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Palestine - 17 mars 2006
Par Mohammad Ahmad Al-Zu’bi
Mohammad Ahmad Al-Zu’bi est un écrivain syrien. Article paru dans Al-Quds al-Arabiyy (Londres), le 2 février 2006
Dès l’annonce du résultat des élections législatives palestiniennes, le 26 janvier au soir, j’ai entendu sur une chaîne de télévision arabe par satellite un des frères de la direction du Fatah déclarer que l’histoire de la cause palestinienne, dans son ensemble, se diviserait désormais en deux périodes : l’avant-25.01.2006 et l’après-25.01.2006.
Ceci signifiait que le grand succès remporté par le Hamas, en comparaison des autres composantes palestiniennes (dont le Fatah) devait être considéré – tout du moins, selon ce responsable du Fatah – comme une rupture décisive et qualitative dans l’histoire de la cause palestinienne, notamment depuis la création de l’Autorité palestinienne sur la base des accords d’Oslo signés par l’OLP en 1993.
Par ailleurs, immédiatement après l’annonce des résultats, l’auteur de ces lignes a consulté par téléphone quelques amis, des hommes politiques impliqués jusqu’à la moelle dans la question palestinienne et notamment les problèmes tant intérieurs qu’extérieurs (palestiniens, arabes et internationaux) rencontrés, par le passé et actuellement, par l’héroïque Intifada d’Al-Aqçâ, depuis son irruption, voici de cela cinq années.
Et l’auteur de ces lignes a été très surpris d’entendre ces amis exprimer les plus grandes réserves devant ce résultat. Ceci, à partir de la prémisse suivante : des élections véritablement démocratiques pouvaient-elles avoir lieu, sous une occupation étrangère ?
Pourquoi les architectes d’Oslo ont-ils tenu à procéder à ces élections, avant même que le Fatah n’ait réglé ses divisions internes ?
Et en quoi l’occupation israélienne de la Palestine différerait-elle de l’occupation américaine de l’Irak, sachant que George W. Bush a supervisé personnellement les élections irakiennes de "a" jusqu’à "z", allant jusqu’à traficoter les résultats dans l’intérêt des occupants et de leurs hommes liges ?
Plus grave encore : certains de ces amis – de ces frères, même – ont insisté pour que je n’écrive rien ni ne publie rien pour l’instant, dans l’attente du moment, d’ici quelques jours, voire quelques semaines, où l’on pourrait distinguer, à l’aube, le fil blanc du fil noir, c’est-à-dire : y voir un peu plus clair…
Dans le journal Dunya al-Watan, mis en ligne depuis Gaza, j’ai lu que le Hamas avait proposé la présidence du conseil des ministres au Dr. Sallâm Fayyâdh, qui a mis les conditions suivantes à son acceptation :
• 1) que le Hamas accepte de négocier avec Israël ;
• 2) la dissolution des milices armées et leur intégration aux forces palestiniennes de sécurité ;
• 3) la reconnaissance d’Israël, afin d’assurer la continuité des aides financières internationales.
Ce sont là, l’honorable lecteur l’aura de lui-même relevé, exactement les conditions américaines, israéliennes et européennes, mises à toute relation avec le Hamas et conditionnant le versement de toute aide financière à ce mouvement – aide financière sans laquelle les roues de l’Autorité palestinienne (création d’Oslo) s’arrêteraient de tourner.
A partir de cette nouvelle situation ambiguë, l’auteur a repris une étude qu’il avait rédigée en 2001, portant sur les réalisations de la conférence de Madrid réunie en 1992, et sur le sommet arabe réuni à Fès en 1974, qui reconnut en l’OLP l’unique représentant légitime du peuple palestinien.
La plus importante de ces réalisations – et aussi la plus négative de toute l’histoire de la cause palestinienne – c’est sans conteste possible l’accord d’Oslo.
