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Palestine - 12 août 2007
Par Ali Abunimah
"Le Premier Ministre israélien Ehud Olmert était apparemment plus enchanté par le banquet que lui avait préparé la femme du chef négociateur palestinien Saeb Erekat que par sa rencontre avec le Président Mahmoud Abbas à Jéricho l'avant-veille", écrit le journal libanais As-Safir sur son site web le 8 août, citant la chaîne de télévision israélienne Channel 10.
Saboter la Palestine derrière des portes closes : le Président de l'Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas en réunion avec le Conseil des Ministres, à Ramallah, le 4 juillet 2007. (Omar Rashidi/MaanImages/POOL/PPO)
Le correspondant de Channel 10 a parlé de "l'hospitalité et de la chaleur" qui ont marqué la réception d'Olmert et de sa délégation par Abbas, notant que "la femme d'Erekat a insisté pour préparer et servir personnellement" le banquet. Le compte rendu ajoute que "Olmert n'a pu cacher son plaisir et son appétit devant la nourriture délicieuse, l'hospitalité et la générosité" avec lesquelles les Israéliens ont été reçus par leurs hôtes palestiniens.
Derrière tout ce théâtre, les résultats de la rencontre ont été aussi maigres qu'on pouvait s'y attendre. Olmert a publiquement affirmé son engagement pour une "solution à deux Etats", pendant que les porte-paroles informaient la presse qu'Israël n'était prêt à discuter d'aucunes des questions fondamentales, comme les frontières, l'arrêt des colonies ou les droits des réfugiés. L'exercice avait pour but de maintenir la fiction d'un "processus de paix" dont Abbas est supposé être en mesure de retirer des résultats, un jour.
Pourtant, pendant qu'il traite Olmert avec délicatesse à Jéricho, Abbas fait de son mieux pour s'assurer que les Palestiniens de Gaza continuent à souffrir et à crever de faim par la fermeture des carrefours commerciaux et civils, et a renforcé le siège imposé par Israël depuis que les résistants du Hamas ont semé la déroute parmi les milices du Fatah soutenues par les USA et Israël en juin dernier.
Une source qui travaille directement avec les ministres d'Abbas dans le "gouvernement d'urgence" non élu et illégal de Salam Fayyad m'a écrit que "Abbas avait explicitement donné l'ordre que la frontière de Rafah soit fermée, et qu'elle le reste, dans le but d'étrangler le Hamas". Cette source, que cette abomination a poussé à parler, mais qui a demandé à garder l'anonymat par crainte de représailles, a ajouté qu'Abbas "est prêt à voir son propre peuple mourir pour son jeu politique". Elle ajoute également que pendant que les déclarations officielles de relations publiques d'Abbas disent que la frontière va enfin ouvrir, "ce qui se passe dans les réunions est l'inverse".
Ce qu'a confirmé ma source avait déjà été révélé par Haaretz dans un article du 8 juillet qui rapportait qu'Abbas "avait demandé à Israël et à l'Egypte d'empêcher tout mouvement des personnes d'Egypte vers la Bande de Gaza par le carrefour frontalier de Rafah" et qu'"Abbas et nombre de ses aides avaient demandé que la requête ne soit pas rendue publique" ("Abbas demande que le point de passage Gaza-Egypte de Rafah reste fermé", Haaretz, 18 juillet 2007).
La politique d'Abbas de collusion avec Israël pour affamer son propre peuple commence à porter ses fruits. L'Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, l'UNWRA, a lancé un appel désespéré pour que les frontières de la Bande assiégée soient rouvertes. Filippo Grandi, adjoint au commissaire général de l'Agence a averti, dans un communiqué du 9 août, qu'il ne faudrait que quelques semaines pour que Gaza "dépende de l'aide à 100%" (Communiqué de presse de Filippo Grandi, adjoint au Commissaire général, UNWRA, Gaza ville, 9 août 2007).
Les 600 usines de vêtement de Gaza ont fermé parce qu'elles ne peuvent pas importer les matières premières et 90% des usines de l'industrie du bâtiment ont fermé, a rapporté la BBC le 9 août, citant des chiffres donnés par les Nations Unies. Jusqu'à 120.000 ouvriers de Gaza vont vraisemblablement perdre leur travail, et même l'UNRWA et le Programme de Développement des Nations Unies ont dû arrêter la construction d'abris pour les réfugiés ("Les Nations Unies mettent en garde contre un désastre économique à Gaza", BBC News, 9 août 2007).
Dans ce qui pourrait être l'aveu tacite de la complicité d'Abbas, Grandi a fait un appel direct non seulement à Israël, mais aussi aux "autorités palestiniennes" pour "prendre des mesures immédiates pour ouvrir le carrefour de Karni aux importations et aux exportations, ainsi qu'à l'aide humanitaire". Il a ajouté que "seule cette mesure permettra au peu d'économie qu'il reste à Gaza de survivre".
