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Palestine - 7 mai 2008
Par Ben White
Alors qu'Israël célèbre ce mois-ci 60 ans d'Etat, les Palestiniens profite de cette occasion pour se souvenir de la destruction catastrophique de leur société en 1948. Il n'est pas seulement question pour eux d'évoquer le passé ; ils continuent de lutter pour l'autodétermination et la reconnaissance de leurs droits, selon les lois internationales.
Pourtant, ce serait une erreur de considérer les 60 années passées comme une simple histoire de désastre absolu pour le peuple palestinien. Il y a également eu des succès et des réalisations significatifs, qui méritent qu'on en parle. C'est d'autant plus remarquable, si l'on considère l'ampleur avec laquelle la société a été dévastée en 1948 : Israël a détruit quelques 400 villages, alors que 85% des Palestiniens, dans ce qui est devenu Israël, ont été spoliés.
En dépit de tout, les Palestiniens n'ont pas seulement survécu mais ils ont gagné la reconnaissance internationale pour un Etat palestinien, grâce à leur obstination inépuisable. Souvent privés d'alliés, ils ont lutté jusqu'à obtenir des gains politiques substantiels. Les Palestiniens d'Israël, des Territoires Occupés et en diaspora ont résisté à la domination israélienne – et ont refusé de "s'en aller".
La détermination palestinienne est incarnée par les Nassars, une famille chrétienne que je connais depuis plusieurs années. Propriétaires d'une belle terre qui surplombe le village de Nahalin, à l'ouest de Bethléem, ils ont vu les colonies illégales surgir sur les collines voisines et jusqu'à maintenant, ils ont résisté aux tentatives de l'armée d'occupation israélienne de confisquer leur propriété.
Que ce soit en bloquant la route des colons intrus, en portant leur affaire devant les tribunaux ou en se connectant avec des supporters partout dans le monde, les Nassars ont mobilisé les ressources de leur famille et de leur communauté. De façon plus stimulante, ils ont développé l'accueil de camps d'enfants, d'échanges interculturels et d'hôtes étrangers, sachant qu'ils devaient se battre pour rester sur leur propre terre.
Leur victoire entre en résonance avec le refus palestinien historique d'accepter simplement son lot et – en particulier depuis les années 1960 – la détermination parallèle d'organiser une résistance de terrain. La réussite la plus remarquable fut peut-être le premier Intifada, un soulèvement populaire à la fin des années 1980, qui a montré aux Israéliens que leur occupation aurait un prix, en même temps qu'elle révélait au monde la réalité oppressive de la politique israélienne.
Une autre réalisation profonde des quelques décennies passées fut l'épanouissement de la société civile palestinienne. S'appuyant sur la participation démocratique et l'éducation, les centres communautaires des camps de réfugiés, les troupes de danse, les organes médiatiques et les groupes pour les droits de l'homme ont doté d'une force vitale une société assiégée. C'est en partie grâce à une culture profondément enracinée de citoyenneté active que les Palestiniens ont été capables de tenir des élections qui, par leur professionnalisme et leur transparence, ont fait des envieux dans le monde arabe.
Partant d'une tradition vigoureuse de vie intellectuelle, les savants et les universitaires palestiniens se sont hissés au premier rang global au cours des décennies récentes, non seulement comme avocats de la lutte de leur peuple, mais aussi comme personnalités de renom dans leurs propres disciplines.
Pendant ce temps, s'inspirant de leur riche héritage culturel et religieux comme de l'expérience d'exil et de lutte, les auteurs, poètes, artistes et réalisateurs palestiniens, et même les artistes hip-hop, ont beaucoup apporté, non seulement à leur propre peuple, mais au monde entier.
Historiquement, un obstacle à la paix fut le fait qu'Israël se soit senti autorisé à poursuivre ses politiques de dépossession et d'occupation, sans beaucoup d'attention internationale. Ce fut étroitement lié au fait que la version sioniste mythologisée de ce qui s'est passé en 1948 ne fut pas récusé en Occident – ni à l'intérieur d'Israël – et ce pendant longtemps.
Maintenant, cependant, grâce à des facteurs comme les "nouveaux historiens" israéliens, les efforts infatigables des militants et la nouvelle technologie médiatique qui permet une dissémination large d'informations "du terrain", les Palestiniens ont pu fissurer la façade de la propagande israélienne.
Dans le même temps, la solidarité internationale avec la cause palestinienne a augmenté substantiellement. La question de la Palestine est maintenant forte et tenace, en dépit des tentatives de la couvrir.
Pourtant, des obstacles terribles demeurent. Israël continue à jouir du soutien sans réserve de l'ainsi nommée communauté internationale, en dépit d'occasionnelles tapes sur les doigts. La plupart de la discussion, en Occident, est toujours influencée par les affirmations sionistes et une perspective israélo-centrée. Les Palestiniens sont traités comme des indigènes qui doivent "gagner" leur droit à l'autodétermination, à la dignité, à la sécurité et à la liberté.
Quelques palestiniens ont aussi involontairement créer des barrières à davantage d'avancées. L'énergie positive du premier Intifada a été canalisée dans les institutions bureaucratiques de l'Autorité Palestinienne, alors que des divisions âpres ont souvent été créées entre des groupes comme le Hamas et le Fatah.
Entre temps, l'unité politique palestinienne et une résistance stratégique, dictée par des principes, ont souvent manqué. Le règlement de compte, la corruption et l'interférence de tiers restent les obstacles majeurs.
Les Palestiniens gagneraient aussi à un accord collectif de fin des attaques sur les civils israéliens. Autant que la dimension morale, ce serait aussi de bonne politique. Cela pourrait même faire partie d'un mouvement plus large vers des stratégies de résistance moins "élitistes" basées sur la participation de masse, populaire. Mais sans brouillage avec l'hypocrisie qui consiste à demander simultanément un pacifisme palestinien et à accepter les attaques militaires israéliennes.
Soixante ans est une longue période. C'est pourquoi, à l'occasion de cet anniversaire, il est on ne peut plus opportun de reconnaître le "sumud" palestinien, ou ténacité. Ce sont les Nassars luttant au milieu des barrages routiers et des checkpoints avec leurs enfants et leurs outils agricoles, plantant des oliviers à l'ombre des colonies israéliennes, déterminés et dignes.
Contre toute attente, des millions de Palestiniens sont restés – travaillant leur terre, créant des entreprises, se mariant, ayant des enfants, veillant leurs morts. Face aux efforts déterminés pour marginaliser, et même effacer, leur patrie et leur société, ils ont continué à vivre leurs vies dans toutes leurs plénitudes, et c'est la meilleure base possible pour de plus grandes victoires dans les 60 prochaines années.
Source : The Christian Science Monitor
Traduction : MR pour ISM
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