Envoyer cet article
Gaza - 4 juin 2009
Par Erin Cunningham
L'avertissement d’Israël est venu du ciel, comme c'est souvent le cas dans la bande de Gaza. Mais cette fois, les avions de chasse n’ont largué ni bombes ni missiles sur le territoire palestinien appauvri, mais des milliers de petits tracts avertissant les habitants de Gaza de ne pas s’approcher des 48 kms de frontière qu'ils partagent avec Israël.
Restez à au moins 300 mètres de la frontière, conseillaient les tracts largués le 25 Mai aux Palestiniens ou vous risquez d'être abattus par les Forces d’Occupation Israéliennes (FOI).
Autrefois, endroit luxuriant couvert d’oliviers, de grenadiers et de citronniers, une grande partie de la région frontalière n’est maintenant qu’un paysage aride, marqué par la présence des chars, de tours de guet et de tirs occasionnels des FOI.
Les agriculteurs et leurs familles ont été déplacés ou ont trop peur de retourner dans leurs champs, tandis que les organisations humanitaires internationales sont dans l'impossibilité de procéder à une évaluation des besoins et des dégâts dans la région suite à l'attaque.
"Nous n'avons pas été en mesure de visiter cette région. Aucune organisation n'a pu le faire, affirme Mohammed al-Shattali, chef de projet de la FAO (l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture) dans la bande de Gaza.
"La guerre a augmenté la quantité de terres détruites, en particulier dans les zones frontalières, et les agriculteurs ne peuvent pas replanter quoi que ce soit parce que c'est trop dangereux», dit-il. "Les soldats israéliens, ils tirent sur tout - les chiens, les moutons. Ils sont très tendus».
Une zone tampon imposée par les Israéliens dans la déjà étroite enclave a été créée il y a plus d'une décennie afin d’empêcher les attaques des militants palestiniens qui utilisent les zones frontalières pour lancer des roquettes sur les villes israéliennes ou creuser des tunnels afin de mener des attaques contre les soldats des FOI postés à la frontière.
Mais ce qui n’était auparavant qu’une bande de terre fortifiée aux frontières nord et Est de la Gaza absorbe maintenant, suite à l'offensive israélienne de Janvier contre le territoire, près de 30% des terres arables de la bande de Gaza, selon la FAO.
Cette bande fait 2 km de large dans le nord et 800 mètres près de la frontière Est, malgré le chiffre déclaré de 300 mètres sur les tracts, dit l’organisation. Gaza ne fait que 40 km de long et un peu plus de 10 km de large.
Le prétexte d’Israël: empêcher le terrorisme, les guerres futures
Le porte-parole d’une Unité des FOI a officiellement refusé de commenter les mesures prises dans la zone tampon, et confirmer si oui ou non il y avait eu un largage de tracts d'avertissement.
Mais Shlomo Brom, un vétéran des FOI et chercheur à l’Institut pour les Etudes de Sécurité Nationale basé à Tel-Aviv dit que la politique de l'armée israélienne dans la zone tampon est tout à fait raisonnable compte tenu de la fréquence des attaques des combattants palestiniens.
Selon les statistiques des FOI, depuis 2005, plus de 7.000 roquettes ont été lancées sur Israël depuis la bande de Gaza. En 2006, des militants palestiniens qui avaient creusé un tunnel sous la frontière entre Israël et Gaza ont capturé le Caporal israélien Gilad Shalit, qui n'a pas encore été libéré.
«La zone tampon rend beaucoup plus compliqué et beaucoup plus difficile le creusement de tels tunnels ", déclare le Général de Brigade (à la retraite), Brom. "Et Israël a établi la zone principalement parce que des groupes armés palestiniens avaient attaqué des patrouilles israéliennes avec des charges explosives du côté israélien de la frontière».
Brom ajoute que la mise en vigueur plus stricte d’une zone tampon, suite à l'agression militaire d'Israël, ne vise pas à rendre plus difficile la vie de la population de Gaza, mais à les empêcher de souffrir d'une autre attaque similaire dans le futur.
"L'armée israélienne est désormais plus stricte dans le maintien de cette zone tampon parce que l'une des raisons pour lesquelles la récente offensive militaire a été lancée, c’est parce que nous avons autorisé la poursuite des actions terroristes depuis la bande de Gaza», dit Brom. "Si nous sommes plus stricts et que nous ne laissons pas la situation se détériorer, alors nous pourrons éviter une répétition de la dernière guerre. Il y a moins de chance que les combats s’intensifient dans la bande de Gaza."
Diminution des livraisons de produits frais
L’offensive israélienne de janvier et la zone tampon récemment élargie ont dévasté le secteur agricole de la bande de Gaza, dit la FAO.
Avec l’objectif officiellement annoncé d’affaiblir le pouvoir du mouvement islamique, le Hamas, dont la charte appelle à la destruction d'Israël, les trois semaines d'agression militaire ont détruit une grande partie des infrastructures de Gaza déjà délabrées, dont de larges bandes de terres agricoles qui font désormais partie de la zone tampon.
