Naplouse - 2 janvier 2005

Talluza

Par M

J'ai passé ces derniers jours dans joli petit village au nord de Naplouse, appelé Talluza.
Le village est perché haut dans les collines. On y assiste à des levers et des couchers de soleil exceptionnels. Sa lumière et son huile d'olive sont particulièrement bonnes et ses ânes sont vraiment mignons.
Comme je l'ai mentionné auparavant, le village a été sous couvre-feu pendant plus d'une semaine et les checkpoints de l'armée ont empêché les étudiants et les professeurs des villages environnants d'accéder aux écoles.

Mais un effort combiné de l'ISM, de Machsom Watch et de plusieurs groupes israéliens (les Rabbins pour les Droits de l'Homme et les Anarchistes Contre le Mur) a réussi à ouvrir les écoles et à obtenir un accord de l'armée de ne pas bloquer l'accès.

Aussi maintenant, bien que les choses se soient considérablement calmées, nous avions maintenu plusieurs internationaux en position dans le village juste pour nous assurer que tout va bien.

Il n'y a eu aucune présence militaire pendant 2 jours, mais hier, des Hummers ont pénétré à nouveau dans le village avant l'aube, tout au long de la journée et tard dans la nuit.

La police des frontières a installé un checkpoint sur la route de EL-Badaan, et l'armée en a placé un sur la route à Asira (Les 2 villages au-dessus).

A chaque fois que notre famille hôte nous laissait partir, elle faisait de son mieux pour nous convaincre qu'on ferait mieux de rester boire le café. Nous avons passé un certain temps chacun notre tour à surveiller, et à notre connaissance, il n'y a eu aucun problème; Personne n'a rencontré de problème.

La police des frontières est restée à distance, et nous aussi, bien que lorsque nous sommes partis, ils nous ont hurlé "Au revoir, les amis," de leur haut-parleur et ils ont alors pompé des mauvais remix technos des classiques des années 80 comme "Final Countdown" et les ont fait retentir à travers les collines.


Puis les soldats sont venus nous parler. Ils nous ont demandé qui nous étions et ce que nous faisions ici (assis sur les rochers parmi les oliviers sur la route pentue du village).

Ils se sont comportés de façon assez amicale, et nous leur avons dit que nous étions des professeurs, et que nous ne tentions pas de passer, nous nous assurions juste que tous ceux qui ont besoin d’aller à l’école y aient accès.


L’un d’entre eux est revenu un peu plus tard.

"Puis-je vous poser une question ?" a-t’il demandé.
J’ai répondu : “Bien sûr”.
"Pourquoi êstes-vous venus là? Que voulez-vous ?"
"Bon, nous sommes des professeurs, et ils ont besoin de professeurs ici," ai-je d’abord répondu, en continuant avec notre première excuse.

"Non, mais ils ont besoin de professeurs dans beaucoup d’endroits. Pourquoi ICI ?"

"Nous sommes un groupe d’Américains," a répondu l’un d’entre nous.

"Nos dollars d’impots payent vos operations. Aussi, nous nous sommes sentis obligés de venir voir ce qui se passe vraiment, pour mieux comprendre la situation. Nous voulons connaître les deux versions."

"Si vous voulez connaître les deux côtés, pourquoi n'êtes-vous pas là-bas? Vous devriez être en Israël." (Je ne me rappelle pas exactement les propres mots qu’il a utilisé...)

"Nous avons déjà vu ce côté-là," avons-nous répondu.

"Nous connaissons cette version de l'histoire. Maintenant nous voulons entendre ce que les gens ici ont à dire."

Il a répondu : « Bien sûr, ok » et il s’est éloigné.
Est-ce rassurant de dire qu’il s’est éloigné avec l’air pensif ?

Source : www.palsolidarity.org

Traduction : MG pour ISM-France