Et j’ai constaté que la partie de mon étude consacrée à la question palestinienne répondait à bien des interrogations soulevées d’ores et déjà, ou qui ne tarderont pas à l’être, par de nombreux commentateurs et analystes des résultats des élections législatives du 25 janvier, dans lesquelles beaucoup d’analystes politiques ont vu un événement démocratique sans précédent dans le monde arabe, mais aussi, concomitamment, un événement tellement complexe et tellement important – voire grave – qu’il était bien difficile, au vu du résultat issu des urnes, d’imaginer aujourd’hui ce qu’il se passera demain.
Particulièrement dans le contexte dégradé de la situation arabo-islamique d’aujourd’hui, dont l’énorme montagne a accouché de la souris des accords d’Oslo, qui en sont venus – après plus de dix années d’échecs continus et accumulés – à notre grand regret – à représenter un "mal nécessaire". Comme l’a dit le poète palestinien Mahmûd Darwîsh : "Quelle idée grandiose… Mais quel Etat minuscule !"
1 – La défaite de juin 1967 (an-naksah) représente la seconde date importante dans la série des défaites des régimes arabes face à Israël, après leur première défaite en 1948, qui entraîna la création de l’"Etat d’Israël".
Ces deux défaites – notamment celle de 1967 – ont eu des conséquences négatives dont souffrent et la nation arabe, d’une manière générale, et le peuple palestinien en particulier, et dont ils continueront à souffrir jusqu’à une date indéterminée (en sachant que la victoire partielle sadatienne, en 1973, n’a en rien diminué ces conséquences négatives, si même elle ne les a pas aggravées, en réalité). Parmi ces conséquences négatives, les principales sont, de mon point de vue, les suivantes :
• la vigueur nouvelle des forces arabes réactionnaires, et le renforcement de leurs relations obvies et cachées tant avec les Etats-Unis qu’avec Israël ;
• l’apparition d’un vaste mouvement d’abandon, chez les régimes et les forces sociales arabes, des principes nationaux, de manière générale, et de la cause palestinienne, en particulier.
Cet abandon s’est traduit par l’apparition du sadatisme, en Egypte, après la disparition du Président Gamal Abdel-Nasser, en 1970 – phénomène qui trouva son couronnement dans l’accord de Camp David et dans la normalisation des relations politiques, économiques et culturelles avec Israël.
C’est-à-dire, en pratique : la sortie du plus grand Etat arabe de l’équation du conflit avec l’occupation israélienne. Il s’est traduit, aussi, par l’apparition de ce qu’on appelle le "mouvement de redressement" [al-harakatu-t-taçhîhiyyah] de Hafez al-‘Asad, en Syrie, en 1970, qui trouva son terme, lui aussi, à Tall ‘Antar et à Jabal al-Shaïkh, à Madrid, à Washington, et à Beyrouth !
Toutes ces conséquences négatives convergent, en pratique, de manière directe ou de manière indirecte, vers le moulin de Camp David.
• l’élargissement du courant liquidateur, qui appelle à reconnaître Israël, jusqu’à contaminer le Fatah, fondé en 1965, initialement dans le but de libérer la Palestine occupée, et non pas de libérer la Cisjordanie , c’est-à-dire la rive occidentale du Jourdain, qui faisait à l’époque partie de la Jordanie, ni de libérer la bande de Gaza, qui faisait à l’époque partie de l’Egypte.
Le Mouvement Fatah qui décida de modifier sa charte nationale, ainsi que la charte de l’Organisation de Libération de la Palestine [OLP], afin que ces deux chartes deviennent cohérentes avec la nouvelle position du mouvement.
Bien plus, l’accord d’Abu Ammar [Yasser Arafat] avec la résolution finale du sommet de Fès, en 1974, qui décréta l’OLP "unique représentant légitime du peuple palestinien", s’insérait dans ce revirement de l’idéologie de la direction du Fatah [et, donc, de l’OLP], revirement piloté et supervisé – à l’époque, et encore aujourd’hui – par les éléments osloïdes bien connus, en particulier après la disparition du président combattant Yasser Arafat, sachant que ce revirement a conduit à la scission au sein de ces deux organisations et à leur affaiblissement, tant sur le plan interne que sur le plan externe, dont on constate les séquelles politiques dans les résultats des dernières élections législatives palestiniennes, résultats par lesquels le peuple palestinien a dit à haute et intelligible voix : "Non à Oslo ! Non aux partisans d’Oslo !"
