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Palestine - 16 octobre 2005
Par Amira Hass
Imaginez la situation : un habitant de Haïfa n’a pas l’autorisastion d’entrer à Tel Aviv sans un permis ( qui est difficile à obtenir) délivré par la police d’Israël.
Imaginez aussi que le Ministère de l’Intérieur ne permette pas aux gens de changer de lieu de résidence en Israël sans son autorisation et que cette autorisation de changer d’adresse soit donnée à quelques individus, sans aucun critères et sans aucune transparence.
Imaginez la situation : dix étudiants de Rosh Pina inscrits en cours de kinésithérapie à l’université Ben Gourion du Negev à Beer Sheva.
"Allez étudier à Safer", leur disent les autorités, ignorant qu’il n’y a pas d’enseignement de kinésithérapie à Safed.
Ou, disons qu’un jour le Ministère de l’Intérieur suspend le processus d’autorisation de changement d’adresse d’un district à un autre. Les autorités daignent bien autoriser une jeune fille du Kibboutz Hazorea à aller à Jérusalem pour se marier avec son petit ami Jérusalémite avec qui elle y vit, mais elles refusent de changer son adresse.
Puis, quand elle s'est rendue à Hazorea pour assister aux funérailles de son père, elles ont refusé de la laisser repartir pour Jérusalem où elle était fichée comme étant "illégalement présente".
Difficile à imaginer ? C’est en fait l’étouffante réalité de tous les jours, bien que les victimes ne soient pas israéliennes. Changez simplement les noms des lieux.
Au lieu du Kibboutz Hazorea et de Haïfa, écrivez Deir el-Balah ou Gaza ; au lieu de Beer Sheva et de Rosh Pina, écrivez Ramallah, Bethléem ou Jéricho.
Tous les exemples cités ci-dessus sont vraiment arrivés : aux habitants de Gaza et de Cisjordanie .
Et ce ne sont que des gouttes d’eau dans un vaste océan d’interdictions similaires.
Ces exemples proviennent du contrêle total israélien sur l'enregistrement de la Population Palestinienne.
L’importance de ce contrêle est manifeste dans la liberté qu’ont les autorités d’empêcher les habitants de Gaza d’aller, de résider ou de travailler en Cisjordanie .
Au cours des cinq dernières années, tous ceux dont l’adresse sur leur carte d’identité est "Gaza" mais se trouvent en Cisjordanie sans un permis temporaire, sont "illégalement présents" et seront expulsés vers Gaza.
Et il y a des milliers de gens dans cette situation dont certains vivent depuis dix ou vingt ans en Cisjordanie . Ils vivent dans la peur permanente d’être arrêtés à un checkpoint par un soldat qui les expulsera vers le terminal de transit d’Eretz.
Selon les accords d’Oslo, l’Autorité Palestinienne a seulement l’obligation d’informer le Ministère de l’intérieur israélien du changement d’adresse des gens : de Naplouse à Ramallah, de Gaza à Hébron ou Jéricho.
Il n’est stipulé nulle part que l’Autorité Palestinienne doive attendre l’autorisation israélienne pour le changement d’adresse.
La logique est claire.
Selon ces accords, la Bande de Gaza et la Cisjordanie sont une seule unité territoriale.
Néanmoins, Israël a systématiquement violé cette clause dès lors que cela concerne les habitants de Gaza. Israël s’est réservé le "droit" d’approuver ou d’empêcher le changement d’adresse, sans donner de critères valables, sans expliquer cette violation des accords d’Oslo.
Mais la main israélienne sur le clavier est l’élément décisif : si un employé israélien ne veut pas enregistrer le changement d’adresse dans l’ordinateur, le soldat et le policier du checkpoint le sauront immédiatement et arrêteront le coupable.
C’est ce qui est arrivé à H., qui est né à Gaza. Au début de 1991, il a fait des études en informatique à l’université de Bir Zeit en Cisjordanie .
Il a trouvé du travail à Ramallah et s’est aussi marié et y a fondé une famille, et a fait son changement d’adresse auprès du Ministère palestinien de l'Intérieur.
En mars 2002, dans le cadre son travail, il a dû se rendre en Jordanie.
Au pont Allenby, il a été arrêté et incarcéré dans une prison d’Ashkelon. LÃ , ses interrogateurs lui ont dit que selon l’ordinateur israélien son adresse est "Gaza" et que par conséquent il est "illégalement présent" Ã Ramallah.
H . a été expulsé vers Gaza.
Les appels du Centre de Jérusalem pour la Défense des Individus devant l’Administration Civile pour permettre à H. de rejoindre sa femme et ses enfants et de rejoindre son travail à Ramallah sont restés sans réponse.
En juin 2003 le Centre a adressé une pétition à la haute Cour de Justice.
En février 2004, presqu’un an après que H. ait été expulsé, le bureau du Procureur d’état a déclaré Ã la Haute Cour que "par indulgence, les responsables avaient décidé de permettre au requérant d’entrer en Judée/Samarie et d’y rester".
Cette intrusion dans les décisions personnelles les plus importantes des habitants de Gaza, comme le choix de leur lieu d’études et de leur lieu de vie, a commencé en 1991, quand Israël a changé de politique et a obligé les Palestiniens à obtenir des autorisations personnelles pour passer des Territoires en Israël et de Cisjordanie à Gaza.
Cette intervention ne s’est aggravée qu’après l’établissement de l’Autorité Palestinienne et en contravention avec les accords d’Oslo. Elle a atteint un sommet au cours des cinq dernières années, jusqu’aux expulsions.
Dans bien des cas, une action en justice oblige l’état à revenir sur sa décision "par indulgence" même quand son prétexte initial était "Motifs de sécurité", ce qui ainsi met en lumière le caractère arbitraire sous-jacent de la politique.
Restent la question de principe et le fait historique : Israël a commencé à séparer la population de Gaza de celle de Cisjordanie avant les accords Oslo, a continué à le faire sans interruption pendant la période d’Oslo sous couvert de l’euphorie qui a prévalu suite à l’accord de paix, et il termine maintenant cette séparation grâce, cette fois sous couvert de l’admiration pour son plan de retrait.
Source : http://www.haaretz.com/hasen/spages/634513.html
Traduction : CS pour ISM
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Amira Hass
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