Israël - 7 juillet 2004

Rencontre avec une femme colon

Par Micheline

Elle me demande comment est la situation dans la vieille ville de Jérusalem.
Je n’en crois pas mes oreilles…. Elle habite Jérusalem et elle n’a pas mis les pieds dans la vieille ville depuis la provocation de Sharon lorsqu’il est venu sur l’esplanade de la Mosquée Al-Aqsa !!
A l'exception des Juifs Orthodoxes qui vont prier au Mur des Lamentations, les Juifs israéliens ne vont pas dans les quartiers Arabes. Même si du côté de Jaffa Street, ils attendent ensemble le bus ou le shérout, ils ne se voient pas. Il y a là encore un Mur invisible.

Mur de 8 mètres de haut à l'entrée de Bethléem

C’est la fin de mon périple en Palestine et j’ai décidé, sur les demandes pressantes de l’un de mes amis à Jénine, d’aller voir comment vivent les Israéliens en « Forty-eight – 48 » comme disent les Palestiniens.

Tel-Aviv : ses plages, son béton, sa jeunesse déjantée qui traine dans les jardins et les squats, ses vieux riches assidus des restaurants, ses pauvres immigrés russes qui ont du mal à payer leurs courses chez le commerçant du coin, ses travailleurs asiatiques qui se promènent en vélo le jour du Shabbat.

« Est-ce que vous êtes Juive » : voici la question que l’on m’a posée à chaque fois que j’ai eu l’occasion de discuter avec quelqu’un et ce, dans les 2 premières minutes de la conversation.

Quelle signification ? Identifier l’autre pour savoir si oui ou non, il appartient à sa communauté.


Je décide de partir vite vers l’aéroport.
J’y fais la connaissance d’une française qui a émigré en Israël depuis une quizaine d’années et habite dans l’une des colonies illégales juives de Jérusalem.

Elle me parle du Mur qu’Israël est en train de construire : « Israël a le droit de se défendre ».
Je la corrige : « de se protéger ». Elle s’excuse en disant qu’elle s’est trompée de terme.

Elle n’est plus allée dans les Territoires Occupés « depuis le début de l’Intifada Al-Aqsa » : « Nous n’avons pas le droit d’y aller » dit-elle.

Elle me demande comment est la situation dans la vieille ville de Jérusalem.
Je n’en crois pas mes oreilles….
Elle habite Jérusalem et elle n’a pas mis les pieds dans la vieille ville depuis la provocation de Sharon lorsqu’il est venu sur l’esplanade de la Mosquée Al-Aqsa !!

Jérusalem a beau être une ville ouverte où les différentes communautés vivent ensemble, mais cela n’est vrai que sur le papier. En fait, chaque communauté s’est construit des murs, invisibles mais ils sont là.

A l'exception des Juifs Orthodoxes qui vont prier au Mur des Lamentations, les Juifs israéliens ne vont pas dans les quartiers Arabes.
Même si du côté de Jaffa Street, ils attendent ensemble le bus ou le shérout, ils ne se voient pas. Il y a là encore un Mur invisible.



Elle me demande également comment est la situation à Bethléem, si c’est facile d’y accéder ?

Je lui parle de l’horrible check-point avec son chemin caillouteux pour les piétons qui fait un détour d’une centaine de mètres surveillé par une énorme tour d’observation (une mini base militaire), la porte détectrice de métaux que nous devons emprunter après avoir monté quelques marches. Tout cela au lieu de faire une vingtaine de mètres sur une route goudronnée. La sortie ou l’entrée pédestre dans Bethléem est donc interdite aux handicapés, aux blessés, ect..

Je lui parle du Mur situé à 100 mètres des premières maisons et qui s’élève à 8 mètres de haut. Bien que je ne sois pas une chrétienne très pieuse, j’en avais les larmes aux yeux.
Comment ose-t’on laisser faire cela ?

Elle me parle des tirs incessants sur les habitations de Gilo en 2002, du droit qu’a Israël de se défendre.
Est-ce que construire un Mur haut de 8 mètres sur le Territoire Palestinien est de la défense ?

L’existence même de Gilo est une violation du Droit International et est condamnée par les Nations-Unies.



C’est une femme au visage agréable, à la voix douce, gentille comme beaucoup d’Israéliennes, convaincue qu’ils sont les victimes.

Elle n’a pas vu et ne veut pas voir la souffrance des Palestiniens : « C’est interdit d’aller dans les Territoires. » et cela l’arrange bien.

Comme la plupart des Israéliens, elle parle de Paix, rejète la faute sur les "Extrémistes Palestiniens", ne veut pas entendre parler de l’Occupation, ne tient pas compte du Droit International (l’ONU est pro-Arabe) mais elle a foi en la Justice Israélienne.
Elle est satisfaite de la demande de la Cour Suprême Israélienne de déplacer la construction du Mur.


Je pense que, comme beaucoup d’Israéliens, au fond d’elle-même, elle a honte de ce qu’ils font aux Palestiniens mais ne veut pas le reconnaître et elle se positionne encore en tant que victime.

La jeunesse israélienne s’enfonce elle, dans la drogue, les fêtes, l’alcool : une autre façon de ne pas voir, de ne pas se poser de questions.


Quand je regarde les habitants de Tel-Aviv, je ne peux pas m’empêcher de penser à ces femmes allemandes, lors de la Seconde Guerre Mondiale, qui regardaient les rangées de Juifs encadrées par des militaires se diriger vers les trains et dire ensuite : « Je ne savais pas. »

Je ne peux pas croire qu’ils ne connaissent pas la vérité : ce qui se passe réellement dans les Territoires Occupés.
Le fils ou le père rentre des Territoires et parle obligatoirement de sa journée : de l'humiliation qu'il a fait subir aux Palestiniens, de l'homme qu'il a tué ou blessé, de la vieille femme à qui il a refusé le passage au check-point, ect...

Ils savent ! Cela se lit dans leurs regards, dans leurs attitudes.

Ils savent ! Certains soutiennent et participent à cette occupation barbare, les autres (la majorité) ont tellement honte qu’ils refusent de le reconnaître et préfèrent entendre la propagande du gouvernement israélien d’Extrème-Droite couvert par le parti d’opposition de Gauche.

Je me souviens d’une phrase de Gilad, un Israélien ; membre des « Anarchistes contre le Mur » qui me déclarait : « Vous savez, en Israël, même la Gauche est pire que votre Le Pen. »


Israël, Etat raciste ! Bien sûr.


Le problème des Israéliens est qu'ils sont tellement convaincus de la justesse de l'idéologie sioniste qu'ils ne veulent pas remettre en question les moyens utilisés pour arriver à leurs fins.

La vérité est tellement terrible qu'il vaut mieux l'ignorer.