La position du peuple palestinien de Cisjordanie et de Gaza, sur le mouvement Fatah, dans ces élections législatives, ne découlait pas seulement (comme d’aucuns se complaisent à le répéter) de la corruption financière répandue dans les organes de l’Autorité palestinienne.
Sa raison principale était la corruption politique, incarnée par l’échec de l’Autorité d’Oslo à réaliser une quelconque avancée politique ou économique un tant soit peu conséquente, dans l’intérêt du peuple palestinien, tout au long des dix années de négociations/mascarade, si ce n’est la construction de dizaines de nouvelles colonies israéliennes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, des milliers de martyrs et des centaines de milliers de blessés, d’invalides, d’orphelins et de veuves, ainsi que les dix mille combattants prisonniers, appartenant aux différentes formations de la résistance palestinienne, ainsi que le labourage sauvage et barbare, par Israël, de la pierre [hajar] (= les maisons) et des arbres [shajar], vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
2 – L’arrivée au pouvoir d’Anwar al-Sadate, en Egypte, en 1970, et l’arrivée au pouvoir de Hafez al-‘Asad, en Syrie, la même année, donnèrent le signal de l’entrée des régimes officiels arabes dans une opération de normalisation avec Israël ; mais cette normalisation passait par toute une série, longue et minutieusement étudiée, de manœuvres politiques, militaires et économiques, qui n’ont jamais cessé depuis lors, jusqu’à aujourd’hui, afin de falsifier la conscience et l’histoire arabo-islamique, et de faire admettre l’occupation, l’épuration ethnique, le refus du droit à l’autodétermination du peuple palestinien, le cassage des os de ses enfants et la violation de ses droits (dont ses droits humains fondamentaux) – le tout, au nom de la "paix" ! Il fallait le faire !
3 – La formule "la terre contre la paix", qui a représenté par le passé et qui continue à représenter aujourd’hui la couverture idéologique de ce qu’il est convenu d’appeler "processus de paix", est le slogan le plus trompeur et le plus fallacieux de l’opération de règlement / liquidation, car il comporte une falsification éhontée de l’histoire et de la réalité, qui tient en ceci :
• l’acceptation implicite de la notion sioniste frelatée de "terre promise" ["terre du retour – ‘ard al-mî’âd], que cela soit conscient ou non ;
• la transformation du conflit arabo-israélien, de conflit existentiel qu’il était, en conflit frontalier ; c’est-à-dire d’un conflit national arabe [qawmiyy] pour la libération de la Palestine en conflit régional [qutriyy] en vue de la libération des territoires occupés en 1967 [le Sinaï, le Golan, les fermes de Shebaa, la Cisjordanie , la bande de Gaza, puis ultérieurement le Sud Liban], avec ce que cela comporte en fait d’abandon de la dimension nationale arabe [qawmiyy] de la cause palestinienne, et par conséquent d’abandon de l’idée d’unité arabe elle-même ;
• l’imposition aux Arabes de la reconnaissance d’Israël, par la force des armes et par la force du fait accompli, que dis-je : l’injonction qui leur est faite de normaliser leurs relations politiques, économiques et culturelles avec Israël et avec l’Occident, de manière générale, dont les Etats-Unis d’Amérique, en particulier ;
• la substitution de la forme au contenu, dans la question du retrait israélien des territoires occupés en 1967, si bien que le retrait israélien du Sinaï (conformément à l’accord de Camp David) et celui des deux rives du Jourdain (conformément à l’accord du Wadi Araba) furent conditionnés à des dispositions sécuritaires qui mettaient fin à l’occupation israélienne d’un point de vue formel, tout en la pérennisant quant au fond ;
• la liquidation de l’OLP et l’arrêt de la résistance armée (devenue ce qu’il est convenu, dans la communauté internationale, de qualifier de "terrorisme"), en contrepartie d’une variété édulcorée ou diluée de gouvernement autonome, que les Palestiniens sont libres d’appeler leur "Empire" si cela leur chante, pour reprendre la remarque ironique d’un important dirigeant israélien.
