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Palestine - 11 septembre 2009
Par Khaled Amayreh
La schizophrénie politique a toujours été l’une des caractéristiques dominantes du Fatah et elle continue à façonner son discours global. Lorsqu’il s’adresse aux Palestiniens, aux Arabes et aux Musulmans, le Fatah se lance dans une sorte de rhétorique grandiloquente sur la libération de la Palestine. Toutefois, lors des négociations avec Israël et des rencontres avec les leaders occidentaux, les responsables du mouvement assurent poliment à leurs interlocuteurs que la rhétorique n’était destinée qu’à la consommation publique et que le Fatah acceptera un accord de « paix » avec l’Etat sioniste, même si un tel accord ne répond pas aux espérances palestiniennes.
J’ai récemment demandé à un intellectuel palestinien éminent, qui maintient des liens étroits avec la direction de l’Autorité Palestinienne (AP), s’il pensait que le président de l’AP Mahmoud Abbas, leader incontesté du Fatah, avait un plan alternatif pour le cas où les efforts de paix d’Obama échouaient.
Mon interlocuteur n’a pas mâché ses mots. Il m’a dit que la seule alternative d’Abbas aux négociations ratées avec Israël était davantage de négociations ratées.
Malheureusement, cela semble être tout à fait vrai.
Abbas prend à la légère, et même avec mépris, les allusions occasionnelles du Fatah à la reprise de la « lutte armée » si Israël refuse de mettre fin à l’occupation. Pourtant, Israël ne refuse pas seulement la fin de l’occupation, il la consolide et la perpétue en faisant de la création d’un Etat palestinien en Cisjordanie un projet irréaliste et illusoire.
Mais pourquoi Abbas méprise-t-il ses pseudos révolutionnaires de la dernière heure au sein de son parti, qui menacent de se lever à nouveau contre Israël tout en jouissant des fruits de la coordination politique et sécuritaire avec l’ennemi qu’ils menacent de combattre ?
Eh bien, la réponse est claire. Abbas pense, peut-être à juste titre, que ces responsables du Fatah sont soit des hypocrites, soit des menteurs, soit les deux. Après tout, la plupart d’entre eux sont parvenus aux positions qu’ils occupent grâce à une coopération et une collaboration étroites avec Israël contre les autres Palestiniens, et particulièrement contre le Hamas.
De plus, Abbas sait qu’une majorité d’entre eux, sinon tous, exception faite de quelques rares éléments patriotiques tels le leader emprisonné Marwan Barghouthi et Hussam Khadr, y réfléchiraient à deux fois avant de sacrifier leurs privilèges et leurs trains de vie somptuaires pour retourner à la lutte armée.
Le président de l’AP réalise aussi que toute sa rhétorique sur l’adoption d’une position intransigeante contre Israël au vu de son expansion coloniale continue a pour unique objectif d’apaiser l’opinion publique palestinienne et de maintenir le Fatah haut dans les sondages, en particulier vis-à-vis du Hamas.
Ceci parce que le Fatah a été de fait émasculé, non seulement à travers la cooptation prolongée par Israël, mais aussi à travers l’endiguement et la domestication du gouvernement de Salam Fayyad soutenu par les USA.
C’est la raison pour laquelle Abbas ne prend pas le Fatah au sérieux et qu’il a clairement l’intention d’utiliser le poids de l’organisation pour accélérer un accord avec Israël qui constituera plus ou moins la liquidation de facto de la cause palestinienne.
Abbas et ses conseillers ont dit qu’ils ne reprendraient pas les « pourparlers de paix » avec le gouvernement Netanyahu. Cependant, lors de rencontres privées avec des responsables américains et européens, ils ont exprimé leur volonté de reprendre les discussions, sans condition, dès qu’Israël sera prêt.
Ce discours malhonnête confirme encore d’avantage l’argument exprimé souvent par Israël, à savoir que les Palestiniens ne se rendront finalement aux conditions israéliennes que si Israël reste ferme et déterminé sur ses positions.