Alors que les gens de Gaza souffrent de cet étranglement, des milliers de leurs cousins étaient bloqués dans des conditions désespérées du côté égyptien du carrefour frontalier de Rafah, réfugiés exilés même de leur lieu d'exil. Beaucoup d'entre eux sont des gens à la santé précaire qui étaient allés en Egypte pour y trouver un traitement médical, et au moins 31 d'entre eux sont morts pendant qu'ils attendaient de rentrer chez eux.
Sur le front politique, le Hamas a continué à réagir à la guerre intensifiée d'Abbas avec équanimité, lançant quotidiennement des appels au dialogue, à la réconciliation et au retour à un gouvernement d'unité nationale. En dépit du siège, il a également continué à se maintenir, payant à des milliers des employés du gouvernement les salaires qu'Abbas et Fayyad avaient confisqués.
Abbas, pendant qu'il étreignait littéralement l'occupant et le colonisateur, a continué à rejeter avec colère tout dialogue intra-palestinien. Pourtant, cette position ne sera pas tenable longtemps. Abbas, sous veto de l'administration Bush, refuse de discuter, alors même que quelques dirigeants israéliens ont commencé à plaider pour un dialogue direct avec le Hamas.
Un d'entre eux est Efraim Halevy, ancien chef des services secrets du Mossad. Dans une interview au Wall Street Journal, Halevy a déclaré : "Je ne dis pas que nous devrions discuter avec le Hamas. Je n'ai aucune sympathie pour le Hamas. Je pense que c'est une bande abominable… Mais je n'ai entendu personne dire que le tandem Abbas-Fayyad allait faire le boulot" ("Et si Israël parlait au Hamas ? Le plan de l'ex espion en chef, vu par certains comme une hérésie", Wall Street Journal, 1er août 2007).
Halevy a exprimé des doutes sur la stratégie des USA de soutien à Abbas et d'isolement du Hamas, la nommant "fantasme politique". Il a appelé Israël à négocier une trêve à long terme avec le Hamas, ce que le mouvement a déjà offert. Le Journal rapporte qu'Halevy "fait partie d'une petite bande de personnages publics qui disent maintenant que, à cause de l'influence grandissante du Hamas, il est devenu impossible d'éviter un tel dialogue. L'ancien Secrétaire d'Etat Colin Powell a rejoint le groupe lors d'une récente interview à la Radio Publique Nationale."
Abbas continue sans vergogne ; il a récemment reçu un nouvel énorme arrivage d'armes – 1.000 fusils – coordonné par Israël et la Jordanie, pour renforcer ses milices contre le Hamas. Toutes ces provocations ont des résultats. Alors que les dirigeants civils du Hamas continuent d'offrir des branches d'olivier, ses rangs militaires montrent des signes que leur patience est à bout.
Suite au récent appel de Fayyad à un désarmement unilatéral de toutes les forces résistantes face à l'occupation, et à la publication qui s'en est suivie du "programme de gouvernement" qui a omis de mentionner la lutte armée, le Comité Palestinien de la Résistance (PRC) a lancé un avertissement menaçant. Lors d'une conférence de presse du 28 juillet, un porte-parole du groupe – coalition des résistants de diverses factions, dont le Fatah, responsable de la capture du prisonnier de guerre israélien Gilad Shalit – "a qualifié Abbas, Fayyad et les autres membres du gouvernement de 'traîtres de Ramallah' et a juré qu'ils recevraient la même réponse' que l'occupation israélienne" ("PRC : Fayad et 'les traîtres de Ramallah' cibles d'attaque", Haaretz, 28 juillet 2007).
Entre temps, un autre membre du Hamas, Mou'aiad Bani Odeh, 22 ans, est mort dans un hôpital israélien après avoir été transféré de la prison d'Al-Juneid, géré par les forces d'Abbas. Bani Odeh, déclare le Hamas, a succombé aux blessures résultant des tortures infligées par les hommes d'Abbas, qui poursuivent leur campagne de répression contre les membres du Hamas dans toute la Cisjordanie ." ("Un membre du Hamas meurt après avoir été torturé dans une prison de l'Autorité Palestinienne", Ma'an News, 10 août 2007).
Tous ces signes montrent qu'à moins qu'Abbas et son entourage changent de cap et mettent fin à leur guerre contre le peuple palestinien, le calme apparent qui prévaut maintenant sera bientôt brisé par une autre tempête.
Source : Electronic Intifada
Traduction : MR pour ISM
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12 août 2007