Les conditions et les limitations imposées par l’Autorité d’Oslo au mouvement Hamas après (et en dépit de) sa victoire aux dernières élections législatives signifient tout simplement, en réalité, que cette Autorité d’Oslo met le Hamas, et par conséquent 60 % du peuple palestinien, devant un choix unique : soit l’acceptation des accords d’Oslo ; soit qu’ils retournent, en silence, dans leurs mosquées ! !
• plus important encore que tout ceci : ce slogan comporte une contradiction logique, à savoir que la terre qu’Israël a occupée en juin 1967 serait devenue en quelque sorte une terre israélienne, qu’Israël voudrait bien aujourd’hui "donner" aux pays arabes en échange de la note qu’elle leur impose de lui régler !
4 – Quant à l’expression "une paix juste et globale", elle est non moins trompeuse et insidieuse que le slogan "la terre en échange de la paix".
En effet, une paix juste et globale ne saurait être instaurée qu’entre deux protagonistes égaux en puissance matérielle et morale, or c’est là une condition qui n’est absolument pas vérifiée actuellement entre les Palestiniens et les Israéliens, ni même d’ailleurs entre les Israéliens [soutenus par l’OTAN] et l’ensemble des Arabes [soutenus par leurs régimes corrompus et collaborateurs ?].
Tous les indices, dans l’arène arabe, depuis 1967 – voire même depuis 1948 – confirment que les processus de Camp David, du Wadi ‘Araba, de Madrid, d’Oslo, de Washington, de Sharm al-Shaïkh, n’ont jamais amené la moindre paix, et qu’ils ne le feront jamais, quand bien même nous appellerions cela, par flagornerie, "la paix des braves", et ceci :
• parce que l’opération de règlement qui se poursuit sans relâche depuis 1967 [Résolutions de l’Onu 242 et 338] est fondée sur des bases vermoulues imposées par l’hégémonie euro-américaine à notre patrie arabe, durant la Première guerre mondiale [accords Sykes-Picot] et durant la Seconde guerre mondiale [création d’Israël]. Il est par conséquent naturel que tout ceci, qui a été édifié sur des fondations vérolées, soit vermoulu aussi…
• parce que les vaincus des guerres de 1948, 1967, 1973, 1978, 1982, 2003, sont ceux qui dirigent et protègent ledit "processus de paix" !
Au lieu d’être devant un tribunal, ils rejettent la sanction de leurs propres erreurs et de leurs propres fautes, causes de ces défaites successives ;
• parce que les régimes qui mènent ce processus sont des régimes non-élus, et par conséquent illégitimes, tant formellement que sur le fond. Ce sont des régimes imposés par les lois tribales ou confessionnelles, les tanks ou les dollars, ou l’étranger (voir : l’invasion américaine de l’Irak) ;
• parce que ce processus se déroule dans un contexte de déséquilibre total des forces militaire, politique et économique entre les deux camps. Il est normal que ce déséquilibre se reflète sur la balance des pouvoirs, et donc sur le résultat pratique du conflit ;
• parce que ce processus est fondé sur une représentation erronée d’on ne sait trop quel rôle "neutre" des Etats-Unis et de l’Europe dans le parrainage de ce conflit (les négociations). Inutile de préciser que cette représentation est pour le moins naïve, sinon carrément suspecte ;
• parce que la négociation se déroule dans une obscurité et une démagogie médiatiques totales, si bien que le citoyen arabe, d’une manière générale, ne sait rien. C’est en particulier le cas du citoyen palestinien qui ne sait rien de ce qui se déroule dans les coulisses, et dont personne ne daigne solliciter l’avis ;
• parce que ce processus de négociation se déroule dans une atmosphère totalement dépourvue de valeurs et de morale, à un point tel que la défense de la patrie passe pour du terrorisme et que la coopération avec les services de sécurité de l’ennemi passe pour la défense du pays contre le terrorisme, si bien qu’un des potentats arabes est allé jusqu’à proposer aux Etats-Unis de leur enseigner les méthodes de lutte anti-terroriste de son régime indestructible ! ! ;
• parce que ce processus se déroule avec la mise à l’écart totale de l’OLP et des Palestiniens de la diaspora, auxquels Oslo a confisqué leur droit à la résistance, aux élections et au retour ;
• parce que ce processus se déroule dans une situation internationale de transition (après la disparition de l’Union soviétique) dont ni les contours ni les dimensions ne sont encore clairs.