La rigueur ostentatoire de l’AP au sujet de la reprise du dialogue avec Israël est éminemment prétentieuse et peu sincère. C’est la même direction qui s’est lancée dans des négociations prolongées et ratées avec le gouvernement précédent d’Olmert, lorsque l’expansion coloniale juive en Cisjordanie continuait à toute vitesse.
C’est à cela que faisait récemment allusion l’ancienne ministre israélienne des affaires étrangères, Tzipi Livni, lorsqu’elle a dit que si le gouvernement Netanyahu modérait ses déclarations publiques, la question de l’expansion des colonies cesserait de faire les titres des médias internationaux et disparaîtrait de l’ordre du jour international.
Livni soutenait avec justesse que pendant le gouvernement précédent, l’expansion des colonies et les pourparlers de paix avec les Palestiniens se passaient main dans la main, et que les Palestiniens vivaient avec et s’abstenaient d’en faire tout un plat.
Le constat de Livni est malheureusement correct, tandis que la direction de l’AP (Fatah) de plus en plus autoritaire continue de se comporter de façon plutôt hasardeuse et irresponsable, donnant aux dirigeants israéliens l’impression que Ramallah n’observe aucune ligne rouge, et vendrait nos intérêts palestiniens vitaux et nos droits inaliénables pour obtenir un « Etat » qui aurait toutes les marques de la capitulation à l’insolence sioniste.
En fait, ce dans quoi Abbas et sa coterie à Ramallah se lancent ces jours-ci est plus que la simple pacification et domestication du Fatah pour accepter un éventuel accord honteux avec Israël, au motif que les Palestiniens doivent être réalistes. Il essaie aussi de désamorcer le consensus palestinien général au sujet des constantes nationales sur les questions cardinales telles que Jérusalem et les réfugiés.
Les Palestiniens, quelles que soient leurs orientations politiques et idéologiques, ont constamment convenu qu’aucun accord avec Israël ne serait possible sans un retrait israélien total des territoires occupés en 1967, y compris tout Jérusalem Est. L’autre point sacré est bien sûr l’application du droit au retour pour les millions de réfugiés palestiniens déracinés et expulsés de leur patrie ancestrale lorsque l’Etat criminel d’Israël a été créé en 1948.
Malheureusement, il y a de plus en plus de preuves qu’Abbas et son camp sont en train, lentement mais définitivement, d’abandonner ces constantes et d’adopter des positions édulcorées compromettant les droits palestiniens.
Par exemple, la direction de l’AP semble lentement se résigner à un « échange de terre » par lequel Israël garderait l’ensemble des colonies juives, en particulier à al-Quds et autour, en échange de terres non spécifiées, peut-être dans l’aride désert du Néguev.
Ce qui serait une déviation scandaleuse du consensus national palestinien parce qu’un tel marché décapiterait réellement les espoirs palestiniens de création d’un Etat viable et territorialement contigu en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.
De même, la direction de l’AP semble décidée à accepter la liquidation de la cause des réfugiés par l’installation de quelques-uns d’entre eux en Cisjordanie , pendant que les autres s’installeraient définitivement dans les pays d’accueil, tels le Liban, la Jordanie et la Syrie, auquel cas ils obtiendraient des passeports palestiniens.
Accepter un tel accord serait un bradage traître des droits palestiniens et la trahison perfide de générations de martyrs palestiniens qui ont fait le sacrifice de leurs vies pour la liberté de leur pays et de leur peuple.
Ceci constituerait aussi un désaveu énorme pour l’OLP, ou ce qui en reste, puisque cette organisation a toujours cherché à justifier sa propre existence en affirmant sauvegarder les constantes nationales palestiniennes.
La traîtrise ne devient pas « halal » (licite d’un point de vue religieux) lorsqu’elle est pratiquée par une organisation qui a un passé révolutionnaire. C’est ce que chacun doit comprendre.
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Khaled Amayreh
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