Le Programme Alimentaire Mondial (PAM) affirme que l'incapacité des agriculteurs de Gaza à cultiver leurs terres suite à l'agression prive les 1,5 millions d’habitants du territoire d'une importante source de produits frais souvent rares.
Déjà rares après un blocus économique de 2 ans, les marchés de produits frais locaux font face à une diminution des livraisons de persil, d’épinards, de pois chiches, de dattes, de carottes et de grenades, cultivés autrefois sur des parcelles de terre situées près de la frontière.
Le chef des chercheurs d'Amnesty International pour Israël et les Territoires Palestiniens Occupés déclare qu’en dépit de l'effet désastreux de la zone tampon sur la population locale, l’élargissement de cette zone n'est pas sans avantages pour Israël.
«Le déplacement vers l'ouest de la zone de danger, ou si vous voulez, de la zone tampon d'Israël, n’est pas tombé du ciel», explique Donatella Rovera.
"Les actions israéliennes sont liées un peu au fait que du côté palestinien, il y a des gens qui vont dans ces zones tout simplement pour cultiver leurs terres et il y a des gens qui viennent y faire autres choses», dit-elle. «Et ces derniers sont des cibles légitimes, parce que ce sont des combattants».
Mais, Mme Rovera dit que le nouvel empiètement d’Israël sur les terres de la bande de Gaza est disproportionné à la menace, en suggérant des drones comme autre moyen de surveillance.
«Il doit y avoir un moyen"
Depuis que l'opération s'est terminée le 18 janvier, 12 civils palestiniens ont été pris pour cible – dont trois ont été tués - dans des secteurs situés à moins de 900 mètres de la frontière, selon des militants des droits de l’homme et des responsables de la santé ici.
Nabeel al-Najjar, un agriculteur du village rural de Khuzaa, à 24 km au sud-est de la ville de Gaza, a reçu une balle dans la main le 23 janvier alors qu’il retournait dans les décombres de sa maison, à moins de 2 km de la frontière.
«J’étais revenu pour voir si je pouvais récupérer quelques affaires dans ma maison, et ils m’ont tiré dessus», a déclaré M. Najjar. "Comment puis-je continuer à vivre ici en sachant que je suis suffisamment près pour qu’ils puissent me tuer quand ils le veulent?"
A Jaher Al-Deek, un village agricole de Bédouins du sud de la ville de Gaza, Omar Suliman a abandonné son oliveraie datant de plusieurs décennies, située à 400 mètres de la frontière israélienne, de peur d'être tué.
"Quand j'étais enfant, nous avions l'habitude d'aller jusqu’à la frontière», dit M. Suliman, avec en bruit de fond le crépitement des tirs provenant d'un poste d'observation israélien voisin.
"Nous blaguions avec les soldats israéliens et nous leur donnions des raisins de nos vergers. Ils nous donnaient du chocolat, dit-il. "Maintenant, ils nous tirent dessus tous les jours."
Sans garanties pour leur sécurité, les agriculteurs de Gaza ne risquent pas de revenir dans la zone tampon dans un proche avenir, dit M. Shattali de la FAO.
"La situation est très sensible, pour les deux parties», reconnaît-il. "Mais il doit y avoir un moyen pour que les gens puissent cultiver leurs terres sans être tués."
Source : http://www.csmonitor.com/
Traduction : MG pour ISM
Afin d'assurer sa mission d'information, ISM-France fait appel à votre soutien.
L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient. Les auteurs du site travaillent à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui leur seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas l'ISM ne saurait être tenu responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont il n'a pas la gestion, l'ISM n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
9 novembre 2021
Le fait d'être désigné comme "terroristes" par Israël illustre le bon travail des ONG en Palestine9 novembre 2021
L’Art de la guerre - Les nouvelles armes financières de l’Occident5 novembre 2021
Israa Jaabis : De victime à criminelle, du jour au lendemain3 novembre 2021
La normalisation est le dernier projet pour éradiquer la cause palestinienne1 novembre 2021
Kafr Qasem reste une plaie béante tandis que les Palestiniens continuent de résister à l'occupation30 octobre 2021
Voler et tuer en toute impunité ne suffit plus, il faut aussi le silence14 octobre 2021
Tsunami géopolitique à venir : fin de la colonie d’apartheid nommée ’’Israël’’12 octobre 2021
La présentation high-tech d'Israël à l'exposition de Dubaï cache la brutalité de l'occupation9 octobre 2021
Pourquoi le discours d'Abbas fait pâle figure en comparaison du fusil d'Arafat à l'ONU6 octobre 2021
Comment la propagande israélienne s'insinue dans votre divertissement quotidien sur Netflix : La déshumanisation et la désinformation de FaudaGaza
Erin Cunningham
4 juin 2009