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Gaza - 13 octobre 2007
Par Saleh Al-Naami
Bien qu'Al Wahidi, le nouveau présenteur des informations sur la radio "La Voix des Travailleurs" dans la Bande de Gaza, ait terminé toutes les procédures administratives requises pour se rendre à Jérusalem, des agents du Shin Bet au passage d'Erez ne veulent pas l'autoriser à passer jusqu'à ce qu'il accepte de devenir un agent israélien et qu'il founisse des informations sur les activités des responsables et des membres des mouvements de la résistance palestinienne actifs dans la Bande de Gaza.
Photo AFP : Des soldats israéliens reviennent d'une patrouille dans le nord de Gaza. Ils passent à côté de la barrière de blocs de béton construite par Israël pour séparer Gaza.
Son attitude calme cache sa tragédie personnelle. Le journaliste Bassam Al Wahidi, 30 ans, est sur le point de tomber dans l'obscurité perpétuelle.
Cela se produira s'il ne subit pas une opération visant à repositionner sa rétine, une opération qu'il était censé avoir le mois dernier dans un hôpital palestinien de Jérusalem.
Bien qu'Al Wahidi, le nouveau présenteur des informations sur la radio "La Voix des Travailleurs" dans la Bande de Gaza, ait terminé toutes les procédures administratives requises pour se rendre à Jérusalem, des agents de l'agence des renseignements internes israéliens au passage d'Erez, sur la frontière nord entre la Bande de Gaza et Israël, le Shin Bet, ne veulent pas l'autoriser à passer jusqu'à ce qu'il accepte de devenir un agent israélien et qu'il founisse des informations sur les activités des responsables et des membres des mouvements de la résistance palestinienne actifs dans la Bande de Gaza.
Lorsque Al Wahidi a été arrêté à Erez, des agents du Shin Bet l'ont insulté et l'ont complètement déshabillé avant de l'emmener devant l'un des interrogateurs de l'agence.
L'interrogateur, qui s'est présenté sous le nom de "Capitaine", l'a inondé de questions sur les mouvements de la résistance palestinienne pendant 5 heures et demi, en lui demandant de divulguer des informations avant d'être autorisé à se rendre à Jérusalem pour subir son opération.
L'interrogateur a utilisé toutes les carottes et les bâtons que ces organisations ont en leur possession.
Al Wahidi, qui fait partie d'une famille bien établie de Gaza étroitement liée à la résistance contre l'occupation, a refusé de prendre en considération les offres de l'interrogateur du Shin Bet et il a dénigré ses tentatives de l'enrôler comme espion.
L'heure de l'opération est passée alors qu'Al Wahidi était encore dans la salle d'interrogatoire.
À six heures du soir, après que l'officier ait perdu l'espoir qu'Al Wahidi lui donnerait ce qu'il imaginait, il l'a jeté hors du bureau en lui disant qu'il perdrait la vue pour toujours et qu'il ne serait pas autorisé à aller à Jérusalem jusqu'à ce qu'il accepte d'utiliser sa position de journaliste pour coopérer avec le Shin Bet.
Al Wahidi, qui a raconté son histoire à Al-Ahram Weekly, affirme très sûr de lui qu'après ce qui lui est arrivé avec le Shin Bet, il est plus que jamais convaincu qu'il faut résister à l'occupation.
La contrainte sadique à laquelle les Palestiniens souffrant de maladies chroniques ont été soumis par le Shin Bet est devenu le sujet de discussion dans les rues de la Bande de Gaza.
L'histoire commence généralement quand un patient palestinien demande une autorisation auprès du Département de Liaison israélo-palestinien/Affaires Civiles afin de pouvoir se rendre en Cisjordanie ou en Israël pour subir une opération.
Après des efforts épuisants, les patients reçoivent des autorisations et ils se rendent à Erez pour se retrouver face aux mêmes procédures que celles auxquelles Al Wahidi a été confronté.
Selon les dossiers transmis à Weekly par d'éminents centres des droits de l'homme sur les pratiques du Shin Bet, les officiers de l'agence ne font pas de distinction entre les jeunes et les personnes âgées dans leur tentative de piéger et de contraindre les patients,. Les femmes et même des enfants sont concernés.
Le Professeur Kamel Al-Moughni, 65 ans, est l'ancien doyen de la faculté des Beaux-Arts à l'Université Nationale An Najah à Naplouse.
Il vit dans le quartier Al Shajaiyeh, à Gaza City et il ya deux ans, il a appris qu'il avait un cancer de la gorge. Il a subi une intervention chirurgicale dans un hôpital israélien, et cela a amélioré son état de santé.
Ceux qui suivaient son traitement lui ont demandé de venir régulièrement pour recevoir un traitement radiologique afin de ne pas rechuter.
Il ya un mois, Al-Moughni est parti pour Israël, mais au passage d'Erez, il a été surpris quand plusieurs membres du Shin Bet l'ont conduit dans une pièce où il a été brutalement interrogé par un officier du Shin Bet qui lui a dit, en termes clairs, qu'il ne serait pas autorisé à poursuivre son voyage jusqu'à l'hôpital israélien sauf s'il était prêt à coopérer avec le Shin Bet et à lui fournir des informations sur les militants de la la résistance.
Al-Moughni a été choqué par la proposition du Shin Bet, en particulier au vu de son statut professionnel et de son âge avancé. Il a rejeté l'offre et a regagné la Bande de Gaza, en craignant de subir une rechute.
Une femme de 34 ans, qui a refusé de révéler son nom, a été diagnostiquée d'un cancer. Elle devait être opérée dans un hôpital israélien, mais quand elle est arrivée à Erez, un interrogateur du Shin Bet l'attendait et il a tenté de la contraindre à parler.