Par conséquent, toutes les solutions, tous les arrangements que connaît cette étape de transition, sur la scène arabe et internationale (Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Tchétchénie, Timor oriental, Irak, Libye, Palestine, Irlande, Soudan, etc…) risquent de ne pas tenir, face à un éventuel bouleversement sérieux du statu quo international actuel.
Un bouleversement qui se produira un jour : c’est inéluctable.
5 – Durant le siècle écoulé, ainsi qu’au début de notre vingt-et-unième siècle, et ceci, sur tous les plans (tant international que national arabe [qawmiyy], régional arabe [qutriyy] et palestinien), se sont produits des événements et sont apparues des situations nouvelles que l’on ne saurait ignorer, ni traiter de manière cavalière.
Ces événements nouveaux ont concerné tous les aspects de la vie politique, sociale, économique, démographique et militaire, à égalité, et ils doivent trouver un reflet dans la conscience populaire des sociétés arabes, notamment dans celle des Palestiniens.
Et il faut qu’ils s’engagent à changer, eux aussi (problème de mentalité) en même temps que se modifient leur réalité et leur situation, ainsi que la réalité et les circonstances qui les entourent.
En ceci, nous sommes confrontés à une relation dialectique entre la conscience et la réalité, mais il convient de ne pas tomber dans l’ornière de la cause première, développée par Karl Marx, et qui entre en contradiction pratique avec le concept même de la dialectique.
Sans doute le fruit de cette relation dialectique a-t-il été – en ce qui concerne notre situation – la nouvelle position exigée aujourd’hui tant de la direction du mouvement Hamas que de sa base, en raison des nouveaux développements que nous avons rappelés, qui doivent trouver un écho objectif dans une position nouvelle et créatrice du peuple palestinien dans toutes ses composantes politiques et sociales, dont le mouvement de la résistance islamique (Hamas), en ce qui concerne la cause palestinienne.
Cette position créatrice peut se manifester – c’est ce que nous pensons et espérons – sous la forme d’un négociateur palestinien d’un genre nouveau, s’asseyant à la table des négociations en ayant avec lui deux carquois – un carquois de "oui" et un carquois de "non" – et qui soit déterminé à ne faire aucune concession gratuite à Israël, comme nous avons eu à en déplorer tout au long de l’époque achevée, de la part de l’Autorité palestinienne.
Ce que nous avons qualifié, dans le titre de cet article, d’"équilibre du refus" entre les deux partis palestinienne et israélienne, vise fondamentalement à refuser de concéder la force du droit en contrepartie de la non-concession par l’adversaire du droit à la force, car seul un réel équilibre des forces aboutira à l’instauration d’un Etat palestinien à la souveraineté pleine et entière, soit sur la base de la résolution 181 (de 1947) (résolution de partage de la Palestine), soit sur la base de la résolution 242 (de 1967), avec le retour des Palestiniens de la diaspora et des camps de réfugiés dans les foyers dont ils ont été chassés lors de la Nakbah (de 1948), en application de la résolution 194, adoptée par l’Assemblée générale de l’Onu en 1948.
Quand la force du droit s’appuie sur un peuple courageux prodigue en sacrifices (tant de ses hommes que de ses femmes et de ses enfants), et sur un leadership avisé, audacieux, honnête et aux mains propres, capable de mener le combat sous ses deux formes – non violente et armée – et sur les deux niveaux – stratégique et tactique – contre Israël, avec une grande capacité et une grande maîtrise, la confiance en soi et dans le peuple, alors cette force du droit ne peut que remporter la victoire, tôt ou tard.
6 – L’auteur s’adressera dans le présent chapitre à nos amis européens, avec lesquels nous nous nourrissons du même lait maternel – l’eau de la mer Méditerranée – et dont nous nous attendons néanmoins à ce que leurs positions sur nos justes causes correspondent aux positions israéliennes et américaines ouvertement hostiles à ces mêmes causes.
