Envoyer cet article
USA - 6 juillet 2005
Par Ali Abunimah
Le conflit palestino/israélien prend une place disproportionnée dans les principaux media occidentaux, comparé, disons, avec les conflits en Afrique ; Pourtant le public, surtout aux Etats-Unis, reste largement mal informé.
Jeffrey Dvorkin, médiateur de la Radio Publique Nationale des Etats-Unis (NPR), a récemment déclaré que la couverture de son réseau en 2001-2002 a eu "tendance à surestimer l’impact de l’Intifada sur les Palestiniens et à en sous-estimer l’effet sur les Israéliens".
En fait, c’est l’inverse qui est vrai.
Au cours d’une période des six mois qui ont précédé le début de l’Intifada, NPR a parlé de 84% des morts civils israéliens, une étude qu’a faite le très estimé Fairnesse and Accuracy in Reporting organization Found (Organisation pour l’impartialité et l’exactitude des Reportages) alors qu’elle n’a parlé que de 26% des morts civils palestiniens. C’est la constante façon de faire des medias.
A l’époque, la correspondante de NPR à Jérusalem, Linda Gradstein, acceptait un paiement cash et contraire à la déontologie, pour des milliers de dollars annuels d’organisations pro-israéliennes, une pratique qui ne s’est arrêtée que lorsqu’elle a été révélée par l’enquête que des collègues et moi-même avons conduite pour le site de The Eletronic Intifada .
Alors que NPR autorisait Gradstein à continuer ses reportages, elle avait précédemment renvoyé une autre correspondant, au motif qu’elle n’avait pas révélé aux responsables que sont mari avait été conseiller de l’Autorité Palestinienne (PA).
Le révisionnisme de Dvorkin arrive au moment où NPR, les autres medias et les organisations universitaires des Etats-Unis font face à une attaque importante des groupes pro Israëliens et des alliés d’Israël au Congrès lesquels voient tout reportage qui n’est pas servilement à la dévotion de la ligne israélienne comme implacablement hostile voire antisémite.
NPR et ses stations filiales font face à d’importantes coupes budgétaires dans les subventions de leur gouvernement, à l’initiative des responsables ayant des liens étroits avec le lobby pro israélien.
On pourrait pardonner à ceux qui font confiance aux media traditionnels de croire que les Israéliens sont de manière écrasante victimes de la violence dont les Palestiniens sont les principaux auteurs.
Il faut sans cesse rappeler aux organismes de presse que depuis le début du premier soulèvement palestinien en décembre 1987 jusqu’au 15 mai 2005, les Israéliens ont tué un total de 4857 Palestiniens, pour la grande majorité des civils non armés, dont 949 âgés de moins de 18 ans, selon l’association israélienne des droits de l‘homme B’Tselem.
Au cours de la même période, les Palestiniens ont tué 1 382 Israéliens dont 928 étaient des civils et 131 des enfants. Peu rappellent que le premier attentat suicide palestinien visant des civils en Israël était intervenu 40 jours après le massacre à Hébron de plusieurs dizaines de Palestiniens par le colon Baruch Goldstein.
En général, les media ont répondu aux groupes de pression sionistes en recourant à un fallacieux équilibrage qui permet au reporter d’énumérer les déclarations des "deux côtés" sans essayer d’apporter, en toute indépendance, de pièces à conviction, soutenant l’un et contredisant l’autre. Ainsi les territoires qui sont occupés au regard de la loi internationale deviennent des territoires "disputés" et les colonies construites sur une terre expropriée et occupée deviennent des "quartiers".
La cruelle réalité de l’occupation devient quelque chose de simplement "perçu" par les Palestiniens.
En terme d’analyse politique, les commentaires des principaux medias s’inspirent de l’ordre du jour du gouvernement états-uniens, et ne mettent jamais en cause le soutien inconditionnel de l’Amérique à Israël.
Après la mort de Yasser Arafat, il y a eu beaucoup d’éditoriaux éculés sur une "fenêtre d’opportunité" pour la paix.
Presque toujours ignorés sont les faits qui ne collent pas avec ce rose scénario.
Le ministre du travail de l’Autorité Palestinienne, Ghassan Khatib a récemment écrit que : "pendant les conversations sur la libération des colonies de moins de 2000 logements à Gaza, Israël s’est affairé à construire, pour cette seule année, quelque chose comme 6400 logements illégaux en Cisjordanie ".
Peu de gens sont conscients de ça parce que les media suivent les pirouettes officielles selon lesquelles le plan de Gaza de Sharon est considérable alors que ce qu’il fait en Cisjordanie ne l’est pas.
Sur la scène palestinienne, l’élection douteuse de Mahmmoud Abbas – le candidat favori des Etats-Unis – par une fraction du peuple palestinien a été saluée comme une grande victoire pour la démocratie, alors que sa décision clairement non démocratique d’annuler les élections législatives prévues dans laquelle sa faction du Fatah aurait pû perdre face au Hamas a été minimisée.
Et alors que des tas de conversations sur la "réforme" palestinienne ont lieu, les medias s’intéressent rarement aux allégations crédibles et de longue date de la corruption au sein des personnalités clefs de l’Autorité Palestinienne, dont certains sont même salués comme des "réformateurs".
Mais si les média ont d’importants défauts, il y a des journalistes sérieux et honnêtes dont la contribution vitale devrait être reconnue.
Et paradoxalement, l’Autorité Palestinienne, qui semble croire que l’opinion internationale viendra à sa rescousse, a échoué à contrer la propagande israélienne par une stratégie de communication crédible, abandonnant en grande partie la tâche à des individus palestiniens et à des groupes privés ad hoc.
Tous ceci démontre l’importance vitale d’un développement fort de media indépendants palestiniens qui ne soient liés ni à l’Autorité Palestinienne ni aux donateurs internationaux.
L’ordre du jour des donateurs, après tout, doit se concentrer sur la réforme intérieure "palestinienne" et une interminable et stérile diplomatie pour éviter le nécessaire affrontement avec Israël sans quoi il ne peut y avoir de progrès en direction de la paix.
Source : Electronic Intifada
Traduction : CS pour ISM
Afin d'assurer sa mission d'information, ISM-France fait appel à votre soutien.
L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient. Les auteurs du site travaillent à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui leur seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas l'ISM ne saurait être tenu responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont il n'a pas la gestion, l'ISM n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
9 novembre 2021
Le fait d'être désigné comme "terroristes" par Israël illustre le bon travail des ONG en Palestine9 novembre 2021
L’Art de la guerre - Les nouvelles armes financières de l’Occident5 novembre 2021
Israa Jaabis : De victime à criminelle, du jour au lendemain3 novembre 2021
La normalisation est le dernier projet pour éradiquer la cause palestinienne1 novembre 2021
Kafr Qasem reste une plaie béante tandis que les Palestiniens continuent de résister à l'occupation30 octobre 2021
Voler et tuer en toute impunité ne suffit plus, il faut aussi le silence14 octobre 2021
Tsunami géopolitique à venir : fin de la colonie d’apartheid nommée ’’Israël’’12 octobre 2021
La présentation high-tech d'Israël à l'exposition de Dubaï cache la brutalité de l'occupation9 octobre 2021
Pourquoi le discours d'Abbas fait pâle figure en comparaison du fusil d'Arafat à l'ONU6 octobre 2021
Comment la propagande israélienne s'insinue dans votre divertissement quotidien sur Netflix : La déshumanisation et la désinformation de FaudaUSA
Réformes
Ali Abunimah
6 juillet 2005