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Suisse - 26 septembre 2004
Par Silvia Cattori
Le 28 septembre est une date terrible pour les Palestiniens. Une date qui marque le début du "soulèvement", de l’ Intifada, déclenché il y a quatre ans, par l’irruption provocante d’Ariel Sharon, un des lieux les plus saints pour les musulmans : la Mosquée Haram al Sharif.
Mais de quel soulèvement parlons-nous depuis lors ?
Durant ces années où les gouvernements israéliens, de droite comme de gauche, se sont conduits comme si les exigences d’humanité n’existaient plus, nous avons assisté affligés et impuissants, à l’écrasement des Palestiniens.
Les gens bien informés, les Etats, les médias, savent fort bien que l’occupant illégal, fort des armes les plus sophistiquées et les plus terrifiantes, a violé tous les articles de la IV Convention de Genève, articles qui protégent les civils dans les territoires occupés.
A l’heure des comptes, nul ne pourra prétendre, comme les citoyens allemands hier : "Nous ne le savions pas".
Dans ce conflit déséquilibré, l’attention première des citoyens qui ont des liens familiaux ou affectifs avec Israël, devrait se porter sur l’action illégale et les atrocités perpétrées par ce dernier contre les civils Palestiniens.
Or, les organisations juives, les citoyens juifs, les médias, portent une responsabilité considérable dans les souffrances générées de part et d’autres. De fait, ne pas condamner Israël revient à ouvrir la voie à plus de répression contre des innocents et par là même à se discréditer aux yeux de tous les peuples qui, dans ce conflit inégal, savent faire la part des choses.
Devant la multiplication des outrages contre des enfants en bas âge, il est de notre devoir de réagir, de demander à toutes les organisations juives de peser de tout leur poids pour faire cesser les abus commis par Israël contre des populations civiles. Nous ne cesserons jamais de le répéter. Persécuter des enfants déjà captifs de l’occupation, menacer leur sécurité, est un crime impardonnable.
"Si les hommes et les femmes attachés à Israël découvraient ce que nous avons découvert. Que la terre sainte est devenue une jungle de non droits, que le mouvement sioniste a systématiquement et intentionnellement trompé le monde, que l’implantation de l’Etat hébreu en Palestine est jonchées d’épisodes sinistres, d’épisodes qui font de lui un Etat criminel, ils ne pourraient plus accepter la version « officielle » des faits colportée par les sionistes financés par le Congrès Juif Mondial, très actifs en France et aux Etats-Unis. La critique du sionisme se radicalise à mesure que les gens découvrent l’étendue de la tragédie"
Après ce constat Elias Davidsson poursuit : «Les Palestiniens se battent déjà depuis un siècle. Ils ne sont pas devenus cyniques pour autant. Ils continuent génération après génération à tendre la main à la réconciliation. Faisons la même chose.
Reconnaissons aussi aux juifs qu’ils sont victimes de leurs propres phantasmes et anxiétés. D’une certaine manière les juifs sont encore plus à plaindre ; nous devons les aider à sortir de leur ghetto mental. Bien que cela ne soit pas facile pour les victimes ou les témoins qui se trouvent souvent face à des individus arrogants chargés d’armes meurtrières… » (1)
Les Palestiniens souffrent atrocement. Et cela ne peut qu’empirer aussi longtemps que les citoyens de confession et de culture juive resteront majoritairement silencieux. Leur honneur serait d’exiger de l’Etat d’Israël qu’il accepte la légalité internationale et les résolutions de l’ONU ainsi que la cessation des souffrances infligées aux enfants.
Ce que subissent des enfants de Balata par exemple, comme l’illustre le cas de Mohammed Aboddra, 16 ans, arraché au cœur de sa mère, le 9 août 2004, par les forces israéliennes, est inacceptable.
Sans parler de l’état de détresse, d’inquiétude et d’abandon que connaissent toutes les mères palestiniennes privées de leurs fils.
Qu’y a-t-il de plus précieux pour toute mère que de savoir son enfant en sécurité et de pouvoir le serrer contre son sein quand il est en peine ?
Depuis qu’il a été transféré à la prison de Majeddo, Leila se désespère à l’idée que son fils Mohammed, affectueux et bon élève, soi maltraité et reste enfermé des mois et des années, alors qu’il n’y a aucune charge contre lui. Depuis son incarcération Leila ne l’a entrevu qu’une seule fois.
Quand elle décrit ce moment émouvant sa voix se brise : « A peine il m’a vue de loin son visage s’est rasséréné puis il a éclaté en sanglots. Il portait les mêmes vêtements qu’il avait sur lui le jour de son enlèvement. Il voulait m’embrasser. Ils ne l’ont pas laissé s’approcher.
Peu après son arrivée à Majeddo nous avons appris qu’un prisonnier de 30 ans était mort faute de soins. Le climat est très dur là bas. Il fait très chaud le jour, très froid la nuit.
Un prisonnier nous a fait savoir qu’il y aurait 120 détenus enfermés dans des tentes conçues pour 50 personnes.
Que180 détenus sont mineurs.
Que 70 détenus nécessitent les soins d’un médecin.
Que la nourriture est insuffisante, souvent avariée. Qu’ils leur donnent toujours le même plat.
Que chaque tente reçoit 50 repas, moins de la moitié de la ration pour chaque prisonnier.
Les rares détenus qui sont autorisés à recevoir des visites doivent se tenir à 15 mètres de distance des visiteurs.
Que chaque jour ils inventent de nouvelles méthodes de torture, commencent par donner des coups, puis ils les empêchent de dormir jusqu’à ce qu’ils ne savent plus qui ils sont et finissent par s’accuser d’actes qu’ils n’ont pas commis…».
Le calvaire de cette mère n’est pas différent de celui de la grande majorité des mères palestiniennes.
Rester neutre, continuer de se taire, dans la situation si désespérément déséquilibrée que connaissent les Palestiniens, est une position immorale.
Les organisations juives devraient tout tenter pour contraindre Israël – qui est à l’origine du conflit - à reconnaître les traitements inhumains infligés aux Palestiniens depuis 1948, et à leur fournir une réparation.
Les victimes non juives de l’occupation israélienne ne doivent pas moins compter que les victimes juives d’hier, dont le monde célèbre toujours, après le temps, la mémoire.
(1) Elias Davidsson est né en Palestine en 1941. Ses parents étaient des réfugiés juifs d'Allemagne nazie. Il a grandi à Jérusalem où sa famille côtoyait des familles juives, chrétiennes et musulmanes en bonne convivialité. Après l'établissement de l'Etat d'Israël sa famille a quitté le pays et Elias s'est installé en Islande. Il vit à Reykjavik, où il partage son temps entre la composition musicale, son engagement pour une paix juste en Palestine et la recherche dans le domaine des droits économiques et sociaux et du droit pénal international. Tout en rejetant depuis son jeune âge le sionisme "pour sa symbiose avec l'antisémitisme", il n'a pris conscience de la tragédie palestinienne qu'en 1986, après avoir lu les écrits de l'Israélien Uri Davis.
Cette découverte le poussa à étudier systématiquement la nature et l'histoire du sionisme et du conflit en Palestine. Il fonda en 1988, avec des amis islandais, l'association Islande/Palestine. Il est membre de l'Association pour un Seul Etat en Palestine/Israël.
Ses écrits (surtout en anglais) peuvent être consultés sur son site web : www.juscogens.org et sur des sites les plus variés (voir Google "Elias Davidsson")
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