Ce que nous reprochons à nos amis européens, c’est le rapprochement de leurs positions des positions israélo-américaines en ce qui concerne le problème du "deux poids – deux mesures" dès lors qu’il est question du conflit israélo-arabe.
Généralement, ils nous regardent de haut, et ils se vantent devant les pays sous-développés que nous sommes de leur vie démocratique et de la liberté dont jouissent leurs sociétés. Et ils exigent de nous, avec insistance, que nous leur emboîtions le pas sur ces questions essentielles et délicates.
Mais si les résultats de la mise en application de cette démocratie [par des élections, notamment] n’ont pas l’air de leur plaire, ils sont très prompts à tourner le dos à cette démocratie et à cette liberté, et ils demandent à leurs cellules dormantes, au sein de nos forces armées, de procéder à un coup d’état militaire contre ces résultats. Bien entendu, ils ne manqueront ni d’arrogance, ni de sagesse, pour trouver les prétextes expliquant cette nouvelle attitude…
Cela s’était produit, déjà, par le passé, dans l’Iran de Mossadegh [Mossadegh s’était prosterné un jour d’élection devant une urne électorale. Une des personnes ayant assisté à cette scène étrange lui en ayant demandé la raison, Mossadegh répondit : "Cette urne est sacrée… Elle est magique : un bulletin "Mossadegh" qui y pénètre en ressort en portant un autre nom !"].
Cela s’est produit à nouveau en Algérie, avec le Front Islamique du Salut [FIS]. Et voilà que cela se produit pour la énième fois, en Palestine occupée… Et ce ne sont là que quelques exemples, parmi bien d’autres.
Demandons donc ici à nos frères européens quel intérêt ils ont à s’opposer ainsi aux désirs des peuples arabes et musulmans et pourquoi ils prennent ainsi partie d’une part pour l’axe israélo-américain (nous apprécions, à ce propos, la position allemande, opposée à l’invasion américano-britannique de l’Irak frère) et, d’autre part, pour les régimes dictatoriaux et dynastiques arabes, sachant que leur appui, apporté aux peuples et aux masses, et la construction d’une relation positive avec eux leur apporteraient des bénéfices matériels et moraux incomparablement supérieurs à ceux qu’ils retirent de leur soutien aux Etats-Unis et à Israël, ainsi qu’aux régimes arabe despotiques.
Les élections législatives palestiniennes, qui se sont déroulée d’une manière déontologique et intègre (nous en sommes reconnaissants au Président Mahmoud Abbas) le 25 janvier dernier, ont abouti à la victoire du Mouvement de la Résistance Islamique [Hamas] avec près de 60 % des sièges au Conseil Législatif Palestinien [qui en compte 132].
Il est regrettable, à ce sujet, que dès la proclamation officielle de ce résultat, les dirigeants des Etats-Unis, d’Israël et des pays européens se soient livrés à une surenchère dans leurs critiques du Hamas, dans leurs exigences envers ce mouvement ["de faire ceci, de ne pas faire cela… sinon…"], qui représentent autant de gazouillements en-dehors du nid de la démocratie et de la liberté.
Les différentes formations politiques palestiniennes se sont présentées à ces élections sur la base de programmes électoraux précisément définis ; il est donc naturel que le vainqueur de ces élections soit tenu par ses engagements vis-à-vis de ses électeurs, de mettre en application son programme, qui est l’équivalent d’un contrat social conclu entre le candidat et son électorat.
Si le parti victorieux dans ces élections est tenu de réaliser les desiderata de l’Europe, de l’Amérique et d’Israël, aux dépens (et même à l’encontre) de ses électeurs et de son programme, alors : qu’on veuille bien m’expliquer ce que devient la démocratie ? !
Nos partenaires et voisins européens doivent se débarrasser de cette tendance au chantage qui est la leur – "faites ceci et cela, sinon…" – qu’ils brandissent sous le nez du peuple palestinien. Sinon…
Traduit de l'arabe en français par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique (www.tlaxcala.es). Cette traduction est en Copyleft.
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