'élection, un certain nombre de journalistes étrangers ont été renvoyés, mais pendant l'élection beaucoup de gens ont pû entrer facilement. Immédiatement après, le passage de la frontière s'est à nouveau compliquée.


Revenons donc à notre histoire : Nous avons appelé la liaison de l'Union Européenne, à qui Pat avait parlé avant de venir. L'homme a dit à Pat que des décisions étaient prises au cas par cas. Il a dit qu'il allait étudier nos demandes et que Pat devrait rappeler quelques minutes plus tard.

Pat a finalement réussi à le joindre une heure plus tard, et il lui a dit que les papiers n'avaient été jamais déposés au bureau de liaison. Pat a rappelé Ashraf qui lui a dit : "Il y a un problème de coordination entre les Européens et les Israéliens, et je vais vérifier."

Nous avons appelé un ami bien-informé qui travaille dans l'Autorité Palestinienne. Il a demandé à quelqu'un de Gaza d'encourager Ashraf à nous aider, en disant que nous étions solidaires de la lutte palestinienne.

Un autre homme a dit à Pat qu'il ne pensait pas que nous serions autorisés à entrer parce que notre invitation provenait d'une ONG palestinienne, et les règles en vigueur exigent qu'elle vienne "d'une ONG internationale accréditée."

Je suis devenue en colère. Pourquoi l'accès à Gaza était-il aussi limité ? C'est un accord durement gagné par la communauté internationale. Le désengagement est censé signifier la liberté pour les Palestiniens, et ils ne peuvent même pas recevoir de visiteurs.

Nous avons des invitations d'au moins dix Palestiniens : Venez quand vous le voulez; nous serons heureux de vous voir;
"de Rafah avec amour," disait un email, envoyé par une femme que je n'avais jamais rencontrée.
Pourquoi n'est-ce pas suffisant ?
Pourquoi l'amitié n'est-elle pas une assez bonne raison pour rendre visite à quelqu'un?

Les gens de Gaza peuvent obtenir des autorisations pour entrer et sortir, bien qu'ils ne puissent aller en Cisjordanie qu'en passant par la Jordanie. Mais Gaza est toujours une prison.

Alors que nous étions assis là, j'ai observé les gens qui passaient la frontière, avec des bagages et des paquets, et je sais que cela doit être bien mieux de passer une frontière contrêlée par la police palestinienne que d'avoir des soldats israéliens armés poser des questions envahissantes.

Mais même dans la plupart des prisons, vous êtes autorisés à voir tous les visiteurs que vous voulez.

Nous sommes revenus à Arish; un des gardes égyptiens nous a trouvé un taxi pour un hêtel qu'il nous a recommandé (vraisemblablement contre un petit backchich). Avec un petit peu plus d'argent que nous pensions, nous avons eu une jolie chambre donnant sur la mer.

Nous avons longtemps marché sur la plage, en regardant Rafah, inaccessible, et en parlant du contraste de cette station silencieuse, qui est vraisemblablement remplie en été de vacanciers égyptiens et de touristes, située trente kilomètres du camp de Rafah, et qui doit être l'un des endroits les plus traumatisés sur terre.

Pour nous, cela accentuait la nature artificielle du "conflit." Il n'y a rien concernant le paysage ou la culture qui crée un danger pour la population.
Autrefois, les gens de Rafah en Palestine et ceux de Rafah en Egypte n'était qu'une seule communauté.

Alors les colonisateurs ont collé une frontière entre eux, et puis une barrière, et puis un mur, puis quelques tours avec des soldats armés, et maintenant ils sont des pions torturés dans un jeu international "du mien est plus grand que le tien."

Le scénario est reproduit dans le monde entier. Par exemple, Alta California et Baja California – des membres d'une même famille sont d'un cêté de la barrière appartenant au pays le plus riche sur terre, ceux de l'autre cêté, font partie du "tiers monde."

Cette situation est si récente, et les distances sont tellement petites, que cela met en perspective la démence.

Source : www.palsolidarity.org/

Traduction : MG pour ISM

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