Elle est rentrée chez elle sans avoir subi l'opération, et depuis cette date, son état de santé s'est dégradé.
Raji Al Sourani, le directeur du Centre Palestinien pour les Droits de l'Homme, a déclaré à Weekly que son centre avait suivi des cas dans lesquels des agents du Shin Bet avaient tenté de piéger des enfants malades en échangeant des soins médicaux contre la fourniture de renseignements.
Al Sourani souligne que les "pratiques criminelles" du Shin Bet ont également conduit à des tentatives d'exploitation des mauvaises conditions de santé de certains détenus palestiniens dans les prisons israéliennes en conditionnant des soins à un espionnage de leurs codétenus.
Al Sourani souligne que ce que fait le Shin Bet est une grave violation des lois internationales qui affirment le droit du malade à recevoir un traitement approprié. Le refus de ce droit est un "crime de guerre" et "crime contre l'humanité"
Le Centre d'Al Sourani a réussi à lancer des mandats d'arrêt contre un certain nombre de généraux de l'armée israélienne et des chefs des renseignements en Grande-Bretagne et en Amérique, en les accusant d'avoir commis des crimes de guerre contre les Palestiniens.
Pourtant, il reconnaît la difficulté d'intenter des actions en justice contre les officiers du Shin Bet -- et contre Israël en général -- pour la pression exercée sur les malades palestiniens.
Un procès exige des témoins pour témoigner sous serment devant les tribunaux. Les victimes de contraintes refusent généralement de s'identifier et de témoigner, car elles continuent à espérer qu'Israël leur permettra de recevoir un traitement. Elles craignent que si elles intentent des poursuites contre Israël, leurs chances d'obtenir une autorisation qui leur permettrait d'accéder aux hôpitaux diminueraient.
Pourtant, une source de sécurité palestinienne a déclaré à Weekly qu'alors que la plupart des Palestiniens soumis à une contrainte par le Shin Bet rejetaient leurs tentatives d'exploiter leur situation critique en vue de les recruter comme informateurs, un petit nombre de patients acceptent les demandes du Shin Bet pour tenter de sauver leur vie.
Cette source a indiqué que certains de ceux qui avaient été obligés de traiter avec le Shin Bet étaient ensuite allés voir des agences de sécurité palestinienne et leur avaient raconté ce qui s'était passé et la nature des informations qu'ils avaient fournies au Shin Bet. Ils ont été autorisés à rentrer chez eux une fois qu'il a été confirmé qu'ils avaient rompu leurs relations avec les renseignements israéliens.
Certaines des organisations israéliennes des droits de l'homme surveillent constamment les efforts du Shin Bet visant à contraindre les Palestiniens malades.
"Récemment, nous avons noté une augmentation évidente de patients palestiniens, et en particulier ceux qui résident dans la Bande de Gaza, dont l'obtention d'une autorisation pour se faire soigner à l'extérieur de la Bande de Gaza dépend d'une coopération avec le Shin Bet", affirme Ron Yaroun, le porte-parole de l'organisation israélienne Médecins pour les Droits de l'Homme.
"Je suis face à un groupe de personnes qui se sentent faibles et effrayées. Ces personnes se retrouvent piégées. D'une part, elles sont inquiètes pour leur santé, mais en même temps, elles ne sont pas disposées à coopérer avec Israël et à donner des renseignements pour sauver leur vie."
Quant à Danny Valak, le chef de l'organisation Médecins Pour les Droits de l'Homme, il considère que ce que fait le Shin Bet aux patients palestiniens avec l'autorisation du gouvernement israélien est une "situation qui est refusée d'un point de vue de l'éthique médicale et de toute autre éthique. Du point de vue de l'éthique, tout n'est pas autorisé sous prétexte de la sécurité. Tout comme la torture est interdite, de trop fortes pressions sur les patients ou l'exploitation des malades pour les transformer en agent sont également interdites. De fortes normes de morale sont, à mon avis, ce qui garantira la sécurité d'un Etat à long terme. Les États qui refusent l'éthique ne resteront pas des sociétés fortes. "
Des officiers du Shin Bet à la retraite ont admis qu'ils avaient des instructions strictes pour pratiquer les plus hauts degrés de contrainte et d'exploitation en vue d'obliger les malades palestiniens à devenir des informateurs israéliens.
Avner, un ancien haut fonctionnaire du Shin Bet, a admis dans une interview accordée au journal israélien Maariv publié vendredi dernier que les officiers en charge du recrutement des agents avaient l'ordre de ne pas hésiter à exploiter toute condition humaine, quelle que soit sa gravité, dans le but de recruter le plus grand nombre possible d'informateurs palestiniens.
Le Shin Bet, à l'instar du Mossad, rend des comptes directement au Premier Ministre israélien. Le Premier ministre approuve personnellement toutes les opérations qu'il effectue.
Seuls ceux qui rencontrent les personnes atteintes d'une maladie chronique et pour lesquelles les minutes passent comme des heures alors qu'elles attendent la mort puisqu'on leur a refusé le droit le plus fondamental de la possibilité de recevoir un traitement parce qu'elles refusent de devenir des informateurs et de coopérer avec l'ennemi contre leur peuple, peuvent comprendre la profondeur et la raison du mépris que les Palestiniens portent dans leur cœur envers Israël.
Ce qui s'ajoute à l'amertume que ressentent ces patients et leurs familles, et pour tous ceux qui sont témoins de leur situation, c'est le monde du silence sur le crime d'état organisé auquel ils sont soumis.
Source : http://weekly.ahram.org.eg/
Traduction : MG pour ISM
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